ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2007-135

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Décision de radiodiffusion CRTC 2007-135

  Ottawa, le 14 mai 2007
  Radio McGill
Montréal (Québec)
 

Révision d'une décision antérieure prise par le personnel du Conseil relativement à la diffusion d'une chanson sur les ondes de CKUT-FM Montréal pendant l'émission Space Bop

  Dans la présente décision, le Conseil répond à la demande de révision d'une décision antérieure prise par le personnel du Conseil concernant la diffusion par Radio McGill de la chanson Banging in the Nails sur les ondes de CKUT-FM Montréal pendant l'émission Space Bop. Le Conseil conclut que la diffusion par Radio McGill de cette chanson, n'a enfreint ni la Loi sur la radiodiffusion, ni l'interdiction de diffuser des propos offensants contenue dans le Règlement de 1986 sur la radio. En outre, le Conseil conclut que la titulaire a répondu aux préoccupations des plaignants adéquatement et dans un délai raisonnable.
 

Introduction

1. En octobre 2006, le Conseil a reçu d'un Montréalais une demande de révision d'une décision antérieure du personnel du Conseil portant sur la diffusion de la chanson Banging In The Nails du groupe musical The Tiger Lillies. La chanson avait été diffusée par Radio McGill, la titulaire de CKUT-FM Montréal, durant l'émission Space Bop. Plus particulièrement, cette personne demandait au Conseil d'infirmer la décision précédemment prise par le personnel du Conseil, de conclure à une conduite répréhensible de la part de Radio McGill et d'émettre une ordonnance exécutoire contre la titulaire, à moins que la titulaire ne prenne des mesures précises afin de rectifier la situation.
2. Le Conseil présente ci-dessous l'historique de la présente décision ainsi que les informations concernant la plainte originale et la seconde plainte respectivement soumises à CKUT-FM et au Conseil. Le Conseil énonce ensuite sa décision à l'égard de la demande de révision de la décision antérieure prise par le personnel du Conseil.
 

Historique

 

Plainte adressée  à CKUT-FM

3. En mars 2005, deux Montréalais (les plaignants) ont déposé une plainte portant sur la diffusion par Radio McGill de la chanson Banging In The Nails sur les ondes de CKUT-FM au cours de l'émission Space Bop. Affirmant notamment que la chanson était détestable, haineuse et qu'elle « se moquait avec jubilation » de la Crucifixion, les plaignants arguaient que Radio McGill, en mettant en ondes une chanson qui faisait l'apologie de la haine, du mépris et de la violence sadique à l'endroit d'une figure religieuse vénérée, avait violé non seulement les dispositions de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), mais aussi celles de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Selon le dossier, l'animatrice de Space Bop avait répondu à l'un des plaignants qui lui avait téléphoné à CKUT-FM peu après la diffusion de la chanson et demandé pourquoi la station diffusait une chanson de ce genre, qu'elle-même avait « un grand sens de l'humour » et que le seul problème était « le manque d'humour » des plaignants.
4. Radio McGill a répondu aux plaignants qu'elle ne croyait pas que les artistes ou les animateurs aient eu l'intention délibérée de propager des sentiments haineux ou des mauvaises intentions. La titulaire a décrit la chanson comme « une expression ironique de la mort de Jésus-Christ » et a soutenu que la chanson n'incitait pas à la haine contre un groupe précis. Bien qu'elle ait reconnu qu'elle aurait pu offrir une meilleure mise en contexte de la chanson diffusée puisque certaines personnes auraient pu facilement être offensées à la simple lecture de ses paroles, la titulaire a noté que le groupe The Tiger Lillies se produisait au Festival Juste pour rire et dans des théâtres Off Broadway à New York et que ses spectacles en direct étaient « un mélange de cabaret et de vaudeville musical ». Radio McGill a expliqué que le groupe produisait une musique « extrêmement satirique, sombre et typiquement britannique, avec un sens tordu de l'humour qui rappelle Monty Python ».
5. Radio McGill a ajouté que la plainte faisait l'objet d'une enquête et qu'elle avait provoqué des discussions entre son comité de programmation et ses fournisseurs d'émissions. Prenant acte de l'importance d'offrir à ses auditeurs la toile de fond et le contexte des pièces musicales controversées qu'elle diffuse, tel que précisé dans sa politique musicale, la titulaire a admis que les producteurs auraient pu offrir aux auditeurs une meilleure mise en contexte de la chanson. Radio McGill a indiqué que ses motifs d'inquiétude à cet égard avaient été transmis aux fournisseurs de Space Bop et s'est dite convaincue que ces derniers feraient dorénavant preuve de diligence raisonnable et d'une plus grande prudence. Enfin, Radio McGill s'est assurée que les animateurs de Space Bop se familiarisent à nouveau avec ses procédures relatives aux plaintes téléphoniques des auditeurs.
6. En réplique, les plaignants ont exprimé leur mécontentement avec la réponse de la titulaire, la jugeant malhonnête et complaisante envers la station, et ont déclaré qu'ils refusaient l'assertion décrivant la musique de The Tiger Lillies de « satirique ». Ils ont exigé que Radio McGill présente des excuses sincères et admette qu'elle avait commis une erreur en diffusant cette chanson.
7. Radio McGill a reconnu par la suite la nature controversée de la chanson et a accepté de s'excuser en ondes de ne pas avoir mis la chanson en contexte et justifié sa diffusion. Ces excuses ont été diffusées le 17 avril 20051; en même temps, la titulaire s'est excusée d'avoir pu offenser des auditeurs et a fourni des coordonnées au cas où d'autres personnes auraient des commentaires.
8. Ces excuses ont été rejetées par les plaignants qui ont plutôt proposé un projet de libellé de nouvelles excuses à diffuser pour, selon eux, « en finir avec cette histoire ». La nouvelle mouture précisait que Radio McGill avait enfreint sa politique de radiodiffusion en diffusant cette chanson, qu'elle s'excusait d'avoir pu offenser ses auditeurs et qu'elle révisait ses politiques et lignes directrices pour s'assurer que cette situation ne se reproduise plus. La titulaire a répondu aux plaignants que, « après mûre réflexion et à la suite de nombreux débats, discussions et réunions », elle s'en tiendrait aux excuses qu'elle avait présentées en ondes et à sa lettre initiale de réplique adressée aux plaignants.
9. Envisageant une solution de remplacement aux excuses publiques exigées au départ et réagissant à la mise en contexte du titulaire, les plaignants ont demandé à Radio McGill de présenter une mise en contexte convaincante de la chanson. En réponse, Radio McGill a ajouté à son topo original une description de la chanson précisant que celle-ci était « un commentaire très pointu sur les gens qui se retournaient contre les strictes croyances qui leur avaient été inculquées », notant que le texte ne contenait aucune infraction à caractère sexuel. Radio McGill a allégué que, dans l'ensemble, les paroles de la chanson évoquaient une fausse parodie et qu'elles visaient davantage à choquer et à faire réagir qu'à inciter à la haine contre les chrétiens. Radio McGill a expliqué que The Tiger Lillies utilisait « un humour et une satire sans prétention pour commenter toute chose sacrée, mettant souvent en lumière la violence extrême quotidiennement approuvée dans l'histoire de notre culture ». Les plaignants ont rejeté cette nouvelle mise en contexte et repris un grand nombre d'arguments qu'ils avaient déjà soumis, niant que cette chanson puisse être une satire.
 

Plainte déposée au Conseil

10. En décembre 2005, l'un des deux Montréalais (le plaignant) a déposé une plainte au Conseil dans laquelle il alléguait que la mise en ondes de la chanson par Radio McGill, le 14 mars 2005, avait exposé à la haine et au mépris les chrétiens et toute personne ayant des convictions chrétiennes. Arguant que la diffusion de cette chanson enfreignait les normes de radiodiffusion, le plaignant exigeait ce qui suit :
 
  • que le Conseil censure Radio McGill pour avoir diffusé du matériel accablant de mépris envers une religion donnée,
     
  • que le Conseil interdise à la titulaire de diffuser ce matériel offensant,
     
  • que le Conseil exige que la titulaire s'excuse en ondes et par écrit d'avoir diffusé ce matériel,
     
  • que le Conseil inscrive cette infraction au dossier de la titulaire en vue de sa prochaine audience de renouvellement de licence, en 2007, pour s'assurer qu'elle applique une politique de radiodiffusion plus responsable à l'avenir.
11. Répondant au personnel du Conseil qui lui demandait de réagir aux allégations de la plainte, Radio McGill a fourni d'autres éléments d'appréciation. Ainsi, la titulaire avait contesté les propos du plaignant qui qualifiait sa mise en contexte de « fantaisiste » et de « sans fondement » et souligné que, pour ce qui était de la plainte originale de mars 2005, il avait répondu au courrier des plaignants en temps voulu (c.-à-d. en moins d'un mois) et offert des excuses en ondes. La titulaire a répété qu'elle n'avait pas eu l'intention d'attaquer ou d'offenser une religion, une personne ou un groupe, et que sa responsabilité de radiodiffuseur consistait à s'assurer de mettre en contexte le matériel diffusé et non à imposer des interprétations de formes artistiques. Selon Radio McGill, la chanson en question pouvait être offensante pour certains, satirique pour d'autres.
12. Le 10 octobre 2006, le personnel du Conseil a publié sa décision qui concluait que Radio McGill avait respecté son obligation de répondre aux motifs d'inquiétude du plaignant, insistant sur le fait que la station s'était excusée en ondes et par écrit. Le personnel du Conseil rappelait aussi que sa procédure de plainte n'exigeait pas le consentement de toutes les parties. Le rôle du Conseil, en vertu de la Loi, est de réglementer et de superviser le système de radiodiffusion canadien de manière à respecter la liberté d'expression et l'indépendance journalistique, créative et de programmation dont jouissent les radiodiffuseurs. De plus, le Conseil n'est pas un bureau de censure, et il ne s'ingère pas dans les décisions quotidiennes des radiodiffuseurs.
 

Demande de révision de la décision antérieure du personnel du Conseil

13. Exigeant la révision de la décision du personnel du Conseil en date du 10 octobre 2006, le plaignant a notamment demandé au Conseil un réexamen complet de ce dossier, l'infirmation de la décision précédemment prise par le personnel du Conseil, une conclusion de conduite répréhensible de la part de Radio McGill et l'émission d'une ordonnance exécutoire contre la titulaire, à moins que les mesures suivantes soient prises immédiatement :
 
  • que la titulaire s'excuse d'avoir diffusé le matériel en question;
 
  • que la titulaire reconnaisse la nature haineuse et offensive du matériel;
 
  • que la titulaire procède dynamiquement à une restructuration de ses lignes directrices en radiodiffusion et de ses processus de surveillance;
 
  • que la titulaire s'assure de ne plus diffuser de matériel haineux et méprisant.
 

Analyse et décisions du Conseil

14. Dans son examen de la décision du personnel du Conseil du 10 octobre 2006, et après examen des positions prises par les parties relativement à la plainte initiale déposée en mars 2005, le Conseil estime que les principaux enjeux sont les suivants :
 

1) Le personnel du Conseil a-t-il erré en concluant que la titulaire avait répondu comme il le fallait aux préoccupations des plaignants?

2) Le personnel du Conseil a-t-il erré en ne concluant pas que la chanson contrevenait à la Loi sur la radiodiffusion?

 

Procédure adoptée par Radio McGill pour traiter les préoccupations des plaignants

15. La première question concerne la qualité du traitement des plaintes adressées à Radio McGill.
16. Le Conseil réglemente et surveille tous les aspects du système canadien de la radiodiffusion et oblige les radiodiffuseurs à se conformer à ses règlements. Toutefois, le Conseil n'est pas un bureau de censure; il ne réglemente pas le bon goût, et il n'a pas pour mandat de dicter à un radiodiffuseur ce qu'il peut diffuser ou à interdire une émission avant sa diffusion. Les entreprises acceptent ce principe d'autoréglementation et sont censées se surveiller pour s'assurer d'agir en conformité avec les lois, les règlements et les normes applicables.
17. Lorsqu'il évalue la réaction d'un radiodiffuseur aux remarques d'un plaignant, le Conseil se demande tout d'abord si le radiodiffuseur a pris au sérieux les commentaires du plaignant et s'il y a répondu en temps opportun.
18. Le Conseil admet que le plaignant n'accepte pas les excuses présentées en ondes par Radio McGill et qu'il continue à contester sa position. Toutefois, il note que la titulaire a répondu sans délai au courrier des plaignants. De plus, le Conseil estime que Radio McGill a pris la plainte au sérieux, comme en témoignent ses excuses en ondes et sa mise en contexte de la chanson diffusée. Le refus des plaignants d'accepter la décision du personnel du Conseil ne signifie pas qu'ils ont été pris à la légère ou qu'ils ont été traités de façon injuste. Par ailleurs, le Conseil constate que Radio McGill a pris des mesures pour rappeler aux animateurs de l'émission Space Bop les procédures à respecter lors de plaintes téléphoniques des auditeurs.
19. Le Conseil est donc d'avis que les mesures prises par Radio McGill démontrent qu'elle a mûrement réfléchi à la plainte et qu'elle l'a soigneusement étudiée. Par conséquent, le Conseil estime que, en ce qui concerne la plainte initiale déposée auprès de CKUT-FM, le personnel du Conseil n'a pas erré en concluant que la titulaire avait répondu comme il le fallait aux préoccupations des plaignants adéquatement et dans un délai raisonnable.
 

Propos offensants

20. La seconde question concerne la possibilité que la diffusion de la chanson Banging in the Nails ait pu contrevenir à la Loi et à ses règlements connexes.
21. L'article 3b) du Règlement de 1986 sur la radio (le Règlement) interdit aux titulaires de diffuser :
 

des propos offensants qui, pris dans leur contexte, risquent d'exposer une personne ou un groupe ou une classe de personnes à la haine ou au mépris pour des motifs fondés sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge ou la déficience physique ou mentale.

22. Comme le mentionne le Conseil dans plusieurs décisions2, l'objectif du Règlement interdisant les propos offensants est de prévenir les préjudices très réels que de tels propos peuvent causer et qui sapent les objectifs de la politique canadienne de radiodiffusion. Les commentaires qui risquent d'exposer un groupe à la haine ou au mépris entraînent des préjudices émotionnels qui peuvent occasionner de graves problèmes d'ordre psychologique et social aux membres du groupe visé. La dérision, l'hostilité et la violence encouragées par de tels propos peuvent avoir, pour les membres de ce groupe, un impact très négatif sur l'estime de soi, la dignité humaine et leur acceptation par la société. Ce préjudice mine l'égalité des droits des personnes visées, droits que la programmation du système canadien de radiodiffusion devrait, conformément à la politique canadienne de radiodiffusion, respecter et refléter. En plus d'éviter le préjudice aux personnes visées par de tels propos, la disposition du Règlement interdisant les propos offensants vise à garantir à tous les Canadiens le reflet et le respect des attitudes et des valeurs canadiennes. La diffusion de propos incitant à la haine et au mépris mine également le tissu culturel et social du Canada que le système canadien de radiodiffusion doit sauvegarder, enrichir et renforcer.
23. L'article 3b) du Règlement reflète un juste équilibre entre la liberté d'expression, d'une part, et les valeurs d'égalité et de multiculturalisme enchâssées dans la Loi et dans la Charte canadienne des droits et libertés, d'autre part. L'article 3b) protège largement la liberté d'expression tout en interdisant la diffusion de propos offensants susceptibles d'avoir des effets très néfastes sur les valeurs d'égalité et de multiculturalisme.
24. Les commentaires entendus en ondes enfreignent l'article 3b) du Règlement lorsqu'ils remplissent les trois critères ci-dessous :
 
  • ils sont offensants,
     
  • ces propos offensants, pris en contexte, risquent d'exposer une personne, un groupe ou une classe de personnes à la haine ou au mépris,
     
  • les propos offensants se fondent sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'orientation sexuelle, l'âge ou la déficience physique ou mentale d'une personne ou d'un groupe.
25. Le Conseil estime crucial de tenir compte du contexte de la diffusion du matériel examiné avant d'analyser des allégations de propos offensants. La plupart du temps, le contexte élargi dans lequel le contenu de programmation est décrit ou les propos sont exprimés a une influence clé sur la façon dont un auditeur raisonnable comprend le contenu d'une émission, surtout lorsque le matériel ou les commentaires peuvent être considérés comme controversés, inappropriés ou offensants en soi et pour soi.
26. Dans le cas présent, le radiodiffuseur est une entreprise de radio de campus axée sur la communauté. Tel que noté dans Politique relative à la radio de campus, avis public CRTC 2000-12, 28 janvier 2000, les stations de radio de campus ont pour premier objectif d'offrir une programmation dont le style et la substance les distinguent des autres types de stations de radio. Autrement dit, elles doivent proposer des pièces musicales qui ne s'inscrivent pas dans les courants dominants et qui sont négligées par les stations de radio commerciales. Par conséquent, le Conseil croit qu'il incombe aux fournisseurs des stations de radio de campus de découvrir et de diffuser des émissions musicales différentes. De la même façon, les auditeurs de ces stations devraient s'attendre à entendre des pièces musicales qui sortent des sentiers battus - sans exclure la possibilité que le contenu puisse choquer certaines oreilles. Dans cet optique, le Conseil estime envisageable qu'une station de radio de campus diffuse des pièces musicales de The Tiger Lillies, un groupe qui compose manifestement de la musique alternative.
27. En outre, le Conseil considère que le genre de l'émission a son importance dans le cas présent. Les attentes diffèrent en fonction du genre d'émission : par exemple, les auditeurs s'attendent généralement à ce que des émissions de nouvelles qui diffusent des informations et des opinions aient une plus grande responsabilité que des émissions dédiées à la musique alternative. Bien que l'ensemble de la programmation soit assujettie aux règles applicables aux propos offensants, la source des renseignements transmis, y compris sa crédibilité, est un élément dont il faut tenir compte dans l'évaluation générale.
28. Dans le cas présent, la chanson a été diffusée à l'émission Space Bop de CKUT-FM. Selon Radio McGill, le but de cette émission est d'explorer surtout les genres musicaux basés sur l'électronique qui ne bénéficient ordinairement d'aucun temps d'antenne et de présenter des nouveaux artistes et des musiciens différents. Il est donc raisonnable de penser que les auditeurs pourraient s'attendre à entendre des pièces musicales à la limite du bon goût.
29. Enfin, compte tenu de la nature générale de la musique de The Tiger Lillies, du caractère de ses spectacles en direct et de ses lieux de représentation, le Conseil estime qu'il est largement prouvé que ce groupe joue la carte de la satire et utilise d'autres procédés comiques pour livrer ses messages artistiques. Le recours à la satire se rattache à l'intention d'offenser, autrement dit à la possibilité que des remarques satiriques risquent d'exposer une personne ou un groupe à la haine ou au mépris. Étant donné l'analyse contextuelle ci-dessus, le Conseil estime qu'un auditeur sensé peut interpréter le texte de la chanson comme une satire plutôt que comme des propos offensants.
30. Par conséquent, le Conseil juge que, en ce qui concerne la plainte initiale déposée auprès de CKUT-FM, le personnel du Conseil n'a pas erré en ne concluant pas que la chanson contrevenait à la Loi sur la radiodiffusion et à ses règlements connexes.
 

Conclusion

31. Bien qu'il n'appuie ni n'accepte nécessairement le message de la chanson, le Conseil a l'obligation de respecter la liberté d'expression. Compte tenu de l'analyse qui précède, le Conseil estime que la décision concernant la possibilité que la chanson soit offensante est finalement affaire de goût. Par conséquent, le Conseil confirme la décision prise par le personnel du Conseil le 10 octobre 2006, à savoir que la diffusion de la chanson ne contrevient pas aux dispositions de la Loi sur la radiodiffusion ou de ses règlements connexes et que Radio McGill a donné suite aux préoccupations des plaignants de façon responsable lorsqu'elle a répondu aux plaintes adressées à CKUT-FM et au Conseil. Par conséquent, le Conseil refuse la demande des plaignants de conclure à une conduite répréhensible de la part de Radio McGill relativement à la diffusion de la chanson en question, refuse la demande des plaignants d'émettre une ordonnance exécutoire contre la titulaire, et rejette la plainte.
  Secrétaire général
  Cette décision doit être annexée à la licence. Elle est disponible, sur demande, en média substitut et peut aussi être consultée en format PDF ou en HTML sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca.
 

Annexe à la décision de radiodiffusion CRTC 2007-135

 

Excuses officielles présentées par Radio McGill le 17 avril 2005 sur les ondes de CKUT-FM Montréal à la suite à la diffusion de la chanson Banging in the Nails

  [traduction]
  Le 16 mars 2005, le comité de programmation de CKUT a reçu une plainte écrite portant sur la diffusion, le samedi 13 mai, d'une pièce musicale à l'émission Space Bop (une émission hebdomadaire diffusée entre 16 h et 17 h). La chanson en question, « Banging in the Nails » du groupe britannique The Tiger Lillies, a offensé les plaignants qui ont estimé qu'elle n'avait pas sa place sur les ondes de CKUT-FM.
  Le comité de programmation de CKUT, qui se compose de bénévoles élus chaque année à notre assemblée générale annuelle, prend au sérieux toutes les plaintes et observations. Après avoir enquêté sur cette plainte, le comité a admis la nature controversée de la chanson et admis que celle-ci n'avait pas été convenablement mise en contexte et justifiée. Ni les artistes, ni les animateurs ne semblaient délibérément vouloir inciter à la haine ou à la discrimination.
  Par son mandat, sa licence et sa politique musicale, CKUT-FM doit explorer tous les genres de musique. Cette démarche comprend souvent des textes écrits par des artistes qui s'attachent à étudier les côtés les plus sombres de l'expérience et du comportement humains. Les fournisseurs de programmation de CKUT-FM doivent justifier la mise en ondes de tout matériel qui risque d'offenser l'auditoire en signalant les qualités de ce matériel et en fournissant une mise en contexte.
  Nous regrettons ici d'avoir pu offenser nos auditeurs. Cet incident nous aidera à rappeler notre licence, notre mandat et notre politique musicale ainsi que notre procédure de plainte à tous nos fournisseurs. Les commentaires de nos auditeurs sont toujours les bienvenus. Les courriels peuvent être envoyés à programming@ckut.ca; les lettres, au Comité de programmation de CKUT, 3647, rue Université, Montréal (Québec) H3A 2B3.
  Notes de bas de page :

[1] Le texte des excuses diffusées par Radio McGill est présenté en annexe de cette décision.

[2] Tout récemment, dans Plaintes concernant la diffusion d'épisodes de l'émission Les Francs-tireurs sur les ondes de Télé-Québec, décision de radiodiffusion CRTC 2006‑293, 14 juillet 2006

Mise à jour : 2007-05-14

Date de modification :