ARCHIVÉ – Décision de télécom CRTC 2015-482

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Ottawa, le 28 octobre 2015

Numéro de dossier : 8620-B96-201505223

Bruce Power Demande de mise en place d’un service d’alerte public sans fil

Le Conseil rejette la demande produite par Bruce Power, dans laquelle elle réclamait la mise en place immédiate d’un service d’alerte public sans fil en cas d’urgence à l’aide des technologies disponibles. Cependant, le Conseil reconnaît l’importance d’un tel service pour protéger la vie des Canadiens, et annonce donc son intention de lancer une instance publique en bonne et due forme sur la question d’un service d’alerte public sans fil d’ici la fin du premier trimestre de 2016.

Introduction

  1. Le Conseil a reçu une demande de Bruce Power, datée du 29 mai 2015, dans laquelle Bruce Power demandait au Conseil d’ordonner aux fournisseurs de services sans fil (FSSF) de mettre en place un service d’alerte public sans fil (APSF). Bruce Power a joint à sa demande des lettres d’appui de la municipalité de Kincardine, de la ville de Saugeen Shores et des Laboratoires nucléaires canadiens.
  2. Bruce Power a fait valoir que comme la grande majorité des Canadiens sont propriétaires d’appareils mobiles et qu’ils les transportent avec eux toute la journée, la diffusion d’alertes sur ces appareils permettrait de les aviser facilement de menaces imminentes à la vie et aux biens.
  3. Par conséquent, Bruce Power a demandé que le Conseil :
    • exige des FSSF qu’ils offrent un service d’alerte public sans fil et diffusent ces alertes d’ici le 30 septembre 2015;
    • ordonne aux FSSF qu’ils utilisent des technologies et des solutions existantes;
    • ordonne aux FSSF de mettre en place une solution de service d’APSF qui n’est pas discriminatoire à l’endroit des Canadiens qui n’ont pas d’appareils compatibles ou qui ne sont pas desservis par des réseaux LTE (technologie d’évolution à long terme).
  4. Le Conseil a reçu des interventions concernant la demande de Bruce Power de la part d’administrations municipales et de gouvernements provinciaux, de FSSF, d’organismes de l’industrie et de particuliers. On peut consulter sur le site Web du Conseil le dossier public de l’instance, lequel a été fermé le 13 juillet 2015. On peut y accéder à l’adresse www.crtc.gc.ca ou au moyen du numéro du dossier indiqué ci-dessus.

Contexte

  1. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-444, le Conseil a annoncé que les entreprises de distribution de radiodiffusion devront diffuser des messages d’alerte en cas d’urgence aux Canadiens.
  2. La politique réglementaire est l’aboutissement d’un processus public au cours duquel le Conseil a examiné la nécessité d’une intervention réglementaire pour veiller à ce que les Canadiens soient informés des dangers imminents, et que les alertes en cas d’urgence enregistrées dans le Système d’agrégation et de dissémination national d’alertes soient diffusées au grand public par les diffuseurs.
  3. Dans la politique réglementaire, le Conseil a fortement encouragé l’utilisation des médias numériques et plateformes mobiles pour avertir le public de tout danger actuel ou imminent, surtout que les Canadiens utilisent de plus en plus couramment les appareils mobiles. Le Conseil a aussi noté que Sécurité publique Canada a demandé au Comité directeur du CRTC sur l’interconnexion (CDCI) de commencer une nouvelle tâche pour faciliter l’élaboration de spécifications techniques et de conception de réseau d’un système d’alerte public sans fil au Canada. Par la suite, le Centre des sciences pour la sécurité de Recherche et développement pour la défense Canada a lancé, par le biais du Programme canadien pour la sûreté et la sécurité, un projet basé sur des spécifications techniques et une conception de réseau mises au point par le CDCI pour construire, tester et exploiter un service efficace d’APSF (projet pilote). Le Conseil a aussi noté dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-444 qu’il attendrait de voir les résultats de ces initiatives.

Le Conseil devrait-il enjoindre aux FSSF de mettre en place un service d’APSF?

  1. Bruce Power a fait valoir que, bien que le Conseil ait ordonné aux entreprises de distribution de radiodiffusion de participer à la diffusion d’alertes en cas d’urgence, les FSSF n’ont pas reçu d’ordre semblable en vertu de la Loi sur les télécommunications (Loi). 
  2. Bruce Power a fait valoir que même si le travail entrepris par le CDCI et Recherche et développement pour la défense Canada est bénéfique, il demeure futuriste et le processus est trop lent et fastidieux, ce qui met les Canadiens en danger. Quant aux activités déjà en cours pour créer un service d’APSF, elle est d’avis qu’il faudra du temps pour s’assurer qu’un système solide est en place pour desservir tous les Canadiens, sinon ce service sera discriminatoire à l’endroit de ceux qui ne se sont pas abonnés aux mises à jour ou qui n’ont pas acheté de téléphone compatible, une carte SIM (module d’identité d’abonné) LTE et le service voix et/ou données. Bruce Power a indiqué que ce serait contraire au paragraphe 27(2) de la LoiRetour à la référence de la note de bas de page 1. Enfin, Bruce Power a précisé qu’un seul FSSF participe au projet pilote et qu’il faut par conséquent plus de temps pour que d’autres FSSF mettent des services semblables en place.
  3. Bruce Power a indiqué que la technologie permettant de déployer un service d’APSF est déjà accessible. Elle a cité un projet de collaboration qu’elle a entrepris avec Futureshield, Pelmorex Media Inc., la province de l’Ontario et la Société TELUS Communications (STC) en novembre 2014 à l’aide de la technologie appelée « service de messages courts basé sur la localisation » (LB-SMS). Bruce Power a fait valoir que ce projet démontre que l’APSF pourrait être mis en place au Canada aujourd’hui sur les téléphones cellulaires actuels.
  4. Bruce Power a soutenu que la mise en œuvre immédiate de la diffusion d’alertes sur les appareils mobiles est possible, étant donné la réussite du projet susmentionné et le déploiement par d’autres pays dans le monde de services d’APSF s’appuyant sur un éventail de solutions techniques aujourd’hui accessibles.

Les parties en faveur de la demande de Bruce Power

  1. De façon générale, les intervenants appuyaient l’idée d’un service d’APSF, mais certains exprimaient des préoccupations concernant différents aspects de la demande de Bruce Power.
  2. Le Bruce County a fait valoir qu’un service d’APSF serait utile pour prévenir des événements comme l’épidémie d’E. coli à Walkerton, en Ontario. Le Brampton Emergency Management Office a indiqué qu’il a fallu beaucoup de temps pour mettre en place un système d’alerte en cas d’urgence à l’intérieur du système de radiodiffusion et qu’il espérait qu’il ne faudrait pas autant de temps pour mettre en place un système fondé sur l’utilisation d’appareils mobiles.
  3. L’Alberta’s Northeast Region Community Awareness Emergency Response a soutenu que peu importe la solution qui sera mise en place, il est important que le système ne dépende pas d’une adhésion; c’est-à-dire que le système doit rejoindre tous les individus, qu’ils soient inscrits ou non. De même, le Strathcona County a précisé qu’il avait établi son propre système appelé SC Alerts, lequel dépend de l’adhésion des individus. Après plus d’un an, le taux de pénétration demeure en deçà de 10 %, ce qui démontre qu’un système qui dépend de l’adhésion est beaucoup moins efficace qu’un système qui diffuse automatiquement des alertes aux individus.
  4. La Division des mesures d’urgence et de la sécurité du gouvernement du Manitoba et NetAlerts Incorporated ont affirmé que le Conseil devrait retirer tout obstacle que doit surmonter l’industrie dans l’adoption du système choisi, et ont aussi indiqué que la participation de l’industrie du sans-fil demandée par le Conseil serait probablement requise. Ces deux intervenants ont fait appel au Conseil pour que des mesures soient prises le plus tôt possible sur les enjeux politiques liées à la mise en place d’un service d’APSF.
  5. Le Bureau du commissaire des incendies et de la gestion des situations d’urgence (BCIGSU) de l’Ontario a indiqué qu’il est partenaire dans le projet pilote. Le BCIGSU a fait valoir que, bien qu’il soutienne la technologie d’alerte par LB-SMS comme une solution valable, ce soutien ne sera pas accordé aux dépens des travaux réalisés dans le cadre du projet pilote. Enfin, le BCIGSU a mentionné sa participation à l’essai de la technologie LB-SMS précédent, et a fait mention de quelques préoccupations connexes, comme le processus, le délai excessif nécessaire pour la diffusion du message et l’absence actuelle de politiques, de procédures, de normalisation et de mesures de sécurité prescrites. Bien que le BCIGSU ait favorisé un soutien continu de la technologie LB-SMS comme solution envisageable, il a recommandé qu’un processus de développement semblable à celui utilisé dans le cadre du projet pilote soit entrepris pour cette technologie.
  6. Le sous-ministre des Affaires municipales de l’Alberta a indiqué qu’un service d’APSF complet combinerait probablement la technologie LB-SMS et la diffusion cellulaireRetour à la référence de la note de bas de page 2. Il a précisé que les forces du marché à elles seules ne permettraient pas de résoudre la question et que des directives du Conseil seraient requises. En outre, il a souligné la récente campagne média En alerte dans le système de radiodiffusion, indiquant que celle-ci a permis de sensibiliser le public et d’affirmer la nécessité d’agir plus rapidement que ce qui était prévu au départ avec l’APSF.
  7. La Calgary Emergency Management Agency a exprimé des préoccupations relativement au fait que le projet pilote dépend de la technologie LTE, laquelle pourrait, à son avis, empêcher certaines personnes de recevoir les alertes. Ainsi, elle a proposé la création d’un service d’APSF utilisant la technologie LB-SMS, comme l’a proposé Bruce Power.

Les parties qui s’opposent à la demande de Bruce Power

  1. Bell Mobilité inc. (Bell Mobilité) a fait valoir que la demande devrait être rejetée parce qu’elle n’est pas justifiée, car le projet pilote est déjà en cours. L’entreprise a indiqué que les FSSF contribuent largement à la création d’un service d’APSF par leur participation au projet pilote. Bell Mobilité a également précisé que le délai proposé par Bruce Power n’est pas réaliste et que les travaux de l’actuel projet pilote exigent un échéancier raisonnable et une supervision adéquate. Bell Mobilité a également soutenu que la diffusion cellulaire est une technologie entièrement normalisée et qu’elle présente des avantages par rapport à la technologie LB-SMS, citant des problèmes liés à la congestion du réseau et à la capacité de prioriser les messages d’alerte.
  2. Saskatchewan Telecommunications (SaskTel) a soutenu que la demande devrait être rejetée, faisant valoir que le processus menant à la mise en œuvre des directives énoncées dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-444 nécessitait beaucoup de temps et d’essais; les courts échéanciers proposés par Bruce Power sont donc impossibles à respecter. L’entreprise a aussi argué qu’il existe des limites fondamentales liées à l’utilisation de la technologie LB-SMS. Plus particulièrement, SaskTel a souligné que sur son réseau, les messages SMS sont limités à 160 caractères, incluant le numéro de l’appelant, ce qui raccourcit radicalement le contenu du message. L’entreprise a indiqué que la diffusion cellulaire constitue donc l’option technique pertinente à adopter pour les prochaines étapes.
  3. L’Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS) a aussi fait référence aux efforts et à la collaboration continus de l’industrie du sans-fil à l’égard du projet pilote, indiquant qu’il s’agit de la principale raison de rejeter la demande de Bruce Power. Elle a précisé que la prolifération de la LTE au Canada explique pourquoi la diffusion cellulaire a été choisie plutôt que la LTE pour le projet pilote. L’ACTS a fait valoir qu’elle permettrait la mise en place d’un service d’APSF sur une technologie réseau de pointe; le service serait ainsi plus durable et permettrait l’intégration de nouveaux progrès technologiques.
  4. Le Rogers Communications Partnership (RCP) n’a pas adhéré à l’affirmation selon laquelle la technologie LB-SMS est la seule technologie pouvant être utilisée pour le service d’APSF, et a réclamé le rejet de la demande. Le RCP a noté que toutes les technologies d’accès sans fil de sa zone de couverture prennent en charge la diffusion cellulaire. Il a aussi fait valoir que la bonne façon de mettre en place une solution d’APSF est d’adopter une infrastructure réseau accessible sur le marché et prise en charge par les normes que des organismes accrédités ont établies, comme on le fait dans le cadre du projet pilote. Le RCP a indiqué que la technologie LB-SMS convient aux déploiements à petite échelle, mais a soutenu qu’elle ne fonctionne pas pour les déploiements à grande échelle en raison de problèmes comme le délai de transmission des messages et l’éventuelle congestion du réseau.
  5. Dans son intervention, la STC a expliqué son rôle dans l’essai de la technologie LB-SMS décrit par Bruce Power dans sa demande, et a précisé la nature limitée de cet essai particulier, indiquant qu’il ne s’agissait que d’un test de faisabilité de haut niveau. La STC a précisé que l’essai ne convenait pas pour valider un déploiement et une utilisation à grande échelle. Comme c’est le cas pour de nombreux autres FSSF qui sont intervenus, la STC a fait valoir que la méthode à adopter consiste en un processus et un essai adéquats en regard des exigences, et c’est ainsi que le projet pilote actuel est exécuté. La STC a précisé que le Conseil devrait donc rejeter la demande de Bruce Power.
  6. Le Conseil fait remarquer que Bruce Power n’a pas répliqué à ces interventions, bien qu’elle en ait le droit selon les Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. En ce qui concerne la proposition de Bruce Power, à savoir qu’un service d’APSF doit être mis en place d’ici quatre mois, l’échéancier proposé n’est pas réaliste. Comme l’ont fait remarquer plusieurs parties, d’importants travaux devront être entrepris pour permettre un déploiement à grande échelle. L’exigence selon laquelle le service d’APSF doit être mis en place avant une date donnée n’est appropriée que si un délai raisonnable est prévu pour la création de normes techniques, de procédures d’essai et de procédures de déploiement. En outre, il serait plus pertinent de lancer une vaste instance publique afin d’étudier les enjeux politiques et les questions techniques de façon plus approfondie, avec la participation de tous les FSSF concernés et d’autres intervenants.
  2. Les travaux réalisés dans le cadre du projet pilote sont entrepris sous la direction d’un grand nombre d’organismes et de partenaires en respectant un financement stable, et se déroulent selon un échéancier précis. Bien que ce projet et les travaux connexes ne constituent pas nécessairement l’unique option pour un service d’APSF, ils ont obtenu l’appui de l’industrie et du gouvernement, et seraient donc probablement plus susceptibles de générer des résultats positifs à la suite d’une mise en place à grande échelle.
  3. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil rejette la demande de Bruce Power.
  4. Nonobstant la décision susmentionnée, dans le Plan triennal du CRTC 2015-2018, le Conseil a précisé son soutien et son engagement continus pour veiller à ce que soient mises en place des mesures supplémentaires pour protéger la vie des Canadiens à l’aide d’alertes en cas d’urgence. Le Conseil a noté que pour l’exercice financier 2016-2017, il surveillerait les progrès de l’industrie des FSSF en ce qui concerne le projet pilote et la mise en place du service d’APSF. Le Conseil a aussi indiqué qu’il pourrait lancer une instance publique concernant le service d’APSF, au besoin.
  5. Le Conseil note le soutien général exprimé par les intervenants à l’égard de la présente instance au sujet de la mise en place d’un service d’APSF. Compte tenu des enjeux soulevés dans le cadre de la présente instance, il convient d’entamer un processus public complet concernant la nécessité d’un service d’APSF utilisant les réseaux mobiles sans fil et comprenant l’ensemble des FSSF. Par conséquent, le Conseil prévoit amorcer une vaste consultation publique avant la fin de l’exercice financier 2015-2016, accélérant ainsi les délais indiqués dans le Plan triennal du CRTC 2015-2018.

Secrétaire général

Documents connexes

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Le paragraphe 27(2) de la Loi se lit comme suit : Il est interdit à l’entreprise canadienne, en ce qui concerne soit la fourniture de services de télécommunication, soit l’imposition ou la perception des tarifs y afférents, d’établir une discrimination injuste, ou d’accorder — y compris envers elle-même — une préférence indue ou déraisonnable, ou encore de faire subir un désavantage de même nature.

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Note de bas de page 2

La technologie LB-SMS et la diffusion cellulaire sont deux solutions technologiques différentes qui peuvent être utilisées pour mettre en place un service d’APSF. Bien que la technologie LB-SMS utilise les fonctions SMS existantes des appareils mobiles, la diffusion cellulaire s’appuie sur une technologie différente avec laquelle les alertes peuvent être diffusées à tous les téléphones cellulaires dans une région donnée, sur un canal réservé. La diffusion cellulaire s’appuie sur des normes précises et une fonctionnalité de combiné qui ne sont présentes que sur les nouveaux combinés.

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