ARCHIVÉ -  Décision CRTC 86-367

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Décision

Ottawa, le 18 avril 1986
Décision CRTC 86-367
DEMANDES EN VUE DE TRANSFÉRER LE CONTROLE DE TÉLÉ-MÉTROPOLE INC. A POWER CORPORATION DU CANADA
Montréal (Québec) - 853209500 - 860059500
Table des matières
LES PARTIES EN CAUSE
LA TRANSACTION
CONSIDÉRATIONS RELATIVES A LA POLILITIQUE EN MATIERE DE PROPRIÉTÉ
LES AVANTAGES PROPOSÉS
a) Expertise de Power Corporation dans le domaine des affaires
b) Expansion des marchés d'exportation
c) Réinvestissement des profits
d) Contenu canadien
e) Maintien des acquis
LA DÉCISION
LES INTERVENANTS
Lors d'une audience publique tenue à Montréal les 17 et 18 mars 1986, le Conseil a étudié des demandes présentées par élé-Métropole Inc. (Télé-Métropole) en vue d'obtenir l'autorisation de transférer le contrôle effectif de la compagnie titulaire, au moyen du transfert de 1 434 318 actions avec droit de vote de la catégorie A et de 1 746 958 actions de la catégorie B, de la Succession J.A. DeSève, de la Fondation J.A. DeSève et de Ciné-Monde Inc. à Power Corporation du Canada (Power Corporation).
Pour les motifs qui sont exposés ci-dessous, le Conseil annonce qu'il refuse les demandes présentées en vue de transférer le contrôle effectif de Télé-Métropole à Power Corporation.
LES PARTIES EN CAUSE
Télé-Métropole exerce ses activités principalement dans le domaine de la radiotélédiffusion et les secteurs connexes et se situe parmi les dix plus importantes entreprises de radiodiffusion au Canada.
Télé-Métropole est titulaire de la licence de CFTM-TV Montréal, la première station de télévision privée de langue française en importance au Québec et une des toutes premières stations de télévision canadiennes en terme de production locale. Elle est également propriétaire à 100 % de C.J.P.M.-T.V. Inc., titulaire des licences de CJPM-TV Chicoutimi et de CJPM-TV-1 Chambord et elle détient des intérêts minoritaires (33,5 %) dans Pathonic Communications Inc., laquelle est titulaire des licences de CHEM-TV Trois-Rivières et de CHLT-TV Sherbrooke. Ces intérêts en radiodiffusion détenus par Télé-Métropole font également partie de la transaction en instance.
De plus, parmi les filiales en propriété exclusive de Télé-Métropole qui oeuvrent dans des secteurs connexes, on compte la firme Paul L'Anglais Inc., qui représente les stations du réseau TVA au plan des ventes publicitaires nationales; J.P.L. Productions Inc., qui est dotée d'un important centre de production audio-visuelle; et Sonolab Inc. qui oeuvre notamment dans le secteur de la post-production et du doublage.
Télé-Métropole est également impliquée depuis 1981 dans un programme conjoint d'exploitation de ressources gazières et pétrolières dans l'ouest du pays avec la Westburne Petroleum & Minerals Ltd.
Pathonic Communications Inc., pour sa part, détient le contrôle de TéléCapitale Inc. qui est titulaire des licences de CFCM-TV Québec, CFER-TV Rimouski et son réémetteur de Sept-Iles et elle détient aussi des intérêts minoritaires (34 %) dans TéléInter Rives Ltée, titulaire de la licence de CIMT-TV Rivière-du-Loup.
Conséquemment, Télé-Métropole contrôle à 100 % deux (2) des dix (10) stations affiliées au réseau TVA, dont CFTM-TV qui constitue la tête du réseau, tout en ayant un lien de parenté corporative avec cinq (5) autres au nombre desquelles se trouve les stations les plus importantes du réseau.
La présence de Télé-Métropole à l'échelle provinciale se retrouve non seulement au plan corporatif mais surtout au niveau du rayonnement des émissions produites par la station CFTM-TV Montréal. Outre sa contribution au réseau TVA, dont elle produit la majeure partie des émissions et dont elle détient 16,6 % des actions, elle rend ses productions disponibles aux neuf autres stations membres du réseau TVA ce qui, en général, représente plus de 60 % de toutes les émissions diffusées par les autres stations affiliées à TVA à travers le Québec. Les émissions de CFTM-TV rejoignent ainsi près de 100 % de l'auditoire québécois de langue française et constituent l'essence du deuxième service de télévision de langue française dans cette province.
Les émissions de CFTM-TV sont également mises à la disposition des entreprises de télédistribution à travers le pays par l'entremise du signal de TCTV distribué par satellite par Les Communications Par Satellite Canadien Inc. (CANCOM).
Sur le plan financier, la situation de Télé-Métropole est excellente. Le bénéfice net a oscillé entre 13,7 et 16,1 million de dollars entre 1981 et 1985. Il s'élevait à 15,4 millions de dollars en 1985 sur des recettes nettes totales de 97,8 millions de dollars.
Dans le contexte de la présente transaction, les vendeurs sont la Succession J.A. DeSève, la Fondation J.A. DeSève ainsi que la firme Ciné-Monde Inc. Suite à la décision CRTC 69-395 du 11 décembre 1969, Télé-Métropole est sous le contrôle des cinq exécuteurs testamentaires de la Succession J.A. DeSève. La Fondation J.A. DeSève, pour sa part, est une fondation charitable qui fut établie en 1966. Quant à la firme Ciné-Monde Inc., il s'agit d'une entreprise qui agit présentement comme société de gestion.
Power Corporation, l'acheteur, est une importante société de portefeuille et de gestion dont les activités sont très diversifiées. Elle est contrôlée par M. Paul Desmarais et sa famille par le biais de sociétés associées. Outre ses intérêts dans le secteur des services financiers (Corporation financière Power et ses filiales, dont notamment Le Groupe Investors, La Great-West, compagnie d'assurance-vie et la Montreal Trustco Inc.) et dans le secteur des pâtes et papier (la Consolidated-Bathurst Inc.), Power Corporation détient aussi d'importants intérêts dans le secteur de la presse écrite.
Power Corporation est propriétaire à 100 % de Gesca Ltée qui contrôle La Presse Ltée, l'éditeur du journal La Presse de Montréal, un des principaux quotidiens de la métropole et qui est distribué dans les principales régions du Québec. Power Corporation est également propriétaire à 100 % de Les Publications J.T.C. Inc. qui édite trois quotidiens en province, soit Le Nouvelliste à Trois-Rivières, La Tribune à Sherbrooke et la Voix de l'Est à Granby. Également par l'intermédiaire de Les Journaux Trans-Canada (1982) Inc., Power Corporation contrôle indirectement la station radiophonique CHEF Granby.
D'autre part, M. Paul Desmarais détient à titre personnel des intérêts dans Prades Inc. et Katenac Holdings Limited. Prades Inc. détient notamment le contrôle de Télévision de la Baie des Chaleurs Inc. qui exploite la station CHAU-TV Carleton et ses réémetteurs, affiliée au réseau TVA. Prades Inc. contrôle également des entreprises qui exploitent les stations radiophoniques CKSM Shawinigan et CFLP Rimouski. Pour sa part, la Katenac Holdings Limited contrôle des entreprises de radiodiffusion qui exploitent des stations de télévision et des stations radiophoniques notamment à Kingston, Peterborough, Barrie et Collingwood (Ontario).
Power Corporation détient également des intérêts dans Pargesa Holding S.A., une multinationale européenne dont la majorité des activités se situent dans le domaine des services financiers. Cette dernière contrôle indirectement la Compagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion qui exploite, entre autres, une station de télévision de langue française (RTL) dont les émissions sont captées surtout par les publics français et belge.
Power Corporation affiche une situation financière remarquable tel que l'indique un actif d'environ un milliard de dollars. Selon les résultats non vérifiés de l'année 1985, elle a enregistré un bénéfice net de 152 millions de dollars.
LA TRANSACTION
Power Corporation a convenu d'acheter 1 434 318 actions de classe A avec droit de vote, représentant 99,6 % du droit de vote au sein de Télé-Métropole, ainsi que 1 746 958 actions de classe B sans droit de vote, au prix de 30,75 $ l'action pour un montant de 97,8 millions de dollars, auquel s'ajouterait le rachat par Power Corporation, au moment d'une décision favorable du Conseil, des débentures détenues par la Succession J.A. DeSève et la Fondation J.A. DeSève pour une somme de 7,7 millions de dollars, ce qui porterait la valeur totale de la transaction à 105,5 millions de dollars. Ce faisant, Power Corporation acquerrait ainsi 41 % du capital-actions de Télé-Métropole.
La présente transaction n'implique aucun financement par emprunt, la somme de 97,8 millions de dollars ayant déjà été déposée en fiducie par Power Corporation.
Il ressort de ce qui précède que le Conseil se trouve face à une transaction de toute première importance, surtout si on la considère dans son contexte québécois, autant par les sommes en cause que par l'importance et l'influence des principales parties impliquées et par ses répercussions possibles sur le système de la radiodiffusion en général et sur le secteur de la radiotélédiffusion de langue française au Québec en particulier.
CONSIDÉRATIONS RELATIVES A LA POLITIQUE EN MATIERE DE PROPRIÉTÉ
La question de la propriété des entreprises de radiodiffusion constitue un élément essentiel du mandat de réglementation et de surveillance que la Loi sur la radiodiffusion confère au Conseil pour ce qui est d'atteindre les objectifs fondamentaux de la Loi visant un système de la radiodiffusion canadienne fort.
Outre la condition de propriété canadienne, une des principales caractéristiques de la structure du système de la radiodiffusion canadienne est qu'il doit être suffisamment varié pour atteindre les objectifs exposés à l'alinéa 3 d) de la Loi, qui stipule que:
la programmation offerte par le système de la radiodiffusion canadienne devrait être variée et compréhensive et qu'elle devrait fournir la possibilité raisonnable et équilibrée d'exprimer des vues différentes sur des sujets qui préoccupent le public et que la programmation de chaque radiodiffuseur devrait être de haute qualité et utiliser principalement des ressources canadiennes créatrices et autres.
Étant donné que le Conseil ne sollicite pas de demandes de transferts de propriété ou de contrôle d'entreprises de radiodiffusion, il estime que c'est à la requérante d'un tel transfert qu'il incombe exclusivement de prouver au Conseil que la demande telle que soumise constitue la meilleure proposition dans les circonstances, compte tenu des préoccupations générales du Conseil à l'égard de transactions de cette nature. A cet égard, le Conseil a élaboré des lignes directrices générales qui s'appliquent à l'examen des demandes de changements de propriété ou de contrôle effectif de toutes les classes d'entreprises de radiodiffusion.
Le premier critère que toute requérante doit remplir, c'est que le transfert proposé de propriété ou de contrôle doit entraîner des avantages significatifs et sans équivoque pour les collectivités desservies par les entreprises de radiodiffusion et le système de la radiodiffusion canadienne dans son ensemble et servir l'intérêt public.
Ces lignes directrices n'ont pas été énoncées en détail dans les règlements, expressément pour que le Conseil puisse conserver suffisamment de souplesse pour évaluer chaque demande au mérite, d'après les propositions et les engagements globaux de la requérante, particulièrement au chapitre de la programmation et du service aux collectivités en cause, et compte tenu de considérations d'ordre régional, social, culturel, économique et financier.
Compte tenu de la mesure dans laquelle les transferts de propriété peuvent varier, tant par leur ampleur que par leur complexité, le Conseil doit, lors de l'examen de la demande dont il est saisi, être convaincu que les avantages, tant ceux qu'il est possible de quantifier du point de vue financier que les autres qui sont difficilement mesurables monétairement, correspondent à l'ampleur de la transaction et reflètent les responsabilités à assumer, les caractéristiques et la viabilité des entreprises de radiodiffusion en cause et le niveau des ressources dont l'acheteur peut disposer, c.-à-d., programmation, gestion, finances et techniques.
Les avantages provenant de la transaction pourraient comprendre, notamment, des améliorations à la qualité du service, des initiatives et des dépenses accrues au chapitre des émissions canadiennes, des contributions au développement des talents canadiens de langues anglaise et(ou) française et des industries de production connexes (films, disques, vidéos, scénarios et développement, et autres). Il pourrait également s'agir de capacités accrues en matière d'expertise, de gestion et de leadership, de la diffusion élargie à l'échelle nationale et internationale d'émissions canadiennes populaires de haute qualité, et d'autres propositions semblables visant à favoriser le système de la radiodiffusion canadienne.
La concentration de la propriété au sein du système de la radiodiffusion ne préoccupe pas nécessairement en elle-même le Conseil, pourvu qu'il continue d'exister un degré réel de diversité de propriété et de sources d'émissions de nature à s'assurer que les objectifs de la Loi soient atteints. Compte tenu du milieu fortement concurrentiel qui existe actuellement dans tous les marchés du secteur des communications, ainsi que des frais et des risques élevés en cause, la structure de la propriété doit sans aucun doute se composer d'entreprises de radiodiffusion de tailles diverses, y compris de grandes entreprises qui sont dotées de ressources importantes, qui sont suffisamment fortes pour concurrencer les entreprises étrangères et qui ont la capacité de produire des émissions canadiennes de qualité concurrentielle. Le Conseil continuera de traiter ces questions sur une base individuelle et il devra être convaincu que l'acheteur a prouvé que les avantages d'une telle concentration l'emportent nettement sur les inconvénients et que la transaction sert l'intérêt public.
Dans le cas de demandes mettant en cause la propriété mixte des médias, la principale préoccupation est d'assurer que, dans toute région donnée, il continue d'exister une diversité d'opinions et de sources d'information et de radiodiffusion qui permette d'offrir aux collectivités desservies des vues différentes sur des sujets qui préoccupent le public. Cette préoccupation fondamentale à l'égard de la diversité de l'information constitue un élément essentiel de la structure et de la programmation du système de la radiodiffusion de toute société démocratique. C'est pourquoi il incombe à l'acheteur de prouver que des mesures de contrôle convenables ont été prises pour protéger cette diversité indispensable. Au nombre de ces mesures pourraient se trouver des politiques et pratiques administratives et opérationnelles appropriées, le respect d'un code d'éthique éditoriale strict, l'établissement de comités consultatifs ou d'autres mesures et mécanismes de ce genre élaborés en consultation avec les collectivités en cause.
A cet égard, le Conseil s'attendrait à recevoir des plans et des engagements détaillés, de manière à pouvoir évaluer la nature, l'ampleur, les répercussions et la pertinence des mesures de contrôle proposées.
Dans chaque cas, toutefois, avant même que le Conseil soit disposé à étudier des préoccupations précises telles les répercussions possibles de la concentration ou de la propriété mixte des médias, il doit d'abord être convaincu que l'acheteur a rempli le premier critère et a prouvé que la transaction entraînera des avantages clairs, significatifs et sans équivoque pour le système de la radiodiffusion canadienne dans son ensemble et les localités en cause et que son approbation sert l'intérêt public.
LES AVANTAGES PROPOSÉS
Face à une transaction d'une telle envergure, le Conseil a donc procédé d'abord à un examen minutieux des demandes et des informations obtenues à l'audience afin de déterminer si le transfert du contrôle de Télé-Métropole à Power Corporation offrait des avantages significatifs et sans équivoque pour les collectivités desservies, le système de la radiodiffusion canadienne dans son ensemble et s'il sert l'intérêt public.
En ce qui a trait à la Succession J.A. DeSève et à ses divers éléments, il a été démontré lors de l'audience qu'il était à l'avantage de celle-ci de se départir de ses intérêts dans Télé-Métropole afin de s'assurer de revenus accrus, stables et permanents. On a souligné que la Succession s'assurait ainsi d'une source de revenus annuels au moins trois fois plus importante qu'actuellement et qu'elle disposerait dorénavant de l'autonomie et de la stabilité nécessaires pour effectuer une meilleure planification de ses donations aux institutions charitables ou autres qu'elle soutient.
D'autre part, en ce qui a trait à Télé-Métropole, Power Corporation a indiqué que sa participation entraînerait les avantages suivants:
a) Expertise de Power Corporation dans le domaine des affaires
Power Corporation a déclaré qu'elle mettrait son expertise dans le domaine des affaires à la disposition de Télé-Métropole. Power Corporation a certainement acquis au cours des ans une expertise enviable au Canada et dans le monde, et cela dans des domaines diversifiés. Le Conseil doit tout de même constater que Télé-Métropole a su au cours des ans conserver dans son domaine une position enviable parmi les dix entreprises de radiodiffusion les plus importantes au Canada et qu'elle demeure l'une des entreprises de radiotélédiffusion les plus rentables au pays.
b) Expansion des marchés d'exportation
Power Corporation a précisé qu'elle favoriserait l'expansion des marchés d'exportation de Télé-Métropole grâce à la participation de Power Corporation dans Pargesa Holding S.A. et, indirectement, dans la Compagnie Luxembourgeoise de Télédiffusion (RTL). Le Conseil estime que cette association représenterait un avantage très significatif pour le développement de la télévision de langue française au Canada et au Québec en particulier. Étant donné le haut niveau de développement et de maturité de Télé-Métropole et les défis nombreux qu'elle doit relever dans un environnement de plus en plus concurrentiel, cette association éventuelle avec des partenaires européens entraînerait sans nul doute des retombées très significatives, notamment dans le domaine de la co-productions d'émissions télévisées.
Toutefois, aucun plan concret n'a été soumis au Conseil. Power Corporation a indiqué que des sessions d'étude ont eu lieu afin d'identifier les secteurs éventuels de collaboration entre les deux parties et qu'un comité, formé de représentants de Télé-Métropole et de la Compagnie Luxembourgeoise de Télé-diffusion, sous la supervision de Power Corporation, a été chargé d'étudier davantage les secteurs possibles de collaboration.
c) Réinvestissement des profits
Le Conseil a noté également l'engagement pris par Power Corporation à l'audience de réinvestir 60 % des profits de Télé-Métropole dans l'entreprise et de répartir les 40 % restants en dividendes aux actionnaires. Le Conseil note que ceci correspond pratiquement à la politique suivie par Télé-Métropole.
d) Contenu canadien
Power Corporation a également précisé qu'elle maintiendrait, sans l'augmenter, le niveau actuel du contenu canadien des émissions diffusées par Télé-Métropole.
e) Maintien des acquis
Power Corporation a indiqué qu'elle estimait que le rendement de Télé-Métropole était "excellent" et qu'à son avis, "le maintien d'une telle performance peut en lui-même constituer un avantage important". En conséquence, Power Corporation a souscrit aux engagements qui étaient relevés dans la dernière décision renouvelant la licence de CFTM-TV (décision CRTC 85-677 du 22 août 1985) et s'est engagée à corriger les déficiences "mineures" qui y étaient signalées sans préciser quels moyens elle entendait prendre pour ce faire.
Power Corporation a indiqué que les objectifs suivants seraient fixés au conseil d'administration de Télé-Métropole:
1) consacrer annuellement au moins 1 million de dollars à la réalisation d'émissions par des producteurs indépendants au cours des 5 années suivant une décision favorable;
2) coopérer davantage avec Téléfilm Canada et la Société générale du cinéma pour assurer la création de produits de qualité;
3) apporter une contribution positive à la solution des problèmes du doublage d'émissions en français grâce aux contacts européens;
4) contribuer à Musicaction en allouant une subvention de 50 000 $ par année au cours de chacune des 5 prochaines années;
5) porter les émissions sous-titrées pour malentendants à 2 heures et 30 minutes par semaine un an après l'approbation de la transaction;
6) faciliter la distribution des émissions de Télé-Métropole aux francophones hors Québec; et
7) effectuer toute diversification dans le domaine des communications et autres domaines connexes et se dessaisir des intérêts actuels de Télé-Métropole dans les propriétés gazières et pétrolières.
Afin d'être en mesure d'évaluer si les objectifs fixés par Power Corporation pouvaient contribuer de façon tangible et significative à l'amélioration du service offert au public et au système de la radiodiffusion en général, le Conseil a interrogé la titulaire actuelle lors de l'audience sur ses réalisations depuis le dernier renouvellement de sa licence en août 1985.
1) En ce qui a trait à la contribution de Télé-Métropole au secteur indépendant de la production, il est apparu que celle-ci avait investi au-delà de 600 000 $ depuis juin dernier dans des productions indépendantes ou des coproductions, ceci sans compter son engagement d'investir 156 000 $ dans une série télévisée qui a été abandonnée pour des raisons hors du contrôle de Télé-Métropole, ainsi que son engagement d'investir une somme de 250 000 $ sur une période d'un an dans la recherche et la création de nouvelles émissions.
2) D'après les renseignements à sa disposition, le Conseil a pu constater que la collaboration de Télé-Métropole avec Téléfilm Canada n'a jamais été aussi étroite qu'en 1985. Power Corporation, pour sa part, n'a soumis aucun projet précis de collaboration, ni aucune stratégie différente de celle de Télé-Métropole.
3) Le Conseil note qu'il n'y a pas eu de progrès relativement au problème du doublage d'émissions en français. D'autre part, Power Corporation a indiqué qu'il s'agit d'un des sujets qui doit être discuté avec les partenaires européens lors de rencontres à venir.
4) En ce qui a trait à l'appui à la production et à la diffusion de musique vocale de langue française, Télé-Métropole a déclaré qu'elle avait fait des efforts particuliers à cet égard dans le cadre de ses émissions télévisées. Tel que souligné à l'audience, le Conseil a mis en perspective la somme de 50 000 $ devant être consacrée à Musicaction et qui est proposée par Power Corporation dans le cadre de la présente transaction, avec les sommes beaucoup plus importantes engagées lors de transactions récentes de moindre envergure touchant l'acquisition de stations radiophoniques de langue anglaise à Montréal.
La carence du côté de la production de musique vocale de langue française a atteint un seuil critique et l'on doit s'attendre, de la part du plus important télédiffuseur privé de langue française au Canada, à une compréhension de l'importance de cette situation face aux objectifs du système de la radiodiffusion, et à une implication et à des efforts appropriés.
5) A l'égard des émissions sous-titrées pour les malentendants, Télé-Métropole s'est engagée à diffuser 3 heures et 30 minutes par semaine d'émissions sous-titrées d'ici septembre 1986. De plus, la principale émission qu'elle produit pour le réseau TVA, soit l'émission quotidienne "Les Nouvelles TVA" est sous-titrée depuis mars 1986. Le Conseil constate que les engagements de Télé-Métropole recoupent et même dépassent ceux de Power Corporation.
6) En ce qui a trait à l'objectif visant à faciliter la distribution des émissions de Télé-Métropole aux francophones hors Québec, le Conseil fait remarquer que la CANCOM offre déjà les émissions de CFTM-TV par satellite à travers le pays par l'intermédiaire de TCTV depuis 1981. Le Conseil note, de plus, que Power Corporation n'a pas précisé par quels moyens elle comptait améliorer la situation présente.
7) Quant au projet de se dessaisir des propriétés gazières et pétrolières, Télé-Métropole a indiqué à l'audience qu'elle avait déjà résolu de restreindre considérablement son implication dans ce domaine et qu'il était possible qu'elle se dessaisisse éventuellement de tous ses intérêts actuels. Quant à Power Corporation, elle a fait part de son intention ferme de se départir de ces intérêts.
LA DÉCISION
Tout en ne mettant pas en doute la capacité ou la volonté de Power Corporation de remplir tous les engagements pris par Télé-Métropole lors du dernier renouvellement de sa licence et de maintenir le haut niveau de service actuel, le Conseil estime que la requérante n'a pas démontré, à sa satisfaction, que certains avantages qu'elle proposait n'étaient pas déjà offerts ou proposés par Télé-Métropole, ou ne pouvaient pas être offerts par celle-ci. De plus, aucun des autres avantages proposés n'étaient suffisamment étayés ou détaillés pour en permettre l'analyse mentionnée plus haut.
Conséquemment, après avoir soigneusement analysé les demandes telles que soumises ainsi que les déclarations faites à l'audience publique, le Conseil en a conclu que la requérante n'a pas démontré, à sa satisfaction, que le transfert de contrôle proposé entraînerait des avantages significatifs et sans équivoque à la fois pour les collectivités desservies et le système de la radiodiffusion canadienne dans son ensemble et qu'il sert l'intérêt public. En conséquence, le Conseil refuse les demandes telles que présentées en vue de transférer le contrôle effectif de Télé-Métropole à Power Corporation.
Étant donné la rentabilité élevée de Télé-Métropole et la position prépondérante qu'elle occupe présentement, le Conseil est convaincu que celle-ci doit continuer à jouer un rôle déterminant dans le développement de la télévision de langue française au Canada. Le Conseil demeurera disposé à étudier des demandes en vue d'acquérir Télé-Métropole, si les propriétaires actuels juge qu'il est toujours de leur intérêt de s'en départir. Toutefois, conformément aux lignes directrices exposées dans la présente décision, le Conseil exigera des parties intéressées qu'elles fassent la preuve, de façon non équivoque, que leurs propositions entraînent des avantages tangibles et significatifs.
LES INTERVENANTS
Les présentes demandes ont soulevé beaucoup d'intérêt dans le public, notamment au Québec, en raison notamment de l'importance et de l'implication dans le milieu des principales parties en cause, soit Télé-Métropole et Power Corporation, et des préoccupations que soulevaient les demandes à l'égard de la concentration de la propriété et de la propriété mixte des médias.
Le Conseil a reçu onze interventions portant sur ces demandes, dont quatre favorisaient la transaction, cinq s'y opposaient et deux émettaient des commentaires à leur égard. Neuf de ces intervenants ont comparu à l'audience publique. Les interventions favorables ont été présentées par M. Claude Fournier, le Syndicat général du cinéma et de la télévision (section Télé-Métropole), le Syndicat canadien de la Fonction publique et l'École polytechnique de Montréal. Celles en opposition provenaient de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec, du Syndicat des professeurs de l'Université Laval, de la Fédération nationale des communications, de l'Institut canadien d'éducation des adultes laquelle était accompagnée d'une pétition qui a été acceptée par les parties à l'audience, et du Comité social Centre-Sud de Montréal, alors que des commentaires ont été reçus de la Conférence nationale des conseils régionaux des communications du Québec et de l'Association des techniciens de Télé-Métropole.
Les intervenants en faveur de la transaction estimaient que celle-ci offrait comme avantage de favoriser le développement et la croissance future de Télé-Métropole, particulièrement à cause de la possibilité d'accès au marché européen de langue française. Les représentants syndicaux ont tout spécialement souligné la nécessité de bénéficier de sang nouveau au niveau de la direction et de l'orientation de Télé-Métropole, d'augmenter les ressources consacrées à la programmation et de réinvestir les profits dans les opérations et, pour ces raisons, souhaitaient l'approbation de la transaction.
Pour leur part, les intervenants opposés aux demandes voyaient la transaction comme une menace à la diversité de l'information, en raison de la propriété mixte de la station de télévision CFTM-TV et du journal quotidien La Presse qui en résulterait. Ils ont notamment précisé qu'à leur avis, le fait que les salles de nouvelles de CFTM-TV et de La Presse soient gérées de façon indépendante ne constituait pas pour eux une garantie suffisante, même en prenant en considération les protections prévues à cet effet dans les conventions collectives des journalistes et le projet de Power Corporation d'établir une politique en matière d'information et d'affaires publiques à CFTM-TV. La Fédération professionnelle des journalistes du Québec et le Syndicat des professeurs de l'Université Laval ont ajouté que, pour eux, le seul compromis acceptable serait que Power Corporation consente à se départir de ses intérêts dans la presse écrite. On a également identifié le phénomène de l'auto-censure des journalistes comme étant, dans les circonstances, un danger latent vis-à-vis la liberté professionnelle des journalistes. On estimait que la concentration de la propriété qui résulterait d'une approbation de la transaction doit être évaluée en tenant compte qu'elle aurait lieu dans un marché déjà restreint aux dimensions du Québec. Par ailleurs, les commentaires reçus des autres intervenants recoupaient sensiblement les mêmes préoccupations.
Le Conseil estime que des questions fondamentales ont été soulevées par les intervenants et il désire les remercier pour leur participation éclairée à la présente instance. Comme le Conseil a déterminé que la requérante n'a pas satisfait au premier critère, soit qu'elle n'a pas démontré de façon évidente que l'approbation de la transaction entraînerait des avantages significatifs et sans équivoque, le Conseil n'a pas eu à se prononcer, dans le contexte des présentes demandes, sur les préoccupations particulières soulevées à l'égard de la concentration et de la propriété mixte des médias.
Le Conseil réitère, comme il l'a déclaré par le passé dans de nombreuses décisions, qu'il accorde une grande attention aux préoccupations soulevées par les intervenants, et aux caractéristiques propres à chaque marché, soit celui du Québec dans le cas présent. En outre, lors de l'étude de toute transaction ultérieure qui soulèverait les mêmes préoccupations, le Conseil exigera que les requérantes démontrent que les avantages significatifs que comportent leurs propositions, ajoutés aux mesures de contrôle prévues, l'emportent de façon non équivoque sur les désavantages potentiels.
Le Secrétaire général
Fernand Bélisle

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