Décision de télécom CRTC 2005-33
Ottawa, le 10 juin 2005
Application de la décision 2003-45 à la Coalition des fournisseurs de services de télécommunication du secteur hydroélectrique
Référence : 8644-T89-200313859
Dans la présente décision, le Conseil applique aux membres de la Coalition des fournisseurs de services de télécommunication du secteur hydroélectrique (la Coalition) les lignes directrices relatives aux conditions d'accès établies dans la décision Fourniture de services de télécommunication aux clients d'immeubles à logements multiples, Décision de télécom CRTC 2003-45, 30 juin 2003. Le Conseil étend également les obligations actuellement imposées aux entreprises de services locaux concernant la condition d'accès aux immeubles à logements multiples (ILM) et la divulgation des ententes d'accès aux ILM, de manière à inclure les membres de la Coalition qui fournissent des services aux utilisateurs finals dans les ILM, que ce soit directement ou indirectement à titre de grossistes.
Le Conseil rejette la demande de la Coalition visant à imposer aux propriétaires d'immeubles des restrictions particulières à l'égard des négociations de certains frais de même que sa demande visant à étendre les lignes directrices d'accès rétroactivement au 30 juin 2003.
Introduction
1. Le 1er octobre 2003, conformément aux articles 32, 37, 42, 48, 55, 58 et 62 de la Loi sur les télécommunications (la Loi), Toronto Hydro Telecom Inc. (Toronto Hydro), au nom de la Coalition des fournisseurs de services de télécommunication du secteur hydroélectrique (la Coalition), a déposé auprès du Conseil une demande en vertu de la partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications (les Règles). La Coalition a demandé au Conseil d'étendre à ses membres les lignes directrices relatives aux conditions d'accès établies dans la décision Fourniture de services de télécommunication aux clients d'immeubles à logements multiples, Décision de télécom CRTC 2003-45, 30 juin 2003 (la décision 2003-45).
2. La Coalition a en outre demandé au Conseil d'émettre une ordonnance stipulant que :
- l'accès des entreprises canadiennes aux immeubles à logements multiples (ILM) sera régi par des lignes directrices établies dans la décision 2003-45, et tous les contrats en vigueur avec des propriétaires d'immeubles ou des entreprises canadiennes ou qui sont négociés à la date de la décision 2003-45, soit le 30 juin 2003 ou après cette date, devront être modifiés en conformité avec ces lignes directrices si les clauses substantielles de ce type d'entente concernant le paiement de locations, les frais d'accès ou d'autres frais ne sont pas permises aux termes de ces lignes directrices;
- les décisions et ordonnances du Conseil auront préséance sur les clauses des ententes d'accès aux immeubles si ces ententes renferment des clauses incompatibles avec les lignes directrices du Conseil régissant les modalités d'accès aux ILM;
- après le 30 juin 2003, les propriétaires d'immeubles ne pourront pas facturer aux entreprises canadiennes (y compris les membres de la Coalition) de frais d'accès ou de licence basés sur la superficie louable brute (SLB), peu importe la date à laquelle l'entente d'accès est mise en oeuvre;
- les propriétaires d'immeubles ne pourront pas imposer aux entreprises canadiennes, par voie de licence d'accès ou d'autres formes d'entente, de frais de location ou d'accès, de droits d'usage ou d'autres frais à l'égard des immeubles où en fait ces entreprises ne fournissent pas de services de télécommunication ou n'y sont pas présentes physiquement.
3. La Coalition a fait valoir que cette demande n'est pas une demande de révision et de modification de la décision 2003-45, étant donné qu'à première vue, il n'y a pas d'erreur de droit ou de fait, qu'aucune modification fondamentale des circonstances ne s'est produite, qu'il n'y a eu aucun défaut de considérer un principe de base et qu'il n'y a aucun principe nouveau.
Historique
4. Dans la décision 2003-45, le Conseil a conclu que les obstacles à l'accès aux clients dans les ILM pourraient avoir une incidence négative importante sur les entreprises de services locaux (ESL). Le Conseil a estimé que le règlement des questions d'accès aux ILM était essentiel au développement de la concurrence locale et en particulier de la concurrence fondée sur les installations, de même qu'au choix dont doivent disposer les utilisateurs finals.
5. Par conséquent, afin d'aider les propriétaires d'immeubles et les ESL à conclure des arrangements d'accès aux ILM, le Conseil, dans la décision 2003-45, a jugé opportun d'établir des lignes directrices à l'égard des conditions qui pourraient être considérées justes et indiquées, notamment :
- les frais demandés pour un espace particulier devraient refléter les frais qui auraient pu être facturés pour une autre utilisation de cet espace, en tenant compte de l'emplacement et de la quantité d'espace occupé par les installations de télécommunication;
- les frais d'accès pour le droit d'entrer dans un ILM qui reviennent à un droit d'admission ou d'entrée ne conviennent pas;
- les propriétaires d'immeubles devraient être compensés pour les coûts raisonnablement engagés pour fournir des services supplémentaires, comme l'approbation des plans, les mesures de sécurité et de sûreté;
- les coûts associés à la négociation des ententes d'accès ne devraient pas faire partie de ces frais;
- les principes de responsabilité pour négligence en vigueur dans la province dans laquelle l'ILM est situé devraient s'appliquer.
6. Dans la décision 2003-45, le Conseil a établi la condition d'accès aux ILM, aux termes de laquelle la fourniture d'un service de télécommunication par une ESL dans un ILM était assujettie à la condition que les ESL souhaitant desservir des utilisateurs finals dans cet ILM puissent y avoir accès rapidement au moyen d'une revente, d'installations louées ou de leurs propres installations, selon leur choix, et selon des modalités et des conditions raisonnables.
7. Le Conseil a également fait remarquer que lorsque des négociations sur l'accès ne peuvent être conclues rapidement et lorsque, selon le processus établi en vertu de la partie VII des Règles, il conclut que l'accès à un ILM n'a pas été ou ne sera probablement pas accordé dans des conditions raisonnables, il prendra les mesures appropriées, selon les circonstances, de manière à s'assurer que toutes les ESL puissent fournir des services de télécommunication aux utilisateurs finals dans un ILM, conformément à la condition d'accès aux ILM.
Processus
8. Le Conseil a reçu des observations de l'Institut canadien des compagnies immobilières publiques et privées ainsi que de la Building Owners and Managers Association (collectivement, l'ICCIPP/la BOMA), et de Microcell Solutions Inc. (Microcell), en date du 30 octobre 2003; et d'Allstream Corp., maintenant MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) et de FCI Broadband, filiale de Futureway Communications Inc. (FCI Broadband), en date du 31 octobre 2003. Le Conseil a reçu de la part de la Coalition des observations en réplique, datées du 14 novembre 2003; et des renseignements supplémentaires, datés du 27 novembre 2004 et du 3 décembre 2004, incluant des copies des ententes d'accès aux ILM, en réponse à sa lettre du 29 octobre 2004.
La demande
9. La Coalition a fait valoir que dans la décision 2003-45, les parties ont cité un certain nombre d'abus de la part des propriétaires d'immeubles et de gestionnaires immobiliers, dont des cas d'obstruction de l'accès aux ILM par les propriétaires, l'imposition de modalités et de conditions onéreuses ou déraisonnables, y compris des coûts imposés aux ESL concurrentes (ESLC) et à d'autres entreprises canadiennes, incluant des membres de la Coalition. Elle a soutenu qu'avant et après la publication de la décision 2003-45, les propriétaires d'immeubles avaient imposé à ses membres des conditions d'entrée tout aussi abusives.
10. La Coalition a indiqué que les propriétaires d'immeubles ne s'estimaient pas tenus de négocier de façon juste avec des entreprises non dominantes, étant donné que cette classe d'entreprises n'avait pas été mentionnée spécifiquement dans la décision 2003-45. Il était clair, selon elle, que les propriétaires d'immeubles n'entendaient pas respecter les lignes directrices relatives à l'accès équitable établies dans la décision 2003-45à l'égard de la fourniture de l'accès à ses membres, à moins que le Conseil ne modifie la décision 2003-45 et accorde aux membres de la Coalition les avantages des dispositions qui y sont stipulées.
11. La Coalition a fait valoir qu'actuellement, les entreprises situées dans des ILM utilisent des services de télécommunication très différents de ceux qu'elles utilisaient lorsque le Conseil a établi un cadre pour la mise en oeuvre de la concurrence locale. La Coalition a présenté des exemples montrant que les réseaux téléphoniques de base étaient maintenant devenus des réseaux étendus de transmission de données.
12. La Coalition a fait valoir que bon nombre de ses membres sont inscrits auprès du Conseil comme entreprises canadiennes non dominantes qui fournissent non pas un service local, mais un large éventail de services de détail et de gros au moyen de leurs propres installations. La Coalition a fait valoir qu'en plus de fournir des installations aux ESL titulaires (ESLT) et aux ESLC, ses membres desservent des utilisateurs finals et en particulier, des municipalités, des universités, des écoles et des établissements de soins de santé. La Coalition a fait remarquer que ses membres avaient investi des dizaines de milliers de dollars dans l'infrastructure de réseau.
13. La Coalition a également fait remarquer que ses membres ne fonctionnent pas ni ne peuvent fonctionner comme des ESLC, pas plus que ses membres pouvaient se transformer en ESLC de façon rationnelle, ou à un coût raisonnable, afin d'obtenir un accès équitable aux ILM conformément aux lignes directrices établies dans la décision 2003-45.
14. La Coalition a fait valoir que la conduite des propriétaires d'immeubles avait empêché ses membres de fournir le service, citant des exemples ayant trait aux frais, à la responsabilité et à des négociations prolongées.
15. La Coalition a précisé que de nombreux propriétaires d'immeubles avaient imposé des frais d'accès onéreux pour entrer dans leurs immeubles. Par exemple, la Coalition a indiqué que dans leurs ententes d'accès aux ILM, un grand nombre de propriétaires d'immeubles avaient imposé des clauses d'indexation des frais exigeant le paiement de frais d'accès basés sur la SLB des immeubles, multiplié par un facteur non lié à l'indice des prix à la consommation, ou à l'activité économique des entreprises exploitant dans les immeubles. De plus, bon nombre de propriétaires d'immeubles obligeaient des membres de la Coalition à payer des frais basés sur l'ensemble du parc immobilier du propriétaire, sans égard au fait qu'ils aient mis en place des installations ou fourni des services aux abonnés dans chaque immeuble. Selon la Coalition, des négociateurs pour les propriétaires d'immeubles ont admis d'emblée qu'ils n'imposaient pas aux ESLT ces conditions d'entrée ou ces frais onéreux.
16. La Coalition a fait valoir que ces structures tarifaires avaient un effet dévastateur sur les entreprises non dominantes. En fait, pour certaines entreprises, les frais d'accès représentent plus de 15 % des revenus provenant des ILM et augmentaient plus rapidement que les revenus et d'autres coûts. À titre d'exemple, la Coalition a indiqué que Toronto Hydro devait payer à deux propriétaires d'immeubles des frais basés sur la SLB de 38 immeubles, soit plus de 300 000 $ par année, malgré qu'elle n'y soit pas présente physiquement ou qu'elle n'ait pas de clients dans 20 des 38 immeubles. La Coalition a fait valoir que dans la région de Toronto, les propriétaires d'immeubles continuaient d'imposer à ses membres des frais annuels basés sur la SLB qui s'élevaient à plus de 1,2 million de dollars par année.
17. La Coalition a ajouté que les propriétaires d'ILM avaient imposé aux entreprises canadiennes autres que les ESL des clauses contractuelles inéquitables à l'égard des modalités de responsabilité et d'indemnisation. La Coalition a fait valoir que les propriétaires d'immeubles n'étaient pas disposés à accepter une couverture de police d'assurance MEARIE1 à l'égard de l'installation à faible risque de services sur fibre noire, mais que les mêmes propriétaires d'ILM avaient accepté une couverture d'assurance MEARIE identique dans le cas de services publics d'électricité pour un risque inhérent à l'installation de lignes haute tension et d'équipement de distribution d'électricité, qui occupaient souvent le même espace que la fibre de télécommunication.
18. La Coalition a en outre fait valoir que la décision 2003-45 avait créé d'autres obstacles à l'accès rapide aux immeubles que le Conseil n'avait pas prévus. La Coalition a fait remarquer que certains propriétaires d'immeubles avaient cessé de négocier avec ses membres après la publication de la décision 2003-45, en attendant une révision de la décision, un appel de l'ICCIPP et/ou la publication d'une nouvelle entente de l'ICCIPP à l'égard de l'accès aux ILM, et que les occupants des immeubles touchés s'étaient ainsi vus privés d'un service de télécommunication. La Coalition a également fait remarquer que plusieurs propriétaires d'immeubles avaient refusé de négocier des modalités d'accès à moins que ses membres ne s'engagent à payer les honoraires d'avocat. La Coalition a ajouté que même après la publication de la nouvelle entente type de l'ICCIPP le 15 août 2003, ses membres n'avaient pu conclure rapidement de négociations parce que les propriétaires d'immeubles n'avaient pas encore établi les frais.
19. La Coalition a fait valoir que la capacité de ses membres d'obtenir l'accès aux ILM suivant des modalités et des conditions raisonnables, dans un délai relativement court, était d'une importance capitale à la fois pour les ESLC et pour leurs utilisateurs finals de services de télécommunication. La Coalition a fait valoir que les ESLC et les ESLT font souvent appel aux services de ses membres pour fournir les services de gros de transmission de données sur fibre à partir d'un immeuble jusqu'à leur centre de données ou de commutation. Des membres de la Coalition ont rapporté qu'ils tiraient jusqu'à 50 % de leur chiffre d'affaires de la fourniture de services aux ESLC et aux ESLT, sous la forme de raccordement « physique » des abonnés des ESL. La Coalition a fait valoir que ce sont donc ses membres et non pas les ESLC qui doivent pouvoir négocier des ententes d'accès aux ILM avec les propriétaires d'immeubles. La Coalition a déclaré que ses membres jouent un rôle indispensable dans l'obtention de l'accès aux immeubles et l'installation de l'équipement de point de présence.
20. La Coalition a fait valoir que si le Conseil acceptait que les propriétaires d'immeubles jouent un rôle de contrôleur des entreprises non dominantes, les consommateurs de services de télécommunication et d'autres fournisseurs de services, dont les ESLC qui dépendent des entreprises non dominantes pour leurs services d'interconnexion, subiraient un préjudice. La Coalition a également soutenu que si le Conseil n'appliquait pas à ses membres les lignes directrices relatives aux ententes d'accès aux ILM, les ESLC seraient obligées de mettre en place leurs propres installations dans tous les ILM afin de pouvoir fournir les services de façon équitable.
21. La Coalition a en outre fait valoir que parce que ses membres se sont vu interdire l'accès à leurs clients et aux clients des ESLC et des ESLT dans certains immeubles, le Conseil était justifié d'intervenir.
22. La Coalition a également soutenu que refuser à ses membres un accès équitable et le fait pour les propriétaires d'immeubles d'exiger que ses membres paient des frais de négociation, des frais de location basés sur la SLB, ou d'autres frais, était incompatible avec la politique canadienne de télécommunication énoncée dans la Loi.
23. La Coalition a indiqué que ses membres étaient disposés à se conformer aux dispositions de la décision 2003-45 concernant la divulgation des clauses des ententes d'accès aux ILM. Elle a soutenu, cependant, que ces dispositions ne devraient s'appliquer que dans les cas où ses membres fournissent des services téléphoniques directement aux clients dans les ILM et non pas lorsqu'ils fournissent des services sur fibre noire ou autres aux ESLC, aux ESLT ou à d'autres entreprises, lorsque ce trafic est en provenance ou à destination d'ILM.
Observations des parties
24. MTS Allstream et Microcell ont appuyé la demande de la Coalition. MTS Allstream a fait remarquer que certaines ESLC continuent d'obtenir des services sur fibre auprès d'entreprises non dominantes, comme les membres de la Coalition, afin de desservir leurs clients. MTS Allstream a fait valoir que sa capacité d'accéder rapidement et de façon équitable aux ILM dépendait donc de la capacité des entreprises non dominantes de négocier des modalités d'accès raisonnables.
25. Microcell a fait remarquer que les concurrents comme elle comptent beaucoup sur les ESLT pour fournir des services de transport de réseau numérique et que les membres de la Coalition représentent l'une des quelques avenues qui permettent d'intensifier la concurrence au chapitre de la fourniture de ces services sur une échelle significative. Microcell a fait remarquer qu'au moins en une occasion, elle avait été empêchée d'obtenir des services de transport de réseau numérique de la part d'un membre de la Coalition en raison des modalités d'accès déraisonnables que le propriétaire d'immeubles imposait à ce membre.
26. Microcell a fait valoir que le Conseil devrait se préoccuper du fait que les pratiques de propriétaires d'immeubles qu'il a déjà qualifiées d'injustifiables lorsqu'elles sont imposées aux ESL empêchent d'avoir recours à ce mode d'offre.
27. Opposées à la demande de la Coalition, FCI Broadband et l'ICCIPP/la BOMA ont fait valoir que si les membres de la Coalition veulent profiter du régime établi pour promouvoir la concurrence locale, ils doivent être disposés à respecter ce régime et à s'inscrire comme ESLC. FCI Broadband a fait remarquer que dans la décision Concurrence locale, Décision Télécom CRTC 97-8, 1er mai 1997 (la décision 97-8), et dans la décision 2003-45, le Conseil a examiné la question de l'accès aux ILM uniquement dans le contexte de la concurrence locale. L'ICCIPP/la BOMA ont fait valoir que l'information disponible ne permettait pas d'évaluer pourquoi les entreprises non dominantes, incluant les membres de la Coalition, ne pouvaient pas obtenir le statut d'ESLC. L'ICCIPP/la BOMA ont ajouté qu'un régime personnalisé ne convenait pas et que la décision 2003-45 répondait adéquatement au redressement réclamé par la Coalition si ses membres devenaient des ESLC.
28. L'ICCIPP/la BOMA ont indiqué que la demande de la Coalition soulevait des questions débordant la déréglementation des services locaux représentée par la décision 97-8; la décision Emplacement de point de démarcation pour le câblage intérieur dans les immeubles multilocataires et questions connexes, Décision Télécom CRTC 99-10, 6 août 1999; de même que la décision 2003-45. L'ICCIPP/la BOMA ont dit estimer qu'un examen général de la politique s'imposait et que :
- les entreprises non dominantes n'ont jamais fait partie du discours sur la « concurrence dans la téléphonie locale »;
- l'extension de la décision 2003-45 au-delà des fournisseurs de services téléphoniques soulève la nouvelle et importante question d'un modèle obligatoire de la concurrence fondée sur les installations pour les services de données et de gros;
- la demande soulève de nouvelles questions, dont celle de savoir si le Conseil choisit les gagnants économiques, de même que les raisons stratégiques invoquées pour accorder un statut d'accès préférentiel à un fournisseur commercial;
- les membres de la Coalition se trouvent dans un marché différent et ont une orientation commerciale différente de celle des ESL.
29. Selon l'ICCIPP/la BOMA, l'intervention du Conseil n'est pas nécessaire. En effet, ils ont indiqué que les ILM dans le centre-ville de Toronto comptaient parmi les plus concurrentiels et que les résidents commerciaux qui avaient besoin de services de données pouvaient exercer des pressions sur les propriétaires d'immeubles pour qu'ils accordent l'accès à leurs fournisseurs privilégiés, sans l'intervention du Conseil. L'ICCIPP/la BOMA ont également fait valoir que les ententes d'accès aux ILM sont négociées comme elles l'ont toujours été dans le marché privé, donnant ainsi une véritable occasion aux membres de la Coalition de modifier les documents ou de choisir de fournir un service ailleurs.
30. De l'avis de l'ICCIPP/la BOMA, les membres de la Coalition n'ont pas essayé de régler leurs problèmes, par l'entremise du Comité directeur du CRTC sur l'interconnexion (CDCI) ou avec des représentants de l'industrie. Ils ont ajouté qu'avant de recourir au processus réglementaire, il faudrait d'abord que les membres de la Coalition travaillent de concert avec l'industrie.
31. L'ICCIPP/la BOMA ont souligné plusieurs autres préoccupations concernant la demande. Premièrement, ils ont fait valoir que la demande s'appuyait sur des faits présentés dans la décision 2003-45 et que les affirmations des ESL dans leurs mémoires semblaient avoir été prises au premier degré. L'ICCIPP/la BOMA ont précisé que même si des instances publiques constituaient un outil de collecte de renseignements utile, il aurait été impossible de faire une constatation de fait qui soit fiable. Par exemple, l'ICCIPP/la BOMA ont fait remarquer qu'au cours des instances, il ne leur était pas permis de voir des éléments de preuve clés ou encore de procéder à un contre-interrogatoire. Deuxièmement, l'ICCIPP/la BOMA ont indiqué que, dans divers endroits, les ESLT paient des frais d'accès aux ILM, contrairement à ce que la Coalition affirme. Troisièmement, l'ICCIPP/la BOMA ont soutenu que la Coalition n'a présenté qu'un seul côté de la médaille et notamment, que la Coalition n'a pas divulgué les revenus obtenus dans 18 immeubles qu'elle avait mentionnés et que sans cette information, il était difficile d'évaluer les liens existant entre les coûts et les revenus. Quatrièmement, l'ICCIPP/la BOMA ont fait valoir que contrairement à ce que soutient la Coalition, les entreprises non dominantes ont effectivement un pouvoir de marché. L'ICCIPP/la BOMA ont souligné que si les occupants désirent obtenir un service d'une entreprise non dominante, ils pourraient alors forcer le propriétaire de l'immeuble à permettre à l'entreprise non dominante d'y entrer.
32. L'ICCIPP/la BOMA ont fait remarquer que les modalités de responsabilité et d'indemnisation étaient un problème courant après la publication de la décision 2003-45. Ils ont fait valoir que les propriétaires d'immeubles n'étaient pas prêts à accepter le risque d'une poursuite pour négligence ou une perte purement financière, étant donné qu'ils en étaient réduits à recouvrer uniquement leurs coûts après la publication de la décision 2003-45. À leur avis, un produit d'assurance personnalisé pourrait régler le problème avec le temps.
33. De l'avis de FCI Broadband et de l'ICCIPP/la BOMA, les membres de la Coalition, contrairement à ce que ceux-ci proposent, devraient être tenus de divulguer toutes les ententes d'accès aux ILM s'ils veulent être traités comme des ESLC. FCI Broadband a soutenu que la Coalition réclame un traitement préférentiel pour une composante clé du régime actuel. L'ICCIPP/la BOMA ont fait valoir que le fait que les membres de la Coalition ne fournissent pas de services téléphoniques ne peut pas être important dans un contexte et non dans d'autres.
Observations en réplique de la Coalition
34. La Coalition a reconnu que les décisions antérieures du Conseil portaient spécifiquement sur l'accès aux services téléphoniques commutés. La Coalition a fait valoir, cependant, que ces dernières années, de nouveaux services, dont les services de données, n'avaient cessé de voir le jour. Elle a ajouté que les consommateurs doivent avoir le choix des entreprises pour tous leurs services de télécommunication.
35. La Coalition a indiqué que, contrairement à ce que l'ICCIPP/la BOMA affirment, l'influence que peuvent exercer les occupants des immeubles visés ne permet pas de faire aboutir les négociations et donc de garantir leur droit aux choix comme utilisateurs finals. La Coalition a fait valoir que les occupants ont peu d'influence, sinon aucune, sur les négociations entre les propriétaires d'immeubles et les entreprises non dominantes.
36. La Coalition a fait valoir que ses membres avaient essayé de travailler avec l'industrie avant d'invoquer le processus de réglementation. Elle a fait remarquer que ses membres avaient contacté les propriétaires d'immeubles et les gestionnaires immobiliers pour discuter de la mise en oeuvre de la décision 2003-45 et que c'était l'impasse. La Coalition a en outre indiqué qu'il ne semblait pas que le CDCI avait le pouvoir de persuader les membres de l'ICCIPP/la BOMA d'étendre aux entreprises non dominantes les clauses de l'entente de licence de télécommunication type de l'ICCIPP.
37. La Coalition a fait valoir qu'elle ne disait pas que dans tous les cas, les ESLT ne payaient pas de frais d'accès, mais que ses membres étaient forcés de payer un coût disproportionné pour leurs installations beaucoup plus modestes.
38. La Coalition a fait valoir que le produit d'assurance personnalisé suggéré par l'ICCIPP/la BOMA reflète leur mauvaise compréhension de l'industrie de l'assurance au Canada ainsi que de la nature du risque que les assureurs peuvent assumer. Elle a fait valoir que dans la décision 2003-45, le Conseil a très bien cerné le problème d'assurance et de risque.
39. En réponse aux observations de l'ICCIPP/la BOMA et de FCI Broadband concernant l'obligation de divulguer les clauses des ententes d'accès aux ILM, la Coalition, contrairement à ce qu'elle affirmait initialement, a fait valoir qu'elle accepterait volontiers de se conformer à l'obligation de divulguer les ententes d'accès aux ILM si le Conseil étendait les lignes directrices d'accès aux entreprises non dominantes.
Analyse et conclusion du Conseil
40. Le Conseil fait remarquer qu'aucune des parties intéressées n'a désapprouvé la déclaration de la Coalition selon laquelle sa demande n'était pas une demande de révision et de modification de la décision 2003-45. Comme cette demande ne conteste pas l'exactitude initiale de la décision 2003-45 mais vise plutôt une extension des lignes directrices relatives aux ententes d'accès aux ILM, le Conseil estime qu'il ne s'agit pas d'une demande de révision et de modification conformément à l'article 62 de la Loi.
41. Le Conseil fait remarquer qu'il a élaboré des cadres de réglementation pour promouvoir le développement de la concurrence dans le marché des télécommunications, en vue de mettre en ouvre les objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés à l'article 7 de la Loi. L'alinéa 7c) de la Loi prévoit que la politique canadienne de télécommunication vise à accroître l'efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes.
42. Dans la décision 2003-45, le Conseil a fait remarquer qu'il avait établi que la concurrence fondée sur les installations est le meilleur moyen d'assurer un service de qualité et abordable de même que l'innovation et la différenciation de services, et que la concurrence fondée sur les installations serait finalement la forme de concurrence la plus efficace et la plus durable pour atteindre les objectifs de la politique énoncés à l'article 7 de la Loi.
43. Le Conseil a en outre fait remarquer que pour favoriser le développement de la concurrence, il avait cherché à faire en sorte que les fournisseurs de services puissent accéder aux abonnés et les desservir de diverses façons, notamment par la revente des services, la location des installations, de même que par la mise en place et l'exploitation de leurs propres installations. Il a fait remarquer que dans de nombreuses décisions, il avait cherché à supprimer les obstacles qui limitent la capacité des fournisseurs de services à desservir les utilisateurs finals par l'un de ces moyens.
44. Dans la décision 2003-45, le Conseil a également examiné l'importance du marché des ILM. Il a estimé que les marchés des services locaux de résidence et d'affaires des ILM étaient importants et que leurs revenus annuels s'élevaient à près de 1,15 et 3 milliards de dollars respectivement. Le Conseil a en outre estimé que la forte concentration des ILM dans les zones urbaines donnait également aux ESL l'occasion d'acquérir une masse critique de clients à forte concentration géographique, ce qui contribuait à une envergure d'activités qui ne serait pas possible avec une petite clientèle dispersée.
45. Par conséquent, le Conseil a estimé que le règlement des questions d'accès aux ILM était essentiel au développement de la concurrence locale et, en particulier, de la concurrence fondée sur les installations, de même qu'au choix dont doivent disposer les utilisateurs finals.
46. Le Conseil fait remarquer qu'au dire de la Coalition, un grand nombre de ses membres ont investi des dizaines de millions de dollars dans l'infrastructure de réseau et qu'ils sont inscrits auprès du Conseil comme entreprises canadiennes non dominantes qui utilisent leurs propres installations pour fournir une gamme de services de télécommunication.
47. Le Conseil fait remarquer que les « compagnies de téléphone de services publics », qui incluent les membres de la Coalition, sont contrôlées comme catégorie distincte dans le Rapport à la gouverneure en conseil : État de la concurrence dans les marchés des télécommunications au Canada - Mise en place et accessibilité de l'infrastructure et des services de télécommunication de pointe, 25 novembre 2004. Le rapport indique que, même si les compagnies de téléphone de services publics accaparent un faible pourcentage de l'ensemble des revenus de télécommunication (moins de 1 % du total des revenus des services de télécommunication et environ 1,6 % de la part des revenus des services de télécommunication détenue par les concurrents en 2003), de 2002 à 2003, elles ont enregistré un taux de croissance de 26 %.
48. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les membres de la Coalition forment un groupe de concurrents dotés d'installations qui est petit certes, mais en expansion. Le Conseil note que de l'avis de l'ICCIPP/la BOMA, les membres de la Coalition ne sont pas des concurrents dotés d'installations. Ils font plutôt valoir que la demande soulève des questions qui débordent le cadre des décisions relatives à la concurrence locale, étant donné qu'elle va au-delà des services téléphoniques pour traiter d'un modèle de concurrence fondée sur les installations qui pourrait être appliqué aux services de données et de gros.
49. Le Conseil convient également avec la Coalition que la gamme de services fournis aux utilisateurs finals a changé sensiblement depuis les décisions sur la concurrence locale, ce qui reflète une convergence des services téléphoniques et de données. Par conséquent, le Conseil estime qu'à ce stade-ci, même si les services fournis par les membres de la Coalition ne sont pas des services téléphoniques locaux, les membres de la Coalition jouent un rôle important dans le développement de la concurrence locale et plus particulièrement dans le développement de la concurrence fondée sur les installations et les choix qui s'offrent aux utilisateurs finals.
50. Dans la décision 2003-45, le Conseil a souligné les divers obstacles à l'entrée dans les ILM. Outre les interdictions catégoriques à leur entrée dans les ILM, les ESLC ont décrit des situations où on les a empêchées de desservir rapidement leurs clients et où elles ont perdu des clients potentiels, en raison de retards déraisonnables subis en essayant de négocier des ententes d'accès acceptables avec les propriétaires d'immeubles. Les ESLC ont également décrit des situations où les modalités et les conditions, notamment les frais, demandés par les propriétaires d'immeubles étaient si lourds qu'elles ont été obligées de refuser de desservir les clients dans l'ILM. Elles ont également fait remarquer que dans certains cas, pour pouvoir desservir leurs clients, elles ont dû capituler devant les demandes des propriétaires d'immeubles ou signer des ententes d'accès selon des conditions qui, à leur avis, équivalaient à de la contrainte.
51. Le Conseil a conclu que la preuve au dossier de l'instance qui a mené à la décision 2003-45 prouve qu'un certain nombre d'obstacles à l'entrée dans les ILM empêchaient les ESL d'y desservir les utilisateurs finals.
52. Le Conseil fait remarquer qu'au dire de la Coalition, les propriétaires d'immeubles avaient imposé des conditions d'entrée identiques à celles de ses membres.
53. Après avoir examiné des échantillons des ententes d'accès aux ILM proposés par la Coalition à titre confidentiel, le Conseil constate que les propriétaires d'immeubles ont facturé un large éventail de frais d'occupation. Le Conseil souligne en outre que certains de ces frais étaient basés sur des facteurs qui ne semblaient pas se rapporter à l'espace utilisé par les installations, comme la superficie des immeubles. Le Conseil a ajouté que dans certains cas, les ententes d'accès aux ILM contenaient des frais additionnels, dont des frais d'entrée, et des suppléments pour des services additionnels.
54. Le Conseil note également que dans certains cas, un membre de la Coalition avait conclu que parce que l'imposition de frais par un propriétaire d'immeubles avait rendu la fourniture de services non viable, il avait décidé de ne pas signer d'entente d'accès pour desservir ces immeubles.
55. Le Conseil fait en outre remarquer, selon ce que Microcell a indiqué, qu'en une occasion au moins, les modalités déraisonnables d'accès imposées à un membre de la Coalition par le propriétaire d'immeubles en question l'avaient empêchée d'obtenir des services de transport de réseau numérique de la part de ce membre.
56. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que la preuve montre que les membres de la Coalition sont confrontés à des obstacles à l'entrée dans les ILM qui les empêchent d'y desservir les utilisateurs finals, que ce soit directement ou indirectement à titre de grossistes. Le Conseil estime également que, comme cela avait été le cas des ESL, ces obstacles à l'entrée limitent le choix des utilisateurs finals et empêchent les membres de la Coalition de livrer une véritable concurrence dans les marchés locaux de télécommunication. Le Conseil estime en général que lever les obstacles qui limitent le choix des utilisateurs finals et nuisent au développement de la concurrence locale et, en particulier, la concurrence fondée sur les installations, est essentiel à la mise en ouvre de la politique canadienne de télécommunication énoncée dans la Loi.
57. Par conséquent, le Conseil conclut que pour aider les membres de la Coalition et les propriétaires d'immeubles à conclure des arrangements d'accès aux ILM :
- les lignes directrices d'accès aux ILM concernant les conditions qui pourraient être considérées justes et indiquées, et décrites aux paragraphes 147 à 172 de la décision 2003-45, sont élargies de manière à inclure les arrangements entre les membres de la Coalition et les propriétaires d'immeubles;
- la condition d'accès aux ILM, décrite au paragraphe 141 de la décision 2003-45, est étendue de manière à inclure les membres de la Coalition qui fournissent des services aux utilisateurs finals dans les ILM, que ce soit directement ou indirectement à titre de grossistes;
- les membres de la Coalition doivent remplir à l'égard de la divulgation des ententes d'accès aux ILM les obligations qui sont énoncées aux paragraphes 173 à 178 de la décision 2003-45.
58. Le Conseil fait remarquer que la Coalition lui a également demandé d'imposer aux propriétaires d'immeubles des restrictions précises à l'égard de la négociation de certains frais, ainsi que d'étendre les lignes directrices rétroactivement au 30 juin 2003. Le Conseil estime que l'inclusion dans les lignes directrices d'accès ci-dessus des ententes d'accès aux ILM entre les membres de la Coalition et les propriétaires d'immeubles est suffisante pour aider les propriétaires d'immeubles et les membres de la Coalition à négocier des conditions d'accès aux ILM qui soient justes et indiquées. Par conséquent, le Conseil rejette cette partie de la demande de la Coalition.
59. Les conclusions susmentionnées du Conseil entrent en vigueur à la date de la présente décision.
Secrétaire général
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Notes de bas de page
[1] Le groupe MEARIE fournit des produits financiers et d'assurance à l'industrie de l'énergie de l'Ontario.
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