ARCHIVÉ - Ordonnance CRTC 2001-82

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Ordonnance CRTC 2001-82

 

Ottawa, le 31 janvier 2001

 

Le CRTC rejette la demande de Primus/Distributel visant à annuler les ordonnances CRTC 2000-37 et 2000-38

 

Référence: 8662-P11-01/00 et 8662-D11-01/00

 

Le Conseil rejette la demande présentée par Primus/Distributel en vue d'annuler les ordonnances CRTC 2000-37  et 2000-38 et : (A) il conclut qu'il est habilité à rendre les ordonnances 2000-37  et 2000-38; (B) il rejette la demande de Primus/Distributel visant à ordonner à Bell Canada d'appliquer l'article 24.4(d) de son Tarif général au trafic interurbain d'autres fournisseurs de services interurbains (AFSI) qui est raccordé au moyen de liaisons du service régional et de percevoir les frais non facturés conformément à ses Modalités de service; (C) il conclut que l'entente d'interconnexion entre les compagnies de téléphone indépendantes (CTI) et Bell Canada ne s'applique pas aux cas visés par les ordonnances 2000-37  et 2000-38; (D) il rejette la demande de Primus visant à supprimer le supplément de 25 % comme remplacement des minutes de départ dans le territoire d'Hurontario; (E) il précise que la contribution déjà versée par Primus et Distributel à Bell Canada doit être prise en compte; (F) il maintient le rabais de 15 % pour l'accès côté ligne; (G) il précise que les frais de contribution des CTI s'appliquent au trafic du service régional en question; (H) il offre aux AFSI trois alternatives pour les rapports et la facturation; (I) il conclut que Bell Canada n'est pas tenue de modifier ses pages de tarif; et (J) il fournit une estimation de la responsabilité en matière de contribution des requérantes aux intimées, conformément à la présente ordonnance.

1.

Dans une lettre du 21 février 2000, Primus Telecommunications Canada Inc. (anciennement London Telecom Network Inc.) a demandé, en vertu de l'article 62 de la Loi sur les télécommunications (la Loi) et de la partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications, que le Conseil annule l'ordonnance CRTC 2000-37 du 21 janvier 2000.

2.

Primus a fait valoir que, comme l'ordonnance 2000-37 renferme des excès de compétence, de même que des erreurs de droit et de fait soulevant un doute réel quant à la rectitude de la décision. Les intimées dans ce cas sont Hurontario Telephones Limited, l'Ontario Telecommunications Association (OTA) et Bell Canada.

3.

L'ordonnance 2000-37 règle un litige en matière de concurrence opposant London Telecom et Hurontario concernant le paiement approprié de frais de contribution pour l'acheminement du trafic interurbain au moyen de liaisons du service régional, conformément à la décision Télécom CRTC 96-6 du 7 août 1996 intitulée Cadre de réglementation pour les compagnies de téléphone indépendantes au Québec et en Ontario (sauf la Commission de transport Ontario Northland, Québec-Téléphone et Télébec ltée).

4.

Dans l'ordonnance 2000-37, le Conseil a notamment conclu : (a) qu'en acheminant le trafic interurbain au moyen de liaisons du service régional entre Hurontario et Bell Canada, London Telecom est tenue de verser une contribution à Hurontario conformément aux modalités de la décision 96-6; et (b) que les dispositions de « facturation répercutée » pour la perception de la contribution des CTI dans l'article 24.4(d) du Tarif général de Bell Canada ne s'appliquent pas à l'acheminement du trafic interurbain sur les routes du service régional.

5.

Compte tenu de ses conclusions, le Conseil a notamment ordonné à London Telecom de payer à Hurontario la contribution pour la période du 1er janvier 1997 au 21 octobre 1998.

6.

Dans une lettre du 21 février 2000, Distributel Communications Limited a soumis pratiquement la même demande en vertu de l'article 62 concernant l'ordonnance CRTC 2000-38 du 21 janvier 2000. Les intimées dans ce cas sont La Compagnie de Téléphone de Warwick, la Société d'administration des tarifs d'accès des télécommunicateurs (SATAT) et Bell Canada.

7.

L'ordonnance 2000-38 portait sur un litige opposant Distributel et Warwick à l'égard du paiement approprié de la contribution pour l'acheminement du trafic interurbain au moyen de liaisons du service régional, conformément à la décision 96-6.

8.

Primus/Distributel (les requérantes) ont demandé notamment que le Conseil : (a) annule les ordres donnés dans les ordonnances 2000-37 et 2000-38 contre London Telecom et Distributel, respectivement; et (b) ordonne à Bell Canada d'appliquer l'article 24.4(d) de son Tarif général au trafic interurbain des autres fournisseurs de services interurbains (AFSI) qui est raccordé au moyen de liaisons du service régional, ainsi que de percevoir les frais non facturés conformément à ses Modalités de service.

9.

Dans l'avis public Télécom CRTC 98-6 du 20 mars 1998 intitulé Lignes directrices relatives aux demandes de révision et de modification, le Conseil a déclaré :

 

.pour que le Conseil exerce le pouvoir que lui confère l'article 62 de la Loi, les requérantes doivent lui démontrer qu'il existe un doute réel quant à la rectitude de la décision initiale, résultant, par exemple :

 

(i) d'une erreur de droit ou de fait;

 

(ii) d'un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision;

 

(iii) du défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans la procédure initiale; ou

 

(iv) d'un nouveau principe découlant de la décision.

10.

Le Conseil conclut qu'il doit examiner les neuf questions ci-après.

 

A. Pouvoir du Conseil de rendre les ordonnances 2000-37 et 2000-38

 

La position des requérantes

11.

Les requérantes ont fait valoir que le Conseil n'est pas habilité à rendre les ordonnances 2000-37 et 2000-38. Ces ordonnances obligent le prédécesseur de Primus, London Telecom, et Distributel, respectivement, toutes deux des revendeurs, à payer aux CTI les frais du Tarif des services d'accès des entreprises (TSAE) et à leur soumettre des données sur le trafic.

12.

Les requérantes ont soutenu que comme les revendeurs ne sont pas « des entreprises de télécommunication » au sens de la Loi, ils ne sont pas assujettis à une réglementation.

13.

De l'avis des requérantes, les restrictions à l'égard de la fourniture de services de télécommunication domestiques par les revendeurs doivent être imposées indirectement, dans le cadre des modalités et conditions des tarifs et des ententes des entreprises réglementées qui fournissent des services de télécommunication aux revendeurs, ce qui n'est pas le cas des ordonnances 2000-37 et 2000-38. De plus, en voulant réglementer directement Primus/Distributel comme entreprises canadiennes dans le cadre des modalités de la décision 96-6 plutôt que par les tarifs de Bell Canada, le Conseil a excédé sa compétence statutaire. Primus/Distributel ont soutenu qu'il n'y a pas d'exemples où le Conseil a rendu une décision réglementant directement les revendeurs comme dans le cas des ordonnances 2000-37 et 2000-38.

14.

Les requérantes ont fait valoir que l'article 37(2) de la Loi confère au Conseil le pouvoir d'exiger qu'une personne non réglementée lui soumette des renseignements mais non à une tierce partie. Cet article ne l'autorise toutefois pas à imposer des modalités et conditions aux revendeurs.

15.

Les requérantes ont soutenu qu'il y a des façons légitimes de mettre en oeuvre la décision 96-6. Le Conseil peut ordonner à Bell Canada et aux CTI d'établir des dispositions tarifaires mettant en ouvre la décision 96-6. Ces dispositions pourraient prévoir l'enregistrement, auprès des CTI, des revendeurs qui utilisent les liaisons du service régional de Bell Canada, de même que la présentation de rapports sur ce trafic. Selon Primus/Distributel, même si le Conseil ne pourra leur facturer rétroactivement les frais de TSAE non payés, il peut établir un régime tarifaire qui mettra dorénavant en ouvre la décision 96-6.

 

La position des intimées

16.

Les intimées (Bell Canada, l'OTA, Hurontario, Warwick et la SATAT) ont soutenu que le Conseil a le pouvoir d'ordonner aux revendeurs de verser des paiements aux CTI et de leur fournir des données sur le trafic, comme il l'a fait dans les ordonnances 2000-37 et 2000-38. L'article 24 de la Loi permet au Conseil d'imposer pour la fourniture des services offerts par les entreprises canadiennes, des modalités et des conditions qui lient les revendeurs lorsqu'ils utilisent le service.

17.

L'imposition de conditions peut se faire dans le cadre d'une décision ou d'une ordonnance. Bell Canada et l'OTA ont souligné que dans les ordonnances 2000-37 et 2000-38, comme dans la décision 96-6, le Conseil a assorti de conditions la fourniture de services par une entreprise canadienne, conditions qu'un revendeur doit respecter avant de pouvoir utiliser le service.

18.

L'OTA a soutenu que l'article 24 doit être lu de concert avec l'article 32, qui énonce les pouvoirs généraux du Conseil. Selon elle, l'article 32(g) habilite le Conseil à rendre une ordonnance contre un revendeur concernant les services de télécommunication d'une entreprise canadienne, ce qui peut inclure l'imposition de conditions à l'offre et à la fourniture de services par une entreprise canadienne.

19.

Bell Canada a fait savoir qu'au fil des années, le Conseil a donné de nombreuses directives à des parties non réglementées. Par exemple, dans une lettre-décision publiée le 5 mars 1996, le Conseil a ordonné à l'Université McGill et à l'Université Brock, les deux ayant introduit des arrangements de services partagés aux locataires dans les résidences pour étudiants, de fournir un accès raisonnable aux locataires désirant obtenir des services directement de Bell Canada. Les Modalités de service de Bell Canada, qui renferment des dispositions ordonnant aux abonnés de faire ou de ne pas faire certaines choses en rapport avec les services et installations que la compagnie fournit sont un autre exemple. L'article 8, par exemple, interdit aux abonnés « .d'utiliser les services de Bell Canada ou de permettre qu'ils soient utilisés de manière à empêcher autrui d'en faire un usage juste et proportionné. »

20.

Selon Bell Canada et l'OTA, l'article 37(2) de la Loi donne le pouvoir nécessaire au Conseil de donner effet aux directives contenues dans les ordonnances. L'article 37(2) permet au Conseil de demander des renseignements à quiconque, y compris à des parties non réglementées comme les revendeurs. L'obligation pour les revendeurs de fournir des renseignements aux CTI s'inscrit dans les pouvoirs qui sont conférés au Conseil.

21.

Bell Canada a soutenu que même s'il aurait été possible au Conseil d'ordonner à Bell Canada et à d'autres entreprises canadiennes de déposer des tarifs mettant en ouvre la décision 96-6, pareille mesure aurait été coûteuse et peu pratique.

22.

Bell Canada a soutenu qu'annuler les ordonnances : (a) annulerait l'obligation pour les revendeurs de rembourser les CTI et leur permettrait de profiter d'une inobservation intentionnelle des directives du Conseil; (b) annulerait l'obligation pour les revendeurs d'aviser dorénavant les CTI de tous leurs numéros d'accès, ce qui empêcherait les CTI de bloquer les appels de départ et d'arrivée; et (c) transférerait à Bell Canada la responsabilité du suivi et du paiement.

 

Historique

23.

En 1994, les CTI sont devenues du ressort fédéral par suite d'un jugement de la Cour suprême du Canada dans la cause Procureur général du Québec et al. c. Téléphone Guévremont Inc. Le 7 août 1996, le Conseil a publié la décision 96-6, qui établissait un nouveau cadre de réglementation pour les CTI en Ontario et au Québec.

24.

Dans la décision 96-6, le Conseil a exigé que les entreprises titulaires permettent aux entreprises intercirconscriptions et aux revendeurs de livrer concurrence dans les territoires des CTI, sous réserve de conditions, dont l'obligation de payer une contribution, précisées dans la décision dans le but de réduire l'impact financier sur les CTI. Par exemple, à compter du 1er janvier 1997, les revendeurs pourraient utiliser le service Centrex de Bell Canada afin d'acheminer du trafic de départ et d'arrivée dans les territoires des CTI. La partie pertinente de la décision 96-6, à la page 52, se lit comme suit :

 

Le Conseil est d'avis que dans toute la mesure du possible, la concurrence doit être élargie. Il s'inquiète cependant de l'incidence financière produite sur les compagnies indépendantes. Grâce au service régional, on peut en effet contourner la contribution à verser aux indépendantes par les entreprises de services interurbains concurrentes qui profitent du service régional dans les cas où la liaison de service régional fait intervenir une circonscription de Bell, de même que par les « simples butineurs » locaux. Dans la décision 92-12, le Conseil n'a pas permis aux entreprises de services interurbains concurrentes de se servir des commutateurs de Bell pour le départ du trafic dans les territoires des parties qui ne sont pas intervenues dans l'instance qui a abouti à cette décision. Les entreprises de services interurbains concurrentes devaient négocier avec les indépendantes pour pouvoir se prévaloir des ententes de service régional conclues avec Bell.

 

Par conséquent, le Conseil approuve la revente du service régional et ordonne qu'il n'y ait pas de différence entre les revendeurs de ces services et ceux des services interurbains et que, par conséquent, ils doivent verser une contribution. Le paiement de la contribution sur le service régional revendu tient compte de la vulnérabilité financière des indépendantes. Les revendeurs doivent s'inscrire auprès du Conseil et de la compagnie de téléphone compétente et fournir à la compagnie de téléphone en cause, si elle lui en fait la demande, des statistiques sur le trafic pour les besoins de la facturation et pour le calcul du TSAE. [Soulignement ajouté]

25.

Le pouvoir du Conseil, d'émettre des directives, citées ci-dessus, repose sur l'article 24 de la Loi, et l'article 32(g) prévoit une autre base.

26.

Toutefois, il faut noter que l'article 37(2) ne permet pas au Conseil de donner des directives obligeant les revendeurs à fournir aux CTI des données sur le trafic. L'article 37(2) ne porte que sur les renseignements devant être fournis au Conseil et non à des tierces parties.

27.

L'article 24 se lit comme suit :

 

L'offre et la fourniture des services de télécommunication par l'entreprise canadienne sont assujetties aux conditions fixées par le Conseil ou contenues dans une tarification approuvée par celui-ci. [Soulignement ajouté]

28.

Compte tenu du mot « ou » à l'article 24, on peut trouver des conditions dans les tarifs qui sont approuvés par le Conseil ou celles-ci peuvent être imposées par le Conseil dans le cadre d'une ordonnance ou de toute autre forme de décision.

29.

Lorsque des conditions sont imposées dans le cadre de tarifs approuvés par le Conseil, un revendeur ou quiconque utilisant le service offert par l'entreprise canadienne est lié par les modalités et conditions du tarif. De la même façon, les modalités et les conditions imposées dans une ordonnance lient un revendeur ou quiconque utilise le service (auquel les conditions se rattachent) offert par l'entreprise canadienne.

30.

Primus et Distributel louent des services Centrex de Bell Canada et reçoivent les circuits du service régional sans frais additionnels; la revente des services Centrex de Bell Canada inclut des fonctions du service régional. Primus/Distributel utilisent les circuits de service régional pour acheminer du trafic interurbain dans le territoire d'une CTI. La route de service régional de départ à partir de la CTI jusqu'à Bell Canada a été fournie par la CTI. Bell Canada et la CTI ont conçu et mis en place la route de service régional.

31.

Les directives contenues dans la décision 96-6, citées ci-dessus, doivent être comprises comme assortissant des conditions à la fourniture de services de télécommunication par une entreprise canadienne, Bell Canada, en vertu de l'article 24 de la Loi. C'est le service de Bell Canada qui permet aux revendeurs de fournir le service à destination (et en provenance) du territoire de la CTI. Ainsi, comme condition à la fourniture, par Bell Canada, d'un service Centrex ayant des fonctions du service régional en provenance et à destination du territoire d'une CTI, les revendeurs qui utilisent le service doivent s'inscrire auprès de la CTI, lui fournir des données sur le trafic et lui verser une contribution. Ces conditions ont été imposées parce que le Conseil a conclu que la fourniture de la revente d'un service ayant des fonctions du service régional pourrait nuire à la CTI.

32.

Ces dispositions dans la décision 96-6 n'équivalent pas à une réglementation des revendeurs. La Loi comprend une réglementation exhaustive et détaillée des entreprises canadiennes. Par exemple, il est interdit aux entreprises de fournir des services de télécommunication sans que le Conseil n'ait d'abord approuvé leurs tarifs (qui incluent leurs taux), les tarifs doivent être justes et raisonnables et les entreprises ne doivent pas faire preuve de discrimination injuste dans la fourniture des services de télécommunication ou la facturation des taux pour ces services. De plus, les limitations de responsabilité et certaines ententes interentreprises exigent l'approbation du Conseil et les entreprises doivent se conformer aux règles canadiennes en matière de propriété et de contrôle. Dans la décision 96-6, le Conseil n'a imposé aucun de ces genres d'obligations aux revendeurs. Comme condition à l'utilisation des services des entreprises, les revendeurs doivent plutôt fournir certains renseignements et payer la contribution.

33.

Les requérantes elles-mêmes ont suggéré qu'il est possible d'imposer, dans le cadre des tarifs, l'obligation de payer une contribution aux CTI. Ainsi, leur argument se rapporte davantage à la façon dont l'exigence a été imposée qu'au contenu de l'obligation.

34.

Il faut noter que les requérantes ont fait valoir qu'il n'y a pas d'exemples d'ordonnances où le Conseil réglemente directement les revendeurs (comme c'est le cas, dans leur mémoire, pour les ordonnances 2000-37 et 2000-38). Tel que noté ci-dessus, le Conseil ne réglemente pas les revendeurs. De plus, la validité des ordonnances n'a rien à voir avec la question de savoir si le Conseil a déjà rendu ou non une décision semblable.

35.

Quoi qu'il en soit, il y a d'autres cas, y compris ceux fournis par Bell Canada, où le Conseil a imposé des conditions (qui semblent être des ordres directs) adressées aux parties qui ne sont pas des entreprises canadiennes. Dans ces cas, comme dans celui qui nous préoccupe, les directives doivent être considérées comme des conditions rattachées à la fourniture d'un service de télécommunication par des entreprises canadiennes. Un autre exemple nous est fourni par l'ordonnance CRTC 2000-500 du 31 mai 2000, dans laquelle le Conseil a fait remarquer qu'une directive énoncée dans la décision Télécom CRTC 97-8 du 1mai 1997 intitulée Concurrence locale, s'applique aux revendeurs.

36.

De façon alternative, les directives données dans la décision 96-6 l'étaient conformément à l'article 32(g) de la Loi qui confère au Conseil des pouvoirs généraux d'exécuter son mandat :

 

Le Conseil peut, pour l'application de la présente partie :

 

(g) en l'absence de disposition applicable dans la présente partie, trancher toute question touchant les tarifs et tarifications des entreprises canadiennes ou les services de télécommunication qu'elles fournissent.

37.

Les directives données dans la décision 96-6 ont été émises parce que le Conseil était préoccupé par « l'incidence financière produite sur les compagnies indépendantes », si des fonctions du service régional étaient utilisées pour éviter de verser une contribution aux CTI.

38.

Les directives se rapportent aux tarifs des CTI parce que le Conseil ne pouvait que veiller à ce que ces tarifs (y compris les taux de contribution) soient justes et raisonnables, comme l'exigeait la Loi, en incluant ces directives. Ces dernières se rapportent aussi aux services de télécommunication, à la fourniture de services Centrex incluant des fonctions du service régional, offerts par une entreprise canadienne.

39.

London Telecom, maintenant Primus, a participé activement à l'instance qui a abouti à la décision 96-6. Hurontario/Warwick ont rappelé à maintes reprises à London Telecom/Distributel les exigences imposées par la décision 96-6, mais ces dernières n'ont pas suivi les modalités de la décision, alléguant plus tard que c'était l'article 24.4(d) du Tarif général de Bell Canada qui régissait leurs liens avec les CTI.

40.

Après un processus public complet, en janvier 2000, le Conseil a publié les ordonnances 2000-37 et 2000-38 afin d'appliquer la décision 96-6, y compris l'obligation que les CTI reçoivent des paiements de contribution.

41.

Dans la présente instance, les requérantes ont contesté deux aspects des ordonnances, à savoir : (a) la directive voulant qu'elles fournissent aux CTI des données sur le trafic; et (b) la directive voulant qu'elles paient les CTI. Il incombe aux requérantes dans cette instance en révision et modification de prouver qu'il existe un doute réel quant à la rectitude des deux ordonnances, à cause de prétendus excès de compétence et erreurs de droit et de fait.

42.

Les requérantes ont tiré avantage de la décision 96-6 et n'ont pas voulu faire supprimer ou modifier les directives données dans la décision 96-6. Au cours du processus qui a abouti à l'ordonnance 2000-38, Distributel a déclaré qu'il n'était pas question pour elle de demander de révision et de modification de la décision 96-6. Dans le cadre de cette instance, les requérantes ont plutôt soutenu qu'il y avait de meilleures façons de mettre en oeuvre la décision 96-6. De plus, tel que précisé dans les questions abordées aux sections F et G de la présente ordonnance, les requérantes ont cherché à tirer profit des parties de la décision 96-6 où le Conseil a exigé une réduction de 15 % pour les raccordements côté ligne, et ordonné le paiement de montants de contribution et non du TSAE intégral.

 

Décision du Conseil

43.

Le pouvoir du Conseil de rendre les ordonnances découle de l'article 51 de la Loi. Il les a rendues dans le but d'appliquer les directives données dans la décision 96-6 établissant un cadre de réglementation pour les CTI exploitant en Ontario et au Québec. Les ordonnances d'exécution sont prévues à l'article 51 qui stipule ce qui suit :

 

Le Conseil peut ordonner à quiconque d'accomplir un acte ou de s'en abstenir conformément aux modalités de temps et autres qu'il précise, selon que cet acte est imposé ou interdit sous le régime de la présente loi ou d'une loi spéciale.

 

The Commission may order a person, at or within any time and subject to any conditions that it determines, to do anything the person is required to do under this Act or any special Act, and may forbid a person to do anything that the person is prohibited from doing under this Act or any special Act.

44.

Le Conseil fait remarquer que l'article 2 de la version anglaise de la Loi définit le terme « personne » de façon générale et qu'il englobe les revendeurs. De plus, le terme « quiconque » dans la version française de l'article 51 est tout aussi général et englobe également les revendeurs. Dans le cas qui nous occupe, le Conseil, dans les ordonnances, enjoignait aux revendeurs de se conformer aux directives données dans la décision 96-6.

45.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les ordonnances 2000-37 et 2000-38, qui mettent en application les directives données dans la décision 96-6, sont valides, conformément à l'article 51 de la Loi, et que les requérantes ne se sont pas déchargées du fardeau de la preuve de l'existence d'un doute réel quant à la rectitude des ordonnances pour des raisons d'excès de compétence ou d'erreurs de droit.

 

B. Applicabilité du tarif de Bell Canada au trafic du service régional

 

La position des requérantes

46.

D'après les requérantes, le Conseil a commis une erreur en concluant que les dispositions de l'article 24.4(d) du Tarif général de Bell Canada concernant la facturation répercutée ne s'appliquent pas au trafic interurbain acheminé dans les territoires des CTI utilisant des arrangements de service régional que Bell Canada a conclus avec les CTI. L'article 24.4(d) stipule ce qui suit :

 

(d) Refacturation des frais du Tarif de services d'accès (TSA) d'une compagnie de téléphone indépendante (CTI).

 

(1) Pour chaque minute de trafic, en provenance ou à destination du territoire d'une CTI au nom d'un fournisseur de services interurbains concurrent (FSIC), des frais équivalant aux frais par minute du TSA du CTI s'appliquent, moins 0,0121 $, le montant représentant les frais de contribution moyens de la compagnie pour l'accès côté ligne.

 

(2) Pour chaque facture adressée aux FSIC en vertu de cet article, un tarif mensuel est exigible comme l'indique l'article
G-220(a)(1) du Tarif des montages spéciaux de la compagnie.

 

EXCEPTION : Les frais indiqués en (d)(1) et (d)(2) ci-dessus ne sont pas exigibles lorsqu'une entente spécifique a été établie entre le FSIC et la CTI précisant que les frais du TSA sont payés directement par le FSIC à la CTI.

47.

Primus/London Telecom ont affirmé qu'elles traitent comme du trafic intercirconscription pour lequel une contribution est versée, tout le trafic à destination des installations Centrex louées auprès de Bell Canada, de l'extérieur de la zone d'appels locaux.

48.

Lorsque la zone d'appels locaux de Bell Canada incluait une partie du territoire d'exploitation d'une CTI, Bell Canada établissait la communication au moyen de son raccordement de service régional avec la CTI.

49.

Voilà pourquoi Primus/London Telecom ont soutenu qu'elles étaient assujetties aux modalités et conditions établies dans les tarifs de Bell Canada, y compris les modalités de l'article 24 du Tarif général régissant la revente et le partage des services de Bell Canada, les Modalités de service de même que les articles particuliers des tarifs de Bell Canada s'appliquant aux services Centrex et Megaroute auxquels elles souscrivent.

50.

Les requérantes ont déclaré que l'article 24.4(d) du Tarif général a été formulé de façon suffisamment générale pour englober la refacturation par Bell Canada des revendeurs de Centrex pour les raccordements côté ligne à destination des territoires des CTI. Les requérantes ont fait valoir qu'aucune distinction n'est faite entre les raccordements côté ligne ou les raccordements côté réseau, ou entre le service régional ou le service interurbain. C'est ce qui explique pourquoi London Telecom a dit croire que Bell Canada la facturerait pour la contribution de la CTI.

51.

De l'avis de Primus/London Telecom, la décision 96-6 portait non pas sur les appels d'arrivée mais sur les appels de départ dans le territoire d'une CTI. Selon elles, les revendeurs n'étaient pas obligés de s'inscrire auprès des CTI pas plus qu'ils n'étaient tenus de leur fournir des renseignements sur le trafic à des fins de facturation.

 

La position des intimées

52.

Bell Canada a déclaré que l'article 24.4(d) de son Tarif général doit être interprété comme suit : elle facturera au revendeur un montant égal aux frais de TSAE par minute de la CTI, rajusté pour les frais d'accès côté ligne et les frais de raccordement direct, pour chaque minute de trafic en provenance ou à destination du territoire d'une CTI.

53.

Bell Canada a déclaré que le service régional est un service local qui permet aux abonnés de faire des appels à partir de circonscriptions locales avoisinantes sans payer de frais d'interurbain. La contribution, c'est-à-dire ce que les dispositions relatives à la facturation répercutée visent à régler, sont des frais qui s'appliquent à la fourniture du service interurbain. Bell Canada a déclaré que la lettre associée à l'avis de modification tarifaire 5894 du 13 décembre 1996 montre que le tarif de facturation répercutée n'était pas censé s'appliquer à la revente du service régional.

54.

Bell Canada a fait savoir que Primus et d'autres revendeurs exploitaient dans les territoires des CTI et auraient dû déclarer leurs minutes aux fins de la facturation. La revente au moyen de liaisons du service régional dans les territoires des CTI est assujettie au paiement du taux de contribution de la CTI et signifierait donc exploiter dans ce territoire. Un mécanisme, de l'avis des intimées, conviendrait pour le trafic régional dans le territoire de la CTI, comme l'indique la décision 96-6 : exiger que les revendeurs fassent rapport du trafic applicable aux CTI et qu'ils paient les frais de TSAE pertinents.

55.

L'OTA a soutenu que l'article 24.4(d) du Tarif général de Bell Canada ne s'applique pas à la revente du service régional de Bell Canada parce que :

 

a) l'article 24.4(d) porte sur les frais de contribution. Le service régional est un service local auquel aucune contribution ne s'applique. Il est impossible qu'on ait voulu que l'article en question s'applique à la revente du service régional de Bell Canada;

 

b) si la position de Primus sur l'applicabilité de l'article 24.4(d) est juste, le Conseil a approuvé un tarif qui va à l'encontre de la décision 96-6; et

 

c) si elle n'utilisait pas, ensemble, le service Centrex et les liaisons du service régional de Bell Canada dans les territoires d'exploitation des CTI, Primus serait obligée de payer le TSAE applicable aux CTI en ce qui concerne le trafic interurbain des abonnés qui acheminent du trafic en provenance ou à destination des territoires d'exploitation des CTI. À ce titre, Primus ne peut prétendre que l'article 24.4(d) s'applique à la revente du service régional de Bell Canada.

 

Décision du Conseil

56.

Le régime institué par l'article 24.4(d) diffère passablement de celui instauré par la décision 96-6. En effet, l'article en question ne prévoit ni l'enregistrement du revendeur auprès de la CTI, ni la fourniture de données sur le trafic, ni le versement d'une contribution à la CTI. Si l'article 24.4(d) s'applique au cas en instance, le régime créé par la décision 96-6 n'aurait plus alors aucun sens.

57.

La décision 96-6 prévoit que les revendeurs sont tenus de verser une contribution aux CTI. La décision ne dit pas que les revendeurs ne sont tenus d'en payer une que pour le trafic en provenance du territoire d'une CTI, comme Primus le prétend.

58.

L'article 24.4(d) du Tarif Général de Bell Canada crée un régime différent de celui de la décision 96-6 et ne stipule pas que la décision 96-6 cesse de s'appliquer. L'article en question vise à traiter et à couvrir la revente des services interurbains (comme le service Vnet de Bell Canada) à destination et en provenance du territoire d'une CTI. Le régime créé dans le cadre de la décision 96-6 vise spécifiquement la question de la revente de services de télécommunication ayant des fonctions de service régional à destination et en provenance du territoire de la CTI.

59.

Le Conseil conclut que les dispositions de l'article 24.4(d) ne s'appliquent pas dans le cas présent; par contre, les directives spécifiques données dans la décision 96-6 s'appliquent, et les requérantes n'ont pas prouvé qu'il faudrait modifier les ordonnances sur ce point.

 

C. Applicabilité de l'entente d'interconnexion entre les CTI et Bell Canada

 

La position des requérantes

60.

Selon les requérantes, l'entente d'interconnexion conclue entre Bell Canada et les CTI exige que Bell Canada perçoive les frais de contribution associés au trafic interurbain acheminé au moyen du service régional et qu'elle verse ces paiements aux CTI.

61.

Plus particulièrement, les requérantes ont soutenu que la section 8.2 de l'entente d'interconnexion stipule que « Bell convient de payer tous les frais et tarifs visés par la présente entente, conformément aux tarifs et aux modalités de partage approuvés ou censés avoir fait l'objet d'une approbation par le Conseil. »

62.

L'expression « tarifs de l'Indépendant » est définie dans la section 1 de l'entente comme désignant « des taux ou tarifs, y compris le tarif d'accès à des transporteurs pour l'interconnexion des réseaux avec l'Indépendant, que l'Indépendant est autorisé à appliquer en vertu d'une tarification déposée auprès du Conseil et approuvée par celui-ci (ou censée l'avoir été) ou en vertu d'une tarification commune entérinée par le Conseil ». Les requérantes ont soutenu que même en l'absence de cette disposition, Bell Canada serait tenue de se conformer aux conditions du TSAE pour les CTI.

63.

De l'avis des requérantes, ces dispositions exigent que Bell Canada perçoive les frais de contribution associés au trafic interurbain acheminé au moyen du service régional et de verser ces paiements aux CTI. Le tarif de revente de Bell Canada aurait dû être modifié après la décision 96-6 afin de lui permettre de recouvrer ces frais des revendeurs au nom des CTI.

 

Position de Bell Canada

64.

Bell Canada a fait remarquer qu'elle a conclu une entente d'interconnexion avec les CTI. Toutefois, la pièce jointe 2 (dont Primus/Distributel donnent des extraits dans leurs mémoires) n'a jamais fait partie de l'entente en question.

65.

L'entente d'interconnexion ne visait qu'à décrire les moyens permettant aux CTI de se protéger contre le risque de non-paiement des frais de TSAE appropriés, en ce qui concerne le trafic interurbain raccordé au réseau interurbain de Bell Canada. Pour ce qui est des autres dispositions de l'entente d'interconnexion, Bell Canada a soutenu qu'elles ne s'appliquent pas au trafic du service régional.

66.

Bell Canada a également déclaré que lorsque les ententes d'interconnexion de l'OTA et de l'Association des compagnies de téléphone du Québec ont été exécutées en 1993, les TSAE ne s'appliquaient qu'au trafic interurbain, défini comme excluant le service régional. Bell Canada a ajouté qu'en 1993, les organismes de réglementation provinciaux ne permettaient pas la revente du service régional dans les territoires des CTI. La revente n'a été autorisée que lorsque, dans le cadre de la décision 96-6, le Conseil a permis aux revendeurs de service régional d'exploiter dans les territoires des CTI au Québec et en Ontario.

 

Décision du Conseil

67.

Bell Canada a conclu des ententes d'interconnexion avec les CTI qui se raccordent à ses installations pour l'interconnexion interurbaine. Son entente avec les membres de l'OTA a été approuvée dans l'ordonnance Télécom CRTC 93-1089 du 20 décembre 1993.

68.

Le Conseil souligne que la revente d'un service de télécommunication ayant des fonctions de service régional n'a été autorisée que lorsque la décision 96-6 a traité de la question, et que les organismes de réglementation provinciaux en 1993 ne permettaient pas la revente de ce service à destination ou en provenance des territoires des CTI.

69.

Ainsi donc, les TSAE dont il est question dans ces ententes ne s'appliquaient qu'au trafic interurbain, qui exclut le service régional. De plus, le Conseil estime que le service régional ne devrait pas être compris comme inclus dans l'entente d'interconnexion, étant donné qu'en permettant le service régional à destination et en provenance des territoires des CTI, la décision 96-6 a créé un régime particulier dans lequel la revente du trafic du service régional serait autorisée. L'entente d'interconnexion ne devrait pas non plus servir à réduire (ou à remplacer) les obligations de Primus/Distributel conformément à la décision 96-6. Par conséquent, les requérantes n'ont pas prouvé qu'il faudrait modifier les ordonnances 2000-37 et 2000-38 sur ce point.

 

D. Estimation des minutes de départ de Primus

70.

Au cours de la période du litige (1997 et une partie de 1998), Primus a acheminé du trafic interurbain de départ dans le territoire d'Hurontario. Dans l'instance qui a abouti à l'ordonnance 2000-37, Hurontario avait fait valoir que 25 % de l'estimation du trafic d'arrivée serait une estimation raisonnable du trafic de départ en question.

71.

Dans l'ordonnance 2000-37, le Conseil a accepté l'estimation du trafic d'arrivée donnée par Primus. Pour ce qui est du trafic de départ, en l'absence de preuve de Primus, le Conseil a accepté la suggestion d'Hurontario, et il a ordonné à Primus de payer le supplément de 25 % (comme montant substitut).

72.

Dans cette instance, Primus a fait valoir que le supplément de 25 % pour l'estimation par London Telecom du trafic d'arrivée dans le territoire d'Hurontario imposé dans l'ordonnance 2000-37 est en fait sans fondement et qu'il est gonflé. Primus a affirmé que le Conseil n'a jamais demandé à London Telecom de fournir une estimation des minutes de départ. En réponse à une demande de renseignements du Conseil dans cette instance, Primus a fourni une estimation des minutes de départ dans le territoire d'Hurontario.

73.

Dans l'instance relative au litige qui a donné lieu à l'ordonnance 2000-37, Hurontario a fourni une estimation des minutes de départ. London Telecom aurait pu, dans le cadre de cette instance, fournir sa propre estimation dans ses observations en réplique, mais elle a préféré ne pas le faire.

74.

Le Conseil fait observer que Primus a raté une deuxième occasion de produire des éléments de preuve; dans sa demande de révision et de modification, elle a soulevé la question du supplément de 25 % sans soumettre de preuve. De plus, elle n'a pas montré comment l'estimation d'Hurontario pourrait être considérée comme gonflée. Ce n'est que lorsque le Conseil lui a adressé une demande de renseignements qu'elle a fourni son estimation.

75.

Le Conseil fait remarquer que suivant la décision 96-6, Primus était et demeure obligée de fournir ces renseignements à Hurontario depuis le début du régime institué dans la décision 96-6, le 1er janvier 1997, et elle ne l'a pas fait.

76.

Le Conseil fait remarquer que Primus est un participant expérimenté aux instances qu'il tient, et qu'il lui appartient de défendre sa cause, tâche pour laquelle le Conseil n'est pas tenu de fournir une aide.

77.

Pour le Conseil, le caractère définitif de ses décisions est important. Les parties devraient lui fournir des éléments de preuve à la première occasion.

78.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que, comme Primus ne s'est pas dégagée de l'obligation de prouver qu'il faudrait modifier l'ordonnance sur ce point, il rejette la demande de Primus visant à rajuster le supplément de 25 % dans l'ordonnance 2000-37.

 

E. Contribution déjà payée par Primus et Distributel à Bell Canada

79.

Primus a soutenu que le Conseil n'a pas tenu compte de la contribution déjà payée pour le trafic en question. À son avis, ces montants devraient être compensés par tout autre paiement de contribution fait par London Telecom pour ce trafic.

80.

Bell Canada n'a pas contesté avoir perçu des frais de contribution. Elle a toutefois indiqué qu'elle n'avait pu rembourser Primus/Distributel pour ces frais, parce que ni Hurontario ni Warwick ne lui avaient confirmé que les frais que Primus/Distributel leur devaient avaient été payés.

81.

Le Conseil n'a donné aucune instruction précise sur cette question dans les ordonnances 2000-37 et 2000-38. Le Conseil conclut qu'il faudrait tenir compte de la contribution déjà versée par Primus et Distributel à Bell Canada. Par conséquent, le Conseil clarifie les deux ordonnances et il ordonne à Hurontario et à Warwick de déduire le montant déjà payé à Bell Canada lors du règlement des paiements en souffrance par Primus et Distributel, respectivement.

 

F. Réduction de 15 % pour l'accès côté ligne

82.

Les requérantes ont fait valoir que la réduction de 15 % pour les arrangements d'accès côté ligne ordonnée dans la décision 96-6 demeure en vigueur dans les territoires des CTI. Primus a fait observer qu'il ne serait possible de changer l'application de la réduction en question que de manière prospective c.-à-d., après la tenue d'un processus approprié incluant un avis donné à toutes les parties intéressées.

83.

Selon Bell Canada, il faudrait supprimer la réduction de 15 % pour l'accès côté ligne dans le cas des revendeurs qui exploitent dans les territoires des CTI, comme ce qui a été fait dans le territoire de Bell Canada dans l'ordonnance Télécom CRTC 96-1607 du 23 décembre 1996. L'OTA et la SATAT ont convenu avec Bell Canada que cette réduction de 15 % ne convient plus.

84.

Le Conseil confirme que, conformément à la décision 96-6, une réduction de 15 % est appliquée à la contribution de l'accès côté ligne dans le cas des raccordements entre le territoire de Bell Canada et ceux des CTI.

85.

Le Conseil souligne que l'actuel régime par minute ne sera en vigueur que pendant un an dans les territoires des CTI, conformément à la décision CRTC 2000-745 du 30 novembre 2000 intitulée Modifications au régime de contribution. Dans les circonstances, le Conseil estime que la présente réduction de 15 % devrait demeurer en vigueur dans le territoire des CTI pour le reste de 2001. Tel que noté dans l'ordonnance CRTC 2000-1159 du 19 décembre 2000, le Conseil sollicite des observations concernant un nouveau cadre de réglementation pour les petites CTI devant prendre effet le 1er janvier 2002.

 

G. Contribution c. TSAE

86.

Le Conseil fait remarquer que les ordonnances 2000-37 et 2000-38 font généralement référence aux frais de contribution. Dans leur preuve, Bell Canada a parlé de frais de TSAE alors que Primus a parlé de frais de contribution. Le Conseil a voulu clarifier la question et il a demandé aux parties de lui indiquer lequel, du taux de contribution ou du TSAE, il faudrait appliquer au trafic en question.

87.

Primus a fait valoir que, compte tenu de l'architecture de son réseau, seuls les frais de contribution devraient s'appliquer au trafic en question. Primus a déclaré que l'utilisation du groupe de fonctions A ou de raccordements côté ligne n'a jamais justifié l'application de frais de commutation et de groupement comme les frais de raccordement direct. Il s'ensuit donc à son avis que la commutation et le groupement inclus dans le TSAE des CTI ne devraient pas s'appliquer.

88.

Primus a fait remarquer que les intimées ont omis de mentionner le passage le plus pertinent de la décision 96-6 qui stipule que :

 

Le Conseil fait observer que les fonctions de commutation et de groupement et l'égalité d'accès ne sont utilisées que par les fournisseurs de services interurbains qui ont accès côté réseau au commutateur de la compagnie de téléphone. Par conséquent, le Conseil est d'avis que les frais combinés des petites indépendantes pour ce qui est de la commutation et du groupement et de l'égalité d'accès doivent être calculés en fonction du nombre de minutes de conversations de départ et d'arrivée relatif à l'accès côté réseau au commutateur et ne doivent s'appliquer qu'au trafic côté réseau.

 

Primus a fait valoir qu'il est clair d'après cet extrait que le Conseil n'a jamais prévu que le TSAE s'appliquerait intégralement aux arrangements d'accès côté ligne.

89.

De plus, Primus a soutenu que les frais de raccordement direct n'ont jamais été appliqués aux raccordements côté ligne (y compris les raccordements Centrex) dans les territoires des compagnies de téléphone titulaires du ressort du Conseil, incluant le territoire de Bell Canada. Primus a fait valoir que de toute évidence, cela n'a pas incité les AFSI à cesser d'utiliser des arrangements de raccordement direct côté réseau ou interurbain de transit.

90.

Primus a déclaré que les revendeurs de Centrex ou d'autres revendeurs qui utilisent des arrangements d'interconnexion côté ligne souscrivent au service local fourni par Bell Canada, qui inclut le service régional fourni aux territoires des CTI. Ces revendeurs paient donc déjà des taux tarifés pour utiliser le réseau local afin d'acheminer leur trafic de départ et d'arrivée, y compris un raccordement aux circonscriptions des CTI qui ont un service régional avec une circonscription de Bell Canada. Si les utilisateurs de liaisons du service régional étaient obligés de payer les frais d'interurbain direct des CTI, ils se trouveraient à payer deux fois pour le même service.

91.

Les intimées ont fait valoir que ce n'est pas la contribution mais les frais de TSAE qui doivent être payés. Autrement, selon elles, les compagnies seraient encouragées à acheminer les appels au moyen de liaisons du service régional, ce qui causerait des problèmes aux CTI.

92.

Les intimées ont fait valoir que si le Conseil acceptait le point de vue selon lequel le taux de contribution le plus bas est le taux qu'il faut appliquer à ce trafic, il est probable que d'autres entreprises, dont Bell Canada, décideraient d'acheminer le trafic de leurs clients en provenance et à destination du territoire des CTI en utilisant des liaisons du service régional pour conserver la composante interurbain direct du TSAE des membres de l'OTA. L'OTA et la SATAT ont soutenu que la situation aurait une très forte incidence négative sur leurs compagnies membres, et entraînerait une hausse du TSAE pour tenir compte de la réduction des revenus du TSAE ou encore des augmentations du tarif local.

93.

Bell Canada a fait remarquer qu'en permettant, dans la décision 96-6, la revente de liaisons du service régional dans les territoires des CTI, le Conseil estimait qu'aucune distinction ne serait faite entre les revendeurs de service régional et les revendeurs de services interurbains. Ces derniers paient le TSAE intégralement, pas seulement la composante contribution, lorsqu'ils acheminent du trafic de départ et d'arrivée dans la circonscription d'une indépendante.

94.

Le Conseil convient avec Primus, comme il l'a prévu dans l'extrait susmentionné de la décision 96-6, qu'il n'était pas dans son intention que le TSAE s'applique intégralement aux arrangements d'accès côté ligne. Le réseau Centrex des revendeurs comprend l'accès côté ligne, dans le cas présent, et des frais de raccordement direct n'ont pas été appliqués aux raccordements côté ligne.

95.

Par conséquent, le Conseil clarifie les ordonnances 2000-37 et 2000-38 et il confirme que les frais de contribution s'appliquent au trafic du service régional en question.

 

H. Rapports et facturation au regard du mécanisme de perception par minute

96.

Le Conseil souligne que la question des rapports et de la facturation doit être tranchée dans cette instance. Il a demandé aux parties de fournir : (a) une description de toutes les méthodes possibles utilisées pour calculer le trafic en question entre les AFSI et les CTI; et (b) la solution recommandée par chaque compagnie (en tenant compte du fait que le Conseil était alors à examiner le régime de perception des frais de contribution). Le Conseil fait remarquer que le régime est maintenant passé des frais par minute aux frais en pourcentage des revenus à compter du 1er janvier 2001, conformément à la décision 2000-745, mais que le mécanisme par minute est encore nécessaire pour 2001 dans le territoire des CTI, au cours de la période de transition.

97.

Les parties ont présenté quatre options : (a) le revendeur calcule et soumet ses rapports en utilisant ses propres dossiers; (b) le revendeur ou Bell Canada communique les données du système d'enregistrement des données d'appels de poste (EDAP); (c) le revendeur installe des circuits réservés; et (d) mise en oeuvre des changements au réseau de Bell Canada (la GR-317 ou le groupe de fonctions D).

98.

Distributel, l'OTA et la SATAT ont fait valoir que si les AFSI étaient la source des données, il faudrait les assujettir à une vérification externe.

99.

Comme le mécanisme par minute ne sera utilisé dans le territoire des CTI que pendant une autre année encore, soit 2001, le Conseil estime que le meilleur système de mesure est celui qui est le moins onéreux pour toutes les parties.

100.

Le Conseil conclut que la quatrième option n'est pas acceptable, étant donné les coûts importants qu'elle entraînerait, sans compter les reconfigurations de la technologie, de la gestion et du réseau pour Bell Canada, d'où l'impossibilité d'atteindre l'objectif susmentionné. Le Conseil conclut que la troisième option (le revendeur installe des circuits réservés) n'est ni pratique ni efficace pour les revendeurs.

101.

Le Conseil fait remarquer que de l'avis de Bell Canada et de Primus/Distributel, la deuxième option (le revendeur calcule les minutes en utilisant les données EDAP) serait pratique, et que cette option est conforme à la décision 96-6. Le Conseil ordonne aux revendeurs, comme première solution de rechange, de calculer les minutes en utilisant les données EDAP provenant du commutateur de Centrex applicable et de communiquer ces minutes directement à la CTI.

102.

Toutefois, comme deuxième solution de rechange, dans le cas où les revendeurs ne voudraient pas utiliser les données EDAP, le Conseil leur ordonne de choisir la première option (les revendeurs calculent les minutes en utilisant leurs propres registres) et communiquent les données directement à la CTI. Distributel a supposé que la plupart des AFSI au commutateur pourraient obtenir, sur les appels, des données qui renferment suffisamment d'éléments pour déterminer quels appels ont utilisé des liaisons du service régional en provenance ou à destination des diverses CTI, et pour compter le total des minutes par CTI. Distributel a indiqué que seule Bell Canada aurait l'information nécessaire pour dresser une liste complète des AFSI qui utilisent ses liaisons du service régional pour acheminer le trafic de départ et d'arrivée dans les territoires des CTI. Encore une fois, cette option est conforme à la décision 96-6.

103.

En dernier lieu, comme troisième alternative, si les revendeurs estiment que ni la première ni la deuxième option ne sont acceptables, le Conseil leur ordonne de bloquer le trafic en question en provenance et à destination du territoire de la CTI, comme Primus l'a déjà fait, tel que décrit dans l'ordonnance 2000-37.

104.

Si les revendeurs choisissent la première ou la deuxième option ci-dessus, il leur est enjoint de rencontrer le personnel de la CTI pertinente et de Bell Canada dans les 30 jours de la date de la présente ordonnance pour négocier des procédures de vérification mutuellement acceptables basées sur les suggestions faites au cours du processus.

 

I. Nouvelles pages tarifaires

105.

Primus a fait valoir que la mise en oeuvre de l'une ou l'autre des approches proposées pour calculer le trafic obligera Bell Canada et les CTI à modifier leurs tarifs afin de les appliquer aux revendeurs. De plus, pour assurer l'équité en matière de concurrence, la méthode adoptée en bout de ligne devra s'appliquer également à tous les revendeurs qui utilisent des liaisons du service régional, et non pas seulement à Primus et à Distributel.

106.

Bell Canada a fait remarquer que les directives du Conseil, exposées dans la décision 96-6, tiennent clairement compte de ces questions. Dans cette décision, le Conseil a décrit une approche administrative simple pour remédier au problème d'évitement inhérent à l'utilisation des liaisons régionales locales pour acheminer le trafic dans le territoire de la CTI ainsi que pour examiner en détail l'applicabilité des TSAE des CTI. Des précisions supplémentaires seraient les seuls changements tarifaires qu'il conviendrait sans doute d'apporter, afin de réduire les risques d'agiotage en raison d'une mauvaise interprétation intentionnelle ou encore de renforcer le pouvoir des CTI de poursuivre les parties qui continuent d'ignorer les directives du Conseil.

107.

Le Conseil conclut que ses directives, données dans la décision 96-6 et les ordonnances, et précisées dans la présente ordonnance, répondent clairement aux questions en cause : les AFSI doivent s'inscrire auprès de la CTI à laquelle ils acheminent le trafic, lui fournir des données sur le trafic et lui verser la contribution appropriée. Bell Canada n'est donc pas obligée de modifier ses tarifs.

 

J. L'estimation par le Conseil de la responsabilité des requérantes au chapitre du paiement de la contribution aux intimées conformément à la présente ordonnance

108.

En se fondant sur la preuve produite au cours de l'instance qui a donné lieu aux ordonnances 2000-37 et 2000-38, de même que sur les précisions contenues dans la présente ordonnance, le Conseil estime que Primus devra payer environ 35 k$ à Hurontario pour la période de janvier 1997 à septembre 1998. Distributel devra verser environ 24 k$ à Warwick pour la période de septembre 1997 à avril 1999 et un autre montant pour la période subséquente, étant donné qu'elle n'a pas bloqué le trafic.

 

Secrétaire général

 

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