Ordonnance Télécom CRTC 98-1186

Ordonnance Télécom

Ottawa, le 26 novembre 1998
Ordonnance Télécom CRTC 98-1186
Le 23 octobre 1998, la BC TEL a déposé une demande en vue de faire approuver des révisions tarifaires à l'article 32 du Tarif général, de manière à prolonger la promotion de lignes supplémentaires jusqu'au 30 avril 1999.
No de dossier : 8638-C12-19/98
1.Le 5 août 1998, les personnes intéressées ont été invitées à présenter des observations sur l'exigence établie à l'alinéa 22 a) de l'ordonnance Télécom CRTC 98-626 du 26 juin 1998 (l'ordonnance 98-626) et au paragraphe 101 (l) de la décision Télécom CRTC 98-8 du 30 juin 1998 intitulée Concurrence des services téléphoniques payants locaux (la décision 98-8). Plus particulièrement, les personnes ont été invitées à formuler des observations sur ce qui suit :
a) Les claviers qui n'ont pas de boutons-poussoirs plus gros et plus espacés que ceux d'un appareil ordinaire, mais qui ont un « point » en relief sur le bouton-poussoir numéro 5 ou des lettres et numéros gravés sur tous les boutons-poussoirs, offrent-ils malgré tout un accès équitable aux personnes ayant une déficience visuelle?
b) L'alinéa 22 a) de l'ordonnance 98-626 devrait-il être révisé afin de supprimer la mention de « plus gros boutons-poussoirs sur le clavier, plus espacés que les appareils ordinaires », de manière que seul un clavier plus tactile soit obligatoire?
2.Le Conseil a reçu des observations de la Paytel Canada, Inc. (la Paytel), la Fundy Cable Ltd./Ltée (la Fundy), la Protel Inc. (la Protel), la DKN Entreprise/Enterprises (la DKN), la Independent Payphone Management (la IPM), la Canada Payphone Corporation (la CPC), le Centre de ressources Stentor Inc. (Stentor), le British Columbia Public Interest Advocacy Centre, au nom de la BC Old Age Pensioners' Organization, du Council of Senior Citizens' Organizations of BC, des federated anti-poverty groups of BC, de la Senior Citizens' Association of BC, du West End Seniors' Network, de la End Legislated Poverty, de la BC Coalition for Information Access et de la Tenants Rights Action Coalition (les BCOAPO et autres), Chris et Marie Stark (les Stark), The Payphone Connection, la BC Coalition of People with Disabilities (la Coalition) et la Goldiphones. Le Conseil a aussi reçu des observations en réplique de Stentor, de la Paytel, de la CPC et des Stark.
POSITION DES PARTIES
3.La Paytel, la Fundy, la Protel, la DKN, la IPM, la CPC et Stentor ont fait valoir que l'ordonnance 98-626 devrait être modifiée pour plusieurs motifs, notamment ce qui suit :
a) le seul téléphone payant qui satisfait actuellement aux exigences de l'ordonnance 98-626 est l'appareil Millennium, fabriqué par la Northern Telecom Limited;
b) les autres fabricants de téléphones payants sont situés aux États-Unis, et leurs appareils sont conformes aux exigences réglementaires américaines, notamment un point en relief sur le bouton-poussoir numéro 5 et un clavier ordinaire. Les fournisseurs de services de téléphones payants concurrents (les FSTPC) entendent utiliser ces téléphones payants pour le marché canadien, faisant remarquer que la plupart des téléphones payants Millennium n'ont pas de point sur le bouton-poussoir numéro 5. Le point en relief sur le bouton-poussoir numéro 5 donnerait un accès équitable aux personnes ayant une déficience visuelle;
c) les organisations qui examinent la question de l'accessibilité pour les personnes ayant une déficience visuelle, notamment l'Institut national canadien des aveugles (l'INCA), favorisent un point en relief sur le bouton-poussoir numéro 5 d'un clavier ordinaire; et
d) la subjectivité de l'alinéa 22 a) pourrait aboutir à l'élaboration de claviers de tailles variées, ce qui créerait encore plus de confusion pour les personnes ayant une déficience visuelle.
4.Les BCOAPO et autres, les Stark et la Coalition ont fait valoir que l'ordonnance 98-626 ne devrait pas être modifiée.
5.Les BCOAPO et autres, après consultation avec l'INCA, ont déclaré que le point sur le bouton-poussoir numéro 5 constitue la caractéristique la plus importante pour les personnes ayant une déficience visuelle. Les BCOAPO et autres ont aussi fait remarquer que l'INCA estime que de plus gros et différents chiffres et lettres sur les claviers pourraient également aider. L'INCA a aussi avisé les BCOAPO et autres que des chiffres gravés sur le clavier n'offrent presque pas d'aide aux personnes ayant une déficience visuelle parce qu'ils sont extrêmement difficiles à lire, tandis que de plus gros boutons plus espacés pourraient entraîner plus de confusion pour certaines personnes ayant une déficience visuelle qui sont habituées aux claviers ordinaires. Les BCOAPO et autres ont également déclaré que la Federal Communications Commission des États-Unis est en voie d'élaborer des lignes directrices pour faire en sorte que les téléphones payants soient de design universel normalisé, afin que le plus grand nombre possible de personnes puissent s'en servir.
6.Toutefois, les BCOAPO et autres ont fait valoir que les organisations représentant les handicapés physiques sont en faveur de plus gros claviers plus espacés, qui aideraient grandement les personnes dont la dextérité est restreinte. Les BCOAPO et autres ont ajouté que les parties qui sont en faveur de modifier l'ordonnance 98-626 n'ont pas prouvé que les téléphones payants qu'ils comptent utiliser continueraient d'accommoder les handicapés physiques dans la même mesure que des téléphones payants conformes à toutes les garanties établies dans l'ordonnance 98-626.
7.Les Stark ont pour leur part soutenu que les parties qui veulent faire modifier l'ordonnance 98-626 devraient être tenues de prouver, avec études et tests à l'appui, que d'autres types de téléphones payants satisfont les besoins des personnes handicapées. Selon les Stark, il faudrait modifier l'ordonnance 98-626 de manière à exiger que les FSTPC manifestent leur volonté et leur capacité de fournir des téléphones payants qui accommodent les personnes ayant une déficience visuelle et les personnes ayant d'autres types de déficience avant de pouvoir offrir le service de téléphones payants.
8.La Coalition, pour sa part, a déclaré qu'elle appuie les observations formulées par les BCOAPO et autres et les Stark. Elle a aussi demandé au Conseil d'élargir la portée de son instance de manière à solliciter un plus grand apport de la part des personnes handicapées.
DÉCISION DU CONSEIL
9.Le Conseil estime que l'alinéa 22 a) de l'ordonnance 98-626 est imprécis. Bien que l'ordonnance 98-626 exige que les téléphones payants soient dotés de plus gros boutons-poussoirs plus espacés que les appareils ordinaires, elle ne définit pas l'expression « appareils ordinaires ». Il devient ainsi plus difficile pour les fabricants, les fournisseurs de téléphones payants et les consommateurs, y compris les personnes handicapées, d'interpréter l'alinéa 22 a) avec certitude. Selon le Conseil, l'ambiguïté de l'alinéa 22 a) pourrait aboutir au déploiement de claviers qui ne servent pas le mieux les besoins des personnes handicapées.
10.Le Conseil estime que les arguments concernant la taille des claviers posent des préoccupations et des difficultés pour ce qui est d'établir l'équilibre entre les besoins tout aussi importants, mais parfois divergents, de personnes ayant divers types de déficience. Le Conseil prend note des déclarations selon lesquelles, bien que de plus gros boutons sur le clavier plus espacés puissent aider les personnes dont la dextérité est restreinte, une telle caractéristique pourrait nuire à l'accès pour certaines personnes ayant une déficience visuelle qui seraient habituées aux claviers ordinaires et pour qui de plus gros claviers plus espacés entraîneraient de la confusion. Ces déclarations donnent également à entendre que des claviers modifiés pourraient ne pas offrir une aide comparable à celle d'un point en relief, par exemple. En outre, la subjectivité de l'alinéa 22 a) pourrait entraîner l'utilisation de claviers de diverses tailles, ce qui pourrait aussi se traduire par de la confusion pour les personnes ayant une déficience visuelle. Selon le Conseil, le dossier de l'instance prouve la nécessité d'examiner plus en profondeur quelles caractéristiques des claviers des téléphones payants conviendraient, en vue d'établir des normes pertinentes.
11.Le Conseil estime que, dans les circonstances actuelles, l'alinéa 22 a) donne lieu à beaucoup d'incertitude, au détriment possible des personnes handicapées ainsi que des fournisseurs de téléphones payants titulaires et concurrents. Il estime également que le maintien d'une règle aussi ambiguë ne sert pas l'intérêt public. Par conséquent, le Conseil estime que l'alinéa 22 a) doit être supprimé de l'ordonnance 98-626 et que d'autres exigences relatives aux claviers ne doivent pas être imposées avant que des normes convenables aient été élaborées.
12.À cet égard, le Conseil estime qu'il convient de demander à l'Association canadienne de normalisation (la CSA) d'examiner les caractéristiques techniques et ergonomiques qui devraient faire partie intégrante des téléphones payants, en particulier pour ce qui est des claviers, de manière à satisfaire le mieux les besoins des personnes handicapées. Selon le Conseil, la CSA possède l'expertise voulue et est bien dotée pour élaborer des normes satisfaisant aux besoins des personnes ayant divers types de déficience. Le Conseil fait remarquer que la CSA tient compte de l'apport d'un vaste éventail d'intervenants, par exemple les intervenants de l'industrie et les consommateurs, y compris les personnes handicapées. La CSA possède également la capacité de surveiller et d'examiner les développements dans d'autres compétences, comme aux États-Unis, dans le choix d'une norme ou d'un jeu de normes.
13.Par conséquent, le Conseil a écrit aujourd'hui à la CSA pour lui demander d'élaborer une norme ou un jeu de normes concernant les caractéristiques qui devraient faire partie intégrante des téléphones payants, en particulier pour ce qui est des claviers, de manière à satisfaire le mieux les besoins des personnes handicapées.
14.Le Conseil fait remarquer que les personnes handicapées bénéficieront des autres caractéristiques des téléphones payants prescrites dans l'ordonnance 98-626. Pour ce qui est des claviers mêmes, tant qu'une norme ou un jeu de normes ne seront pas en place, le Conseil s'attendra à ce que les intervenants de l'industrie déploient tous les efforts voulus pour fournir des téléphones payants à claviers plus tactiles qui tiennent compte des besoins des personnes ayant divers types de déficience.
15.Le Conseil fait remarquer qu'une fois qu'une norme ou un jeu de normes seront en place, les fournisseurs de téléphones payants seront contraints de les respecter comme condition de fourniture du service.
16.Le Conseil est aussi préoccupé par le fait que l'ordonnance 98-626 et la décision 98-8, tel qu'elles s'appliquent à l'heure actuelle, puissent compromettre le déploiement de téléphones payants utilisant des techniques de rechange, notamment le sans fil. Par exemple, le Conseil constate qu'il y a actuellement des téléphones payants dans les avions, les trains, les bateaux et les limousines. Des téléphones payants sans fil peuvent aussi être installés dans des chantiers très isolés non desservis par des installations sur ligne. Le Conseil constate que, dans certains cas, il n'est peut-être pas physiquement ou financièrement possible d'exiger que toutes les fonctionnalités établies au paragraphe 22 de l'ordonnance 98-626 soient fournies.
17.Le Conseil fait remarquer que l'ordonnance 98-626 exige que les fournisseurs de téléphones payants installent des appareils qui fournissent toutes les fonctionnalités établies dans cette ordonnance, à moins qu'ils puissent prouver que la conformité avec toutes les exigences leur occasionnerait un tort indu. Le Conseil ajoute que les parties ont aussi le loisir de demander une exemption des exigences de l'ordonnance 98-626 relatives aux téléphones payants, dans des circonstances autres qu'un tort indu, sous réserve que la non-conformité avec certaines ou la totalité de ces exigences ne contrevienne pas au paragraphe 27(2) de la Loi sur les télécommunications.
18.Le Conseil fait de plus remarquer que la IPM a demandé que l'inscription de la CPC à titre de FSTPC soit suspendue d'ici à ce que le Conseil ait rendu une décision sur l'à-propos de modifier l'alinéa 22 a). Compte tenu de la présente décision, le Conseil estime que la demande de la IPM visant à suspendre l'inscription de la CPC est désormais caduque et il la rejette.
19.Le Conseil fait remarquer qu'il a reçu des observations de Stentor, exposant l'interprétation de ses compagnies membres concernant ce qui pourrait de manière raisonnable et pratique constituer un « tort indu » dans la fourniture de téléphones publics payants. Il a aussi reçu de la Norouestel Inc. une demande visant à être exemptée de l'application du paragraphe 22 de l'ordonnance 98-626. Le Conseil estime que ces demandes débordent le cadre de l'instance actuelle et, par conséquent, il les traitera séparément.
20.Compte tenu de ce qui précède, le Conseil ordonne que l'alinéa 22 a) de l'ordonnance 98-626 soit supprimé.
Secrétaire général
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