ARCHIVÉ -  Décision CRTC 93-171

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Décision

Ottawa, le 28 mai 1993
Décision CRTC 93-171
Radio Beauséjour Inc.
Shédiac (Nouveau-Brunswick) - 921768800Nouvelle radio communautaire de langue française
À la suite d'une audience publique tenue à Moncton à partir du 17 février 1993, le Conseil approuve la demande de licence de radiodiffusion visant l'exploitation à Shédiac, à la fréquence 89,5 MHz (canal 208B), d'une entreprise de programmation de radio FM communautaire de langue française d'une puissance apparente rayonnée de 38 000 watts.
Conformément à l'avis public CRTC 1992-38 du 29 mai 1992 intitulé "Politiques relatives à la radio communautaire et à la radio de campus", le Conseil attribuera une licence de station de radio FM communautaire de Type B. Cette licence expirera le 31 août 1999 et sera assujettie aux conditions stipulées dans la présente décision et dans la licence qui sera attribuée.
Le Conseil s'attend à ce que la radio communautaire élabore des formes innovatrices d'émissions axées sur la collectivité, qui contribuent à la diversité des services radiophoniques offerts à une collectivité. Il s'attend également à ce que la radio communautaire mette l'accent sur tous les aspects de la collectivité en offrant des émissions traitant de questions qui touchent tous ses membres ainsi que d'autres qui portent sur des questions intéressant des éléments particuliers de la collectivité, comme les quartiers, les villes et villages avoisinants et les groupes aux intérêts particuliers. Le projet de station de radio communautaire soumis par la Radio Beauséjour Inc. vise à desservir la population francophone acadienne du sud-est du Nouveau-Brunswick dispersée entre la région urbaine de Moncton-Dieppe et de nombreuses collectivités rurales des comtés d'Albert, de Kent et de Westmorland. Cette région, qui compte plus de 70 000 francophones, n'est desservie par aucune station de radio locale de langue française sauf pour ce qui est de la région immédiate de Moncton où on reçoit le service de la station de campus/communautaire de langue française CKUM-FM Moncton. On peut toutefois y capter les services radiophoniques régionaux des réseaux de langue française et de langue anglaise de la Société Radio-Canada, CBAF et CBA Moncton, ainsi que les signaux de CKCW, CJMO-FM et CFQM-FM, une station AM et deux stations FM privées de langue anglaise.
Radio Beauséjour Inc. veut se rendre accessible non seulement à la population de Moncton-Dieppe mais aussi à la population rurale francophone de la région du sud-est du Nouveau-Brunswick en orientant une bonne partie de sa programmation vers celle-ci. Questionnée à l'audience sur son engagement à cet égard, la requérante a souligné que son Conseil d'administration sera composé de représentants de chaque région du sud-est et ses membres auront pour mandat de voir au respect de l'orientation régionale. Des comités de surveillance seront d'ailleurs mis sur pied pour assurer cette orientation régionale.
En plus d'offrir une alternative au mandat extra-régional du réseau de la Société Radio-Canada, la requérante a expliqué que son service différerait de celui de CKUM-FM qui s'adresse en tout premier lieu à la population étudiante et ensuite à la population urbaine de la région immédiate de Moncton. La requérante a par ailleurs fait part au Conseil des rencontres qu'elle a tenues avec CKUM-FM pour discuter de la complémentarité de leur service respectif et du partage éventuel de certaines de leurs ressources, que ce soit l'échange de nouvelles, des sessions conjointes de formation des bénévoles, l'organisation de spectacles et leur promotion, la vente conjointe de forfaits publicitaires, etc.
En approuvant la présente demande, le Conseil a pris en considération toutes les données contenues au dossier de cette instance, les résultats d'une étude de marché soumise par la requérante ainsi que l'appui manifesté par la population pour ce service radiophonique local de langue française. Le Conseil a tenu compte en particulier des ressources disponibles dans le milieu et des projets de financement de la requérante.
Au chapitre du financement, le projet tel que soumis par la Radio Beauséjour Inc. prévoit des coûts en immobilisation de quelque 406 796 $. La requérante a indiqué que ces coûts seront défrayés en partie par des subventions ou contributions en provenance de différentes sources, dont certaines de sources gouvernementales, et en partie par des dons, des contributions de municipalités et d'organismes du milieu et une campagne de financement annuelle. Le Conseil note qu'au moment de l'audience publique, la Radio Beauséjour Inc. comptait environ 2 000 membres et il est convaincu, compte tenu de ce qui précède et de la documentation au dossier, que la requérante disposera des sommes nécessaires et d'un appui communautaire suffisant pour mettre en oeuvre son projet.
Pour ce qui est des recettes d'exploitation, la Radio Beauséjour Inc. a prévu pour la première année d'exploitation des recettes totales de 512 128 $, dont 250 000 $ de recettes publicitaires locales. Les autres sources de recettes proviendraient de programmes gouvernementaux d'aide à la formation et à la création d'emplois, de la vente de cartes de membre et d'activités bénéfices diverses. Le Conseil note la grande volonté d'autofinancement dont fait preuve la requérante. Il l'encourage à cet égard à diversifier le plus possible ses sources de financement au fil des ans. Le Conseil fait état des interventions présentées à l'audience par l'Atlantic Stereo Ltd., titulaire de la station CJMO-FM Moncton, la Maritime Broadcasting System, titulaire des stations CKCW et CFQM-FM Moncton et par l'Atlantic Association of Broadcasters. Le Conseil fait également état des interventions écrites soumises par l'Association canadienne des radiodiffuseurs (l'ACR), CFBC/CJYC, la Fundy Cable TV Ltd./Ltée, la Radio Atlantic Group et par la Radio One Ltd. qui s'opposent à la venue d'une nouvelle station dans le marché. Les intervenantes, à l'exception de CFBC/CJYC et de la Fundy Cable TV Ltd./Ltée. font part de leurs préoccupations à l'égard notamment de la puissance d'émission et du rayonnement prévu de la station. Tout en ne s'opposant pas à l'implantation d'un service de radio de langue française pour desservir les collectivités francophones du sud-est du Nouveau-Brunswick, les intervenantes disent craindre que la nouvelle station ne fragmente davantage l'assiette publicitaire de la région immédiate de Moncton. Elles suggèrent donc l'utilisation de paramètres techniques plus modestes.
La Radio Beauséjour Inc. a fait valoir lors de l'audience publique que le projet retenu présente le plus d'avantages, autant du point de vue économique que pratique. Elle a mentionné notamment que le fait de pouvoir diffuser à partir du site d'antenne exploité par la Société Radio-Canada à Lutes Mountain lui permettra d'offrir un signal de bonne qualité dans toutes les localités situées au sud-est du Nouveau-Brunswick. Elle a noté également que les économies substantielles découlant du partage du site d'antenne de Radio-Canada contribueront beaucoup à la viabilité de son projet. En ce qui a trait à la fragmentation de l'assiette publicitaire, la requérante a fait remarquer que la santé financière globale du marché de Moncton est enviable et qu'il n'y a donc pas de quoi s'inquiéter de l'impact que la Radio Beauséjour pourrait avoir sur les radiodiffuseurs existants.
En étudiant ces interventions le Conseil a pris en considération la bonne situation financière du marché de Moncton et l'existence probable d'un potentiel publicitaire inexploité à Moncton. Il est d'avis que la puissance de la station ne devrait pas être réduite pour des motifs économiques et que la légitimité des paramètres techniques proposés devrait être déterminée principalement en fonction de son mandat de desservir son marché cible dans le sud-est du Nouveau-Brunswick. Il fait d'ailleurs remarquer qu'il y a plus de francophones vivant en milieu rural qu'à Moncton-Dieppe, que la requérante entend orienter sa programmation en conséquence et qu'elle a choisi d'installer son studio à Shédiac plutôt qu'à Moncton, ce qui atteste de ses intentions à cet égard.
Considérant également la bonne situation financière du marché radiophonique de la région de Moncton, au sein duquel l'ensemble des stations ont généré des bénéfices nets avant impôt et intérêts situés de façon régulière au-dessus de la moyenne canadienne ces dernières années, ainsi qu'au-dessus de la moyenne du Nouveau-Brunswick, le Conseil estime que l'implantation de ce projet de station de radio communautaire de langue française ne saurait mettre en danger la survie des autres services de radio de la région ou entraîner une fragmentation indue de l'auditoire que ces derniers desservent.
Le Conseil note l'intention de la requérante d'établir un second studio à Saint-Louis-de-Kent, lorsque sa situation financière le lui permettra. Il note en outre la possibilité envisagée par celle-ci d'établir un émetteur de faible puissance dans ce secteur si la qualité du signal de la station source ne s'avérait pas satisfaisante.
La licence est assujettie à la condition que la requérante ne diffuse pas plus de 6 minutes de publicité au cours de chaque heure de diffusion et qu'en moyenne, elle ne diffuse pas plus de 4 minutes de publicité par heure de diffusion, pour un total cumulatif n'excédant pas 504 minutes de publicité par semaine, conformément à la politique sur la radio communautaire pour les stations de type B. Le Conseil note la proposition de la requérante visant la diffusion de 105 heures d'émissions produites localement par semaine de radiodiffusion ainsi que la diffusion d'émissions la nuit.
Le Conseil note aussi la proposition de la requérante de diffuser un minimum de 4,5 % du total de la programmation musicale en musique de catégorie 3 (musique traditionnelle et pour auditoire spécialisé).
Au chapitre du développement des talents canadiens, la requérante a indiqué qu'elle entend donner accès à ses studios aux artistes locaux pour la production de bandes démos. Elle entend également accorder une importance de premier ordre à la diffusion de leur musique, de leurs spectacles ou de leurs concerts. La requérante prévoit en outre produire elle-même des spectacles afin de promouvoir et mettre en valeur les talents locaux.
Dans l'avis public CRTC 1992-59 du 1er septembre 1992 intitulé "Mise en oeuvre d'une politique d'équité en matière d'emploi", le Conseil annonçait que les pratiques des radiodiffuseurs à cet égard feraient dorénavant l'objet d'un examen du Conseil. Il est d'avis qu'une radio communautaire devrait être particulièrement attentive à ce sujet et ce, afin de refléter pleinement la collectivité qu'elle dessert. Le Conseil encourage donc la requérante à tenir compte des questions d'équité en matière d'emploi lors de l'embauche du personnel et en ce qui a trait aux autres aspects de la gestion des ressources humaines.
La licence est assujettie à la condition que la requérante respecte les lignes directrices relatives à la représentation non sexiste des personnes, exposées dans le "Code d'application concernant les stéréotypes sexuels à la radio et à la télévision" de l'ACR, telles que modifiées de temps à autre et approuvées par le Conseil.
La licence est également assujettie à la condition que la requérante respecte les dispositions du Code de la publicité radio-télévisée destinée aux enfants publié par l'ACR, telles que modifiées de temps à autre et approuvées par le Conseil. Le ministère des Communications (le MDC) a avisé le Conseil que cette demande est techniquement acceptable sous condition et qu'il n'attribuera de Certificat de radiodiffusion que lorsqu'il aura été établi que les paramètres techniques proposés ne brouilleront pas de façon inacceptable les services aéronautiques NAV/COM.
Conformément au paragraphe 22(1) de la Loi sur la radiodiffusion, le Conseil n'attribuera la licence, et l'autorisation accordée par la présente ne pourra être mise en oeuvre, qu'au moment où le MDC aura confirmé par écrit que ses exigences techniques ont été satisfaites et qu'un Certificat de radiodiffusion sera attribué.
La licence est assujettie à la condition que la construction de l'entreprise soit terminée et que cette dernière soit en exploitation dans les douze mois de la date de la confirmation du MDC mentionnée au paragraphe précédent ou, lorsque la requérante en fait la demande au Conseil au cours de cette période et lui démontre qu'elle ne peut en commencer l'exploitation avant la fin de ce délai et qu'une prorogation sert l'intérêt public, dans le délai additionnel que le Conseil aura approuvé par écrit.
La Société Radio-Canada a soumis une intervention écrite dans laquelle elle s'oppose à l'utilisation de la fréquence proposée par la requérante. La Société explique qu'étant donné que la requérante ne lui a pas soumis de document technique, conformément aux procédures établies par le MDC, elle n'a pas été en mesure de déterminer précisément l'impact que la station proposée à Shédiac aurait sur le rayonnement existant de CBHN-FM New Glasgow. Le Conseil note que le MDC a informé la Société que du point de vue technique, il ne prévoit aucun problème et qu'il n'a donc pas d'objection à l'utilisation de la fréquence proposée.
La Conseil a pris en considération les interventions présentées, lors de l'audience publique, en faveur du projet, par la Ville de Shédiac, le Congrès Mondial Acadien, la Société des acadiens et acadiennes du Nouveau-Brunswick, l'Association des radios communautaires acadiennes du Nouveau-Brunswick, l'Alliance des radios communautaires du Canada Inc. ainsi que les interventions écrites soumises par l'Association acadienne des artistes professionnel.le.s du Nouveau-Brunswick, l'Association canadienne d'éducation de langue française, la Fédération de la jeunesse canadienne-française Inc. (FJCF), la Fédération des communautés francophone et acadienne du Canada et les Médias acadiens universitaires Inc. (CKUM-FM).
Le Secrétaire général
Allan J. Darling

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