ARCHIVÉ -  Décision CRTC 88-887

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Décision

Ottawa, le 23 décembre 1988
Décision CRTC 88-887
CJRN 710 Inc.
Niagara Falls (Ontario) - 873528400
A la suite d'une audience publique tenue dans la région de la Capitale nationale le 12 avril 1988 et de la décision CRTC 88-403 du 9 juin 1988 portant sur le renouvellement de la licence pour une période de trois mois, pour des motifs d'ordre administratif, le Conseil renouvelle la licence de radiodiffusion de CJRN Niagara Falls, du 1er janvier 1989 au 30 juin 1990, aux conditions stipulées dans la présente décision et dans la licence qui sera attribuée. Cette période permettra au Conseil d'évaluer à brève échéance le rendement de la titulaire quant aux préoccupations exposées dans la présente décision et dans l'avis public CRTC 1987-196 du 1er septembre 1987.
A l'audience, la titulaire a souligné que CJRN 710 Inc. (CJRN) était [TRADUCTION] "la station radiophonique prédominante dans la péninsule du Niagara", et elle a exposé les améliorations apportées en immobilisations depuis le renouvellement de sa licence en 1983 pour conserver cette place. D'après la titulaire, ces améliorations ont touché l'achat d'un nouvel émetteur et d'un car de reportage, la rénovation de ses studios et bureaux et l'installation d'équipement de production multipistes. La titulaire a aussi souligné sa participation dans la collectivité et elle s'est engagée à continuer d'appuyer financièrement le Niagara Falls Festival of Lights et le théâtre pour enfants. L'année dernière, la station a contribué 4 500 $ et 2 000 $, respectivement, à ces deux organismes.
La titulaire a également fait savoir qu'elle entendait garder la formule actuelle qui offre 50 heures par semaine de musique rock -légère et accorde une importance presque égale aux émissions de créations orales, notamment les nouvelles, la couverture intégrale de rencontres sportives et des tribunes téléphoniques.
Ce sont les tribunes téléphoniques de la titulaire qui ont fait l'objet de l'avis public CRTC 1987-196. Dans cet avis, le Conseil a blâmé la titulaire pour les propos racistes tenus au cours de trois épisodes du John Michael Talk Show que CFRN a diffusés au printemps de 1987. Ces propos faisaient suite à la visite de l'ambassadeur de l'Afrique du Sud à la réserve indienne de Peguis au Manitoba. Il s'agissait de remarques désobligeantes à l'endroit de la population amérindienne du Canada que l'animateur de l'émission et quelques-uns de ses interlocuteurs ont faites. Ces propos ont suscité des plaintes du Centre autochtone régional de Niagara et du Centre d'accueil autochtone de Fort Erie (les Centres autochtones) et de la Bande indienne de Peguis. Entre autres choses, les plaignants ont soutenu que la titulaire avait enfreint l'alinéa 3b) du Règlement de 1986 sur la radio (le Règlement), selon lequel il est interdit de diffuser
des propos offensants qui, mis dans leur contexte, risquent d'exposer une personne, un groupe ou une classe de personnes à la haine ou au mépris pour des motifs fondés sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou la déficience physique ou mentale.
Le Conseil a fait remarquer que ce n'était pas le première fois qu'il exprimait de graves préoccupations au sujet de propos tenus par M. Michael à CJRN. Il a rejeté la proposition, qu'il juge inacceptable, voulant que ce qui s'est produit constituait un envenimement de la discussion, indépendant de la volonté de la titulaire. Le Conseil a également jugé que les excuses formulées sur les ondes de CJRN étaient absolument inadéquates et que l'offre de la titulaire de temps d'antenne à titre de réparation n'était pas pertinente.
Le Conseil a pris note des mesures que la titulaire a proposées afin de veiller à ce que les obligations de la station en vertu de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi) et le Règlement soient bien comprises et remplies, mais il a dit s'attendre à ce que la titulaire "...prenne toute autre mesure supplémentaire qui peut s'imposer pour assurer la conformité". De plus, le Conseil a fait remarquer que le public aurait le droit de formuler d'autres observations sur cette question lors du renouvellement de la licence.
Brenda Gibson, Cheryl Ray, la Bande indienne de Peguis et la Ligue des droits de la personne de B'nai Brith, Canada (la B'Nai Brith) ont présenté des interventions d'opposition au renouvellement de la licence de CJRN qui a été entendu lors de l'audience du 12 avril 1988. Les Centres autochtones ont également déposé une intervention conjointe. Tous les intervenants ont critiqué vivement le comportement de la titulaire relativement aux incidents susmentionnés. Trois ont exprimé de nouveau l'avis que les actes de la titulaire avaient contrevenu à l'alinéa 3(b) du Règlement. Deux intervenants, les Centres autochtones et la B'Nai Brith, ont comparu à l'audience publique du 12 avril 1988 pour présenter leurs opinions.
Le porte-parole des Centres autochtones, M. James W. Moses, a fait la déclaration suivante [TRADUCTION]:
Nous voulons obtenir une réparation adéquate afin qu'une situation pareille ne se reproduise plus .... Si nous ne faisons pas en sorte que l'attitude affichée par M. Michael devienne dépassée, nous nous exposons à beaucoup de problèmes que nous pourrions facilement éviter.
Parlant au nom de la B'Nai Brith, M. Dolf Vonberg a dit tenir à ce que [TRADUCTION]:
... des lignes directrices officielles et des politiques soient en place, que la Loi et le Règlement soient bien compris dans des cas comme celui-ci et que les politiques soient respectées et fassent l'objet d'un examen interne.
Le Conseil a demandé à la titulaire précisément quelles lignes directrices ou quels mécanismes de contrôle elle avait mis en place, après le blâme du Conseil, afin de s'assurer que les obligations et responsabilités réglementaires de la titulaire soient toujours respectées intégralement. La titulaire a confirmé que son avocat avait rencontré le personnel de la station pour discuter des obligations réglementaires exposées dans la Loi et le Règlement et que des conseils juridiques à ce sujet et sur d'autres questions continueront d'être facilement accessibles à son personnel. Des copies des documents pertinents, tels que le Règlement et l'avis public contenant le blâme du Conseil, ont aussi été mis à la disposition du personnel de la station. La titulaire a ajouté que des discussions entre le personnel de la station et la direction continueraient d'avoir lieu afin d'assurer la conformité.
Cependant, la titulaire a reconnu qu'elle n'avait pas rédigé de lignes directrices pour aider le personnel de la station à interpréter la Loi et le Règlement ni de politiques établissant quelles mesures seraient prises advenant que des personnalités ne respectent pas, en ondes, les exigences réglementaires. Au contraire, la titulaire a fait savoir qu'elle continuait à se fier à l'expérience et au bon sens de son personnel pour assurer la conformité [TRADUCTION]:
Nous pourrions très bien établir nous-mêmes des lignes directrices plus strictes. Mais nous préférons penser qu'il s'agit de radiodiffuseurs d'expérience.... Ce sont des gens que nous payons très bien et qui travaillent dans le domaine depuis longtemps. Nous nous attendons à ce qu'ils se conforment à la Loi et à l'esprit de la Loi.
Suite à la réaction du public à l'égard des propos désobligeants diffusés par CJRN et aux plaintes d'auditeurs et de téléspectateurs d'émissions de tribune téléphonique que CJRN et d'autres titulaires diffusent, le Conseil a demandé qu'on lui soumette des observations sur un projet de lignes directrices concernant les tribunes téléphoniques dans le but d'aider les titulaires à comprendre leurs responsabilités réglementaires (avis public CRTC 1988-121 du 29 juillet 1988). Toutefois, comme il l'a annoncé dans l'avis public CRTC 1988-213, en date d'aujourd'hui, le Conseil a décidé de ne pas publier de lignes directrices pour le moment, compte tenu des opinions et des préoccupations exprimées en réponse à l'avis public précédent. Il a décidé plutôt d'encourager les titulaires dont la grille-horaire comprend des émissions de tribune téléphonique et qui, à l'heure actuelle, n'ont pas de lignes directrices ou autres mécanismes de contrôle en place, à se doter de mécanismes internes en vue d'assurer en tout temps le respect de leurs obligations réglementaires et de leurs responsabilités à l'égard des émissions de tribune téléphonique.
Le Conseil indique, toutefois, dans son avis public d'aujourd'hui que, dans le cas où il juge qu'une titulaire s'est montrée incapable de respecter les dispositions de la Loi ou du Règlement, il exigera que celle-ci se dote de lignes directrices internes et lui en soumette une copie pour approbation, ainsi qu'une description des mécanismes relatifs aux exigences en matière de propos désobligeants, d'équilibre et de normes élevées mis en place.
Le Conseil estime que, dans le cas de CJRN, il y a lieu d'avoir des lignes directrices écrites appropriées et des mécanismes de contrôle qui vont plus loin que la confiance que la titulaire accorde à l'expérience de ses employés en ondes. Selon le Conseil, les incidents qui ont mené au blâme du Conseil montrent bien que ces mesures s'imposent.
Par conséquent, le Conseil exige que CJRN dépose des lignes directrices et une description des autres mécanismes de contrôle portant sur les émissions de tribune téléphonique, dans les trois mois de la date de la présente décision, aux fins de l'approbation du Conseil. Le Conseil rappelle à la titulaire qu'il continuera de surveiller de près le rendement de CJRN, plus particulièrement en ce qui a trait à l'émission qui a suscité le blâme dont il est question dans l'avis public CRTC 1987-196. Lors du prochain renouvellement de la licence, le Conseil examinera la démarche adoptée par la titulaire à l'égard des tribunes téléphoniques ainsi que l'efficacité des lignes directrices et des mécanismes de contrôle mis en place. Le Conseil réitère également que la répétition d'une situation semblable à celle qui a fait l'objet de l'avis public CRTC 1987-196 entraînera le Conseil à prendre des mesures rigoureuses.
Par ailleurs, le Conseil note qu'à quatre reprises au cours de la dernière période d'application de la licence, la titulaire a soumis des rubans-témoins qui étaient soit incomplets, soit inintelligibles. Les paragraphes 8(5) et 8(6) du Règlement stipulent que chaque titulaire doit conserver et fournir au Conseil, sur demande, "un enregistrement magnétique clair et intelligible ou une autre copie conforme de toute matière radiodiffusée", pour une période de quatre semaines de la date de diffusion.
Le Conseil rappelle à la titulaire l'importance de se conformer aux dispositions relatives aux rubans-témoins contenues dans le Règlement et exige qu'elle lui fasse rapport dans les 60 jours de la date de la présente décision, confirmant que l'équipement nécessaire à cet effet est en place et qu'il fonctionne de manière à répondre aux exigences du Règlement.
Dans ce contexte, le Conseil note que la titulaire l'a assuré à l'audience qu'elle avait installé un deuxième appareil d'enregistrement qui se met en marche aussitôt que le premier tombe en panne. La titulaire a également fait savoir qu'à toutes les heures, l'équipement d'enregistrement est vérifié, que l'on s'assure que le son est bon et que tout fonctionne bien.
En ce qui a trait au contenu canadien, le Règlement exige qu'au moins 30 % de toutes les pièces musicales diffusées quotidiennement par les stations MA soient canadiennes. Le Conseil a effectué des analyses de la musique diffusée par CJRN le 10 juillet 1987 qui a révélé un niveau de contenu canadien de 26,3 %. Une analyse subséquente du Conseil de la musique diffusée le 27 novembre 1987, cependant, a révélé que la station se conformait au Règlement avec un niveau de contenu canadien de 34,1 %. Le Conseil rappelle l'importance de veiller à ce que les mesures nécessaires soient prises afin que le Règlement du Conseil soit respecté en tout temps.
La licence est assujettie à la condition que la titulaire respecte les lignes directrices d'autoréglementation de l'ACR relatives aux stéréotypes sexuels, telles que modifiées de temps à autres et approuvées par le Conseil.
Le Secrétaire général
Fernand Bélisle

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