Décision de télécom CRTC 2024-8

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Référence : 2023-45

Ottawa, le 11 janvier 2024

Dossier public : 1011-NOC2023-0045

Optitel Mobile Inc. – Défaut d’obtenir le statut de participant aux activités de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision inc.

Sommaire

Le Conseil conclut qu’Optitel Mobile Inc. (Optitel) a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi sur les télécommunications (Loi), commettant ainsi une violation pour une période déterminée, en négligeant d’obtenir le statut de participant aux activités de la Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision inc. (CPRST) du 12 mai 2022 à la date de sa dissolution soit le 31 juillet 2022.

Le Conseil conclut que la contravention de Optitel à l’article 24.1 de la Loi constitue une violation aux fins de l’article 72.001. Le Conseil conclut également que Robert Trudeau, le dirigeant de Optitel, est responsable de la violation commise par Optitel.

Le Conseil n’impose pas une sanction administrative pécuniaire (SAP) à Optitel ou à Robert Trudeau en relation avec la violation commise par l’entreprise, car celle-ci a été dissoute et n’offre plus de services qui relèvent du mandat de la CPRST. Par conséquent, sa mise en conformité n’est plus une option ou un objectif.

Même si le Conseil n’impose pas de SAP à Optitel ou à Robert Trudeau pour le moment, sa conclusion quant à la responsabilité peut être prise en considération en cas d’infractions futures à la Loi.

Contexte

  1. La Commission des plaintes relatives aux services de télécom-télévision inc. (CPRST)Note de bas de page 1 est un organisme indépendant qui aide les Canadiens qui n’ont pas été en mesure de résoudre leurs différends avec leur fournisseur de services de télécommunication (FST) concernant des services de télécommunication faisant l’objet d’une abstention de réglementation. La CPRST fait partie intégrante du marché des services de télécommunication déréglementés et offre un service précieux aux consommateurs canadiens.
  2. Afin de s’assurer que les consommateurs canadiens ont un recours lorsqu’ils ne peuvent pas régler une plainte avec leur FST, le Conseil exige, depuis 2011, que tous les FST qui offrent des services qui relèvent du mandat de la CPRST participent aux activités de la CPRST (obligation de participer aux activités de la CPRST).
  3. L’obligation de participer aux activités de la CPRST a été établie conformément aux articles 24 (dans le cas des entreprises de services de télécommunication) et 24.1 (dans le cas des entreprises autres que les entreprises de services de télécommunication, aussi appelées revendeurs) de la Loi sur les télécommunications (Loi) comme condition pour offrir ou fournir des services de télécommunicationNote de bas de page 2. L’obligation de participer aux activités de la CPRST est déclenchée 30 jours civils après la date à laquelle la CPRST informe une personne qu’elle a reçu une plainte relative aux services de télécommunication que cette personne fournit et qui relèvent du mandat de la CPRST (plainte relevant de son mandat).
  4. Pour devenir un participant aux activités de la CPRST, le FST doit signer la Convention de participation de la CPRST, un contrat par lequel le participant s’engage notamment à respecter la Convention de participation ainsi que les règlements administratifs et le Code de procédures de la CPRST, à accorder et à honorer toutes les réparations que la CPRST lui impose et à coopérer de bonne foi à toute enquête menée par la CPRST.
  5. Le Conseil prend au sérieux la non-conformité aux exigences réglementaires qu’il impose aux FST et il prend les mesures à sa disposition qu’il estime les plus appropriées dans les circonstances pour favoriser la conformité.

Régime de sanctions administratives pécuniaires

  1. Depuis 2014, la Loi prévoit un régime général de sanctions administratives pécuniaires (SAP)Note de bas de page 3 qui permet au Conseil d’imposer des SAP aux personnes qui contreviennent à la Loi, ou à un règlement ou à une décision prise par le Conseil en vertu de la Loi. L’objectif d’une pénalité aux termes de ce régime est de promouvoir le respect de la Loi, des règlements et des décisions du Conseil.
  2. Le Conseil a énoncé son approche globale dans le cadre du régime général des SAP dans le bulletin d’information de Conformité et Enquêtes et de Télécom 2015-111.

Instance de justification

  1. Dans l’avis de consultation de télécom 2023-45 (avis), le Conseil a amorcé une instance de justification concernant Optitel Mobile Inc. (Optitel) parce que l’entreprise n’était toujours pas devenue un participant aux activités de la CPRST en date de l’avis.
  2. Plus particulièrement, le Conseil a invité Optitel à justifier pourquoi il ne devrait pas conclure qu’elle a commis une violation, aux termes de l’article 72.001 de la LoiNote de bas de page 4, en ne respectant pas, au cours de la période visée, l’obligation de participer aux activités de la CPRST. Le Conseil a également demandé au dirigeant du FST de justifier pourquoi il ne devrait pas être tenu responsable de toute violation commise par l’entreprise qu’il dirige. Le Conseil a identifié Robert Trudeau comme étant le directeur d’Optitel.
  3. Le Conseil a également ordonné à Optitel de justifier pourquoi, s’il conclut qu’elle a commis une violation en ne respectant pas l’obligation de participer aux activités de la CPRST, il ne devrait pas lui imposer une SAP de 50 000 $. Le Conseil a également demandé à Robert Trudeau de justifier pourquoi, s’il conclut qu’il doit être tenu responsable d’une violation commise par l’entreprise qu’il dirige, il ne devrait pas lui imposer une SAP de 15 000 $.
  4. Le Conseil a aussi sollicité des observations sur une éventuelle mesure d’application supplémentaire sous forme d’ordonnance exécutoire. Le Conseil a ordonné à Optitel de justifier pourquoi, s’il conclut qu’elle a commis une violation, il ne devrait pas imposer une ordonnance exécutoire exigeant qu’Optitel prenne toutes les mesures nécessaires pour participer aux activités de la CPRST dans les 60 jours suivant la date de l’ordonnance exécutoire. Le Conseil a également demandé à Robert Trudeau de justifier pourquoi, s’il est tenu responsable des violations commises par l’entreprise qu’il dirige, il ne devrait pas être nommé dans l’ordonnance exécutoire, ce qui le rendrait également responsable de s’assurer que l’entreprise prend les mesures qui s’imposent pour participer aux activités de la CPRST.
  5. Le Conseil a également désigné Robert Trudeau partie à l’instance, et a donné avis que s’il ne fournissait pas d’information pour justifier pourquoi il ne devrait pas être tenu responsable de toute violation commise par Optitel, le Conseil pourrait tirer une conclusion défavorable.
  6. Le Conseil n’a reçu aucune intervention remettant en question les éléments de preuve fournis par la CPRST, bien que Robert Trudeau ait fourni un affidavit affirmant qu’Optitel avait cessé ses activités en juillet 2022.

Questions

  1. Le Conseil a déterminé qu’il devait examiner les questions suivantes dans la présente décision :
    • Optitel a-t-elle contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, commettant ainsi une violation, en négligeant de participer aux activités de la CPRST?
    • Si Optitel a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, le Conseil devrait-il trouver son directeur, Robert Trudeau, personnellement responsable de la violation commise par Optitel?
    • Si Optitel a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, le Conseil devrait-il imposer une SAP à Optitel et une SAP à Robert Trudeau? Dans l’affirmative, quels devraient être les montants des SAP?

Optitel a-t-elle contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, commettant ainsi une violation, en négligeant de participer aux activités de la CPRST?

Contexte
  1. L’article 24.1 de la Loi permet au Conseil d’imposer directement des conditions de service aux personnes autres que les entreprises de télécommunication canadiennes (c.-à-d. les entreprises autres que les entreprises de télécommunication) qui offrent des services de télécommunication.
  2. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion et de télécom 2016-102, le Conseil a obligé directement tous les FST à participer aux activités de la CPRST, comme suit :

    45. […] le Conseil exige, en vertu des articles 24 (dans le cas des entreprises de télécommunication) et 24.1 (dans le cas des entreprises autres que les entreprises de télécommunication) de la [Loi], comme condition pour offrir et fournir des services de télécommunication, que,

    […]

    • toute personne qui ne participe pas au CPRST en date du 17 mars 2016 devienne et demeure un participant au CPRST 30 jours civils après la date à laquelle le CPRST informe cette personne que le CPRST a reçu une plainte liée aux services de télécommunication visés par le mandat du CPRST.
  3. Avant la publication de l’avis, la CPRST a fourni au Conseil des éléments de preuve concernant ses communications avec Optitel pour informer l’entreprise qu’une plainte avait été reçueNote de bas de page 5, déclenchant l’obligation de participer aux activités de la CPRST. Les éléments de preuve des communications entre la CPRST et Optitel ont été intégrés au dossier de l’instance et résumés à l’annexe 1 de l’avis.
  4. Le personnel du Conseil a également communiqué avec Optitel pour s’assurer qu’elle était directement informée de l’obligation de participer aux activités de la CPRST et des conséquences possibles du défaut de s’y conformer.
  5. De plus, le 2 mars 2023, le personnel du Conseil a informé Robert Trudeau par courriel que l’avis avait été publié et le Conseil est resté en contact avec lui jusqu’à la clôture du dossier de l’instance le 2 mai 2023.
Analyse du Conseil
  1. L’affidavit que Robert Trudeau a déposé au Conseil affirme qu’Optitel i) a cessé ses activités en juillet 2022; ii) a désactivé ses deux sites Web; et iii) n’opérerait pas dans le domaine des télécommunications sans devenir un participant aux activités de la CPRST.
  2. Robert Trudeau n’a pas fourni de tels éléments de preuve à la CPRST avant le renvoi. En outre, il n’a pas fourni ces renseignements au personnel du Conseil au cours de la phase de consultation en matière de conformité, avant que l’instance de justification soit amorcée.
  3. Dans les cas précédents, bien que la participation aux activités de la CPRST soit requise 30 jours civils après la date à laquelle la CPRST informe le FST qu’elle a reçu une plainte dans le champ d’application à son endroit, le Conseil a utilisé la date de renvoi de la CPRST pour déterminer le début de la période de non-conformité, car c’est le moment où le Conseil a officiellement commencé à traiter le cas de non-conformité. Toutefois, le Conseil a été saisi du cas d’Optitel après que l’entreprise a cessé ses activités. Par conséquent, le Conseil estime que la date à laquelle Optitel était tenue de devenir un participant aux activités de la CPRST correspondait au début de la période de non-conformité et que la date à laquelle elle a cessé ses activités correspondait à la fin de la période de non-conformité.
  4. Aucun élément de preuve ou argument figurant dans le dossier de l’instance ne remet en question les éléments de preuve fournis par la CPRST.
  5. Optitel était tenue de devenir un participant aux activités de la CPRST à compter du 12 mai 2022, soit 30 jours après avoir été informée de cette obligation par la CPRST le 12 avril 2022. L’entreprise n’a donc pas respecté son obligation de participer aux activités de la CPRST à partir du 12 mai 2022. En outre, il semble que l’entreprise n’a pas respecté son obligation de participation jusqu’à ce qu’elle cesse ses activités le 31 juillet 2022.
  6. Par conséquent, il semble qu’Optitel ait enfreint l’obligation de participation aux activités de la CPRST du 12 mai 2022, date à laquelle elle était tenue, conformément à la réglementation du Conseil, d’adhérer à la CPRST, au 31 juillet 2022, date à laquelle l’entreprise a cessé ses activités.
  7. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu’Optitel a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, commettant ainsi une violation pour une période déterminée, en négligeant d’obtenir le statut de participant aux activités de la CPRST, de la date à laquelle elle était tenue de devenir un participant aux activités de la CPRST, le 12 mai 2022, à la date à laquelle elle a cessé ses activités, le 31 juillet 2022.

Si Optitel a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, le Conseil devrait-il trouver son directeur, Robert Trudeau, personnellement responsable de la violation commise par Optitel?

Contexte
  1. Conformément à l’article 72.008 de la Loi, en cas de commission par une personne morale d’une violation, ceux de ses dirigeants, administrateurs ou mandataires qui l’ont ordonnée ou autorisée, ou qui y ont consenti ou participé, sont responsables de la violation, que la personne morale fasse ou non l’objet de procédures en violation.
Analyse du Conseil
  1. Dans l’avis, Robert Trudeau a été identifié et désigné partie à l’instance en tant que directeur d’une entreprise qui fournit des services de télécommunication.
  2. Le Conseil a estimé qu’il y avait des éléments de preuve indiquant que Robert Trudeau était au courant de l’obligation de participer aux activités de la CPRST et qu’il n’avait pas assuré la conformité du FST qu’il dirigeait. Lors des discussions informelles concernant la conformité menées par le personnel du Conseil avant la publication de l’avis, Robert Trudeau n’a fourni aucune justification ou aucun élément preuve pour expliquer pourquoi il n’avait pas respecté cette obligation.
  3. Robert Trudeau a reçu un préavis suffisant pour l’informer qu’il pourrait être tenu responsable de toute violation commise par Optitel, et a eu plusieurs occasions de présenter des éléments de preuve et des observations tout au long de l’instance de justification, mais il ne l’a pas fait.
  4. Comme il incombait à Robert Trudeau de démontrer pourquoi il ne devrait pas être tenu responsable de toute violation commise par Optitel, ce qu’il n’a pas fait, le Conseil conclut que Robert Trudeau est responsable de la violation commise par Optitel.

Si Optitel a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, le Conseil devrait-il imposer une SAP à Optitel et une SAP à Robert Trudeau? Dans l’affirmative, quels devraient être les montants des SAP?

Contexte
  1. Conformément à l’article 72.001 de la Loi, toute contravention à une disposition de la Loi, à un règlement ou à une décision prise par le Conseil en vertu de la Loi constitue une violation exposant son auteur à l’imposition d’une SAP.
  2. Le fait de ne pas respecter les conditions de service imposées en vertu des articles 24 et 24.1 de la Loi constitue une violation, à laquelle le Conseil peut remédier en imposant une SAP conformément à l’article 72.001.
  3. Pour déterminer le montant de la SAP, le Conseil doit tenir compte des critères suivants énoncés au paragraphe 72.002(1) de la Loi :

    a) la nature et la portée de la violation;

    b) les antécédents de l’auteur de la violation en ce qui a trait au respect de la Loi, des règlements ou des décisions prises par le Conseil sous le régime de la Loi;

    c) tout avantage qu’il a retiré de la commission de la violation;

    d) sa capacité de payer le montant de la pénalité;

    e) tout autre critère prévu par règlement;

    f) tout autre élément pertinent.

Analyse du Conseil
  1. Optitel n’a pas expliqué pourquoi elle n’a pas commis une violation de l’article 72.001 de la Loi. Par conséquent, le Conseil conclut que la contravention de Optitel à l’article 24.1 de la Loi constitue une violation aux fins de l’article 72.001.
  2. Toutefois, Optitel a été dissoute et ne fournit plus de services dans le champ de l’enquête. Par conséquent, le Conseil estime que la question est sans objet et que la promotion de la conformité de l’entreprise n’est plus une option ni un objectif.
  3. En outre, le Conseil estime que la question de savoir s’il devrait imposer une SAP à Robert Trudeau, en sa qualité de directeur, est par extension également sans objet. Dans le cas présent, la personne en infraction était Optitel, et non Robert Trudeau. L’imposition d’une SAP à Robert Trudeau, bien qu’elle soit possible en vertu de la Loi, n’aurait aucune utilité pratique étant donné qu’Optitel n’existe plus et qu’il n’y a donc aucune personne (c.-à-d. Optitel) à forcer à se conformer conformément au paragraphe 72.002(2) de la Loi. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil n’impose pas de SAP à Optitel ou à Robert Trudeau en relation avec la violation commise par l’entreprise.
  4. Même si le Conseil n’impose pas de SAP à Optitel ou à Robert Trudeau pour le moment, sa conclusion concernant la responsabilité de Robert Trudeau en tant que directeur d’une entreprise qui a été estimée non conforme peut être prise en considération à l’avenir en cas d’autres infractions à la Loi.
  5. À cet égard, les alinéas 72.002(1)b) et 72.002(1)f) de la Loi prévoient que le montant d’une SAP doit être déterminé en tenant compte des antécédents de conformité de la personne qui a commis la violation ainsi que de tout autre facteur pertinent. La conclusion de la responsabilité de Robert Trudeau est un facteur pertinent que le Conseil pourrait prendre en compte pour déterminer le montant d’une SAP imposée à Robert Trudeau, et toute entreprise qu’il dirige, dans toute instance future du Conseil le concernant ou concernant son entreprise.

Conclusion

  1. Le Conseil conclut qu’Optitel a contrevenu à l’article 24.1 de la Loi, commettant ainsi une violation pour une période déterminée, en négligeant d’obtenir le statut de participant aux activités de la CPRST, et ce, à partir de la date à laquelle elle était tenue de devenir un participant aux activités de la CPRST, le 12 mai 2022, jusqu’à la date à laquelle Optitel a cessé ses activités, le 31 juillet 2022.
  2. Le Conseil conclut que la contravention d’Optitel à l’article 24.1 de la Loi constitue une violation aux fins de l’article 72.001.
  3. Le Conseil conclut que Robert Trudeau est responsable de la violation commise par Optitel, en vertu de l’article 72.008 de la Loi.
  4. Le Conseil n’impose pas de SAP ni à Optitel ni à Robert Trudeau en relation avec la violation commise par l’entreprise, car celle-ci a été dissoute et n’offre plus de services qui relèvent du mandat de la CPRST.
  5. Les conclusions du Conseil en matière de non-conformité peuvent être prises en considération en cas de violations futures à la Loi.

Instructions

  1. Le Conseil estime que ses conclusions dans la présente décision sont conformes aux alinéas 2a), 2d) et 17a) des Instructions de 2023Note de bas de page 6. En concluant qu’il y a eu violation de l’obligation de participer aux activités de la CPRST, le Conseil encourage le respect des règles de la CPRST et protège les droits des consommateurs. Les conclusions du Conseil favorisent également la concurrence en s’efforçant de mettre les FST sur un pied d’égalité, sans pénaliser excessivement ceux qui ne font plus partie du secteur.

Secrétaire général

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