ARCHIVÉ - Décision de télécom CRTC 2003-27

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Décision de télécom CRTC 2003-27

Ottawa, le 7 mai 2003

Instance de suivi de la décision de télécom CRTC 2002-56 - Compensation pour la perte de revenus d'interurbain associée à l'élargissement de zones d'appel local

Référence : 8638-C12-68/02

Dans la présente décision, le Conseil établit que la compensation versée aux fournisseurs de services interurbains pour l'élargissement de zones d'appel local équivaudra à trois années de revenus d'interurbain perdus.

1.

Dans la décision Cadre régissant l'élargissement des zones d'appel local, Décision de télécom CRTC 2002-56, 12 septembre 2002 (la décision 2002-56), le Conseil a établi un nouveau cadre régissant l'élargissement des zones d'appel local (ZAL). Dans ce nouveau cadre, le Conseil a également établi un régime de compensation en vue de dédommager tous les fournisseurs de services interurbains pour la perte de revenus d'interurbain enregistrée par suite de l'élargissement de ZAL. Le Conseil a conclu que les abonnés de la ZAL élargie assumeraient les coûts liés à la perte de revenus d'interurbain par le biais d'un supplément mensuel temporaire perçu par les entreprises de services locaux titulaires (ESLT) et les entreprises de services locaux concurrents (ESLC). Le Conseil a indiqué que le recouvrement des revenus d'interurbain perdus pour une durée indéterminée n'était pas raisonnable, car le marché des télécommunications continue d'évoluer sur le plan de la technologie, des prix ainsi que du nombre de concurrents et de leur part du marché. Le Conseil a également dit estimer que s'il dédommageait les fournisseurs de services interurbains de façon permanente en se fondant sur la situation du marché à un moment donné, les abonnés risqueraient de payer trop cher pour l'élargissement des ZAL. Par conséquent, le Conseil a annoncé qu'il était d'avis préliminaire qu'il faudrait dédommager les ESLT et leurs concurrents à l'égard de la perte de revenus d'interurbain pour une période de trois ans. Dans la décision 2002-56, le Conseil a amorcé une instance de suivi en vue de permettre aux parties de commenter son opinion préliminaire.

2.

Dans l'instance de suivi, le Conseil a reçu des observations d'A & A Call Link Telesolutions Ltd. (A & A); d'Aliant Telecom Inc., de Bell Canada, de MTS Communications Inc., de la Société en commandite Télébec et de NorthernTel Limited Partnership (les Compagnies); du Grand Conseil des Cris (Eeyou Istchee) - Administration Régionale Crie (GCCEI-ARC); de Microcell Telecommunications Inc. (Microcell); de la ville d'Ottawa (Ottawa); de Saskatchewan Telecommunications (SaskTel); de la ville du Grand Sudbury (Sudbury); de TELUS Communications Inc. (TELUS); et de West Coast Teltech Ltd. (West Coast).

3.

Le Conseil a reçu des observations en réplique d'AT&T Canada Corp. en son nom et pour le compte d'AT&T Canada Telecom Services Company (collectivement, AT&T Canada); les Compagnies; Ottawa; Primus Telecommunications Canada Inc. (Primus Canada); SaskTel; Sudbury; TELUS et l'Union des consommateurs.

Positions des parties

Observations

4.

De l'avis d'A & A et de West Coast, la période de compensation devrait être de cinq ans, étant donné que la décision 2002-56 entraînerait la faillite de compagnies d'appel sans frais d'interurbain dans la région du Grand Vancouver. Selon A & A, il faut cinq années de revenus d'interurbain pour récupérer les coûts des immobilisations et des logiciels ainsi que les coûts associés à la réduction progressive des activités d'une entreprise de même que dédommager, au cours des prochaines années, les propriétaires de la compagnie pour la perte de revenus.

5.

Les Compagnies ont soutenu qu'il n'était pas raisonnable que le Conseil limite la compensation pour la perte de revenus d'interurbain en raison de changements dans les facteurs du marché des télécommunications identifiés dans la décision 2002-56, comme la technologie, les prix, le nombre de concurrents et la part de marché. Selon les Compagnies, en limitant le montant de la compensation pour les revenus d'interurbain perdus, les clients percevraient l'élargissement des zones d'appels locaux comme relativement peu coûteux par rapport à la valeur réelle, d'où le risque d'un trop grand nombre de demandes d'élargissement de ZAL. Les Compagnies ont ajouté que ce genre d'élargissement non rentable des ZAL imposerait un fardeau injuste aux ESLT et compromettrait l'établissement d'une concurrence durable.

6.

Les Compagnies ont ajouté qu'il serait préférable d'aborder l'inquiétude exprimée par le Conseil dans la décision 2002-56, à savoir que si la compensation était permanente, les abonnés risqueraient de payer trop cher pour le service ZAL élargi, en liant la durée de la compensation aux changements réels survenus dans les facteurs du marché identifiés par le Conseil. Selon les Compagnies, il ne faudrait éliminer la compensation pour les revenus d'interurbain perdus que s'il y avait un changement important dans les facteurs déterminants.

7.

Pour être juste envers les ESLT, les concurrents de l'interurbain et les clients, les Compagnies ont dit estimer que l'élargissement des ZAL doit être sans effet sur le plan économique. De plus, l'absence d'incidence économique et l'équité pour les clients et les fournisseurs de services interurbains ne sont possibles que si la période de compensation est fonction de changements mesurables dans les facteurs pertinents du marché. Il faudrait donc maintenir la compensation jusqu'à ce qu'un changement important dans les facteurs pertinents du marché justifie que le Conseil y mette un terme. Selon les Compagnies, cette approche serait simple à administrer et garantirait une compensation équitable tout en limitant les risques que les clients paient trop cher pour l'élargissement de ZAL et que les fournisseurs de services interurbains ne soient pas suffisamment dédommagés.

8.

Le GCCEI-ARC a déclaré qu'il appuyait l'opinion préliminaire du Conseil selon laquelle le montant de la compensation pour la perte de revenus d'interurbain devrait équivaloir à trois années de revenus d'interurbain.

9.

Microcell a fait valoir que la période de compensation ne devrait pas dépasser un an. À son avis, il faudrait que comme elle, les ESLC (qui sont également des fournisseurs de services sans fil) contribuent au régime de compensation, mais sans pouvoir facturer à leurs abonnés le supplément temporaire pour payer leur contribution au régime ou percevoir une compensation pour les revenus d'interurbain perdus.

10.

Ottawa a déclaré que la décision 2002-56 ne renfermait pas de justification détaillée de l'opinion préliminaire du Conseil au sujet de la période de compensation et que dans la mesure du possible, et quelle que soit la période ou le montant adopté, il faut une justification fondée sur des principes. Ottawa a fait valoir qu'en ce qui concerne le montant de la compensation, l'opinion préliminaire du Conseil représentait une surcompensation, puisqu'il n'était tenu compte d'aucune réduction d'économie de coûts découlant de la non-prestation du service interurbain.

11.

Ottawa a dit estimer que la marge appropriée pour les appels interurbains de courte distance était de 33 %. Selon Ottawa, les fournisseurs de services interurbains ne devraient être dédommagés que pour la marge et non pour les revenus et que par conséquent, un supplément temporaire basé sur un tiers de la valeur de trois années de revenus d'interurbain perdus devrait être perçu auprès des ESLT et des ESLC sur un an, et non pas trois.

12.

SaskTel a fait valoir qu'une période de compensation de trois ans n'était pas raisonnable compte tenu de la valeur du secteur interurbain qui serait éliminé. De l'avis de SaskTel, les minutes d'interurbain perdues par suite de l'élargissement d'une ZAL étaient des minutes à marge élevée, compte tenu de l'absence des coûts évitables importants associés à la fourniture de ces mêmes minutes d'interurbain. En d'autres mots, en plus des revenus d'interurbain qui seraient perdus, les coûts d'interurbain connexes continueraient d'être encourus.

13.

Selon SaskTel, le régime de compensation comporte de graves lacunes. En effet, il ne resterait plus de revenu après trois ans pour dédommager les ESLT pour leurs installations de base entre les circonscriptions devenues sans frais d'interurbain par suite de l'élargissement d'une ZAL. La situation risquerait de décourager certaines ESLT de faire les investissements nécessaires pour fournir un niveau de service adéquat.

14.

SaskTel a dit estimer qu'une période de compensation fixe pour l'élargissement d'une ZAL ne reflète pas l'impact économique réel sur les ESLT et les concurrents visés. À l'égard de la compensation, SaskTel a proposé une approche au cas par cas qui serait équitable pour toutes les parties. Elle a fait valoir qu'il appartient au Conseil de fixer la période de compensation appropriée en fonction de l'étude économique élaborée pour chaque demande d'élargissement d'une ZAL.

15.

Selon Sudbury, la bonne approche consisterait à baser la compensation sur le principe des dommages-intérêts, c.-à-d., dédommager les fournisseurs de services interurbains pour la perte de profits et non pas de revenus. Sudbury a fait valoir que suivant l'opinion préliminaire du Conseil, le montant de la compensation qui serait adjugé serait punitif, étant donné qu'il ne tient pas compte des économies de coût associées à la non-prestation du service interurbain. À son avis, le régime de compensation du Conseil donnerait aux fournisseurs de service interurbains un profit. Par ailleurs, si le Conseil désirait tenir compte des revenus d'interurbain, il faudrait qu'il réduise la période de compensation à beaucoup moins que trois ans.

16.

Selon TELUS, les périodes de compensation devraient être différentes pour les concurrents de l'interurbain, les ESLC et les ESLT. À son avis, avec des ZAL élargies, les concurrents de l'interurbain ne seraient plus obligés d'acheminer du trafic interurbain qui devient du trafic local, alors que les ESLT et les ESLC continueraient d'acheminer ce trafic. À son avis, une période de compensation de trois ans surdédommagerait les concurrents de l'interurbain. TELUS a fait valoir que les concurrents de l'interurbain ne devraient recevoir que six mois de revenus d'interurbain perdus, ce qui représente une compensation pour leur marge de perte du trafic interurbain perdu et pour tout coût direct nécessaire pour redéployer les immobilisations dans les marchés où il serait possible de les réutiliser.

17.

TELUS a déclaré qu'il faudrait éliminer la période de compensation pour la composante ESLC du supplément temporaire. Selon elle, obliger les ESLC à percevoir des suppléments et à payer ces revenus à l'ESLT leur imposera un fardeau administratif. De plus, exiger que les ESLC qui exploitent dans des circonscriptions touchées par l'élargissement de ZAL incluent le supplément dans leurs tarifs locaux, peu importe si elles ont prévu ou non d'adopter la même ZAL élargie que l'ESLT, empêcherait vraiment les ESLC de livrer concurrence.

18.

TELUS a ajouté que dans le cas des ESLT, il ne devrait pas y avoir de limite réglementaire pour la durée de la compensation et que c'est le libre jeu du marché qui déciderait de la durabilité du supplément temporaire.

19.

TELUS a fait valoir qu'en dédommageant les concurrents de l'interurbain, les abonnés paieraient un supplément temporaire de 40 % supérieur à ce qu'il serait si seules les ESLT étaient dédommagées.

Observations en réplique

20.

AT&T Canada a déclaré que TELUS ne faisait qu'exposer de nouveau sa position initiale par rapport à l'instance qui a mené à la décision 2002-56 et suivant laquelle seules les ESLT devraient être dédommagées. De l'avis d'AT&T Canada, il faudrait autoriser toutes les classes de fournisseurs de services interurbains ou n'en autoriser aucune à recouvrer la perte de revenus d'interurbain.

21.

AT&T Canada a déclaré qu'une méthode de compensation, quelle qu'elle soit, causerait des problèmes, et que le fardeau administratif qu'elle imposerait risquerait en bout de ligne de l'emporter sur les avantages de la compensation. AT&T Canada a fait valoir que la période de compensation ne devrait pas dépasser un an.

22.

Selon les Compagnies, il ne serait possible à l'avenir d'établir la période de compensation appropriée que lorsqu'il se produit un changement important dans des facteurs pertinents du marché.

23.

L'Union des consommateurs a déclaré que toute compensation devrait s'appliquer à la perte non pas de revenus d'interurbain mais de profits d'interurbain.

24.

Ottawa a fait valoir que TELUS avait conclu à tort que les ESLC étaient obligées d'imposer le supplément temporaire, ce qui a eu pour effet de désavantager les ESLC sur le plan concurrentiel. De l'avis d'Ottawa, la décision 2002-56 n'obligeait pas les ESLC à facturer le supplément temporaire, mais on supposait qu'il était perçu. Toutefois, plus la période du supplément serait courte, plus une ESLC serait disposée à absorber le supplément pour demeurer concurrentielle.

25.

Ottawa a pris note de l'argument de TELUS selon lequel les concurrents de l'interurbain ne devraient pas être dédommagés pour le trafic interurbain qu'ils n'acheminent plus. Ottawa a fait valoir que la même chose serait vraie pour les ESLT. Ottawa a convenu avec TELUS que dans la mesure où les frais d'exploitation nets augmentent, les ESLT devraient être dédommagées par le biais de tarifs locaux majorés.

26.

Pour appuyer l'opinion voulant qu'il faille raccourcir la période de compensation, Ottawa a fait valoir que les facteurs de marché identifiés dans la décision 2002-56 avaient déjà réduit la valeur des appels de courte distance. À cet égard, Ottawa a dit désapprouver l'opinion des Compagnies selon laquelle il faut surveiller ces facteurs pour en évaluer l'impact futur sur la valeur des revenus d'interurbain perdus.

27.

Ottawa s'est dite en désaccord avec A & A étant donné que le Conseil n'a jamais eu pour rôle de garantir à un concurrent particulier un rendement des investissements.

28.

Primus Canada a fait valoir qu'une compensation devait permettre aux concurrents de trouver de nouvelles occasions d'affaires. À l'instar des Compagnies, Primus Canada estime que tous les fournisseurs de services interurbains devraient être traités également et qu'une période de compensation de trois ans est trop restrictive.

29.

SaskTel a fait valoir que la période de compensation d'un an qu'Ottawa propose n'est nullement justifiée. SaskTel a convenu avec Sudbury que les entités devraient pouvoir se retrouver dans la même position qu'avant l'élargissement d'une ZAL.

30.

TELUS a réitéré son avis voulant qu'il ne faudrait pas dédommager les concurrents de l'interurbain pour des services qu'ils ne fournissent plus. TELUS a fait valoir que les ESLT continueraient d'utiliser leurs installations pour fournir des zones d'appel local élargies et que par suite de la disparition des frais d'interurbain, le volume de trafic doublerait.

31.

TELUS a convenu avec les Compagnies que la période de compensation devrait être dynamique et non pas fixe. Cependant, il faudrait la baser, selon elle, sur les forces du marché et non pas sur une intervention réglementaire.

32.

TELUS a dit estimer que West Coast et A & A ne devraient pas avoir droit à une compensation car, comme elle l'a fait valoir, il s'agit de revendeurs de services locaux qui n'ont jamais été considérés comme des concurrents de l'interurbain. De plus, lorsque le régime de contribution de l'interurbain visant à subventionner les fournisseurs de services locaux était en vigueur, les revendeurs de services locaux étaient exemptés de payer une contribution à l'interurbain parce qu'ils étaient considérés comme fournissant un service local étendu.

Analyse et conclusions du Conseil

Questions débordant le cadre de l'instance

33.

Le Conseil fait remarquer que dans la décision 2002-56, il a déclaré que tout nouveau cadre de réglementation régissant l'élargissement des ZAL devrait traiter les entités de façon juste et il a donc conclu que les ESLT et les concurrents devraient être dédommagés pour la perte de revenus d'interurbain découlant de l'élargissement de ZAL. Le Conseil a sollicité des observations sur «  l'avis préliminaire du Conseil portant sur la durée de la période de compensation applicable aux pertes en revenus d'interurbain ».

34.

Dans la décision 2002-56, le Conseil a déterminé qu'au chapitre de la compensation, tous les types de fournisseurs de services interurbains devraient être traités de la même manière. Par conséquent, le Conseil estime que toute proposition, comme celle de TELUS, visant à traiter différents types de fournisseurs de services interurbains différemment en termes de compensation déborde le cadre de cette instance.

Durée de la période de compensation

35.

Le Conseil fait remarquer que dans cette instance, certaines parties ont appuyé des approches au cas par cas pour calculer la compensation pour la perte de revenus d'interurbain, comme favoriser le libre jeu du marché, de même que la compensation dynamique et les études économiques. Si une partie a appuyé l'opinion préliminaire du Conseil selon laquelle la compensation devrait équivaloir à trois années de revenus d'interurbain perdus, d'autres, en revanche, ont préconisé des périodes plus courtes ou plus longues.

36.

Le Conseil a fait remarquer qu'en se basant sur l'approche au cas par cas suggérée par TELUS, la durée de la période de compensation serait déterminée par le libre jeu du marché. De plus, la compensation serait versée aux fournisseurs de services interurbains aussi longtemps que le libre jeu du marché permettrait de percevoir le supplément temporaire. Dans le document Rapport à la gouverneure en conseil : État de la concurrence dans les marchés des télécommunications au Canada - Mise en place et accessibilité de l'infrastructure et des services de télécommunication de pointe de décembre 2002 (le Rapport), le Conseil a souligné que dans le marché filaire local pour 2001, les ESLT continuaient de fournir plus de 96 % de l'ensemble des lignes locales et d'accaparer plus de 97 % du total des revenus locaux. Toujours d'après le Rapport, la concurrence n'est pas suffisante, selon le Conseil, pour que le libre jeu du marché puisse discipliner la durée pendant laquelle les abonnés paieraient le supplément temporaire. À son avis, les abonnés surdédommageraient donc les fournisseurs de services interurbains. Par conséquent, le Conseil estime qu'il ne conviendrait pas de compter sur le libre jeu du marché pour établir le supplément temporaire et la compensation correspondante pour les revenus d'interurbain perdus.

37.

Le Conseil prend note de la proposition des Compagnies voulant que ce soit les changements dans les facteurs du marché qui déterminent le montant de la compensation. Le Conseil estime que la mise en oeuvre de ce modèle dynamique nécessiterait la tenue d'autres instances à chaque endroit où une ZAL est mise en oeuvre afin de rajuster la compensation à mesure que ces facteurs changent. De l'avis du Conseil, évaluer en permanence le caractère approprié du supplément temporaire, en tenant compte des changements qui surviennent dans un ou plusieurs de ces facteurs du marché, alourdirait le fardeau réglementaire. Par conséquent, le Conseil estime que cette approche ne serait pas appropriée.

38.

Le Conseil note que SaskTel propose d'utiliser des études économiques pour estimer la compensation. Le Conseil est d'avis que même si la proposition de SaskTel peut être valable, la mise en ouvre n'en comporte pas moins des difficultés pratiques. Le Conseil fait remarquer qu'il a approuvé une méthodologie que les ESLT utilisent pour leurs études économiques. Toutefois, il n'a pas approuvé de méthode pour d'autres fournisseurs de services interurbains qui seraient admissibles à une compensation, et qui seraient tenus soit de faire leurs propres études économiques, soit de contribuer à une étude de l'ESLT. En l'absence de méthode approuvée par le Conseil pour les études économiques des concurrents de l'interurbain et compte tenu des limitations des études économiques dans un marché changeant, le Conseil estime qu'il ne conviendrait pas d'utiliser des études économiques pour fixer la compensation.

39.

Le Conseil est d'avis que l'estimation de la compensation en fonction du principe des dommages-intérêts, comme le suggère Sudbury, n'est pas sans problème. En effet, le Conseil estime que cette approche ressemble à celle que SaskTel a proposée, puisqu'elle exigerait des études économiques afin de pouvoir calculer les dommages-intérêts et comporterait donc des lacunes semblables. Le Conseil juge donc que le principe des dommages-intérêts ne serait pas approprié.

40.

Le Conseil prend note de l'argument avancé par Ottawa, Sudbury et l'Union des consommateurs selon lequel il faudrait que la méthode privilégiée tienne compte des revenus d'interurbain perdus, moins les économies connexes découlant de la non-prestation du service interurbain à l'intérieur de la ZAL élargie. Ces parties ont en outre soutenu que la marge bénéficiaire pour le trafic interurbain à l'intérieur d'une petite zone d'appel est très faible. C'est ce qui explique, selon elles, que pour refléter les économies de coûts afférentes, il faudrait réduire sensiblement la période de compensation de trois ans proposée par le Conseil et basée sur la perte de revenus d'interurbain. De plus, selon Ottawa, une compensation de l'interurbain devrait être limitée à l'équivalent d'un an de revenus d'interurbain perdus. Le Conseil fait en outre remarquer que de l'avis d'autres parties, le trafic interurbain perdu aurait une marge élevée et qu'une période de compensation d'un an serait trop courte. Le Conseil estime que la marche bénéficiaire pour le trafic interurbain perdu sera probablement élevée compte tenu de l'absence des coûts évitables des installations sous-jacentes à l'intérieur d'une ZAL nouvellement élargie. Par conséquent, le Conseil juge qu'une période de compensation d'un an serait trop courte pour dédommager adéquatement les fournisseurs de services interurbains et ne conviendrait donc pas.

41.

Pour ce qui est de l'argument avancé par A & A et West Coast à l'appui de la période de compensation de cinq ans qu'elles proposent, le Conseil convient avec Ottawa qu'il n'a jamais eu pour rôle de garantir aux concurrents un rendement des investissements. De l'avis du Conseil, la période de compensation de cinq ans proposée n'est pas étayée et ne serait donc pas appropriée.

42.

Le Conseil note que, de l'avis des Compagnies, une période de compensation de trois ans sous-estimerait la valeur pour les abonnés de l'élargissement des ZAL et entraînerait donc un élargissement non rentable de ces zones. Le Conseil fait en outre remarquer que suivant le nouveau cadre, la compensation totale approchera la valeur pour les abonnés de toute nouvelle ZAL du fait que le supplément temporaire serait plus élevé à cause de la compensation accordée à tous les fournisseurs de services interurbains. Par conséquent, le Conseil est d'avis que rien ne prouve dans le dossier qu'une période de compensation fixe de trois ans au cours de laquelle les fournisseurs de services interurbains seraient dédommagés pour les revenus d'interurbain perdus, sous-estimerait nécessairement la valeur de l'élargissement des ZAL ou entraînerait un élargissement non rentable de ZAL.

43.

De l'avis du Conseil, pour dédommager de façon aussi juste que possible les ESLT et les concurrents de l'interurbain, le régime de compensation doit être efficace et raisonnable au niveau administratif. En basant la compensation sur les revenus d'interurbain perdus, le Conseil estime que les entités peuvent fournir une preuve objective pour justifier la compensation réclamée, comme les données de facturation de l'interurbain de l'année précédente. Cela signifie qu'une norme de preuve commune est exigée pour toutes les entités.

44.

Le Conseil fait remarquer que, compte tenu de l'évolution du marché concurrentiel des télécommunications, le régime de compensation qu'il a établi dans la décision 2002-56 visait à obtenir pour la compensation une estimation raisonnable et non pas un montant précis. Le Conseil estime que la période de trois ans proposée dans la décision permettrait aux concurrents de s'adapter au nouveau contexte d'un élargissement de ZAL tout en fournissant un montant de compensation raisonnable à toutes les entités. De plus, cette compensation pour les revenus d'interurbain perdus représente une estimation raisonnable de la valeur pour les abonnés d'une ZAL élargie de sorte qu'il ne devrait pas y avoir d'élargissement non rentable d'un service ZAL. En même temps, les abonnés sont protégés contre le fait de devoir payer trop cher. Le Conseil estime que tout compte fait, une période de compensation de trois ans est juste pour les fournisseurs de services interurbains et les abonnés.

45.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil établit que la compensation pour les ZAL élargies équivaudra à trois ans de revenus d'interurbain perdus.

Autres questions

Admissibilité à une compensation

46.

Le Conseil prend note des observations de TELUS selon lesquelles les revendeurs de services locaux n'ont jamais été considérés comme des concurrents de l'interurbain et, comme ils ne fournissent à leurs abonnés que la zone d'appel local élargie, ils ne seraient pas admissibles à une compensation pour leurs revenus d'interurbain perdus. Le Conseil fait en outre remarquer que dans la décision Bell Canada - Requête en interdiction de la revente du service Centrex III par la Distributel Communications Limited, Décision Télécom CRTC 89-2, 7 février 1989, le Conseil a déclaré que le service Metroplus de Distributel Communications Limited (Distributel) était basé sur la revente, à un tarif mensuel fixe, du service Centrex III fourni à partir d'une circonscription principale offrant des appels sans frais d'interurbain avec des circonscriptions avoisinantes. Par conséquent, le service Metroplus reliait effectivement deux appels locaux et évitait ainsi les frais d'interurbain qui s'appliqueraient normalement. Le Conseil a conclu que le service fourni par Distributel était décrit à juste titre comme un service local. Par conséquent, en ce qui concerne le nouveau cadre régissant l'élargissement des ZAL, les revendeurs de services locaux, selon le Conseil, ne sont pas considérés comme des concurrents de l'interurbain et ne sont donc pas admissibles à une compensation pour les revenus d'interurbain perdus.

Processus complémentaire

47.

Dans ses observations, Ottawa a soulevé la question des éléments de service qu'il faudrait inclure dans le calcul des revenus d'interurbain perdus ainsi que la question de la lettre, présentée par Bell Canada le 17 septembre 2002 concernant des aspects de la mise en oeuvre des ZAL élargies associés à la décision 2002-56, notamment : la difficulté possible d'obtenir des renseignements d'autres compagnies; la vérification de l'exactitude des renseignements fournis par d'autres compagnies; l'élimination de la double comptabilité des revenus d'interurbain perdus; et l'établissement de l'admissibilité à une compensation. Ottawa a demandé au Conseil d'examiner ces questions dans cette instance.

48.

En réponse à l'affirmation d'Ottawa, Bell Canada a indiqué que le but de sa lettre était de gérer les attentes des municipalités. Bell Canada a déclaré qu'à son avis, les questions soulevées dans sa lettre ne seraient pas insolubles et qu'elle s'attendait qu'elles soient réglées grâce à l'interaction des intervenants pertinents, incluant les municipalités. Selon Bell Canada, c'est seulement en cas d'impasse que les parties demanderaient l'aide du Conseil.

49.

De l'avis du Conseil, le dossier ne lui permet pas à ce stade-ci d'examiner les questions soulevées par Ottawa. Le Conseil convient qu'il s'agit de questions de mise en oeuvre qui pourraient être traitées dans le cadre d'une demande d'élargissement d'une ZAL. Toutefois, le Conseil s'attend que les intervenants fassent tous les efforts nécessaires pour résoudre le plus rapidement possible les questions liées à la compensation pour les revenus d'interurbain perdus.

Secrétaire général

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Mise à jour : 2003-05-07

Date de modification :