ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2010-214

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  Référence au processus : 2009-437
  Ottawa, le 14 avril 2010
  Société Radio-Canada
L’ensemble du Canada
  Demande 2009-0701-6, reçue le 1er mai 2009
 

bold – modification de licence

  Le Conseil refuse la demande de la Société Radio-Canada (SRC) en vue de modifier la licence de radiodiffusion de son service d’émissions spécialisées de catégorie 1 appelé bold afin de changer la condition qui porte sur la nature du service.
  Le Conseil ordonne à la SRC de déposer, dans un délai de 30 jours suivant la date de la présente décision, une proposition de grille horaire alternative pour bold dans laquelle la plupart des émissions reflètent la vie réelle dans les régions rurales du Canada, et qui veille à ce que la nature du service soit suffisamment spécifique et représentative de la stratégie de programmation et que le service ne fasse concurrence à aucun autre service spécialisé.
 

Introduction

1.

Dans la décision 2000-453, le Conseil approuvait l’attribution d’une licence à Land and Sea (devenu par la suite Country Canada) avec la condition suivante pour la nature du service :
 

La titulaire doit offrir un service spécialisé national de télévision de langue anglaise de catégorie 1 consacré à la famille canadienne rurale, et particulièrement orienté vers les adultes âgés de 25 à 54 ans. Toutes les émissions d’information, d’échanges et de divertissements constituant la programmation devront être présentées dans une perspective rurale.

 

Aux fins de la présente condition, le terme « rural » définit des individus vivant à l’extérieur des grands centres urbains, au sein de petites communautés et qui de manière générale tirent leurs moyens de subsistance de la terre ou de la mer ou de l’exploitation d’entreprises directement liées à celles-ci.

2.

Le 26 octobre 2007, la Société Radio-Canada (SRC) faisait part au Conseil de son intention de donner à Country Canada le nouveau nom de bold et de modifier sa grille horaire pour faire plus de place aux dramatiques de haut de gamme et aux arts de la scène. Selon la SRC, ce changement pouvait se faire sans modifier la nature du service.

3.

Le 27 novembre 2007, la SRC a été prévenue que, pour s’écarter de la nature de service de Country Canada l’obligeant à fournir un service de télévision aux Canadiens des régions rurales, il lui fallait faire approuver par le Conseil une demande visant à modifier sa condition de licence en conséquence.

4.

Depuis le changement de nom en mars 2008 de Country Canada à bold, un échange de lettres entre le Conseil et la SRC s’en est suivi afin de déterminer si la nouvelle formule de programmation respecte la condition sur la nature du service. La SRC affirmait que la programmation se conformait à la définition de la nature du service. Dans une lettre datée du 28 novembre 2008 en particulier, la SRC maintient que le service reste fidèle à la formule de créneau pour laquelle il a été autorisé. Son explication s’appuie sur les arguments suivants :
 
  • Bien que l’intention à l’origine de ce service ait été de commander et de mettre au point une programmation originale, comme le degré de pénétration et les revenus projetés n’ont jamais été atteints, le service a été forcé de se rabattre sur la programmation disponible présentée dans une perspective rurale. Dans l’ensemble, la grille horaire n’a jamais à proprement parler adopté la « perspective rurale ».

  • À l’ère de la communication, l’endroit où l’on vit n’ayant plus la même importance, se cantonner dans une « position trop rigide à l’égard de la nature de service de bold serait non seulement mal venu », mais ne permettrait ni à bold d’être « pertinent, ni d’attirer, ni de retenir les téléspectateurs ».

  • Un sondage Ipsos Reid commandé par la SRC a montré que les Canadiens des régions rurales apprécient bold.

  • MenTV est le seul autre service à avoir une nature de service qui l’oblige à fournir une programmation avec une perspective particulière.

5.

La SRC a déclaré que si le Conseil ne partageait pas son opinion, elle n’aurait pas le choix de déposer une demande pour modifier la nature du service de bold.

6.

Cette réponse a fait en sorte que le Conseil en arrive à la conclusion que les actions de la SRC semblaient avoir une incidence négative sur l’intégrité du processus d’attribution des licences, étant donné que le service a été approuvé à l’origine pour fournir un genre de programmation qui s’adressait particulièrement à un auditoire mal servi, ce que le Conseil est d’avis que le service ne fait plus. Le Conseil estime également que les changements apportés à la programmation vont à l’encontre de la politique relative à l’exclusivité des genres, énoncée dans l’avis public de radiodiffusion 2008-100. Par conséquent, comme l’annonce l’avis de consultation de radiodiffusion 2009-132, le Conseil a demandé à la SRC de comparaître pour lui poser des questions, entendre ses réponses et trancher cette affaire.

7.

Le 1er mai 2009, la SRC a déposé une lettre dans laquelle elle ne conteste pas l’opinion préliminaire du Conseil que la programmation de bold ne cadre plus avec sa nature de service et demande à modifier la condition en conséquence. Le 22 mai 2009, le Conseil a suspendu l’audience publique jusqu’à ce qu’il tranche sur les questions abordées dans la demande1.

8.

Dans sa demande, la SRC propose de modifier la licence de radiodiffusion de son service d’émissions spécialisées de catégorie 1 appelé bold afin de remplacer la condition portant sur sa nature de service par la condition suivante :
 

La titulaire doit offrir un service national d’émissions de télévision spécialisée de langue anglaise de catégorie 1 destiné aux Canadiens des régions rurales. Le service comprendra des émissions d’information, d’échanges et de divertissement.

9.

La SRC invoque les raisons suivantes à l’appui de sa demande :
 
  • À l’instar d’autres services spécialisés de catégorie 1, bold ne dispose ni du nombre d’abonnés ni des revenus nécessaires pour créer la quantité de contenu original prévue dans la demande de licence initiale; le service doit donc compter presque entièrement sur une programmation disponible présentée dans une perspective rurale.

  • Les émissions présentées dans une perspective rurale ne suffisent pas à combler la programmation du service.

  • Le service ne sera viable sur le plan économique que si la nature du service est modifiée afin de ne pas mentionner que la programmation doit être « présentée dans une perspective rurale ».

10.

Selon la SRC, la condition de licence proposée pour la nature du service lui permettrait de continuer à bonifier le service pour les familles canadiennes en milieu rural. La SRC estime raisonnable que le Conseil s’attende à ce qu’elle offre une programmation « présentée dans une perspective rurale » et lui demande, lors du prochain renouvellement de la licence de bold, de démontrer comment l’attente a été respectée. Elle est prête à accepter une attente selon laquelle au moins 10 % des émissions de bold seraient des émissions canadiennes consacrées à un auditoire canadien rural.

11.

La SRC indique également que si le Conseil est préoccupé par la possibilité que la programmation de bold fasse concurrence à des services analogiques ou à des services spécialisés de catégorie 1, elle se plierait à une condition de licence l’empêchant de consacrer plus de 15 % de la totalité de la programmation diffusée au cours d’une année de radiodiffusion à des émissions tirées de la catégorie 8a) Émissions de musique et de danse autres que les émissions de musique vidéo et les vidéoclips.

12.

Le Conseil a reçu des commentaires de Bell Aliant Communications régionales inc., société en commandite, et Bell Canada (Bell) et de l’English Language Arts Network–Québec (ELAN) à l’égard de la demande. Le Conseil a aussi reçu des interventions défavorables à la demande de l’Independent Broadcasters Group (IBG)2 et de Quebecor Media inc. (QMi). Les interventions et les réponses de la requérante à ces interventions se trouvent sur le site web du Conseil, www.crtc.gc.ca, sous « Instances publiques ».

13.

Après avoir étudié la demande, les interventions et les réponses de la requérante à ces interventions à la lumière des politiques et règlements pertinents, le Conseil estime que les questions dont il convient de traiter sont les suivantes :
 
  • La modification demandée aurait-elle pour effet de transformer bold en service spécialisé d’intérêt général?

  • La modification demandée aurait-elle pour effet de permettre à bold de concurrencer directement des services analogiques ou des services spécialisés de catégorie 1?

  • La modification demandée compromet-elle le régime du Conseil pour l’attribution des licences?

14.

Le Conseil note que l’intervention d’ELAN ne s’inscrit pas dans le cadre de cette instance.
 

La modification demandée aurait-elle pour effet de transformer bold en service spécialisé d’intérêt général?

  Observations

15.

Selon IBG, bold est un service d’intérêt général qui ne fournit pas la programmation de créneau pour laquelle il a été autorisé. IBG note que, dans la décision de radiodiffusion 2008-251, le Conseil a refusé une demande en vue d’obtenir une licence de radiodiffusion afin d’exploiter une entreprise de programmation d’émissions spécialisées de catégorie 2 qui voulait offrir un service de télévision d’intérêt général diffusant de la programmation en haute définition tirée d’une grande variété de catégories d’émission.

16.

QMI est d’avis que si la modification proposée était approuvée, bold se transformerait en un service semblable à une station de télévision traditionnelle alors que déjà, selon elle, ce service ne respecte pas son mandat.

17.

En réponse, la SRC affirme savoir depuis plusieurs années que rien ne prouve que les Canadiens ne goûtent pas les mêmes genres d’émission en régions que dans les villes : c’est ce qui l’a incitée à changer le nom de Country Canada à bold et à offrir aux Canadiens des régions rurales les émissions qui leur plaisent. Comme preuve de ce qu’elle avance, la SRC déclare que le nombre d’abonnés au service est en augmentation dans les régions rurales depuis son changement d’image.
  Analyse et décisions du Conseil

18.

Le Conseil note qu’un service spécialisé se définit, selon l’avis public 1986-199, comme « une programmation de télévision d’intérêt particulier destinée à satisfaire les intérêts et les besoins propres à divers groupes d’âge ou groupes linguistiques, culturels, géographiques ou autres au Canada ». L’avis mentionne plus loin que « les services spécialisés envisagés pourraient se composer d’émissions communément appelées "thématiques ou verticalesˮ».

19.

En ce qui a trait à bold, le Conseil note que le service peut actuellement tirer sa programmation de toutes les catégories d’émissions, sauf les catégories 3 Reportages et actualités, 4 Émissions religieuses, 8b) Vidéoclips, 8c) Émissions de vidéoclips et 15 Matériel d’intermède. Selon le Conseil, si cette souplesse ne s’accompagnait pas d’une définition de la nature du service selon laquelle la programmation doit être présentée dans une perspective rurale, bold ne présenterait pas un intérêt suffisamment particulier pour être considéré comme un service spécialisé. De plus, le Conseil note que dans la grille horaire affichée par bold sur son site web en décembre 2009, on retrouve très peu d’émissions comme celles que la SRC avait citées dans sa demande comme des émissions présentées dans une perspective rurale. La description même du service par la titulaire comme « la station où se retrouve ce qui se fait de mieux comme arts du spectacle, de plus intelligent comme dramatiques et de plus audacieux comme comédies » ne donne pas le moindre indice que son mandat est de servir les Canadiens des régions rurales conformément à la décision 2000-453.

20.

Le Conseil est donc d’accord avec IBG et QMi qu’éliminer pour bold l’obligation de diffuser des émissions présentées dans une perspective rurale équivaut à dire à la SRC qu’elle peut continuer d’inclure dans sa grille horaire tous les genres d’émissions, à la manière d’une entreprise de télévision traditionnelle qui n’a pas à servir un segment particulier de l’auditoire ou à remplir un certain créneau avec sa programmation. Même si la SRC a raison de penser que les Canadiens des régions rurales apprécient le même type d’émissions que les Canadiens des régions urbaines, le Conseil estime qu’axer une programmation sur une perspective rurale est une façon d’assurer la diffusion d’émissions qui reflètent les styles de vie et les références culturelles des Canadiens qui habitent les régions rurales. Sans cette obligation, l’ensemble de la programmation, bien que susceptible de plaire en général aux Canadiens des régions rurales, ne reflétera pas nécessairement leur réalité et ne peut donc pas être considéré comme une programmation de créneau.
 

La modification demandée aurait-elle pour effet de permettre à bold de concurrencer directement des services analogiques ou des services spécialisés de catégorie 1?

  Observations

21.

IBG est d’avis que bold fait concurrence à des services existants de catégorie 1 et à des services spécialisés analogiques, ce qui va à l’encontre de la politique d’un service par genre récemment confirmée par le Conseil dans l’avis public de radiodiffusion 2008-100. En particulier, IBG fait valoir que bold cherche à combiner des émissions qui font partie des créneaux de services comme Bravo!, Showcase, The Comedy Network, TSN, Sportsnet et The Score.

22.

Bell note que le Conseil a réaffirmé dans l’avis public de radiodiffusion 2008-100 que les limites imposées dans chaque catégorie d’émissions avaient pour but de forcer les services facultatifs à s’en tenir au genre pour lequel ils ont été autorisés et à éviter les métamorphoses qui les mettraient en concurrence directe avec d’autres services analogiques existants et d’autres services spécialisés existants de catégorie 1. Bell demande au Conseil de confirmer si bold contrevient à sa politique sur l’exclusivité des genres.

23.

En réplique, la SRC note qu’à la différence des services spécialisés que bold concurrence, selon les dires d’IBG, celui-ci a le mandat de servir les Canadiens des régions rurales. La SRC ajoute qu’aucun des services de programmation auquel bold serait censé nuire, selon IBG, à cause de son caractère « concurrentiel » ne s’en est plaint ni n’a déposé d’intervention dans le cadre de la présente instance.
  Analyse et décisions du Conseil

24.

Le Conseil note qu’en plus de la condition qui régit sa nature de service, bold doit respecter les conditions suivantes :
 
  • La titulaire ne doit pas consacrer plus de 10 % de la semaine de radiodiffusion aux émissions de la catégorie 7d) Longs métrages pour salles de cinéma diffusés à la télévision;

  • La titulaire ne doit pas consacrer plus de 10 % de la semaine de radiodiffusion aux émissions des catégories 6a) Émissions de sport professionnel et 6b) Émissions de sport amateur;

  • La titulaire ne doit pas consacrer plus de 10 % de la programmation de chaque mois de radiodiffusion à des émissions également diffusées à l’antenne de la SRC au cours du même mois de radiodiffusion.

25.

Le Conseil estime que la limite imposée quant aux émissions de sport professionnel et amateur suffit à empêcher bold de concurrencer les services spécialisés canadiens existants consacrés aux sports.

26.

Cependant, le Conseil note que la description de la programmation de bold, telle que formulée par la SRC, présente des similarités avec la nature de service de Showcase, un service de programmation qui présente exclusivement de la fiction avec des films, dramatiques, comédies et miniséries de producteurs indépendants du Canada et d’ailleurs3. En outre, Showcase est assujettie à une condition de licence qui l’oblige à consacrer au moins 95 % de l’ensemble de sa programmation à des émissions appartenant aux catégories 7 Émissions dramatiques et comiques, 12 Interludes, 13 Messages d’intérêt public, 14 Infopublicités, vidéos promotionnels et d’entreprises et 15 Matériel d’intermède.

27.

Le Conseil note également des similarités entre la description de la programmation de bold et la nature du service Bravo!, un service qui présente, 24 heures sur 24, des spectacles et des émissions dramatiques, ainsi que des documentaires et des émissions de discussion. À l’origine, dans la décision d’attribution de sa licence4, Bravo! est décrit comme un service axé sur les arts de la scène qui offre une combinaison d’émissions de danse, de musique, d’opéra, de documentaires, de cinéma, d’arts visuels et d’émissions-discussion provenant du Canada et d’ailleurs.

28.

Une analyse des émissions à l’horaire de bold entre décembre 2009 et janvier 2010 révèle que plus de la moitié de sa grille horaire au cours d’une semaine est tirée de la catégorie 7. Le Conseil note aussi pour la même période qu’une portion de la grille horaire renferme des émissions de la catégorie 8a), dans une certaine mesure les mêmes que Bravo!

29.

Par conséquent, si le Conseil relevait bold de l’obligation de fournir une perspective rurale dans les émissions d’information, d’échanges et de divertissement, il estime que bold concurrencerait Showcase et Bravo! Le Conseil note aussi que, si on la compare aux natures de service et aux conditions respectives de Showcase et de Bravo!, la proposition de la SRC pour bold ne correspond pas à la définition d’un service spécialisé avec une programmation de créneau. De plus, comme noté plus haut, la seule restriction imposée à bold pour la catégorie 7 est de ne pas consacrer plus de 10 % de la semaine de radiodiffusion à la diffusion de films pour salles de cinéma. Selon le Conseil, approuver la demande de la SRC reviendrait à dire qu’une programmation de ce genre peut soutenir la concurrence et que le Conseil est prêt à recevoir des demandes pour de nouveaux services.

30.

Enfin, le fait que les titulaires des services spécialisés ne se soient pas plaints au sujet de la concurrence de bold ou ne soient pas intervenus dans le processus ne change rien aux responsabilités du Conseil, qui sont de veiller au respect de la politique sur l’exclusivité des genres et d’évaluer la conformité des titulaires à leurs obligations réglementaires.
 

La modification demandée compromet-elle le régime du Conseil pour l’attribution des licences?

  Observations

31.

IBG fait valoir que l’approbation de la demande compromettrait l’intégrité de l’instance d’attribution de licence du Conseil pour les services de catégorie 1 étant donné qu’une telle approbation permettrait à la SRC de continuer à offrir un service de programmation d’intérêt général, à l’encontre des politiques du Conseil à l’égard des services facultatifs. IBG ajoute qu’en acceptant une attente dans sa licence à l’effet qu’elle doit consacrer 10 % de sa programmation à des émissions destinées aux Canadiens des régions rurales, la SRC reconnaît que bold continuerait d’être un service d’intérêt général. Selon l’intervenante, la seule façon de veiller à ce que bold offre une programmation de créneau et serve une population en particulier avec une programmation consacrée aux Canadiens des régions rurales, consiste à l’obliger à fournir des émissions présentées dans une perspective rurale.

32.

QMi est aussi d’avis que l’approbation de la demande compromettrait le régime d’attribution des licences. Elle fait remarquer que la SRC n’a jamais expliqué comment sa demande pouvait profiter au système canadien de radiodiffusion ni en quoi elle ajouterait à la diversité en s’en tenant à un genre exclusif. QMi fait finalement remarquer que la modification proposée par la SRC paraît fondée sur la prémisse que ce service n’a pas un auditoire suffisant pour le rentabiliser. Selon QMi, s’il n’y pas de place pour un tel service, on pourrait dire que « le marché a parlé ».

33.

Bell note que la SRC s’était fait attribuer une licence pour un service de catégorie 1 à la suite d’un processus concurrentiel en affirmant qu’il allait fournir une programmation apte à intéresser particulièrement les Canadiens qui habitent la campagne ou des ports de pêche. Bell note également que le Conseil avait déterminé à l’époque que ces communautés étaient mal servies et avait par conséquent approuvé le service en tant que service de catégorie 1 bénéficiant d’une distribution obligatoire. Selon Bell, vu le changement d’orientation, il n’y a plus de raison pour que ce service soit reconnu comme un service de catégorie 1, et si le Conseil désire approuver la demande de la SRC, il devrait faire de bold un service de catégorie 2 exploité dans un genre concurrent, et par conséquent, bold ne devrait plus être admissible à une distribution obligatoire.

34.

La SRC rejette l’idée que l’approbation de la modification compromettrait l’intégrité du processus dont se sert le Conseil pour attribuer les licences. Elle affirme que la modification a pour but de clarifier le fait que le service a été autorisé à l’origine pour desservir les Canadiens des régions rurales et qu’il demeure un service pour les Canadiens des régions rurales.

35.

En réponse à Bell qui suggère que, si la modification est accordée, bold devrait être désigné comme service concurrentiel et perdre son droit à une distribution obligatoire, la SRC fait valoir qu’une telle décision affaiblirait considérablement sa position dans les négociations avec Bell. Étant donné que bold compte en bonne partie sur la distribution par satellite de radiodiffusion directe, la situation entraînerait autant une bonne occasion d’affaires pour Bell que des conséquences néfastes pour bold.

36.

Enfin, en réponse à QMI, la SRC défend le bien-fondé de sa demande en disant qu’il serait insensé de refuser la modification qu’elle réclame sous prétexte que le marché ne s’intéresse pas à ce type de service, alors que les Canadiens des régions rurales sont clairement intéressés par bold dans sa forme actuelle.
  Analyse et décisions du Conseil

37.

Selon le Conseil, l’approbation de la demande de la SRC telle que déposée pourrait créer une incidence négative à l’égard de l’intégrité du processus d’attribution des licences, car la nature de service proposée est trop large pour que bold puisse fournir une programmation d’intérêt particulier destinée aux Canadiens en régions rurales, conformément à la décision originale. De plus, comme noté plus haut, la définition de sa nature de service telle que proposée n’empêcherait pas bold de faire concurrence à des services spécialisés existants et pourrait faire de bold un service spécialisé d’intérêt général, ce qui est contraire à l’essence même d’un service spécialisé.

38.

En ce qui concerne l’intervention de Bell, le Conseil conclut que la programmation de bold ne satisfait pas aux critères qui permettent à un genre de faire face à la concurrence comme le décrit l’avis public de radiodiffusion 2008-100. Tel que l’indique la SRC dans sa lettre du 28 novembre 2008, ce service n’a jamais réalisé les revenus projetés, la popularité du genre n’a pas été démontrée, la programmation est difficile à trouver et, pour l’instant, bold occupe un créneau unique qui consiste à fournir de la programmation avec un point de vue rural. Aucun des critères n’est satisfait pour justifier l’introduction de la concurrence dans ce genre de programmation.
 

Conclusion

39.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil refuse la demande présentée par la SRC en vue de modifier la licence de radiodiffusion de son service d’émissions spécialisées de catégorie 1 connu sous le nom de bold, afin de remplacer la condition de licence qui porte sur la nature du service.

40.

Le Conseil note toutefois l’argument de la SRC selon lequel elle doit faire face à des défis relativement à la disponibilité des émissions produites expressément pour refléter la perspective rurale et le fait que le service n’a pas les moyens de produire lui-même du contenu original de ce type. Par conséquent, le Conseil accepte que la SRC repositionne la stratégie de programmation de bold de manière à aplanir ces difficultés tout en conservant son orientation qui est celle d’un service conçu pour les Canadiens des régions rurales, qui tient compte de leurs intérêts et reflète leur réalité. En outre, malgré l’intérêt que portent les Canadiens des régions rurales aux émissions dramatiques et aux arts de la scène, le Conseil rappelle à la titulaire que Showcase et Bravo! ont été autorisées pour fournir ces types d’émissions et que ces genres de programmation demeurent protégés de la concurrence.

41.

Par conséquent, le Conseil ordonne à la SRC de lui soumettre, dans un délai de 30 jours de la date de la présente décision, une autre proposition pour la programmation de bold qui soit acceptable au Conseil en satisfaisant les critères suivants :
 
  • la grille horaire devrait inclure des émissions qui reflètent la vie réelle dans les régions rurales du Canada;

  • la nature du service devrait être suffisamment spécifique et représentative de la stratégie de programmation;

  • le service ne devrait concurrencer aucun service spécialisé existant.

42.

Le Conseil note que l’audience publique suspendue par l’avis de consultation de radiodiffusion 2009-132-1 le sera jusqu’à ce qu’il traite de la demande qui sera déposée.
  Secrétaire général
 

Documents connexes

 
  • Avis de consultation de radiodiffusion CRTC 2009-132-1, 22 mai 2009
 
  • Avis de consultation de radiodiffusion CRTC 2009-132, 11 mars 2009
 
  • Canada HD Network – service spécialisé de catégorie 2, décision de radiodiffusion CRTC 2008-251, 4 septembre 2008
 
  • Cadres réglementaires des entreprises de distribution de radiodiffusion et des services de programmation facultatifs – politique réglementaire, avis public de radiodiffusion CRTC 2008-100, 30 octobre 2008
 
  • Land and Sea – un nouveau service spécialisé, décision CRTC 2000-453, 14 décembre 2000
 
  • Approbation du service Bravo!, décision CRTC 94-281, 6 juin 1994
 
  • Approbation du service "Showcase", décision CRTC 94-280, 6 juin 1994
 
  • Appel de demandes de licences de réseau en vue de dispenser des services canadiens d’émissions spécialisées, avis public CRTC 1986-199, 13 août 1986
  La présente décision devra être annexée à la licence. Elle est disponible, sur demande, en média substitut, et peut également être consultée en version PDF ou en HTML sur le site Internet suivant : http://www.crtc.gc.ca.
 

Notes de bas de page

1Avis de consultation de radiodiffusion 2009-132-1.

2 Il s’agit d’un regroupement composé des membres suivants : Réseau de télévision des peuples autochtones APTN, Channel Zero Inc., Ethnic Channels Group Limited, Fairchild Television Ltd., Stornoway Communications Limited Partnership et le Groupe de compagnies S-VOX.

3 Voir la décision 94-280.

4 Voir la décision 94-281.

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