ARCHIVÉ -  Décision Télécom CRTC 90-9

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Décision Télécom

Ottawa, le 4 mai 1990
Décision Télécom CRTC 90-9
BELL CANADA - MAJORATIONS DES TARIFS APPLICABLES AUX VOIES LOCALES
Référence : Avis de modification tarifaire 2907
I HISTORIQUE
Dans la décision Télécom CRTC 88-4 du 17 mars 1988 intitulée Bell Canada - Besoins en revenus pour 1988, rééquilibrage des tarifs et questions de partage des revenus (la décision 88-4), le Conseil a examiné, entre autres choses, une requête de Bell Canada (Bell) visant à majorer de 11 % les tarifs applicables aux lignes directes locales (voies locales). Dans l'instance qui a abouti à la décision 88-4, Bell a fait valoir que ses tarifs en vigueur n'étaient pas compensatoires et, à l'appui de la majoration tarifaire, elle a soumis un processus d'étude revenus-coûts annualisés prévus (RCAP) fait en 1983.
Dans la décision 88-4, le Conseil s'est dit d'avis que la méthode d'étude qu'il convenait d'utiliser dans le cas du projet de majoration des tarifs applicables aux voies locales est une étude de la valeur actuelle nette (VAN) qui établirait jusqu'à quel point il est rentable de répondre à la demande totale prévue au cours de la période de l'étude. Il a déclaré que les processus d'étude RCAP peuvent fournir des justifications à un changement de prix, mais qu'ils ne peuvent lui permettre d'établir de façon concluante que les tarifs d'un service existant sont compensatoires. Il a donc conclu qu'il ne s'agissait pas d'une justification suffisante de la majoration proposée et qu'il faudrait maintenir les rapports tarifaires actuels entre le service d'affaires local de base et les voies locales.
En vertu de l'avis de modification tarifaire 2907 du 4 octobre 1988, Bell a proposé de majorer de 20 % les tarifs applicables aux voies locales, hausse prévue à l'article 950.3 du Tarif général. Comme dans l'instance qui a abouti à la décision 88-4, Bell a soutenu que les tarifs en vigueur ne sont pas compensatoires. En guise de preuve, elle a déposé un processus d'étude RCAP fait en 1987.
Dans une lettre datée du 22 novembre 1988, le Conseil a demandé à Bell, à la lumière des déclarations qu'il avait faites dans la décision 88-4, de soumettre les exposés qu'elle voudrait bien faire au sujet de la méthodologie appropriée à utiliser pour déterminer si les tarifs des voies locales en vigueur sont compensatoires. Il s'est également dit d'avis que les coûts évitables ou causals et les revenus associés à la satisfaction de la demande de service totale aux tarifs en vigueur sur une période d'étude future convenable ne pourraient être déterminés que si on les compare à un scénario d'abandon. Dans une lettre datée du 22 décembre 1988, Bell a convenu qu'une étude VAN est le genre d'étude qui prouve de façon concluante que les tarifs applicables à un service existant sont compensatoires. Elle a indiqué qu'elle fournirait, avant le 31 mars 1989, une étude VAN qui porterait sur les coûts causals et les revenus associés aux tarifs proposés dans l'avis de modification tarifaire 2907, en comparaison avec l'abandon du service. Bell a présenté une étude VAN dans une lettre de la compagnie datée du 28 mars 1989.
Dans l'avis public Télécom CRTC 1989-20 du 1er mai 1989 (l'avis public 1989-20), le Conseil a amorcé une instance en vue de traiter de la requête de Bell en majoration des tarifs applicables aux voies locales prévus à l'article 950.3 du Tarif général. Les installations prévues à l'article en question sont classées selon que le service est fourni à l'intérieur du même bâtiment, entre des bâtiments situés sur une propriété continue, ou entre des bâtiments situés sur des propriétés différentes. La majoration tarifaire que Bell propose s'appliquerait aux trois types de voies, à l'exception de celles qui relient des bâtiments d'une propriété continue fournies à partir du 1er septembre 1987.
En réponse à cet avis, des intervenants ont soit adressé des demandes de renseignements à la compagnie, soit formulé des observations. L'Association of Competitive Telecommunications Suppliers (l'ACTS), la Bell Cellulaire Inc., l'Alliance canadienne des télécommunications de l'entreprise (l'ACTE), les Télécom-munications CNCP (le CNCP), Hoey Associates, Hydro Ontario, Québec- Téléphone, la STM Systems Corp. et Télésat Canada figuraient au nombre des intervenants. Les questions qu'ils ont soulevées portent principalement sur (1) la viabilité économique et (2) l'opportunité des tarifs proposés.
II VIABILITÉ ÉCONOMIQUE
A. Généralités
L'étude VAN de Bell établit une comparaison, sur une période de dix ans, des revenus prévus et des coûts causals associés à l'abandon du service par rapport aux revenus prévus et aux coûts associés au maintien du service (1) aux tarifs actuels et (2) aux tarifs proposés dans l'avis de modification tarifaire 2907. En vertu de cette approche, une VAN positive signifierait que les tarifs applicables aux voies locales ne recouvrent pas leurs coûts connexes. L'ampleur de la perte associée au service est directement proportionnelle à l'importance de la VAN.
L'analyse de Bell révèle que la VAN aux tarifs actuels s'établit à 284,9 millions de dollars, si l'on suppose que toutes les installations utilisées pour offrir les voies locales sont fongibles, c.-à-d. que, lors de l'étude, il y a une autre utilité pour cette installation dans la compagnie. En vertu de la majoration tarifaire proposée de 20 %, la VAN tombe à 228,5 millions de dollars. Bell a déclaré que les équipements de conditionnement des circuits et de signalisation sont les seules installations utilisées pour fournir des voies locales qui peuvent être non fongibles. Elle a ajouté que si on les considère comme telles, la VAN, aux tarifs actuels, se chiffrerait à 231,5 millions de dollars; la majoration tarifaire proposée de 20 % réduirait la VAN à 175,1 millions de dollars.
B. Positions des parties
1. Évaluation des éléments d'actif
Le CNCP a déclaré que la classification des éléments d'actif nécessaires pour offrir des voies locales, c.-à-d. en éléments fongibles et non fongibles, ainsi que la façon dont ils sont évalués influent grandement sur les résultats de l'évaluation économique. Il a ajouté que Bell n'a pas fourni de prévisions des éléments d'actif qui pourraient se voir attribuer une autre utilité dans un délai relativement court. Il a fait valoir que, comme la définition que Bell donne de la fongibilité exige qu'il y ait une autre utilité que celle qui fait l'objet de l'étude, les voies locales de Bell ne sont pas considérées comme fongibles.
De l'avis du CNCP, tous les éléments d'actif devraient être évalués à la valeur comptable nette, même si Bell a semblé évaluer ceux qu'elle jugeait fongibles au coût de remplacement actuel et les non fongibles, à la VCN. Il estimait que l'approche de Bell était contraire à la directive 5.2 de la décision Télécom CRTC 79-16 du 28 août 1979 intitulée Enquête sur les méthodes comptables et analytiques des sociétés exploitantes de télécommunications - Phase II: Renseignements exigés pour les dépôts de tarifs relatifs à de nouveaux services (la décision 79-16). À l'appui de son affirmation selon laquelle la VAN est très sensible aux hypothèses touchant la fongibilité, il a indiqué que si seulement 19 % des éléments d'actif sont traités comme non fongibles, la VAN serait réduite de 53,4 millions de dollars ou 23 %.
Il se peut, d'après le CNCP, que Bell ait surestimé la non-rentabilité des voies locales en excluant de l'étude les voies reliant les bâtiments d'une propriété continue et les voies reliant des points du même bâtiment. D'après lui, ces installations devraient être considérées comme non fongibles.
Il est correct, selon Bell, de traiter les installations de voies locales comme fongibles, puisqu'elles pourraient servir à offrir d'autres services. En guise de preuve, Bell a cité sa réponse à la demande de renseignements Bell(CRTC)31mai89-21, qui renferme une liste de 34 services qui pourraient employer des installations servant à offrir un service de voies locales. À la déclaration du CNCP selon laquelle la VAN est très sensible aux modifications apportées aux hypothèses de fongibilité, la compagnie a répondu que le scénario dans lequel 19 % des installations utilisées pour fournir les voies locales sont réputés être non fongibles suppose que toutes les installations qui peuvent être non fongibles sont traitées comme telles. Selon elle, ce scénario représente donc une moins grande limite pour les analyses de sensibilité touchant la fongibilité.
Bell a déclaré que, comme les installations utilisées pour offrir des voies locales sont fongibles, il convient, pour les évaluer, d'employer les coûts courants. Elle a souligné que, pour les installations fongibles en place, les coûts causals sont les coûts courants de la technologie de croissance. Lorsqu'elle utilise des installations en place pour offrir un service de voies locales, la compagnie doit payer ses coûts .courants pour satisfaire à une augmentation de la demande dans d'autres d'autres services qui utilisent ces installations.
En préconisant l'utilisation des coûts courants pour évaluer les voies locales, Bell a cité diverses déclarations du Conseil. Elle a notamment souligné que dans la décision 88-4, le Conseil est d'avis que le coût des tarifs applicables aux voies locales devrait être établi de préférence en fonction des coûts actuels.
Bell a également fait savoir que, comme elle l'a indiqué dans la réponse à la demande de renseignements Bell(CRTC)31mai89-2, les conséquences de l'exclusion des voies reliant des bâtiments d'une propriété continue ainsi que les voies reliant des points du même bâtiment sont insignifiantes. La compagnie a estimé que, si ces voies étaient incluses dans l'étude, la VAN serait réduite d'environ 11 millions de dollars.
2. Autres questions
Le CNCP a fait remarquer qu'il y avait des prévisions de dépenses d'immobilisation importantes au cours de la période de l'étude, mais que les prévisions de la demande annuelle n'augmentaient pas proportionnellement. Il était d'avis que les dépenses d'immobilisation qui doivent être engagées au cours de la période de l'étude visaient à remplacer les éléments d'actif retirés. Il a présumé que Bell avait établi le pourcentage des retraits en fonction de l'âge des éléments d'actif existants utilisés pour offrir des voies locales. À son avis, cette pratique ne conviendrait pas, étant donné que l'on suppose implicitement que les intallations seraient achetées neuves.
Le CNCP a fait observer que le Conseil et Bell considèrent comme hypothétique la structure de l'étude économique dans laquelle les coûts et les revenus de l'abandon du service sont comparés à ceux du maintien du service. Se disant d'accord avec cette évaluation, il a exprimé l'opinion qu'une étude qui n'est ni réaliste ni réalisable n'aide pas à déterminer si les coûts causals pour offrir des voies locales sont couverts.
L'ACTE a déclaré qu'il est justifié de mettre en doute l'analyse que la compagnie a faite de ce que coûte la prestation des voies locales. Elle a fait référence à un rapport intitulé "Current Trends in the Cost of Providing Local Telephone Service in Bell Canada Territory" fourni en réponse à la demande de renseignements Bell(CNCP)31mai89-1. Ce rapport traite des récentes tendances à la baisse du coût de prestation du service téléphonique local. L'ACTE a fait valoir que, par contraste, les processus d'étude RCAP de 1983 et 1987 soumis par Bell indiquent que les coûts de prestation des voies locales ont augmenté par rapport aux revenus de ce service. Elle a conclu que les résultats des deux processus d'étude RCAP ne concordent pas avec le rapport.
Diverses autres observations au sujet de l'étude économique ont été formulées par des intervenants. Le CNCP a fait valoir que dans l'étude, on a utilisé des taux d'amortissement, des facteurs de capacité de travail ainsi que des hypothèses concernant l'inclusion des coûts pour le câblage intérieur qui ne conviennent pas. Il a ajouté que le coût des capitaux propres employé pour calculer le taux de réduction utilisé dans l'étude dépassait la marge établie du taux de rendement sur l'avoir moyen des détenteurs d'actions ordinaires qu'on a autorisé à Bell. À son avis, si on avait eu recours à d'autres hypothèses, l'excédent prévu des coûts par rapport aux revenus ne serait pas aussi important. Une majoration tarifaire procentuelle plus faible serait donc justifiée.
En réponse aux préoccupations du CNCP à l'égard des prévisions de dépenses d'immobilisation, Bell a soutenu que les dépenses d'immobilisation engagées au-delà de la première année de la période de l'étude sont minimes et qu'elles tiennent compte de celles qui sont engagées dans la courbe normale des retraits et des remplacements associés aux immobilisations, telles que modelées en fonction des caractéristiques appropriées de la courbe de survie. La compagnie a également indiqué avoir estimé les dépenses d'immobilisation au cours de l'étude en fonction des courbes de réforme des nouvelles installations.
Bell a fait savoir que le rapport cité par l'ACTE comme contredisant les processus d'étude RCAP de la compagnie traite des coûts de prestation d'un service de circonscription local, et non pas des voies locales. On ne peut supposer, comme la compagnie l'a fait valoir, que les coûts associés à un service de circonscription local sont les mêmes que ceux des voies locales. Elle a reconnu que certains éléments d'immobilisation utilisés pour offrir un service de circonscription local le sont également pour les voies locales, mais elle a indiqué que les voies locales requièrent de l'équipement additionnel, comme de l'équipement de signalisation et de conditionnement, de l'équipement de transmission ainsi que des installations intracirconscriptions spécialisées, qui ne sont pas généralement requis pour soutenir un service de circonscription local. Elle a aussi précisé qu'il existe des différences dans les frais de prestation et d'administration associés aux voies locales et que celles-ci exigent une prestation et des services techniques accrus.
Bell a également soutenu que les différences dans les résultats du processus d'étude RCAP de 1983 et de celui de 1987 sont attribuables non pas à des augmentations de coûts comme tel, mais à l'ajout de plusieurs autres services au processus d'étude de 1987 qui n'étaient pas inclus dans celui de 1983.
Quant à l'affirmation du CNCP selon laquelle des taux d'amortissement non appropriés ont été utilisés dans l'étude économique, Bell a soutenu que l'analyse du CNCP n'a pas tenu compte de toutes les classes d'installations requises pour fournir des voies locales et que des taux d'amortissement appropriés pour toutes les propriétés amortissables y avaient été utilisés.
Pour ce qui est de l'opportunité des facteurs de capacité de travail, la compagnie a déclaré que les facteurs se situent dans leur marge d'utilisation optimale respective et qu'ils correspondent aux taux d'utilisation que le Conseil a jugés raisonnables dans les Examens annuels du programme de construction.
Bell a aussi fait valoir que le traitement du câblage intérieur a été clairement indiqué dans l'étude VAN à l'appui de la majoration tarifaire. Elle a déclaré y avoir inclus le coût du câblage intérieur uniquement là où il était évident que ce câblage est fourni par elle, car sinon, elle l'en a exclu. Elle a précisé que cette approche tend à sous-estimer le coût de l'élément câblage intérieur des voies locales.
Bell a fait remarquer que le taux de rabais employé dans l'étude économique reposait sur des attentes de rendements futurs du capital de la compagnie et que le coût de ses immobilisations peut différer de son taux de rendement autorisé, selon les conditions de marché éventuelles. À son avis, il ne devrait donc pas être considéré comme inhabituel que l'élément équité du taux de réduction soit supérieur à la marge permise.
C. Conclusions
Dans son étude VAN, Bell a évalué les installations utilisées pour offrir les voies locales aux coûts courants. L'utilisation de ces coûts entraîne un excédent par rapport aux revenus plus important que lorsque la valeur comptable nette est utilisée. D'après elle, il faudrait employer les coûts courants plutôt que la VCN pour établir les coûts causals des installations fongibles en place. En effet, comme elle l'a expliqué, l'utilisation continue d'installations fongibles en place pour fournir des voies locales l'oblige à engager le coût de nouvelles installations pour satisfaire à la croissance d'autres services qui utiliseraient autrement les installations. Le Conseil est d'accord avec le raisonnement de Bell à l'égard de l'emploi des coûts courants pour établir les coûts causals des installations fongibles en place servant à fournir des voies locales.
Bell a exclu de l'étude économique les coûts et revenus associés aux installations fournies à l'intérieur de bâtiments ou entre des bâtiments sur la même propriété. Une voie locale fournie à l'intérieur du même bâtiment peut l'être par l'abonné lui-même ou par les concurrents de la compagnie de téléphone. Les voies locales reliant des bâtiments sur la même propriété peuvent de la même façon être offertes par des fournisseurs autres que Bell. Parce que ces installations sont destinées à un abonné spécifique, elles seraient normalement jugées non fongibles. Comme Bell l'a fait remarquer, l'inclusion des coûts et des revenus associés à ces installations aurait abaissé la VAN d'environ 11 millions de dollars, montant trop petit pour modifier la conclusion de l'étude selon laquelle ni les tarifs actuels ni les tarifs proposés à l'égard des voies locales ne sont compensatoires.
Compte tenu de ce qui précède, la question de la fongibilité se pose surtout en ce qui a trait aux voies reliant des bâtiments sur des propriétés différentes. Comme Bell l'a indiqué, les éléments des installations utilisées pour offrir ces voies sont les mêmes que ceux qui sont utilisés pour fournir d'autres services comme le service local de base, le service Centrex, l'interurbain planifié et le service 800. Et comme ces installations peuvent généralement être employées pour fournir de nombreux autres services de la compagnie, le Conseil considère que Bell peut supposer à juste titre que les installations des voies locales reliant des bâtiments sur des propriétés différentes sont fongibles. Même si la fongibilité de l'équipement de conditionnement de circuits et de signalisation reste douteuse, le Conseil observe que si l'on pose par hypothèse qu'aucun de ces équipements n'est fongible, la VAN s'établit à 231,5 millions de dollars aux tarifs actuels et à 175,1 millions de dollars en vertu de la majoration tarifaire proposée de 20 %.
Quant aux autres questions soulevées par les intervenants, le Conseil conclut que l'étude économique entreprise par Bell prouve de façon satisfaisante que les tarifs actuels et proposés pour les voies locales sont inférieurs aux niveaux compensatoires.
III OPPORTUNITÉ DES TARIFS PROPOSÉS
A. Positions des parties
Le CNCP a fait valoir que, si elle est approuvée, la majoration tarifaire proposée à l'égard des voies locales augmenterait d'environ 2,7 millions de dollars les versements annuels du CNCP à Bell. Comme celle-ci est le principal sinon le seul fournisseur de voies locales, il n'a pratiquement pas d'autres choix que de faire appel à Bell pour en obtenir.
Le CNCP a déclaré qu'il offre des services concurrentiels de rechange à de nombreux services intercirconscriptions de Bell, mais que pour les dispenser, il lui faut recourir à des voies locales louées auprès de Bell. Il a précisé qu'étant donné que dans sa réponse à la demande de renseignements Bell(CRTC)31mai89-19, Bell avait dit ne pas avoir l'intention de modifier ses services concurrentiels qui exigent des voies locales, il avait été amené à penser qu'il souffrirait d'un désavantage concurrentiel injuste si les tarifs proposés étaient approuvés.
L'ACTE et le CNCP ont affirmé que l'approbation des tarifs proposés applicables aux voies locales modifieraient le rapport tarifaire actuel entre le service d'affaires local de base et les voies locales. Le CNCP a fait savoir que, dans la décision 88-4, le Conseil a rejeté l'augmentation proposée de 11 % des tarifs applicables aux voies locales parce que Bell n'avait pu en justifier la nécessité et parce que, de l'avis du Conseil, il fallait maintenir le rapport tarifaire entre le service d'affaires local de base et les voies locales. Il a également noté que par suite d'une hausse de 20 % des tarifs applicables aux voies locales, les tarifs de nombreuses voies locales dépasseraient ceux qui s'appliquent au service d'affaires local de base.
De l'avis de l'ACTE, une requête en majoration des tarifs des voies locales serait mieux traitée dans le cadre d'une requête en majoration tarifaire générale. Elle a fait savoir que, lorsque les tarifs locaux sont majorés dans le cadre d'un rééquilibrage des tarifs, le dérangement et les difficultés que les augmentations occasionnent sont compensés par des réductions des tarifs interurbains. D'après le CNCP, il ne devrait pas être permis à Bell de rééquilibrer de façon sélective certaines classes de service.
L'ACTE a également indiqué que l'approbation de la majoration tarifaire permettrait à Bell d'atteindre un taux de rendement sur l'avoir moyen des détenteurs d'actions ordinaires supérieur à celui de la dernière audience portant sur une majoration tarifaire générale de la compagnie.
En réponse aux observations du CNCP concernant l'impact sélectif de la majoration tarifaire, Bell a soulevé certains points. Premièrement, elle fournit des voies locales à des taux qui ne couvrent pas les coûts. Elle a affirmé qu'elle tente de réduire la perte des voies locales en proposant une majoration tarifaire, et que l'augmentation s'appliquerait à tous les abonnés des voies locales.
Bell a déclaré qu'au lieu de répercuter à ses abonnés les coûts des tarifs majorés des voies locales, le CNCP a comme option de fournir ses propres voies locales. Elle a indiqué que le CNCP en a fourni quelques-unes par le passé et qu'il est en train d'accroître cette capacité par son association avec la Rogers Communications Inc. Selon Bell, le CNCP obtient des voies locales d'elle seulement lorsqu'il juge qu'il est économiquement possible de le faire. Elle a noté la déclaration que le CNCP a faite le 19 avril 1989 dans l'avis de résiliation de son Accord de ligne d'abonnés conclu avec Bell que [TRADUCTION] "les changements technologiques ont été spectaculaires et le CNCP étudiera l'option de construire des installations afin d'optimiser les avantages des économies et d'accroître la réaction des fournisseurs". Bell a fait savoir que cette déclaration va à l'encontre de l'observation du CNCP qui dit ne pas avoir de solutions de rechange aux voies locales.
La compagnie a également noté que d'autres fournisseurs offrent des voies locales utilisant (1) la technologie de transmission par satellite pour raccorder les voies intercirconscriptions (éliminant la nécessité de lignes locales d'abonnés), (2) les fibres optiques (dans le cas des voies groupées entre les deux mêmes endroits), et (3) les systèmes privés adaptés aux besoins uniques des abonnés (c.-à-d. un récepteur micro-ondes local privé installé sur le toit). Lorsque ces options n'existent pas, les voies locales de Bell sont généralement utilisées parce que les tarifs actuels sont inférieurs à ce que les solutions de rechange coûteraient aux abonnés.
Pour ce qui est de l'affirmation du CNCP selon laquelle Bell se confère un avantage en n'augmentant pas les tarifs de ses services concurrentiels ou de ses services améliorés qui utilisent les voies locales, Bell a rétorqué que les tarifs applicables aux voies locales sont déjà dégroupés de ceux des services téléphoniques intercirconscriptions; elle n'a donc aucune raison d'augmenter ses tarifs en question par suite de sa requête en majoration tarifaire de la partie locale du circuit.
En outre, Bell a fait valoir que le CNCP avait cité incorrectement la réponse à la demande de renseignements Bell(CRTC)31mai89-19 à l'appui de l'affirmation selon laquelle Bell ne compte pas proposer de changements à ses services concurrentiels. En fait, comme la compagnie l'a souligné, elle a déclaré exactement qu'elle n'entendait pas changer les tarifs de ses services améliorés par suite de la majoration tarifaire proposée à l'égard des voies locales. Elle a fait savoir que, pour les services améliorés qui concurrencent des services semblables du CNCP, les voies locales comptent pour un très faible pourcentage des coûts totaux. Le projet de majoration des tarifs applicables aux voies locales influerait donc très peu sur le coût global des services améliorés. D'après elle, l'argument du CNCP s'applique également aux services améliorés du CNCP.
Pour ce qui est des rapports tarifaires, Bell a soutenu que les voies locales sont assez différentes du service d'affaires local de base et qu'un positionnement tarifaire entre les deux n'est pas approprié. Elle a signalé que les tarifs applicables aux voies locales excèdent actuellement ceux qui s'appliquent au service d'affaires local de base dans de nombreux cas, spécialement dans celui des voies locales plus longues et du service local de base d'affaires dans les groupes tarifaires inférieurs. Elle a ajouté que, dans la décision 88-4, le Conseil a rejeté la majoration tarifaire proposée de 11 % des voies locales à cause d'une justification insuffisante et non à cause des rapports tarifaires avec le service local de base.
Bell a soutenu que la majoration tarifaire proposée n'est pas une tentative pour rééquilibrer les tarifs. Elle a indiqué que sa requête est un dépôt indépendant ayant sa propre justification exhaustive, et qu'il n'est pas nécessaire dans ces cas de rééquilibrer les majorations tarifaires par des réductions tarifaires. En réponse aux préoccupations de l'ACTE au sujet de son taux de rendement autorisé, Bell a indiqué que la majoration tarifaire proposée augmenterait le taux de rendement prévu de l'avoir moyen des détenteurs d'actions ordinaires de la compagnie d'environ 0,14 %, ce qui éliminerait le risque que la compagnie dépasse le plafond de sa marge autorisée.
B. Conclusions
Comme il a été noté précédemment, le dossier de la présente instance indique que les revenus tirés des voies locales devraient être inférieurs aux coûts causals de prestation du service en vertu des tarifs actuels et proposés. Qu'il y ait ou non des services concurrentiels de rechange, maintenir des tarifs à des niveaux moins que compensatoires signifie faire subventionner les utilisateurs de voies locales par la masse des abonnés.
L'absence de renseignements satisfaisants sur les coûts explique qu'on se soit servi des rapports tarifaires dans les instances générales passées portant sur l'examen des besoins en revenus pour apporter des changements tarifaires à l'égard des voies locales. Toutefois, comme des renseignements satisfaisants sont maintenant disponibles, le Conseil considère qu'il faudrait s'en remettre davantage aux coûts comme moyen d'établir des tarifs justes et raisonnables pour des voies locales.
Compte tenu de ce qui précède, le Conseil approuve l'avis de modification tarifaire 2907, à compter du 10 juin 1990. Il est donc ordonné à Bell de publier, au plus tard le 18 mai 1990, des pages de tarifs révisées reflétant les tarifs approuvés dans la présente décision.
IV AUTRES QUESTIONS CONNEXES
A. Interconnexion
L'ACTE a fait valoir que l'instance en cours donne l'occasion de clarifier les règles relatives à la fourniture des voies locales par des concurrents. Elle a indiqué que la décision Télécom CRTC 85-19 du 29 août 1985 intitulée Concurrence intercirconscription et questions connexes (la décision 85-19), stipule clairement qu'un abonné privé peut interconnecter des voies locales appartenant à un utilisateur privé, qu'elles servent à la transmission de la voix ou de données. Elle a soutenu que la décision 85-19 indique clairement aussi qu'il n'est pas permis d'interconnecter des voies locales non fournies par un transporteur pour offrir un service téléphonique local de base public, mais qu'il est permis de le faire dans le cas des services publics locaux de transmission de données non fournis par un transporteur. Toutefois, elle a ajouté que la décision 85-19 n'est pas claire quant à la question de savoir si une entreprise autre qu'un transporteur peut offrir des voies téléphoniques locales privées interconnectées au service public (autrement que pour dispenser un service téléphonique local de base). À son avis, le Conseil devrait clarifier ce point.
Selon Bell, la décision 85-19 n'est pas ambiguë quant aux préoccupations de l'ACTE. Elle a indiqué que la distinction entre les systèmes publics et privés réside dans l'utilisation qu'il en est fait, et que rien n'empêche un fournisseur d'offrir publiquement des voies locales privées interconnectées (autrement que pour dispenser un service téléphonique local de base).
Le Conseil conclut qu'en vertu du régime établi dans la décision 85-19 pour l'interconnexion de systèmes intracirconscriptions non fournis par des transporteurs, rien n'empêche un fournisseur d'offrir au public des voies locales interconnectées non fournies par un transporteur.
B. Tarifs applicables au Centrex
Dans l'instance qui a abouti à la décision 88-4, Bell a proposé de majorer de 11 % les tarifs applicables aux voies locales. Afin de tenir compte du fait que les tarifs de ces voies locales ont été utilisés dans la tarification initiale du service Centrex III, la compagnie a également proposé de majorer les tarifs applicables à ce
dernier service.
Toutefois, dans la présente instance, Bell n'a pas proposé de majoration tarifaire au service Centrex III. À la lumière de la proposition antérieure de la compagnie, le Conseil conclut que, dans la réponse à la demande de renseignements Bell(ACTS)31mai89-3, la compagnie n'a pas expliqué de façon satisfaisante pourquoi elle n'avait pas proposé de majorer les tarifs applicables au Centrex III en même temps que l'augmentation de 20 % des tarifs des voies locales envisagée dans la présente instance. Comme le cas qui nous occupe ressemble à celui de l'instance qui a donné lieu à la décision 88-4, le Conseil estime qu'une majoration tarifaire du Centrex III peut être appropriée. Il ordonne donc à Bell de déposer, au plus tard le 4 juin 1990, (1) ses vues, et les raisons de ces vues, concernant l'opportunité de majorer les tarifs applicables au Centrex III de manière à tenir compte de l'augmentation de 20 % des tarifs applicables aux voies locales, (2) des pages de tarifs proposées contenant des tarifs applicables au Centrex III qui reflètent l'augmentation de 20 % des tarifs applicables aux voies locales et qui résultent de la méthode utilisée pour établir les tarifs du Centrex III qui sont proposés dans la pièce 54 de l'instance qui a abouti à la décision 88-4, ainsi que (3) les calculs de la compagnie.
La Secrétaire générale par intérim
Rosemary Chisholm

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