ARCHIVÉ -  Décision CRTC 98-226

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Décision

Ottawa, le 21 juillet 1998
Décision CRTC 98-226
Sportscope Television Network Ltd.
L'ensemble du Canada - 199709391
Le transfert d'actions est refusé
1.  Suite à la publication de l'avis 1997-158 du CRTC en date du 30 décembre 1997, le Conseil refuse, par vote majoritaire, à la Sportscope Television Network Ltd. (la Sportscope) l'autorisation de transférer à la Shaw Communications Inc. (la Shaw) 682 576,36 de ses actions ordinaires (les actions achetées), soit 47,85% des actions avec droit de vote de la Sportscope.
Les parties en cause
2.  La Sportscope possède un service de télévision spécialisé de langue anglaise qui, à l'échelle nationale, offre une programmation exclusivement consacrée aux sports, surtout aux faits saillants mis en en lumière par des vidéoclips, des résultats et des mises à jour (manchettes).
3.  Actuellement, la Shaw possède et contrôle trois services de télévision spécialisés et une compagnie de radio payante. Elle est également actionnaire minoritaire dans trois autres entreprises de services de télévision spécialisés.
4.  La Shaw est le deuxième plus important câblodistributeur au pays avec une clientèle d'environ 1,5 million d'abonnés. Après une série d'acquisitions et de ventes de compagnies de câblodistribution, la Shaw concentre 85% de ses opérations dans d'importants centres urbains. Elle contrôle aussi le service de distribution, par satellite, d'émissions captées directement par le consommateur et le service qui achemine les émissions par relais-satellite, services dont la Star Choice Television Network Incorporated détient les licences.
5.  De plus, la Shaw détient 50% du canal Sega (jeux) et 50% d'un service vidéo à la carte. Elle détient également les licences de plusieurs stations de radio et possède des parts dans des services de télécommunication.
Inquiétudes quant à la transaction proposée
6.  Dans l'avis public 1997-158 du CRTC, le Conseil a fait remarquer que les actions de la Shaw dans sept services de canaux spécialisés, y compris sa compagnie de radio payante ainsi que ses intérêts dans diverses entreprises de radiodiffusion peuvent lui conférer un avantage concurrentiel indu. Le Conseil a aussi identifié la concentration, la propriété mixte, l'éventuelle position dominante sur le marché et la possibilité de contrôle de l'accès comme des conséquences possibles de la transaction proposée. De plus, le Conseil a ajouté qu'il évaluerait toute démarche relative à ces transactions et qu'il s'interrogerait à savoir s'il est d'intérêt public de permettre à la Shaw d'acquérir des intérêts importants dans une autre compagnie de services spécialisés.
Interventions
7.  Le Conseil a reçu 14 points de vue sur la demande de la Shaw : 8 favorables, 4 proposant un appui conditionnel et deux défavorables. Les Communications par satellite canadien Inc. a fait des commentaires sur la question.
8.  L'Association canadienne des radiodiffuseurs, Stentor et l'Association de la télévision spécialisée et payante ont appuyé la demande en autant que le Conseil impose à la Shaw des restrictions quant à ses velléités de concentration d'entreprises et la possibilité de préférence indue dont elle pourrait jouir. Tous ceux qui ont manifesté leur appui à la demande ont proposé que le Conseil mette sur pied une instance publique pour clarifier sa politique d'accès à l'entreprise et clarifie aussi la clause du Règlement sur la distribution de radiodiffusion (le Règlement) concernant la préférence indue, plus particulièrement pour les distributeurs de radiodiffusion qui détiennent des intérêts dans des services de télévision spécialisés. ExpressVu a déclaré qu'elle ne s'opposerait pas à la demande si le Conseil imposait à la Shaw des conditions de licence qui interdiraient toute préférence indue.
9.  Torstar Corporation (Torstar), une intervenante défavorable, a fait référence à la plainte qu'elle a déposée contre la Shaw et dont le Conseil est présentement saisi. Torstar, dans sa plainte, a affirmé que la Shaw agit comme un chien de garde en ce qui concerne les services de programmation exemptés et utilise des tarifs tels qu'ils bloquent l'accès aux nouveaux venus. Torstar a proposé que le Conseil prenne sa plainte en considération avant d'approuver la demande de la Sportscope.
10.  Friends of Canadian Broadcasting (Friends) s'est également oposé à la demande. Selon Friends, les exploitants de services multiples (ESM) par câble ont abusé de leur position de force en agissant comme des prédateurs en ce qui concerne l'imposition de frais de marketing obligatoires que Friends considère comme des frais de transmission. Friends a aussi soutenu que les ESM par câble réalignent les canaux à l'avantage des services de télévision spécialisés dans lesquels ils détiennent des intérêts.
11.  La requérante a notamment répondu que la transaction proposée n'est pas une demande qui vise à permettre à la Shaw d'exercer un contrôle au jour le jour sur la Sportscope. La requérante a fait remarquer que l'actuel président du conseil d'administration et président-directeur général de la Sportscope conserverait ses fonctions et continuerait de détenir 47,85% des parts de la Société. En réponse aux allégations voulant que la Shaw ait accordé une préférence indue aux services de télévision spécialisés dans lesquels elle a des intérêts, la requérante a déclaré que la décision de distribuer ces services étaient justifiées par des circonstances particulières. Pour ce qui est des préoccupations exprimées par Torstar, la requérante a fait savoir que des négociations avec l'intervenante concernant la distribution de ses services exemptés ont lieu dans un contexte distinct de la présente instance et qu'elles devraient le demeurer.
Les conclusions du Conseil
12.  Dans son rapport du 19 mai 1995 au gouvernement, intitulé Concurrence et culture sur l'autoroute de l"information (le rapport sur la convergence), le Conseil a déclaré ce qui suit :
 D'ici à ce qu'il existe une capacité suffisante de transmission sur les réseaux de câblodistribution et à ce qu'on établisse des règles transparentes relatives à l'accès pour empêcher une préférence indue, les affiliés des câblodistributeurs autorisés ne doivent généralement pas se voir attribuer des licences d'exploitation d'entreprises de programmation autres que pour des services de radio et de télévision en direct, pas plus qu'elles ne doivent être autorisées à acquérir la propriété ou le contrôle de ce genre d'entreprises.
13.  Les Règles du Conseil en matière d'accès, énoncées dans l'avis public 1996-60 du CRTC du 26 avril 1996, sont maintenant incluses dans le nouveau Règlement qui est entré en vigueur en janvier 1998. Les règles en matière d'accès reposaient sur une capacité de transmission suffisante, la deuxième exigence mentionnée dans le rapport sur la convergence, et un environnement de distribution en radiodiffusion plus concurrentiel. Dans l'optique du Conseil, de telles conditions devraient permettre d'atténuer toute forme de préférence que les câblodistributeurs pourraient accorder aux services spécialisés dans lesquelles ils sont actionnaires.
14.  Lorsqu'il a accordé de nouvelles licences de services spécialisés en septembre 1996, le Conseil prévoyait qu'il y aurait une plus grande capacité de transmission disponible grâce à l'arrivée de la nouvelle technologie numérique (par exemple, le déploiement des décodeurs). Par ailleurs, le Conseil s'attendait au développement d'un environnement plus compétitif dans le secteur de la distribution en radiodiffusion. C'est en prenant ces prémices pour acquises que le Conseil a accordé des permis à des services spécialisés dans lesquelles des câblodistributeurs ou leurs affiliés avaient des intérêts.
15.  En examinant le milieu actuel de la distribution en radiodiffusion, le Conseil considère que les conditions du marché en ce qui concerne la concurrence et la capacité de transmission ne se sont pas concrétisées. Le Conseil considère aussi que l'actuelle capacité de transmission et le niveau de concurrence ne suffisent pas à réduire l'éventualité que les câblodistributeurs confèrent des avantages indus à des entreprises dans lesquelles ils sont actionnaires.
16.  Après avoir examiné tous les arguments pertinents, le Conseil considère, compte tenu des intérêts importants de la Shaw dans l'industrie canadienne de la radiodiffusion que sa suprématie pourrait donner lieu à des pratiques de contrôle de l'accès ou à d'autres comportements anticoncurrentiels. En conséquence, le Conseil est d'avis que l'approbation de cette demande ne servirait pas l'intérêt public dans le moment.
La secrétaire générale
Laura M. Talbot-Allan
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