ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2007-401

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Décision de radiodiffusion CRTC 2007-401

  Ottawa, le 23 novembre 2007
 

Plainte de Torstar Corporation contre Cogeco Câble inc., alléguant une préférence indue

  Le Conseil conclut que la proposition de Cogeco Câble inc. de faire passer le service ShopTV d'un canal analogique à un canal numérique sur son système d'Oakville/Burlington, tout en continuant de distribuer The Shopping Channel en mode analogique, n'enfreindrait pas l'article 9 du Règlement sur la distribution de la radiodiffusion, qui interdit à une titulaire d'accorder à quiconque une préférence indue, y compris elle-même, ou d'assujettir quiconque à un désavantage indu. Par conséquent, le Conseil rejette par conséquent la plainte de Torstar Corporation.
 

Les parties

1.

Torstar Corporation (Torstar), la société-mère de Toronto Star Newspapers Limited, exploite ShopTV, une entreprise de service de programmation de télé-achats exploitée conformément à l'ordonnance d'exemption énoncée dans l'avis public de radiodiffusion 2003-11.

2.

Cogeco Câble inc. (Cogeco) est la société-mère de Cogeco Câble Canada inc., la titulaire d'une entreprise de distribution de radiodiffusion (EDR) par câble de classe 1, autorisée à desservir notamment la zone d'Oakville/Burlington (Ontario). Cogeco distribue présentement ShopTV, dans sa zone autorisée d'Oakville/Burlington, sur un canal analogique (canal 46). Dans cette même zone autorisée, Cogeco distribue également sur un canal analogique (canal 41) le signal d'une entreprise de service de programmation de télé-achats exemptée que détient et contrôle Rogers Communications Inc. (Rogers), The Shopping Channel (TSC).
 

Historique

3.

Cogeco a entrepris de distribuer ShopTV en vertu d'une entente d'un an signée en 2004 et renouvelée en 2005. L'entente a de nouveau été renouvelée en 2006. L'entente de 2006 expirait le 31 août 2007. Conformément aux modalités de l'entente de 2006, Cogeco a fait parvenir un avis par écrit à ShopTV le 30 mai 2007, l'informant qu'elle n'avait pas l'intention de renouveler le contrat. En même temps, Cogeco faisait savoir qu'elle était disposée à négocier une nouvelle entente pour distribuer ShopTV sur un canal numérique. Depuis le 30 mai 2007, les parties ont échangé des propositions et discuté en vain dans l'espoir d'en arriver à des modalités de distribution satisfaisantes pour ShopTV.

4.

Le 27 septembre 2007, Torstar réclame l'aide du Conseil pour régler ce différend, conformément à l'article 12(2) du Règlement sur la distribution de radiodiffusion (le règlement). En même temps, Torstar demande au Conseil de faire enquête pour déterminer si Cogeco n'aurait pas enfreint l'article 9 du règlement en voulant déloger ShopTV de son canal analogique pour l'inscrire à un canal numérique.

5.

Cogeco réplique à la plainte de Torstar le 28 septembre 2007. À sa réplique, Cogeco joint copie d'une lettre informant Torstar qu'elle remet au 5 octobre 2007 sa décision d'abandonner la distribution de ShopTV à son volet analogique afin que le Conseil ait le temps d'examiner la plainte de Torstar. Celle-ci dépose sa propre réplique le 3 octobre 2007, à laquelle Cogeco répond à son tour le 4 octobre.

6.

En réponse à la lettre que lui adressait le personnel du Conseil en date du 5 octobre, Torstar dépose une autre lettre le 9 octobre 2007. Le 11 octobre 2007, elle réclame le respect du caractère confidentiel de deux passages de sa lettre du 3 octobre 2007. Enfin, le 18 octobre 2007, Cogeco indique qu'elle continuera de distribuer ShopTV au même canal analogique afin d'accorder un délai raisonnable au Conseil pour rendre sa décision.

7.

Après avoir considéré la position des deux parties, le Conseil en vient à la conclusion que la question que soulève cette plainte est de déterminer si Cogeco se trouverait à accorder une préférence indue à TSC ou à assujettir ShopTV à un désavantage indu en faisant passer ShopTV à son volet numérique tout en continuant à distribuer TSC au volet analogique.
 

Cogeco se trouverait-elle à accorder une préférence indue à TSC ou à assujettir ShopTV à un désavantage indu en déplaçant ce dernier vers son volet numérique ?

8.

L'article 9 du règlement se lit comme suit :
 

Il est interdit au titulaire d'accorder à quiconque, y compris lui-même, une préférence indue ou d'assujettir quiconque à un désavantage indu.

9.

L'avis public 1997-150 du Conseil dresse la liste des circonstances pouvant donner lieu à une préférence indue ou à un désavantage indu. L'une de ces circonstances est décrite comme suit :
 

La distribution analogique par un titulaire de classe 1 d'un ou de plusieurs services de programmation exemptés dans lequel une « entité similaire » détient une participation d'au moins 15 %, lorsque le titulaire n'offre pas un nombre équivalent de canaux analogiques pour la distribution de services de programmation exemptés indépendants. . [L]e Conseil considère, par exemple, deux entreprises de télédistribution et leurs affiliées, ou deux compagnies de téléphone et leurs affiliées, comme des entreprises similaires.

10.

Torstar allègue que le fait de réserver à TSC, une entreprise qui appartient à un câblodistributeur, une visibilité enviable auprès des téléspectateurs, tout en reléguant sa concurrente, une entreprise de propriété indépendante, à un volet peu regardé, équivaut à accorder une nette préférence à TSC et à assujettir Torstar à un désavantage. Torstar affirme cependant qu'il est difficile d'évaluer à quel point cette préférence est « indue » parce que seule Cogeco détient l'information pertinente. La plaignante indique que, sur la foi de renseignements obtenus par d'autres sources, le déplacement de ShopTV vers le canal 88 du volet numérique entraînerait une réduction significative de la moyenne de minutes d'écoute des canaux avoisinants. Cogeco, selon elle, a refusé de confirmer les chiffres.

11.

Torstar réfère ensuite à une lettre de décision du 31 mai 2000 au sujet d'une plainte de Torstar alléguant que Cogeco avait enfreint les articles 21(3) et 9 du règlement. Dans cette lettre, le Conseil déclare ce qui suit :
 

. il y a présomption réfutable que le distributeur met un canal à la disposition d'au moins un service de programmation exempté appartenant à un indépendant suivant la politique du « premier arrivé, premier servi ».

 

Il faut noter que le distributeur dans ce cas n'a pas tenté de réfuter cette présomption découlant du fait qu'il s'agit d'une entité similaire.

  Ces remarques incitent Torstar à soutenir qu'il appartient à Cogeco de prouver qu'elle n'a pas accordé de préférence indue à TSC, ni assujetti ShopTV à un désavantage indu.

12.

Cogeco rejette l'allégation de Torstar au sujet d'une préférence indue et soutient entre autres choses qu'elle n'est pas tenue de distribuer ShopTV. Selon Cogeco, le seul fait qu'elle soit une « entité similaire » à Rogers, la titulaire de TSC, ne signifie pas que Cogeco est obligée de mettre un autre canal analogique à la disposition d'une entreprise de programmation exemptée appartenant à un tiers. Pour étayer sa position, Cogeco cite une lettre de décision du 31 mai 2000 concernant la plainte de Torstar contre Southmount Cable Limited, de même que la décision de radiodiffusion 2003-518. Cogeco souligne également qu'en vertu du test actuel de la préférence indue, il n'y a pas d'obligation pour un distributeur de faire la démonstration qu'une préférence ou un désavantage n'est pas indu.

13.

Cogeco fait valoir que même s'il y avait présomption réfutable, elle a réfuté cette présomption avec de nombreux arguments, dont les suivants :
 
  • Cogeco ne détient aucune participation dans TSC ou dans quelque autre service de programmation exempté.
 
  • Cogeco distribue TSC depuis 1987, c'est-à-dire avant que Rogers en devienne propriétaire.
 
  • Cogeco et TSC opèrent en toute autonomie et Cogeco n'a reçu aucune rétribution spéciale de TSC, pas plus qu'elle n'est entrée en collusion avec Rogers pour distribuer TSC ou quelque autre service. Cogeco rappelle que Rogers vient d'annoncer que, dans sa zone autorisée, elle compte faire concurrence à Cogeco auprès de ses abonnés.
 
  • TSC est distribuée par toutes les grandes EDR du pays y compris les deux EDR par SRD, lesquelles ne sont pas des « entités similaires » à Rogers. Selon Cogeco, ce fait démontre l'attrait que présente TSC auprès de l'ensemble des consommateurs.
 
  • Cogeco réclame une marge de manouvre pour commencer à tirer parti de la capacité analogique à cause des demandes croissantes découlant de la distribution obligatoire des services de programmation canadiens autorisés en mode numérique et à haute définition.

14.

Cogeco soutient également que la distribution de ShopTV, qu'elle affirme faire pour ainsi dire double emploi avec TSC, représente une utilisation inefficace de la capacité analogique et, par conséquent, contrevient aux objectifs de politique énoncés dans la Loi sur la radiodiffusion (la Loi), qui préconisent la diversité et une distribution efficace de la programmation, à l'aide des techniques les plus efficientes à des tarifs abordables.
 

Analyse et décisions du Conseil

 

Préférence ou désavantage

15.

Lorsqu'il analyse une plainte de préférence indue en vertu du règlement, le Conseil doit commencer par déterminer, en se fondant sur les pièces au dossier, s'il y a bien préférence ou désavantage. Dans l'affirmative, le Conseil doit ensuite déterminer si, compte tenu de toutes les circonstances, la préférence ou le désavantage sont indus.

16.

Le Conseil note que Cogeco distribue actuellement TSC, un service de Rogers, en mode analogique. Cogeco et Rogers exploitent toutes deux des entreprises de distribution similaires. Par conséquent, si Cogeco continue de distribuer TSC au volet analogique tandis qu'elle fait passer ShopTV au volet numérique, ou si elle cesse tout à fait de distribuer ce dernier, il s'agit d'une des circonstances citées dans l'avis public 1997-150 comme pouvant donner lieu à une préférence indue.

17.

Le Conseil juge que ShopTV et TSC sont des entités similaires en ce qu'elles sont toutes deux des services exemptés, exploités en vertu de la même ordonnance d'exemption. En outre, en proposant de traiter ShopTV différemment que TSC, le Conseil juge que Cogeco accorde une préférence à TSC et soumet ShopTV à un désavantage.
 

Préférence ou désavantage indus

18.

Concernant l'argument de Torstar à l'effet que Cogeco a le devoir, à cause d'une « présomption réfutable », de prouver qu'elle n'a ni conféré une préférence indue à TSC ni assujetti ShopTV à un désavantage indu, le Conseil note que cette expression est celle qu'il utilise dans deux lettres de décision en date du 31 mai 2000 traitant des plaintes déposées par Torsar à l'endroit de Cogeco et de Cableworks Communications Inc. en vertu des articles 9 et 21(3) du règlement. Ces deux décisions appliquaient la politique du « premier arrivé, premier servi » énoncée dans l'avis public 1996-60. Cependant, l'utilisation de l'expression « présomption réfutable » dans le contexte n'inversait pas le fardeau de la preuve dans un cas de préférence indue en vertu de l'article 9 du règlement. Le test de la préférence indue a toujours exigé et exigera toujours que la requérante se charge de démontrer qu'il y a bel et bien eu préférence ou désavantage indus. Dans l'optique du Conseil, la notion de présomption réfutable ne s'applique donc pas dans le cas à l'étude.

19.

Afin de déterminer si la préférence ou le désavantage sont indus, le Conseil doit déterminer si cette préférence ou ce désavantage ont eu, ou sont susceptibles d'avoir, un effet négatif important sur toute autre personne. Le Conseil examine en outre l'effet que la préférence ou le désavantage ont eu, ou sont susceptibles d'avoir, sur l'atteinte des objectifs de politique énoncés dans la Loi.

20.

Comme l'indique le Conseil plus haut, dans la méthode qu'il utilise en cas de préférence indue, il appartient au plaignant de prouver qu'il y a bien eu préférence ou désavantage, et que cette préférence ou ce désavantage sont indus. L'étude du dossier révèle que Torstar fournit très peu de preuves pour permettre de conclure qu'elle subirait un effet négatif important résultant du déplacement de ShopTV vers le volet numérique. Par exemple, la titulaire ne donne aucune information précise sur la façon dont le placement de ShopTV au canal numérique 88 risque d'affecter son volume de téléspectateurs ou de ventes. Sa seule allusion à ce sujet consiste à affirmer que les canaux voisins de ShopTV au volet numérique subiraient une baisse de « leur moyenne de minutes d'écoute ».

21.

De plus, en ce qui concerne l'allégation de Torstar à l'effet que Cogeco, et non Torstar, détient l'information permettant à Torstar d'évaluer l'étendue du désavantage qu'elle aurait à subir, le Conseil constate que Torstar dit avoir eu besoin précisément des renseignements suivants : a) une confirmation que, dans les principaux réseaux de Cogeco, les canaux avoisinants sont soit des services en chinois, soit des services dupliqués; b) un exemple d'un canal numérique constant avoisinant des services de langue anglaise non dupliqués.

22.

Le Conseil fait remarquer que la réponse à la première question pouvait sans doute se trouver en vérifiant les alignements de canaux de Cogeco, en général aisément accessibles. Par ailleurs, une réponse au second point n'aurait pas suffi de toute façon à étayer l'allégation de Torstar selon laquelle le fait de déplacer ShopTV au volet numérique tout en continuant de distribuer TSC au volet analogique aurait un effet négatif important sur Torstar.

23.

Le Conseil note aussi que Torstar n'a pas fourni de preuve que Cogeco ait été rétribuée par TSC pour se faire distribuer, ni que Cogeco et Rogers aient entrepris de connivence une démarche commune visant à avantager TSC ou tout autre service. Enfin, le Conseil considère que Torstar lui a fourni très peu d'arguments pour lui permettre de conclure à une incidence sur l'atteinte des objectifs de politique énoncés dans la Loi.

24.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil conclut que bien que le présent cas fasse partie des circonstances énoncées dans l'avis public 1997-150 comme présentant une possibilité de préférence indue, la preuve est insuffisante pour justifier un jugement de préférence ou de désavantage indus. Le Conseil rejette donc la plainte présentée par Torstar Corporation.
 

Demande de Torstar portant sur la confidentialité

25.

Torstar a réclamé que deux passages de sa lettre du 3 octobre 2007 déposée au dossier soient jugés confidentiels en vertu de l'article 20 des Règles de procédure du CRTC et de la circulaire 429. Cogeco n'a pas contesté la demande de confidentialité de Torstar.

26.

Dans le cas présent, le Conseil estime que les dommages qui pourraient résulter de la divulgation publique de l'information en question l'emportent sur l'intérêt général. Par conséquent, le Conseil approuve la demande de confidentialité de Torstar portant sur deux passages de sa lettre du 3 octobre 2007. Une version abrégée de la lettre sera donc versé au dossier public.
  Secrétaire général
 

Documents connexes

 
  • Plainte de Wagg Communications contre Shaw Communications Inc., alléguant des infractions au Règlement sur la distribution de radiodiffusion, décision de radiodiffusion CRTC 2003-518, 23 octobre 2003
 
  • Examen des ordonnances d'exemption relatives aux entreprises expérimentales de programmation vidéo sur demande, aux entreprises de services de programmation de jeux vidéo et aux entreprises de services de programmation de télé-achats,avis public de radiodiffusion CRTC 2003-11, 6 mars 2003
 
  • Plainte dans laquelle Torstar Corporation allègue que Cogeco Câble inc. a enfreint les articles 21(3) et 9 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, lettre, 31 mai 2000
 
  • Plainte dans laquelle Torstar Corporation allègue que Southmount Cable Limited a enfreint les articles 21(3) et 9 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, lettre, 31 mai 2000
 
  • Plainte dans laquelle Torstar Corporation allègue que Western Co-Axial Limited, maintenant appelée Cableworks Communications Inc., a enfreint les articles 21(3) et 9 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion, lettre, 31 mai 2000
 
  • Lignes directrices relatives au traitement confidentiel de toutes les informations, incluant les rapports annuels, déposées à l'appui d'une demande de radiodiffusion devant le Conseil, circulaire no 429, 19 août 1998
 
  • Règlement sur la distribution de radiodiffusion, avis public CRTC 1997-150, 22 décembre 1997
 
  • Règles en matière d'accès pour les entreprises de distribution de radiodiffusion, avis public CRTC 1996-60, 26 avril 1996
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Mise à jour : 2007-11-23

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