Décision de télécom CRTC 2004-49

Ottawa, le 22 juillet 2004

Services de téléphonistes - Assistance-annuaire inverse

Référence :  8651-C12-01/01 and et l'avis de modification tarifaire 6508 et 6508A de Bell Canada

Dans la présente décision, le Conseil conclut qu'il y a lieu d'autoriser un service d'assistance-annuaire inverse (SAAI) limité et il établit un cadre, assorti de mesures de protection de la vie privée, qui régit la fourniture d'un tel service par les entreprises de services locaux titulaires.

I Introduction

1. Au début des années 90, le Conseil a approuvé des tarifs régissant le service d'assistance-annuaire inverse (SAAI) dans le cas de plusieurs entreprises de services locaux titulaires (ESLT), dont NBTel Inc., MTS Communications Inc. (MTS), NewTel Communications Inc., BC TEL Inc. (maintenant connue sous le nom de TELUS Communications Inc.) et TELUS Communications (Québec) Inc. Essentiellement, ces tarifs prévoyaient que, sur présentation d'un numéro de téléphone, l'ESLT ferait une recherche et divulguerait à l'appelant le nom de l'abonné ainsi que de l'information générale sur la localité, p. ex., le nom de la ville ou du village où la personne habite ou le code postal. Au fil des ans, plusieurs ESLT, dont Bell Canada, et quelques petites compagnies de téléphone indépendantes de l'Ontario ont retiré ce service.

2. Dans l'ordonnance Demande de tarif applicable au service d'annuaire inverse rejetée, Ordonnance CRTC 2000-253 , 31 mars 2000 (l'ordonnance 2000-253 ), le Conseil a rejeté les avis de modification tarifaire 1063 et 93 présentés par TELUS Communications Inc. (TELUS) et TELUS Communications (Edmonton) Inc. (TCEI), respectivement. Dans ces avis de modification tarifaire, les compagnies avaient proposé des révisions qui leur auraient permis de divulguer le nom et l'adresse d'un abonné inscrit dans leurs annuaires sur présentation d'un numéro de téléphone, ce qui aurait élargi les services d'assistance-annuaire qu'elles offraient à l'époque. Toutefois, en raison de préoccupations concernant la vie privée, le Conseil a déclaré qu'il ne convenait pas que les compagnies fournissent des renseignements aussi détaillés que ceux proposés dans les révisions tarifaires.

3. Le 23 août 2000, Bell Canada a déposé l'avis de modification tarifaire 6508 et elle l'a révisé le 18 septembre 2000. Dans cet avis de modification tarifaire, la compagnie proposait de fournir les renseignements inscrits concernant le nom et la localité de l'abonné, mais pas l'adresse municipale ou le code postal, sur présentation d'un numéro de téléphone figurant dans les pages blanches de ses annuaires.

4. Au lieu de se prononcer sur la demande de Bell Canada, le Conseil a alors amorcé une instance publique par voie de l'avis Services de téléphonistes - Assistance-annuaire inverse, Avis public CRTC 2001-56 , 25 mai 2001 (l'avis   2001-56 . Dans cet avis, le Conseil a invité les parties à formuler des observations sur les questions suivantes :

  1. convient-il que les compagnies de téléphone fournissent le SAAI, compte tenu des objectifs de la Loi sur les télécommunications (la Loi)?
  2. quelles dispositions tarifaires uniformes devraient s'appliquer à toutes les compagnies de téléphone du ressort du Conseil.

Processus

5. L'avis 2001-56 a permis aux parties de formuler des observations et des répliques. Le dossier a été clos le 9 août 2001. Toutefois, le 6 février 2002, le Conseil a écrit aux parties et au commissaire à la protection de la vie privée du Canada pour les inviter à se prononcer, du point de vue de l'instance, sur la pertinence du rapport que le commissaire à la protection de la vie privée du Canada avait rédigé concernant la plainte que M. Mathew Englander avait déposée contre TELUS Corporation, TELUS et TELUS Communications (B.C.) Inc. aux termes de la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE). Initialement, les parties avaient jusqu'au 13 février 2002 pour déposer leurs observations et jusqu'au 18 février 2002 pour fournir des répliques, mais comme le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a présenté ses observations le 11 mars 2002, le Conseil a reporté au 5 avril 2002 l'échéance du dépôt des répliques.

Parties à l'instance

6. Le Conseil a reçu des mémoires des parties suivantes : le Centre pour la défense de l'intérêt public au nom d'Action Réseau Consommateur, de l'Association des consommateurs du Canada et de l'Organisation nationale anti-pauvreté (ARC et autres); le Centre pour la défense de l'intérêt public de la Colombie-Britannique, au nom de la BC Old Age Pensioners' Organization, de l'Association des consommateurs du Canada (division de la C.-B.), du Council of Senior Citizens' Organizations of BC, des federated anti-poverty groups of BC, de la Senior Citizens' Association of BC, du West End Seniors' Network, du End Legislated Poverty, de la Tenants Rights Action Coalition, de l'Information Policy Committee - B.C. Library Association (collectivement, la BCOAPO et autres);  Saskatchewan Telecommunications (SaskTel); Bell Canada, en son nom et pour le compte d'Aliant Telecom Inc. (Aliant Telecom) et MTS (collectivement, Bell Canada et autres); TELUS; Norouestel Inc. (Norouestel); le commissaire à la protection de la vie privée du Canada; le commissaire à l'information et à la protection des renseignements privés de l'Ontario, et quatre consommateurs, à savoir Mme Dym ainsi que MM. Negus, Piggott et Simard.

7. La BCOAPO et autres ont déclaré avoir adhéré aux mémoires d'ARC et autres tandis que Norouestel a déclaré approuver en général les mémoires de Bell Canada et autres et ceux de SaskTel.

II Bien-fondé du SAAI

Positions des parties

8. Bell Canada et autres, Norouestel, SaskTel et TELUS (collectivement, les Compagnies) étaient d'avis qu'il conviendrait de fournir le SAAI et qu'un tel service serait conforme aux objectifs de la Loi. Les Compagnies ont fait valoir que le SAAI permettait à la fois de répondre aux demandes pour le service et de satisfaire aux attentes du client en matière de protection de la vie privée. Les Compagnies ont fait remarquer qu'elles ne fourniraient pas les renseignements associés aux lignes téléphoniques si l'affichage des renseignements liés à la ligne de l'appelant a été supprimé par ligne et/ou si le client a demandé spécifiquement le blocage par ligne et/ou l'affichage de la mention « nom privé ».

9. Bell Canada et autres ont fait valoir que le SAAI répondrait aux objectifs de la Loiparce qu'il permettrait de satisfaire aux exigences sociales des utilisateurs des services de télécommunication et de contribuer à la protection de la vie privée comme suit :

10. SaskTel a fait valoir que le SAAI permettrait non seulement d'appuyer la protection de la vie privée, mais également de promouvoir l'innovation dans la fourniture des services de télécommunication, tel que le vise la Loià l'alinéa 7h).1

11. TELUS a fait valoir que le SAAI, tel que proposé par TELUS dans l'avis de modification tarifaire 1063 et par TCEI dans l'avis de modification tarifaire 93, ne soulève, en matière de protection de la vie privée, aucune question qui irait à l'encontre de l'alinéa 7i) de la Loi.2

12. De plus, TELUS a soutenu que si les entreprises canadiennes se voyaient interdire de fournir le SAAI, elles subiraient, sur le plan de la concurrence, un désavantage par rapport aux autres fournisseurs de services qui ne sont pas assujettis à la compétence du Conseil, par exemple les fournisseurs de services de téléphonistes concurrents, lesquels fournissent essentiellement le même service. TELUS estime que si le SAAI était autorisé, les clients pourraient choisir parmi un plus grand éventail de fournisseurs de services et de modes de prestation, entre autres choses.

13. Le commissaire à l'information et à la protection des renseignements privés de l'Ontario ainsi qu'ARC et autres ont soutenu que le SAAI va à l'encontre de l'objectif en matière de protection de la vie privée, tel qu'il est énoncé à l'alinéa 7i) de la Loi. Pour cette raison, et parce qu'il soutient que le SAAI, entre autres choses, minerait la protection de la vie privée de l'abonné et qu'il ne contribuerait à promouvoir aucun des objectifs prévus à l'article 7 de la Loi, le commissaire à l'information et à la protection des renseignements privés de l'Ontario a fait valoir que les compagnies de téléphone ne devraient pas être autorisées à fournir le SAAI. En revanche, ARC et autres ont déclaré qu'une atteinte à la vie privée peut être justifiée, soit pour des raisons de politique publique, soit parce que la personne visée a consenti à l'atteinte, soit que le consentement à une telle atteinte est raisonnablement implicite. Néanmoins, ARC et autres estiment qu'aucune politique publique ne justifierait que le SAAI soit fourni sans le consentement de l'abonné.

Conclusion du Conseil

14. Le Conseil est d'avis que pour établir si les objectifs prévus à l'article 7 de la Loi permettent la fourniture du SAAI, il faut évaluer à quoi correspond le juste équilibre entre les intérêts de l'appelant et ceux de l'appelé au chapitre de la protection de la vie privée.

15. Toutefois, comme le SAAI facilite la divulgation de l'identité et/ou de la localité d'une personne, le service en soi risque de miner les intérêts de l'appelant en ce qui concerne la protection de la vie privée.

16. De plus, l'appelé risque de vouloir connaître l'identité de l'appelant avant de décider s'il rappellera la personne ou s'il répondra à l'appel. Dans certaines circonstances, comme dans le cas d'un appel provenant d'une personne que l'appelé a des raisons de craindre, obtenir l'identité de l'appelant pourrait s'avérer crucial pour l'appelé. Dans ce contexte, le SAAI pourrait améliorer la sécurité de l'appelé.

17. Selon le Conseil, la sécurité accrue que le SAAI apporte à l'appelé constitue une caractéristique importante et précieuse du service. Quant à l'importance réduite susceptible d'être accordée à la protection de la vie privée de l'appelant, le Conseil estime qu'il sera possible d'instaurer des mesures de protection pour bien contrer le problème. De l'avis du Conseil, ces mesures de protection, qui sont abordées ci-après, permettent de bien tenir compte des intérêts de l'appelant et de l'appelé en ce qui concerne la protection de la vie privée dans le contexte du SAAI.

18. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que sous réserve de mesures de protection indiquées, il convient que les ESLT offrent le SAAI et qu'un tel service serait conforme aux objectifs prescrits à l'article 7 de la Loi.

III Pertinence des mesures de protection et de leur application à toutes les ESLT

19. En se fondant sur le dossier de l'instance, le Conseil a examiné différentes mesures de protection de la vie privée possibles concernant les points suivants :

  1. les critères de recherche et les renseignements à divulguer;
  2. l'utilisation du SAAI par les entités commerciales;
  3. le consentement de l'abonné;
  4. la possibilité d'appliquer les mesures de protection de la vie privée à toutes les ESLT qui offrent actuellement le SAAI ou qui l'offriront plus tard.

A) Critères de recherche et renseignements à divulguer

Positions des parties

20. Norouestel, SaskTel et TELUS ont fait valoir que le Conseil devrait autoriser les recherches par adresse municipale ou numéro de téléphone inscrits dans les annuaires ainsi que la divulgation des noms et adresses municipales inscrits dans les annuaires.

21. Bell Canada et autres ont fait valoir qu'il serait satisfaisant pour Bell Canada et Aliant Telecom de fournir de l'information générale sur la localité, excluant l'adresse municipale réelle, mais que d'autres compagnies de téléphone devraient pouvoir fournir l'adresse municipale réelle.

22. ARC et autres ont fait valoir que les compagnies ne devraient pas être autorisées à divulguer l'adresse municipale de l'abonné, car la sécurité et la protection de la vie privée de l'abonné en question pourraient être indûment menacées. ARC et autres ont soutenu que certaines personnes, par exemple quiconque désire se protéger d'agresseurs ou de harceleurs, de même que les travailleurs sociaux et d'autres professionnels qui ouvrent auprès de personnes en difficulté, auraient un besoin légitime de préserver l'anonymat ou de tenir leur adresse confidentielle.

23. ARC et autres ont fait remarquer que le Conseil avait déjà rejeté une demande présentée par TELUS en vue de fournir un SAAI qui aurait prévu la divulgation des adresses inscrites dans les annuaires. ARC et autres ont fait valoir que le service que propose Bell Canada pose réellement moins de risques à l'atteinte à la vie privée que le service que proposait TELUS.

24. Enfin, ARC et autres ont fait valoir que si le SAAI visait simplement à identifier l'appelant, il serait inutile de fournir l'adresse municipale.

Conclusion du Conseil

25. Le Conseil fait remarquer que dans le contexte du SAAI, l'utilisation de l'adresse municipale comme critère de recherche et la divulgation d'un tel renseignement soulèvent de sérieuses réserves sur le plan de la sécurité et de la protection de la vie privée. S'il était possible d'utiliser l'adresse municipale comme critère de recherche, une personne passant en voiture devant une résidence pourrait donc, à partir de l'adresse, obtenir l'identité et le numéro de téléphone de l'abonné résidant à cet endroit. La situation pourrait se traduire par une atteinte à la vie privée, suite à des appels non sollicités, du harcèlement ou d'autres préjudices plus sérieux. Des préjudices du même genre pourraient survenir si une compagnie divulguait une adresse municipale particulière à partir d'un numéro de téléphone que lui fournissait l'appelant.

26. Le Conseil fait en outre remarquer qu'à l'heure actuelle, aucun des tarifs approuvés et encore valides concernant le SAAI ne prévoit l'utilisation ou la divulgation d'adresses municipales précises.

27. Tout compte fait, le Conseil estime que les conséquences négatives que pourrait entraîner la divulgation des adresses municipales ou leur utilisation à titre de critère de recherche l'emportent sur les avantages susceptibles de découler d'une telle divulgation. Par conséquent, les compagnies ne seront autorisées ni à divulguer les adresses municipales, ni à les utiliser comme critères de recherche. Toutefois, le Conseil estime qu'il convient d'autoriser les compagnies à divulguer de l'information générale sur la localité, en l'occurrence la ville, le village ou le code postal, et à utiliser ces renseignements comme critères de recherche. De l'avis du Conseil, une telle mesure permet de concilier les intérêts de l'appelé et ceux de l'appelant en ce qui concerne la protection de la vie privée.

B) Utilisation du SAAI par des entités commerciales

Positions des parties

28. Bell Canada et autres ont soutenu que des entités commerciales comme les télévendeurs n'utiliseraient pas le SAAI, en raison des tarifs proposés pour le service. Bell Canada et autres ont ajouté qu'elles étaient disposées à inclure dans le tarif proposé une restriction indiquant explicitement que le SAAI ne serait pas disponible aux fins de la compilation ou de la mise à jour des listes de télémarketing.

29. Dans le but de décourager les abus, Bell Canada et autres ont également proposé de limiter le nombre de recherches à une par appel.

30. SaskTel a fait valoir que le SAAI ne fournirait pas de renseignements additionnels aux télévendeurs, étant donné qu'ils ont déjà accès à la même information à partir d'autres sources.

31. Norouestel a soutenu que le nombre de recherches ne devrait pas être limité à une, puisque forcer les clients à rappeler pour terminer leurs demandes leur causerait des inconvénients inutiles et réduirait l'efficacité des services de téléphonistes. Selon la compagnie, le Conseil devrait plutôt établir une limite raisonnable par appel. Norouestel a indiqué que cette approche aurait pour effet de décourager les personnes qui s'adonnent au télémarketing, tout en permettant aux clients de voir leurs demandes traitées efficacement.

32. À l'appui de sa position selon laquelle le SAAI ne devrait pas être autorisé, le commissaire à l'information et à la protection des renseignements privés de l'Ontario a fait valoir que, combiné à la fonction Afficheur, le SAAI faciliterait la correspondance et l'établissement du profil des données. Le commissaire à l'information et à la protection des renseignements privés de l'Ontario a déclaré que les entreprises commerciales, par exemple, pourraient utiliser ce service pour obtenir les noms et adresses des personnes qui appellent pour obtenir de l'information au sujet de produits et de services, sans que les parties appelées soient au courant ou aient donné leur consentement. À son avis, il s'agirait d'une méthode particulièrement intrusive qui donnerait aux télévendeurs des renseignements personnels sur des particuliers qu'ils auraient obtenus d'une source autre que des intéressés.

Conclusion du Conseil

33. Le Conseil souligne l'importance des questions touchant les intérêts de nature privée et la protection de la vie privée en rapport avec le SAAI. Le Conseil souligne également que Bell Canada s'est dite disposée à inclure dans son tarif l'interdiction d'utiliser le SAAI pour compiler et mettre à jour des listes de télémarketing. De l'avis du Conseil, pareille utilisation devrait être interdite. Le Conseil estime en outre qu'afin d'atténuer les préoccupations selon lesquelles d'autres intérêts commerciaux pourraient utiliser le SAAI pour compiler ou mettre à jour des listes de marketing, le nombre de recherches par appel devrait être limité à une.

C) Consentement de l'abonné

Positions des parties

34. Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a déclaré que dans la mesure où les particuliers acceptant que leur nom et adresse soient inscrits dans les pages blanches de l'annuaire, les règlements pris en vertu de la LPRPDE permettent la collecte, l'utilisation et la divulgation subséquentes de cette information sans que les personnes concernées soient au courant ou aient donné leur consentement. Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a ajouté, cependant, que cela ne devrait pas être interprété comme signifiant qu'il appuie le SAAI. Le commissaire à la protection de la vie privée du Canada a dit s'inquiéter du fait que :

  1. le règlement pris en vertu de la LPRPDE n'impose pas de restrictions à l'égard des utilisations secondaires des renseignements inscrits dans les pages blanches de l'annuaire; et
  2. les revenus soient générés par un service qui peut être considéré comme une atteinte à la vie privée.

35. Les Compagnies ont fait valoir que la divulgation des renseignements contenus dans les pages blanches de l'annuaire serait autorisée en vertu de la LPRPDE sans qu'il soit nécessaire d'obtenir le consentement exprès. Les Compagnies ont soutenu que le Conseil n'a aucune raison impérieuse d'établir des normes de protection de la vie privée plus élevées que celles prévues par la LPRPDE.

36. ARC et autres ont fait valoir que le Conseil ne devrait pas entraver l'exercice de son pouvoir discrétionnaire en traitant la LPRPDE comme définitive sur toutes les questions touchant la protection de la vie privée. Elles ont soutenu que, lorsque le Conseil s'acquitte de ses obligations en vertu de la Loi, il doit tenir compte de tous les facteurs et objectifs de politique pertinents. ARC et autres ont fait valoir que le Conseil est libre d'établir des normes de protection de la vie privée en vertu de la Loi plus élevées que celles prescrites par la LPRPDE.

37. ARC et autres ont fait valoir que pour que le SAAI soit compatible avec la protection de la vie privée des abonnés en vertu de la Loi, la disponibilité d'un processus d'exclusion doit être effectivement portée à l'attention des abonnés avant que les renseignements les concernant soient fournis par le biais du SAAI, de même que régulièrement après le fait. ARC et autres ont soutenu que toutes les exclusions devraient être effectuées dans un court délai, comme dans les 48 heures de la demande. ARC et autres ont en outre proposé que l'option d'exclusion soit portée à l'attention des abonnés à chaque année dans l'état de compte et/ou les encarts de facturation, ainsi que dans la version imprimée de l'annuaire et dans les politiques concernant la protection de la vie privée de Bell Canada et autres.

38. De l'avis de SaskTel, un rappel de l'option d'exclusion servi chaque année par voie d'un état de compte et par d'autres moyens serait inutile et alourdirait indûment le fardeau administratif.

39. Tout en supposant que le SAAI ne convienne pas, le commissaire à l'information et à la protection des renseignements privés de l'Ontario a fait valoir que s'il était mis en ouvre, il faudrait, pour maintenir l'efficacité des fonctions de protection de la vie privée de l'Afficheur, que les abonnés puissent recourir à l'option d'exclusion pour que les renseignements les concernant soient rendus disponibles par l'entremise du SAAI.

Conclusion du Conseil

40. Le Conseil fait remarquer que, tel que déclaré par le commissaire à la protection de la vie privée du Canada, en vertu de la LPRPDE et du règlement afférent, les renseignements contenus dans les pages blanches de l'annuaire peuvent être recueillis, utilisés et divulgués sans le consentement explicite des abonnés. Toutefois, le Conseil fait en outre remarquer que sa compétence en cette matière lui est conférée non pas par la LPRPDE, mais par la Loi, et qu'en exerçant le pouvoir discrétionnaire que la Loi lui donne, il peut appliquer des normes différentes de celles envisagées par la LPRPDE.

41. Le Conseil fait remarquer que les Modalités de service actuelles des ESLT prévoient que tous les renseignements concernant les abonnés, autres que leur nom, adresse et numéro de téléphone inscrit sont confidentiels et ne peuvent être divulgués, sauf dans certaines circonstances particulières décrites dans ces Modalités, sans le consentement écrit des abonnés. Cependant, le Conseil fait remarquer que les Modalités de service ont été approuvées initialement dans un environnement sans SAAI, au moment où les diverses préoccupations concernant la protection de la vie privée en rapport avec le SAAI n'étaient pas en cause.

42. Le Conseil estime que les abonnés qui décident de faire inscrire leur nom, leur numéro de téléphone et tout autre renseignement dans l'annuaire le font surtout pour qu'à l'aide de ces numéros, d'autres personnes puissent communiquer avec eux par téléphone. Le Conseil n'est pas convaincu que la décision, de la part des abonnés, de permettre l'inscription de ces renseignements dans les pages blanches de l'annuaire, signifie qu'ils acceptent que d'autres, en possession de leur numéro de téléphone, se servent de cette information pour les identifier, ou comme moyen pour trouver leur adresse.

43. Le Conseil est d'avis que, compte tenu de graves implications en matière de la protection de la vie privée associées au SAAI, il est important, dans le contexte particulier de ce service, que les abonnés aient le droit de contrôler l'utilisation et la divulgation de ces renseignements qui les concernent relativement aux annuaires.

44. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que pour utiliser et divulguer des renseignements dans le cadre du SAAI, il faut obtenir le consentement exprès de l'abonné.

45. Le Conseil fait remarquer qu'il a approuvé diverses méthodes pour obtenir le consentement exprès du client en ce qui concerne le processus de transfert de clients qui déménagent, dans le but de protéger ces clients contre le transfert non autorisé de leur service interurbain/local.

46. Le Conseil conclut que l'utilisation de l'une des quatre méthodes ci-après, qu'il a approuvées à l'égard du processus de transfert des clients, constitue un moyen valable de prouver qu'un consentement exprès, aux fins du SAAI, a été donné pour la divulgation de renseignements sur les clients :

47. Le Conseil juge que pour être significatif, le consentement exprès des abonnés doit être informé. À cet égard, le Conseil estime que les ESLT devraient expliquer à leurs abonnés :

  1. en quoi consiste le SAAI, y compris les renseignements qui peuvent être utilisés sous forme de critères de recherche et les renseignements qui peuvent être divulgués; et
  2. l'obligation d'obtenir le consentement exprès de l'abonné.

Le Conseil estime que ces renseignements devraient être fournis dans un encart de facturation, dans l'annuaire et, pour les compagnies de téléphone qui en ont, dans les brochures concernant la protection de la vie privée. Les détails sont donnés dans la section V de la présente décision.

IV Tarifs

Positions des parties

48. Les parties qui ont abordé cette question ont proposé que le tarif facturé pour le SAAI soit le même que les taux tarifés applicables au service d'assistance-annuaire d'une ESLT.

49. Norouestel a fait valoir que même si le service d'assistance-annuaire actuel devrait continuer d'être fourni sans frais aux clients qui appellent à partir de téléphones payants, ces clients devraient être obligés de payer pour le SAAI parce qu'il s'agit d'un service à valeur ajoutée.

Conclusion du Conseil

50. Le Conseil estime que le tarif du SAAI devrait être le même que celui qui s'applique au service d'assistance-annuaire d'une compagnie de téléphone, étant donné que le SAAI utilise la base de données de l'assistance-annuaire.

51. Le Conseil fait remarquer qu'il n'a jamais permis que les utilisateurs de téléphones payants publics soient facturés pour les frais d'accès à l'assistance-annuaire. Il est souvent arrivé, comme il continue encore d'arriver, que les annuaires ne soient pas disponibles aux téléphones payants publics, ce qui peut obliger les utilisateurs à recourir au service d'assistance-annuaire pour faire un appel. Cependant, les utilisateurs de téléphones payants publics n'auraient pas besoin du SAAI pour obtenir l'information nécessaire pour faire un appel téléphonique, de sorte que les mêmes considérations ne s'appliquent pas. Le Conseil fait remarquer qu'aucune partie à cette instance n'a fourni de raison de politique impérieuse, dans la mesure où il est question de l'accès au SAAI à partir de téléphones payants publics, pour qu'il modifie sa démarche de tarification habituelle qui permet aux compagnies de téléphone de facturer des tarifs qui couvrent leurs coûts. Par conséquent, le Conseil conclut qu'il faudrait appliquer le tarif du SAAI lorsque le SAAI est fourni aux appelants à partir de téléphones payants.

V Mise en oeuvre

52. Le Conseil ordonne aux ESLT qui fournissent actuellement le SAAI et qui entendent continuer de le faire :

53. Le Conseil ordonne aux ESLT qui fournissent actuellement le SAAI et qui ne déposent pas, conformément au paragraphe 52, les pages de tarif proposées de même que les documents indiqués au paragraphe 52, de déposer un projet de pages de tarif, proposant le retrait du SAAI, dans les 45 jours de la date de la présente décision.

54. Le Conseil ordonne aux ESLT qui, actuellement, ne fournissent pas le SAAI, mais qui comptent désormais le faire :

55. Les encarts de facturation, les annuaires et, le cas échéant, les brochures concernant la protection de la vie privée visent, à tout le moins, à informer clairement les abonnés que :

56. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil rejette les avis de modification tarifaire 6508 et 6508A de Bell Canada pour les services de téléphonistes. Le Conseil fait remarquer qu'aux termes des paragraphes 54 et 55, Bell Canada peut déposer une demande conforme à la présente décision relative à la fourniture du SAAI.

Secrétaire général

Ce document est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consulté sur le site Internet : www.crtc.gc.ca

Notes de bas de page

[1] 7. La présente loi affirme [.] [que] la politique canadienne de télécommunication vise à [.]
h) satisfaire les exigences économiques et sociales des usagers des services de télécommunication.

[2] 7. La présente loi affirme [.] [que] la politique canadienne de télécommunication vise à [.]
i) contribuer à la protection de la vie privée des personnes.

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