ARCHIVÉ -  Décision Télécom CRTC 92-11

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Décision Télécom

Ottawa, le 11 juin 1992
Décision Télécom CRTC 92-11
REQUÊTE PRÉSENTÉE PAR LE STT - STATUT DES REVENDEURS EN VERTU DE LA LOI SUR LES CHEMINS DE FER
I HISTORIQUE
Dans la décision Télécom CRTC 85-19 du 29 août 1985 intitulée Concurrence intercirconscription et questions connexes (la décision 85-19), le Conseil a maintenu que les revendeurs n'étaient pas des "compagnies" au sens de l'article 334 de la Loi sur les chemins de fer. Le 11 avril 1991, le Syndicat des travailleurs en télécommunications (le STT) a déposé une requête conformément à l'article 66 de la Loi nationale sur les attributions en matière de télécommunications (la LNAMT) demandant que le Conseil révise et modifie cette conclusion. Le 19 juillet 1991, le Conseil a publié l'avis public Télécom CRTC 1991-55 invitant les parties intéressées à formuler des observations sur la requête du STT.
Dans la décision Télécom CRTC 79-1 du 2 février 1979 intitulée Requête de Bell Canada en vue de réviser la partie de la décision Télécom CRTC 78-7 du 10 août 1978 qui traite du projet de service téléphonique de l'Arabie Saoudite, le Conseil a adopté les critères lui permettant d'établir s'il y a lieu de réviser et de modifier ses décisions en matière de télécommunications. Ces critères exigent que, pour que le Conseil puisse exercer ses pouvoirs en vertu de l'article 66 de la LNAMT, le requérant démontre qu'il existe, prima facie, un ou plusieurs des critères suivants :
1. une erreur de droit ou de fait;
2. une modification fondamentale des circonstances ou des faits depuis la décision;
3. le défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans la procédure initiale;
4. un nouveau principe découlant de la décision.
En outre, nonobstant l'absence de preuve, prima facie, qu'un des critères susmentionnés n'ait été rencontré, il serait également possible au Conseil de déterminer qu'il y avait un doute réel quant à la rectitude de sa décision originale et qu'en conséquence, une réévaluation était légitime. Ce n'est pas là cependant un cinquième critère, mais plutôt un état du pouvoir discrétionnaire résiduel qui existe dans l'article 66.
Le STT a fait valoir dans sa requête que le Conseil erré en droit de trois façons : (1) en ne statuant pas que les revendeurs relèvent de l'autorité législative du Parlement; (2) en interprétant la définition de "compagnie" comme se limitant aux "compagnies ... qui peuvent tenir en service un réseau de téléphone ou de télégraphe", supprimant ainsi en fait les mots "une ligne ou" de la définition de la Loi sur les chemins de fer; et (3) en basant sa décision juridique sur des questions de politique.
Le STT a en outre soutenu qu'il y a eu modification fondamentale descirconstances depuis la décision 85-19. Plus spécifiquement, le STT a attiré l'attention sur (1) le jugement de la Cour suprême du Canada dans la cause AGT c. CRTC, [1989] 2 R.C.S. 225, (2) l'essor de l'industrie de la revente depuis 1985 et (3) la décision de la Cour fédérale d'appel dans la cause STT c. CRTC et CNCP, [1989] 2 C.F. 280.
À l'appui de son argument, le STT a déposé une copie de sa réponse à la demande de renseignements Bell(CALL-NET)1ermai89-1Revente (Call-Net 1), déposée par Bell Canada (Bell) dans l'instance qui a abouti à la décision Télécom CRTC 90-3 du 1er mars 1990 intitulée Revente et partage des services téléphoniques de ligne directe (la décision 90-3). Cette réponse fournit une description des installations locales et intercirconscriptions de Bell ainsi que les étapes de leur utilisation pour acheminer un appel intercirconscription. Le STT a également déposé des documents promotionnels et autres de quatre revendeurs, nommément l'ITN Corporation (l'ITN), la Cam-Net Communications Inc. (la Cam-Net), la Call-Net Telecommunications Ltd. (la Call-Net) et Optinet Telecommunications (Optinet), fournissant des renseignements sur les services offerts par ces revendeurs ainsi qu'une description de certaines de leurs activités.
Le Conseil a reçu des observations à l'appui de la requête du STT du Gouvernement de l'Alberta, du Gouvernement de la Saskatchewan, de l'Alberta Government Telephones Commission, de Bell, de la British Columbia Old Age Pensioners' Organization et d'autres groupes, de la Compagnie de téléphone de la Colombie-Britannique, de la Maritime Telegraph and Telephone Company Limited, de The Island TelephoneCompany Limited ainsi que de la Newfoundland Telephone Company Limited.
Le Conseil a reçu des observations à l'encontre de la requête du STT de l'ACC Long Distance Ltd., de la British Columbia Systems Corpora-tion, de la Call-Net, de l'Alliance canadienne des télécommunications de l'entreprise (l'ACTE), de la Cam-Net, des Communications par satellite canadien Inc., de la Competitive Telecommunications Alliance (la CTA), de la fonorola Inc., des Motorola Information Systems, de la Rogers Cable T.V. Limited, de Téléglobe Canada Inc. et d'Unitel Communications Inc.
II CONCLUSIONS
Lorsqu'il a tiré sa conclusion dans la décision 85-19 selon laquelle les revendeurs ne sont pas des "compagnies", le Conseil s'est appuyé grandement sur l'argument juridique avancé par le Congrès canadien des communications industrielles et d'autres groupes (le CCCI et autres) dans l'instance qui a abouti à la décision Télécom CRTC 84-18 du 12 juillet 1984 intitulée Services améliorés (la décision 84-18). Se fiant à diverses interprétations judiciaires des termes "télégraphe" et "téléphone" et à l'interprétation du Conseil des mots "réseau de télégraphe et de téléphone" de la décision Télécom CRTC 79-11 du 17 mai 1979 intitulée Les Télécommunications du CNCP : Interconnexion avec Bell Canada, le CCCI et autres ont conclu que l'expression "réseau de téléphone" se limite généralement à un réseau conçu pour la transmission du trafic public de messages parlés en tant que service public, utilisant des droits de passage publics, c'est-à-dire un système capable d'assurer "le bonvieux service téléphonique". Le Conseil a déclaré dans la décision 84-18 qu'il était d'accord avec le CCCI et autres que sa compétence ne s'étendait qu'aux compagnies considérées comme exploitant une entreprise téléphonique. Il a donc conclu qu'il n'était pas tenu de réglementer les fournisseurs de services utilisant des services de télécommunications sous-jacents aux fins de la prestation de leurs offres de services. Dans la décision 85-19, le Conseil s'est fondé sur ce raisonnement pour conclure qu'il n'était pas tenu de réglementer les revendeurs.
En examinant la requête du STT, le Conseil a réexaminé son raisonnement antérieur à la lumière de la preuve spécifique déposée dans la présente instance. Il a d'abord étudié la nature des systèmes actuellement exploités par les revendeurs, notamment les systèmes décrits dans la requête du STT.
Le Telephony's Dictionary, deuxième édition, définit le mot "système" comme un [TRADUCTION] "regroupement d'employés, de machines et de méthodes organisés pour accomplir une série de fonctions particulières". "Système" dans le Telecommunications Dictionary and Fact Book (Centre for Communications Management, Inc., 1984) désigne [TRADUCTION] "un ensemble d'équipements, d'employés, de procédures et autres installations organisés pour remplir une fonction ou une série de fonctions spécifiques".
Le Conseil est d'avis que les revendeurs comme ceux qui sont décrits dans la requête du STT ont des systèmes qui consistent en des lignes d'accès louées ou leur appartenant qui relient, soit directement soit par voie du réseau téléphonique public commuté (le RTPC), les locaux de l'abonné au commutateur du revendeur qui, lui, est raccordé à des installations de transmission louées. Ces installations de transmission sont raccordées à des installations locales qui acheminent ensuite l'appel à destination, comme le montrent d'ailleurs les diagrammes fournis dans la réponse de Bell à la demande de renseignements Call-Net 1.
Le Conseil a en outre examiné si un tel système est conçu pour la transmission du trafic public de messages parlés en tant que service public.
Les types de services de télécommunications fournis par les quatre revendeurs étaient décrits comme suit dans les documents déposés par le STT.
La formule de commande de l'ITN indique que ses abonnés peuvent obtenir "l'IA à déclenchement par boucle", "l'IA et le service local à déclenchement par boucle" ou "l'IA et le service local à déclenchement par la terre" ainsi que le Faxworld. Une copie d'une demande rédigée pour un client éventuel indique que l'ITN peut offrir un service 800 É.-U. et un service 800 World, et qu'elle peut offrir des appels interurbains au Canada, aux É.-U. et outre-mer à un tarif inférieur aux "tarifs de la compagnie de téléphone."
Le STT a déposé des documents publicitaires qui indiquent que la Cam-Net offre un service interurbain à rabais au Canada, à destination des É.-U. et outre-mer. Entre-temps, dans son rapport annuel, la Cam-Net déclare avoir pour objectifs de bâtir une infrastructure qui peut effectivement éviter aux entreprises canadiennes d'avoir à payer des tarifs interurbains excessifs et de continuer à jouer un rôle de premier plan dans l'industrie des services de télécommunications interurbaines de rechange à rabais au Canada.
Le STT a déposé des documents promotionnels indiquant que la Call-Net offre à ses abonnés des frais interurbains réduits pour les appels au Canada et à destination des É.-U. et qu'elle fournit un service qui étend le secteur d'appel local, éliminant ainsi les frais d'interurbain.
En dernier lieu, le STT a déposé une copie d'une publicité parue dans le Globe and Mail dans laquelle Optinet a indiqué fournir aux entreprises canadiennes un service de transmission de la voix, de données et vidéo intégré rentable.
A la lumière de cette preuve, le Conseil conclut que les circonstances sont telles maintenant que les systèmes des revendeurs, du moins, dont les activités correspondent aux descriptions contenues dans la preuve déposée par le STT sont conçus pour la transmission du trafic public de messages parlés en tant que service public, trafic comparable aux services de télécommunications intercirconscriptions fournis par des transporteurs de compétence fédérale.
Certains des intervenants opposés à la requête du STT ont poussé plus loin le raisonnement contenu dans la décision 84-18 et ont soutenu que les revendeurs doivent exploiter une ligne ou un réseau de téléphone avant de tomber dans la définition de "compagnie". Spécifiquement, la CTA et l'ACTE ont soutenu que les mots "tenir en service une ligne ou un réseau de téléphone" dans la définition de "compagnie" renvoient à l'organisation ou à la gestion de lignes ou de réseaux de transmission; elles ont fait valoir que ce sont les transporteurs de télécommunications, et non pas les revendeurs, qui gèrent et organisent les installations matérielles.
Selon la CTA, l'exploitation de la ligne ou du réseau de téléphone comprend l'installation, la construction, l'entretien, la fourniture, la gestion et l'organisation de toute ligne de transmission employée et que ce sont les transporteurs, et non pas les revendeurs, qui remplissent ces fonctions. Elle a fait valoir que, même si le revendeur peut déterminer quelle installation ou quel service d'un transporteur il utilisera pour transmettre un message particulier, c'est ni plus ni moins ce que font d'autres abonnés du service d'affaires des compagnies de téléphone.
La CTA a soutenu que cela est vrai même dans les cas où certains services de transmission sont dits destinés à l'usage du revendeur. Selon elle, un circuit ou une largeur de bande spécialisés fonctionnant à plein temps peuvent être fournis au moyen de diverses installations matérielles, et le transporteur peut décider de temps à autre de réacheminer le circuit vers différentes installations de transmission entre deux villes.
La CTA a également fait valoir que le rôle d'un revendeur ressemble à celui d'un expéditeur qui utilise un chemin de fer sans toutefois l'exploiter.
L'argument de la CTA semble s'appuyer sur l'hypothèse de base selon laquelle ce sont les transporteurs, et non pas les revendeurs, qui sont les exploitants d'installations ou de lignes de transmission, étant donné que ce sont eux qui répartissent le trafic entre des lignes de transmission matérielles particulières et qui entretiennent ces lignes.
Le Conseil n'est pas persuadé que les transporteurs soient les seuls responsables de l'exploitation des réseaux de télécommunications. À son avis, les revendeurs peuvent décider quels services ou quelles installations louer afin de fournir leurs services et ils peuvent regrouper et commuter le trafic devant être acheminé par leurs réseaux. De plus, dans certaines circonstances, les revendeurs contrôlent l'acheminement des messages par leurs services ou installations loués. Les revendeurs louent ordinairement des services et des installations auprès des transporteurs et programment leurs commutateurs de manière à déterminer comment ils achemineront leur trafic par ces services et installations. Dans de tels cas, c'est le revendeur, non pas le transporteur, qui décide de l'acheminement, donc qui exploite le réseau qui achemine le trafic.
Le Conseil conclut donc que, lorsqu'un revendeur offre un service de télécommunications de base de bout en bout au moyen de services ou d'installations de nature interprovinciale qu'il configure, et lorsqu'il exerce un contrôle sur le transport et l'acheminement de ce trafic, il devient assujetti à la compétence fédérale et il exploite une ligne ou un réseau de téléphone. Par conséquent, il est une "compagnie" au sens de l'article 334 de la Loi sur les chemins de fer.
Le Conseil ordonne aux revendeurs qui se sont inscrits auprès du Conseil conformément à la décision 90-3 et à l'ordonnance Télécom CRTC 91-380 du 19 mars 1991 de déposer, au plus tard le 9 octobre 1992, des projets de tarif pour fins d'approbation par le Conseil, ou de justifier, à la lumière de la présente décision, pourquoi ils ne devraient pas être tenus de le faire. Il est également ordonné à tous les autres revendeurs qui, à la lumière de la présente décision, correspondent à la définition de "compagnie" de déposer, au plus tard le 9 octobre 1992, des projets de tarif pour fins d'approbation par le Conseil.
Le Secrétaire général
Allan J. Darling

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