ARCHIVÉ - Télécom Lettre du Conseil - 8690-S9-200414722

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Lettre

Ottawa, le 1er septembre 2005    

Référence : 8690-S9-200414722 

Requérante

Shaw Cablesystems Limited
630, 3 e Avenue Sud-Ouest, bureau 900
Calgary (Alberta)
T2P 4L4

Aux soins de : Dale Butler
Directeur des affaires réglementaires
dale.butler@sjrb.ca
Télécopieur : (403) 234-6278

Intimée

Farris, Vaughan, Willis & Murphy
Avocats et conseillers juridiques
700, rue Georgia Ouest, 25 e étage
Vancouver (Colombie-Britannique)
V7Y 1B3

Aux soins de : George Macintosh, c.r.
gmacintosh@farris.com
Télécopieur : (604) 661-9349

Objet : Demande déposée en vertu de la partie VII par Shaw Cablesystems Limited visant à obtenir une ordonnance permettant l'accès aux propriétés municipales de la ville de Vancouver

Dans la présente lettre, le Conseil établit des lignes directrices quant à ce qu'il estime des modalités et conditions raisonnables d'accès à la propriété municipale pour Shaw Cablesystems Limited (Shaw) dans la ville de Vancouver (Vancouver ). De façon plus précise, le Conseil estime qu'il est raisonnable que Shaw et Vancouver négocient les conditions d'accès pour une période de 15 ans. Le Conseil estime également qu'il est raisonnable que Shaw ait la certitude de son accès aux routes et aux autres lieux publics de Vancouver en vertu d'un AAM d'application générale. Le Conseil fait remarquer que les principes énoncés dans la décision Ledcor /Vancouver - Construction, exploitation et entretien de lignes de transmission à Vancouver, Décision CRTC 2001-23, 25 janvier 2001 , peuvent aider Shaw et Vancouver à négocier d'autres modalités et conditions. Faute d'accord entre Shaw et Vancouver dans les 60 jours suivant la date de la présente lettre, le Conseil sera disposé à étudier la possibilité d'octroyer l'autorisation en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi sur les télécommunications d'une façon expéditive à des conditions que le Conseil juge indiquées.

La demande

1.   Le 6 décembre 2004, Shaw Cablesystems Limited, en son nom et au nom de ses sociétés affiliées, y compris Shaw Communications Inc. (Shaw), a déposé une demande en vertu de la partie VII auprès du Conseil conformément aux articles 42 et 43 de la Loi sur les télécommunications (la Loi) en vue d'obtenir une ordonnance du Conseil lui permettant l'accès aux routes et aux autres lieux publics faisant partie du territoire de la ville de Vancouver (Vancouver). Shaw a demandé l'ordonnance afin de lui permettre de construire, d'entretenir et d'exploiter ses lignes de transmission et les installations connexes de son réseau de communication selon les modalités et les conditions que déterminera le Conseil conformément aux principes établis dans la décision Ledcor/Vancouver - Construction, exploitation et entretien de lignes de transmission à Vancouver , Décision CRTC 2001-23, 25 janvier 2001 (la décision 2001-23).

2.   Plus précisément, Shaw a demandé au Conseil le redressement suivant :

a)  que le Conseil traite la demande sans délai, notamment en déterminant un processus de résolution de différends ou une procédure accélérée à appliquer et un échéancier connexe;

b)  que le Conseil rende une ordonnance :

i)  accordant à Shaw l'accès aux routes publiques et à d'autres propriétés municipales de Vancouver selon des modalités et conditions conformes aux principes établis dans la décision 2001-23 (les principes Ledcor), modalités et conditions à inclure dans un accord qui stipule précisément ce qui suit :

A. une durée de 20 ans ou une autre durée suffisamment longue; 

B. que tous les différends relativement à l'interprétation, à l'application ou à la modification des modalités d'accès soient acheminés au Conseil (si les parties ne les règlent pas autrement);

C.  que tous les droits et frais à payer en vertu de l'accord soient déterminés de façon précise et qu'ils soient limités au recouvrement des coûts causals appropriés conformément au recouvrement des coûts autorisé par le Conseil dans la décision 2001-23; 

D. qu'à l'échéance de l'accord et particulièrement lorsque les parties ne sont pas parvenues à s'entendre sur les nouvelles modalités et conditions, Vancouver n'entrave pas l'exploitation en cours du réseau ou des installations de Shaw au détriment des clients de Shaw, notamment en demandant à Shaw d'enlever ses installations ou en donnant à Vancouver le droit d'enlever le matériel ou les installations qui ne sont pas enlevés par Shaw;

ii)  appliquant les modalités et les conditions déterminées par le Conseil rétroactivement au 1 er novembre 2000; 

iii)  confirmant que les modalités et les conditions déterminées par le Conseil sont les seules à s'appliquer à l'accès de Shaw à la propriété municipale de Vancouver;

c)  tout autre redressement déterminé par le Conseil, y compris toute assistance précise à la résolution d'un différend que prêtera le Conseil pour faciliter la conclusion d'un accord entre Shaw et Vancouver sur les modalités de l'accès de Shaw à la propriété municipale de Vancouver. 

Le processus

3.  Le 6 décembre 2004, Shaw a déposé sa demande en vertu de la partie VII auprès du Conseil.

4.  Le 20 décembre 2004, Vancouver a demandé de reporter sa réponse du 6 au 19 janvier 2005. Dans une lettre du 22 décembre 2004, Shaw a affirmé s'opposer au délai à moins que Vancouver ne s'engage à ne pas donner suite à la poursuite sur une question juridique devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique (BCSC) que Vancouver a intentée contre Shaw et d'autres parties. Dans une lettre du 23 décembre 2004, Vancouver a indiqué que la poursuite qu'elle avait intentée à la BCSC relativement aux sommes dues à Vancouver pour les années 2001 et 2002 dans le cadre de l'Accord Wirevision de 1973 (Accord Wirevision), qui a pris fin le 31 décembre 2002, n'avait rien à voir avec la demande de Shaw en vertu de la partie VII.

5.  Le 30 décembre 2004, le Conseil a accordé à Vancouver une prolongation de deux semaines pour répondre à la demande de Shaw en vertu de la partie VII, soit du 6 au 19 janvier 2005. Ainsi, le 19 janvier 2005, Vancouver a déposé ses observations, et le 31 janvier 2005, Shaw a déposé ses répliques aux observations.

6.  Le 8 février 2005, Vancouver a déposé une lettre présentant des faits supplémentaires visant à compléter la documentation de ce processus relativement aux demandes d'accès de Shaw et à l'approbation de permis par Vancouver.

Dispositions législatives pertinentes et contexte réglementaire

7.  L'article 7 de la Loi établit plusieurs objectifs de la politique canadienne en matière de télécommunications. Les alinéas a), b), c) et f) sont particulièrement pertinents à la présente demande :

7. La présente loi affirme le caractère essentiel des télécommunications pour l'identité et la souveraineté canadiennes; la politique canadienne de télécommunication vise à :

a)      favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada en un système qui contribue à sauvegarder, enrichir et renforcer la structure sociale et économique du Canada et de ses régions;

b)      permettre l'accès aux Canadiens dans toutes les régions - rurales ou urbaines - du Canada à des services de télécommunication sûrs, abordables et de qualité;

c)      accroître l'efficacité et la compétitivité, sur les plans national et international, des télécommunications canadiennes;

...

f)  favoriser le libre jeu du marché en ce qui concerne la fourniture de services de télécommunication et assurer l'efficacité de la réglementation, dans le cas où celle-ci est nécessaire.

8.  Les articles 42, 43 et 44 de la Loi établissent un cadre pour la construction d'installations de télécommunication et le règlement des différends à la suite d'une demande d'une entreprise de télécommunication visant à construire des installations.

42. (1) Dans l'exercice des pouvoirs qui lui sont conférés par la présente loi ou une loi spéciale, le Conseil peut, par ordonnance, sauf disposition contraire de toute autre loi ou loi spéciale, enjoindre ou permettre à tout intéressé ou à toute personne touchée par l'ordonnance de procéder, selon les éventuelles modalités de temps, d'indemnisation, de surveillance ou autres qu'il estime justes et indiquées dans les circonstances, à l'une des opérations suivantes : fourniture, construction, modification, mise en place, déplacement, exploitation, usage, réparation ou entretien d'installations de télécommunication, acquisition de biens ou adoption d'un système ou d'une méthode.

(2) Le Conseil peut préciser à qui et dans quelle proportion les frais d'exécution de l'opération sont imputables, ainsi que la date de paiement.

43. (1) Au présent article et à l'article 44, « entreprise de distribution » s'entend au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la radiodiffusion .

(2) Sous réserve des paragraphes (3) et (4) et de l'article 44, l'entreprise canadienne et l'entreprise de distribution ont accès à toute voie publique ou tout autre lieu public pour la construction, l'exploitation ou l'entretien de leurs lignes de transmission, et peuvent y procéder à des travaux, notamment de creusage, et y demeurer pour la durée nécessaire à ces fins; elles doivent cependant dans tous les cas veiller à éviter toute entrave abusive à la jouissance des lieux par le public.

(3)  Il est interdit à l'entreprise canadienne et à l'entreprise de distribution de construire des lignes de transmission sur une voie publique ou dans tout autre lieu public - ou au-dessus, au-dessous ou aux abords de ceux-ci - sans l'agrément de l'administration municipale ou autre administration publique compétente.

(4)  Dans le cas où l'administration leur refuse l'agrément ou leur impose des conditions qui leur sont inacceptables, l'entreprise canadienne ou l'entreprise de distribution peuvent demander au Conseil l'autorisation de construire les lignes projetées; celui-ci peut, compte tenu de la jouissance que d'autres ont des lieux, assortir l'autorisation des conditions qu'il juge indiquées.

(5) Lorsqu'il ne peut, à des conditions qui lui sont acceptables, avoir accès à la structure de soutien d'une ligne de transmission construite sur une voie publique ou un autre lieu public, le fournisseur de services au public peut demander au Conseil le droit d'y accéder en vue de la fourniture de ces services; le Conseil peut assortir l'autorisation des conditions qu'il juge indiquées.

44. Sur demande d'une administration municipale ou autre administration publique, le Conseil peut :

a) soit obliger, aux conditions qu'il fixe, l'entreprise canadienne ou l'entreprise de distribution à enfouir les lignes de transmission qu'elles ont, ou projettent d'avoir, sur le territoire de l'administration en question ou à en modifier l'emplacement;

b) soit ne leur en permettre la construction, l'exploitation ou l'entretien qu'en exécution de ses instructions.

9.  Dans la décision 2001-23, le Conseil a établi les principes (les principes Ledcor) qui devraient aider les entreprises de télécommunication et les municipalités à négocier des accords d'accès municipal (AAM), mais il n'a pas prescrit de modalités et de conditions relativement à la construction de lignes de transmission par toute entreprise de télécommunication. La décision 2001-23 rendue par le Conseil visait particulièrement la demande de Ledcor Industries Limited (Ledcor) d'accéder à 18 intersections à Vancouver. En outre, le Conseil a indiqué que la décision 2001-23 ne servirait pas de modèle pour des différends futurs relativement à des AAM, mais que si d'autres questions relatives aux AAM étaient soulevées, et étaient soumises au Conseil aux fins de résolution, elles seraient traitées au cas par cas.

10.  La décision 2001-23 a été confirmée par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Fédération canadienne des municipalités , [1] et la Cour suprême du Canada a refusé l'autorisation d'en appeler de ce jugement le 4 septembre 2003. [2] Dans la décision Fédération canadienne des municipalités , la Cour d'appel fédérale a soutenu que le paragraphe 43(4) de la Loi accorde au Conseil un large pouvoir discrétionnaire pour fixer des conditions d'accès de façon à mettre en ouvre les objectifs de la Loi contenus à l'article 7. [3] Relativement à l'effet de la décision 2001-23 sur la négociation d'AAM entre d'autres parties, la Cour d'appel fédérale a reconnu que « pour régler le litige dont il était saisi, le [ Conseil ] a établi un certain nombre de principes en vue de faciliter de futures négociations entre entreprises et municipalités au sujet des conditions d'accès » et que « ces principes ne lient donc personne et le Conseil s'est précisément abstenu d'adopter "un accord type ou standard particulier comme point de départ des discussions entre les municipalités et les entreprises" ». [4]

11.  Dans la décision Modalités et conditions des accords en vigueur régissant l'accès aux servitudes municipales , Décision de télécom CRTC 2003-82, 4 décembre 2003 (la décision 2003-82), le Conseil a indiqué qu'il ne rendrait pas tous les AAM en vigueur conformes aux lignes directrices établies dans la décision 2001-23.

 Historique

12. Le 20 août 1993, Rogers Cable TV Limited (Rogers), dans le cadre d'un processus d'acquisition, a conclu un accord pour modifier un accord qui avait été conclu entre Canadian Wirevision Limited (Wirevision) et Vancouver. En 1973, Wirevision avait conclu un accord avec Vancouver pour obtenir l'autorisation de construire des installations et pour avoir accès aux rues et aux autres lieux publics de Vancouver. L'Accord Wirevision est arrivé à échéance le 31 décembre 2002.

13.  En novembre 2000, Shaw a échangé des actifs avec Rogers et a notamment fait l'acquisition des actifs du réseau de télédistribution de Rogers à Vancouver. Le 9 novembre 2000, Vancouver a envoyé une lettre à Rogers et une copie à Shaw, indiquant que Vancouver n'autoriserait pas que l'Accord Wirevision soit transféré à Shaw. Dans la même lettre, Vancouver a indiqué que Shaw devait négocier un nouvel AAM avant toute occupation des rues de Vancouver.

14.  De façon constante, Shaw a adopté la position qu'elle n'assumait pas les obligations de Rogers dans le cadre de l'Accord Wirevision. Dans une facture du 21 novembre 2001, Vancouver a demandé à Shaw d'effectuer le paiement des frais engagés dans le cadre de l'Accord Wirevision et au début de 2002, Shaw a payé à Vancouver la somme de 52 366,49 $. Shaw prétend que ce paiement a été fait par erreur, tandis que Vancouver est d'avis que le paiement était la part au prorata de Shaw de la somme due dans le cadre de l'Accord Wirevision pour 2000.

15. Vancouver et Shaw ont continué d'échanger de la correspondance concernant l'établissement de frais et d'autres modalités des AAM proposés, Vancouver insistant pour dire que Shaw a assumé les obligations de Rogers dans le cadre de l'Accord Wirevision. Vancouver prétend avoir accordé à Shaw l'accès à ses rues entre novembre 2000 et le 31 décembre 2002 dans le cadre de l'Accord Wirevision. En décembre 2002, Vancouver a proposé que Shaw conclue une version étendue de l'Accord Wirevision ou un nouvel AAM provisoire dans une forme prescrite par Vancouver.

16.  Le 23 septembre 2003, Vancouver a offert à Shaw l'accès, en vertu d'un AAM standard provisoire de Vancouver, à un site pour un projet de construction en particulier à la Shaw Tower. Vancouver a fait remarquer que Shaw n'a pas utilisé cet accès. Depuis avril 2004, Shaw a pu accéder aux rues de Vancouver pour construire des installations dans le cadre d'un arrangement entre Shaw et Urban Networks Inc. (Urban). En 2001, Urban a signé un AAM provisoire avec Vancouver, qui a été renouvelé le 20 avril 2004. Vancouver est au courant de l'arrangement conclu entre Shaw et Urban et continue d'accorder l'accès à Shaw à ses rues dans le cadre de cet arrangement.

17.  Le 22 avril 2004, Vancouver a intenté une poursuite judiciaire contre Rogers et Shaw à la BCSC pour demander le paiement de sommes dues dans le cadre de l'Accord Wirevision pour les années 2001 et 2002. Shaw a répliqué que l'autorité et la tribune adéquate pour résoudre cette question était le Conseil.

 Positions des parties

Les circonstances de cette demande relèvent-elles de la compétence du Conseil?

 Shaw

18.  Shaw a fait valoir que le paragraphe 43(2) de la Loi octroyait un droit formel aux entreprises de construire, d'entretenir et d'exploiter leurs installations sur les routes et les autres lieux publics. Shaw a fait remarquer que les paragraphes 43(3) et 43(4) de la Loi prévoyaient un processus pour obtenir l'agrément de l'administration municipale ou d'une autre autorité publique ou, en l'absence d'un tel agrément, l'autorisation du Conseil de construire une ligne de transmission. Shaw a ajouté qu'en vertu du paragraphe 42(1), le Conseil a le pouvoir d'autoriser une entreprise à construire, exploiter, utiliser ou entretenir ses installations, sous réserve seulement de la détermination par le Conseil d'une indemnisation ou d'autres conditions justes et indiquées dans les circonstances.

19.  Shaw a soutenu qu'elle avait fait suffisamment d'efforts pour négocier et obtenir l'agrément de Vancouver en vue d'accéder à la propriété municipale, mais qu'elle a été incapable d'obtenir cet agrément à des conditions qui lui étaient acceptables.

 Vancouver

20.  Vancouver a fait valoir que l'objet du paragraphe 43(4) était clair. De l'avis de Vancouver, lorsqu'une entreprise canadienne ou une entreprise de distribution est incapable d'accéder à certaines voies publiques municipales afin de construire des lignes de transmission, elle peut présenter une demande au Conseil et ce dernier peut lui accorder l'autorisation de construire ses lignes sur ces propriétés, sous réserve de certaines conditions.

21.  Vancouver a soutenu que Shaw ne s'était jamais fait refuser l'accès aux rues de Vancouver. Selon Vancouver, Shaw pouvait obtenir l'accès chaque fois qu'elle le demandait et Vancouver était disposée à lui accorder l'accès dans le cadre de l'arrangement de Shaw avec Urban ou en concluant un accord provisoire.

22.  Vancouver a fait valoir que la compétence du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) n'était valide que lorsque l'accès est refusé à l'entreprise canadienne ou à l'entreprise de distribution. D'après Vancouver, le déclencheur doit être limité à ces circonstances, parce que l'empiétement sur les droits municipaux prévus au paragraphe 43(4) n'est pas autorisé à moins qu'il ne soit essentiel à l'exploitation de l'entreprise canadienne ou de l'entreprise de distribution. Vancouver a ajouté qu'étant donné que l'accès aux rues de Vancouver n'avait pas été refusé à Shaw et qu'il n'y avait pas de faits ou de différends précis à arbitrer, la demande de Shaw ne réunissait pas les conditions requises pour justifier l'intervention du Conseil en vertu du paragraphe 43(4).

23.  De l'avis de Vancouver, les pouvoirs du Conseil en vertu de l'article 42 ne sont valables que lorsque le Conseil est en mesure d'exercer adéquatement sa compétence sur une question en particulier en vertu de quelque autre disposition de la Loi.

 Réponse de Shaw

24.  D'après Shaw, le véritable critère pour déterminer le droit de présenter une demande au Conseil en vertu du paragraphe 43(4) était de savoir si Shaw avait été incapable d'obtenir l'agrément de la municipalité à des conditions acceptables pour Shaw. Or Shaw a fait valoir que la prétention répétée de Vancouver selon laquelle Shaw ne s'était jamais vu refuser l'accès est fondée sur une mauvaise interprétation du paragraphe 43(4). De l'avis de Shaw, la question pertinente et déterminante était de savoir si la personne qui cherchait à obtenir l'accès avait réellement obtenu l'agrément selon des modalités qui lui étaient acceptables.

25.  Shaw a ajouté qu'elle avait tenté à plusieurs reprises et avait été incapable d'obtenir l'agrément de Vancouver à des conditions qui lui étaient acceptables. D'après Shaw, Vancouver avait refusé d'octroyer des permis sauf à la signature d'un AAM provisoire que Vancouver savait inacceptable pour Shaw, refusant ainsi son agrément. Shaw a fait valoir, en outre, que Vancouver n'avait pas accordé son agrément à Shaw pour la construction de lignes dans le cadre de l'arrangement entre Shaw et Urban. Shaw a affirmé que ses arrangements indirects et provisoires avec Urban ne lui avaient pas permis d'obtenir l'agrément de Vancouver selon des modalités qui lui étaient acceptables.

 Demande d'octroi d'un AAM à long terme et à l'échelle de la ville, et compétence du Conseil

 Shaw

26.  Shaw a soutenu que Vancouver avait refusé de conclure autre chose que des accords provisoires qui expiraient à la fin de l'année civile (le 31 décembre 2004). Shaw a fait valoir qu'elle a besoin d'un AAM de longue durée pour la planification et la budgétisation de son réseau et pour d'autres raisons. D'après Shaw, Vancouver a refusé de discuter de frais ou d'autres modalités fondamentales d'un AAM à long terme.

27.  Shaw a souligné qu'il était impérieux qu'il n'y ait pas d'autres retards pour mettre la dernière main à un AAM avec Vancouver. Shaw a ajouté qu'elle négociait les modalités d'accès à la propriété municipale de Vancouver avec Vancouver depuis deux ans.

28. Shaw a soutenu que, dans une lettre précédente, Vancouver a indiqué qu'elle avait conclu des accords provisoires parce que des procédures judiciaires découlant de la décision 2001-03 étaient en cours. Shaw a fait remarquer que ces procédures judiciaires avaient pris fin en 2003. D'après Shaw, Vancouver a continué de prétendre qu'elle devait traiter plusieurs questions avant d'être en position d'offrir un AAM à long terme. Shaw a ajouté cependant que Vancouver n'avait pas précisé ou expliqué la nature de ces questions.

 Vancouver

29.  Vancouver a fait valoir que le Conseil n'avait pas la compétence de déterminer les modalités d'un AAM complet à long terme lorsqu'une entreprise et une municipalité sont incapables de négocier les modalités d'un tel accord, ni d'obliger Vancouver à signer un tel accord. De l'avis de Vancouver, les pouvoirs d'arbitrage conférés au Conseil en vertu du paragraphe 43(4) se limitent à la résolution de différends particuliers entre les entreprises et les municipalités relativement à l'accès à des voies publiques municipales aux fins de la construction de lignes de transmission particulières ou d'autres installations.

30.  Du point de vue de Vancouver, l'obligation de tenir compte est une condition obligatoire préalable à l'exercice par le Conseil de son pouvoir en vertu du paragraphe 43(4). Vancouver a fait valoir que le Conseil doit examiner l'effet que peut avoir la construction sur toute utilisation et jouissance que peuvent avoir d'autres personnes d'une route ou d'un autre lieu public avant d'octroyer l'autorisation et d'établir des conditions. D'après Vancouver, dans ce cas, il serait impossible pour le Conseil d'évaluer l'effet de la construction de lignes de transmission sur l'utilisation de la servitude municipale par d'autres parties lorsque le Conseil ne sait pas quelles lignes ou autres travaux peuvent être construits, où ils peuvent être construits et quand, durant les 20 prochaines années, Shaw les construirait. D'après Vancouver, le Conseil ne détient pas les données dont il a besoin pour s'acquitter de son obligation de tenir compte et il ne pourrait pas les détenir parce que le redressement recherché par Shaw est trop général et large.

31.  Vancouver a ajouté que depuis la fin des procédures judiciaires découlant de la décision 2001-23, le personnel de Vancouver avait effectué une étude globale de sa méthode actuelle de réglementation de l'accès à ses rues par tous les services publics. D'après Vancouver, une des options à l'étude est l'adoption d'un règlement global sur l'accès à toutes les rues de Vancouver par tous les services publics.

32.  Vancouver a fait remarquer que Shaw a accès aux rues de Vancouver grâce à l'arrangement qu'elle a pris avec Urban et que c'est en vertu de cet AAM provisoire que Vancouver a continué d'accorder à Shaw l'accès à ses rues. Vancouver a précisé que cet accord provisoire prend fin 180 jours après que l'une ou l'autre des parties a donné un avis de résiliation et non pas à la fin de l'année civile, comme le prétend Shaw.

 Réponse de Shaw

33.  D'après Shaw, il existe une pratique établie du Conseil pour déterminer les modalités et les conditions à intégrer dans un accord d'accès à portée étendue. Citant la décision de la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Fédération canadienne des municipalités , Shaw a fait valoir que la Loi accorde clairement au Conseil un large pouvoir discrétionnaire pour fixer les modalités et conditions liées à l'octroi de l'autorisation de construire en vertu du paragraphe 43(4). Shaw a fait valoir que même si les conditions de l'accès seront déterminées dans le contexte de demandes de construction précises et de l'accès connexe, les modalités et les conditions sont bien incluses dans un AAM qui offre un cadre de résolution à la fois des demandes particulières et des demandes semblables qui seront faites dans le cours normal de l'entretien et de l'élargissement du réseau ainsi que de la prestation du service.

34.  Shaw était d'avis qu'il n'y a pas de limite au pouvoir discrétionnaire dont jouit le Conseil pour déterminer les conditions, sauf l'exigence de tenir compte des autres utilisations. D'après Shaw, le large pouvoir discrétionnaire du Conseil est confirmé par le contexte d'autres dispositions, notamment l'article 42.

35.  Shaw a fait valoir que le paragraphe 43(4) n'exige ni explicitement ni implicitement que le Conseil évalue de façon particulière chacune des autres utilisations réelles ou potentielles et la jouissance d'une propriété en particulier avant d'accorder son autorisation de construire. Shaw a soutenu que le paragraphe stipule plutôt que le Conseil doit tenir compte des utilisations et de la jouissance que d'autres ont des lieux dans le processus visant à octroyer l'autorisation appropriée et à déterminer les conditions applicables. Shaw a également fait valoir que l'effet d'une demande de construction en particulier sur l'utilisation et la jouissance est examiné suffisamment dans les processus d'approbation de l'ingénierie et d'octroi de permis qui sont toujours suivis à Vancouver et dont il est question dans les AAM provisoires de Vancouver.

36.  Shaw a soutenu que Vancouver n'appuie sur aucun document législatif son argument selon lequel les pouvoirs du Conseil en vertu du paragraphe 43(4) sont limités à la résolution de différends précis relativement à des rues précises et visant des installations précises. Shaw a fait valoir que le fait de limiter les demandes et l'intervention du Conseil aux demandes individuelles de consentement pour les constructions entraînerait la prolifération des différends et des demandes présentées au Conseil. Shaw était d'avis que cette situation ne pouvait pas être conforme aux objectifs de politique de la Loi, y compris le développement ordonné des télécommunications partout au Canada et l'accroissement de l'efficacité et de la compétitivité des télécommunications. D'après Shaw, comme question de principe, si l'on exigeait que les différends en matière d'accès soient résolus individuellement, cela mettrait les entreprises canadiennes et les entreprises de distribution à la merci des leviers de négociation et de contrôle dont pourrait se prévaloir Vancouver et n'accorderait aucune certitude sur le plan commercial.

37.  Shaw a rappelé qu'elle a besoin d'un AAM de plus longue durée, notamment d'une durée de 20 ans, pour planifier son réseau, établir son budget et pour d'autres raisons commerciales. Shaw a soutenu qu'un AAM d'une plus courte durée signifierait que les parties fonctionneraient dans le cadre d'un accord pendant une courte durée seulement avant qu'il soit nécessaire de commencer les négociations d'un nouvel accord. Shaw était d'avis que la documentation démontre que la négociation d'un AAM peut prendre beaucoup de temps.

38.  Shaw a soutenu que lorsqu'elle planifie ses installations pour un nouvel aménagement communautaire comme un lotissement résidentiel, elle se fonde sur des périodes de planification de 10 à 25 ans pour prévoir la croissance de sa base d'abonnés et construire les installations nécessaires pour répondre à la croissance prévue. Shaw a ajouté que la période de planification réelle utilisée correspond habituellement au plan de lotissement approuvé par la municipalité. Shaw a indiqué qu'elle utilise une période de planification de 25 ans dans d'autres aménagements de la région de Vancouver, y compris des projets se déroulant dans des propriétés de l'University of British Columbia et la Simon Fraser University. Shaw a également fait valoir qu'elle utilise une période d'amortissement de 10 à 15 ans pour sa centrale de transmission. Elle estime qu'une période de 10 à 15 ans est communément utilisée pour l'amortissement de la centrale de transmission des télécommunications et qu'une telle période pourrait servir de référence pratique pour la durée appropriée d'un accord d'accès s'appliquant à la construction de nouvelles lignes de transmission.

 Autres modalités et conditions

 Shaw

39. Shaw a demandé au Conseil d'accorder l'accès selon des modalités et des conditions, y compris celles notées ci-dessus, qui sont conformes aux principes Ledcor.

40.  Shaw a soutenu que Vancouver avait refusé d'inclure des modalités en matière de résolution de différends qui permettent d'acheminer les différends pertinents au Conseil.

41.  Shaw a également demandé la confirmation que les modalités et les conditions, y compris les frais et tarifs déterminés par le Conseil, soient les seules à s'appliquer à l'accès de Shaw à la propriété municipale de Vancouver.

42.  Shaw a demandé qu'à l'échéance de l'AAM, et particulièrement lorsque les parties n'arrivent pas à s'entendre sur les nouvelles modalités et conditions, Vancouver soit obligée de ne pas nuire à l'exploitation continue du réseau ou des installations de Shaw au détriment des clients de Shaw, notamment en demandant à Shaw de retirer ses installations ou en accordant à Vancouver le droit d'enlever le matériel ou les installations qui n'étaient pas retirés par Shaw.

43.  Shaw a demandé que le Conseil applique rétroactivement les modalités et les conditions déterminées par le Conseil au 1 er novembre 2000.

 Vancouver

44.  D'après Vancouver, la décision 2001-23 portait particulièrement sur une question d'accès à 18 intersections. En outre, Vancouver a ajouté qu'aucun principe exécutoire découlant de la décision 2001-23 ne s'appliquerait à la demande de Shaw.

45.  En ce qui a trait à la résolution des différends, Vancouver a fait remarquer qu'elle avait supprimé la clause dans laquelle il était prescrit que son directeur des Finances prenait les décisions finales relativement aux coûts indirects que Vancouver devrait se faire rembourser et que la clause d'arbitrage a été changée pour prévoir que la décision de l'arbitre n'était pas finale, permettant aux deux parties de soumettre la question au Conseil.

46.  Vancouver a fait remarquer qu'elle avait fait des concessions sur plusieurs points, y compris sur les coûts et l'assurance, dans le cadre de l'AAM provisoire proposé. Vancouver a indiqué qu'elle avait modifié une clause d'assurance et revu sa définition des coûts pour qu'ils se limitent aux coûts causals directs.

47.  Relativement à la demande de rétroactivité de Shaw, Vancouver a fait valoir que le paragraphe 43(4) n'accordait pas au Conseil le pouvoir de rendre l'ordonnance rétroactive comme le demande Shaw. Vancouver a fait valoir que la Cour suprême du Canada avait établi dans l'affaire Bell Canada c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ) ,[1] que seules les ordonnances provisoires du Conseil pouvaient faire l'objet d'une modification rétroactive. Vancouver a ajouté que la Cour avait noté qu'il aurait fallu prévoir explicitement dans la loi habilitante le pouvoir de réexaminer les décisions finales antérieures.

48. Vancouver a ajouté que dans la lettre du Conseil du 28 avril 2000, intitulée Demande présentée en vertu de la partie VII par des entreprises de câblodistribution indépendantes concernant les structures de soutènement d'Ontario Hydro Services Company Inc. et/ou d'Ontario Hydro Networks Company Inc., le Conseil a indiqué ce qui suit :

Le pouvoir du Conseil conféré par le paragraphe 43(5) ne peut être exercé que dorénavant et il ne l'habilite pas à établir les tarifs rétroactivement. Cela est conforme à la règle générale voulant que la loi ne doive pas être interprétée comme ayant un effet rétroactif à moins que ce ne soit expressément prévu ou nécessairement exigé implicitement dans le libellé de la loi. Comme exception à la règle, les tribunaux ont conclu que le pouvoir de rendre des ordonnances provisoires implique le pouvoir de rendre les ordonnances rétroactivement à la date de l'ordonnance provisoire.

49. Vancouver a soutenu que la raison invoquée par Shaw pour demander une ordonnance rétroactive avait trait à une poursuite judiciaire relativement à l'Accord Wirevision à la BCSC. Vancouver a soutenu que Shaw essayait peut-être d'utiliser l'ordonnance rétroactive comme moyen de défaire la réclamation contractuelle de Vancouver contre Shaw. Vancouver a également soutenu que Shaw pouvait tenter de se fonder sur une ordonnance rétroactive qui inclut une modalité renvoyant tous les différends au Conseil, pour remettre en cause la compétence de la BCSC en ce qui a trait à la poursuite judiciaire intentée par Vancouver relativement à l'Accord Wirevision.

50. Quant à la demande de Shaw réclamant que le Conseil confirme que les conditions qu'il juge indiquées seraient les seules conditions régissant l'accès de Shaw à Vancouver, Vancouver a fait valoir que d'autres lois provinciales et municipales peuvent s'appliquer et qu'elles peuvent avoir un effet sur l'accès d'une entreprise à la propriété municipale. Vancouver a soutenu que le paragraphe 43(4) n'habilitait pas le Conseil à rendre une ordonnance visant à exempter Shaw d'autres lois valides et constitutionnellement applicables et que le Conseil ne devrait pas le faire.

Réponse de Shaw

51. Selon Shaw, même si l'AAM provisoire proposé par Vancouver ne mentionne pas la question des frais annuels, Vancouver avait l'intention d'imposer des frais annuels rétroactifs une fois que toutes les procédures judiciaires relatives à la décision 2001-23 seraient terminées. Même si les procédures relatives à la décision 2001-23 sont maintenant terminées, Shaw a fait valoir que Vancouver n'avait pas encore indiqué les frais et tarifs applicables à l'accès. Shaw a demandé que les frais et tarifs soient établis en fonction du recouvrement des coûts causals appropriés, conformément au recouvrement des coûts autorisé par le Conseil dans la décision 2001-23.

52.  Shaw a fait valoir que l'AAM provisoire de Vancouver ne prévoyait pas ou ne reconnaissait pas le Conseil comme arbitre final des différends sur l'accès. Shaw a rappelé sa position selon laquelle elle souhaitait une ordonnance exigeant que tous les différends relatifs aux modalités d'accès soient soumis au Conseil.

53.  Au sujet de la rétroactivité, Shaw a indiqué qu'elle souhaitait une date d'entrée en vigueur des modalités et des conditions d'accès qui correspond à la période durant laquelle Shaw a exploité son entreprise de distribution à Vancouver. Shaw a soutenu qu'elle désirait éviter que des négociations distinctes doivent se tenir avec Vancouver pour déterminer les modalités et les conditions de l'accès durant la période allant du 1 er novembre 2000 à la date d'entrée en vigueur de l'ordonnance du Conseil.

54.  Shaw a fait valoir que l'utilisation par Vancouver de l'affaire Bell Canada c. Canada ( Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ) à l'appui de son argumentation selon laquelle le Conseil n'avait pas la compétence de rendre une ordonnance rétroactive était incorrecte. En effet, Shaw a fait valoir que la Cour avait surtout examiné le pouvoir d'un tribunal administratif de changer les taux imposés par le passé dans le cadre d'une décision antérieure. Shaw a soutenu que cette question soulevait l'autre question de savoir si le Conseil avait le pouvoir de réexaminer les taux établis dans une ordonnance provisoire.

55.  D'après Shaw, l'affaire Bell Canada c. Canada ( Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ) n'appuie pas la thèse selon laquelle un tribunal administratif ne peut exercer ses pouvoirs de façon rétroactive que lorsque la rétroactivité est prévue explicitement dans la loi habilitante. Shaw était d'avis que la Cour avait plutôt statué qu'il était approprié pour un tribunal administratif d'exercer ses pouvoirs de façon rétroactive soit lorsque ces pouvoirs étaient explicitement prévus, soit lorsqu'ils étaient justifiables parce qu'ils étaient nécessairement implicites, soit lorsqu'ils étaient nécessairement accessoires aux pouvoirs pertinents.

56.  Shaw a indiqué que de toute façon, Bell Canada c. Canada ( Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes ) était une affaire différente. Shaw était d'avis que dans le contexte de sa demande, aucune décision antérieure du Conseil ne pouvait être touchée par l'octroi d'un redressement rétroactif. Shaw était également d'avis qu'il n'était nullement question d'une ordonnance rétroactive modifiant les modalités d 'un AAM conclu entre Shaw et Vancouver, puisqu'il n'existe, en fait, aucun AAM entre Shaw et Vancouver.

57.  Shaw a fait valoir que dans l'affaire Fédération canadienne des municipalités , la Cour avait accepté que le Conseil dispose d'un large pouvoir discrétionnaire pour fixer les modalités et les conditions de l'accès. Shaw a fait valoir qu'on pouvait interpréter ce large pouvoir discrétionnaire comme incluant, dans des circonstances limitées et appropriées, la détermination des modalités et conditions d'accès de façon rétroactive.

58.  De l'avis de Shaw, il ne faisait nul doute que les parties étaient libres de conclure un accord sur l'accès avec effet rétroactif. Shaw a expliqué que Vancouver et Shaw pouvaient notamment convenir de modalités d'accès qui fonctionnent comme si elles avaient été en vigueur depuis le 1 er novembre 2000. Shaw a également ajouté que si le Conseil, dans l'exercice de ses pouvoirs et de l'autorité que lui confère le paragraphe 43(4), est réputé être l'arbitre des modalités commerciales que les parties elles-mêmes pourraient avoir conclues, sans avoir pu en arriver à une entente, il pourrait alors être prévu que dans des circonstances appropriées, le Conseil pourrait déterminer des modalités et conditions d'accès qui s'appliqueraient avec un effet rétroactif.

59.  Shaw a accepté l'argument de Vancouver selon lequel le Conseil ne devrait pas rendre d'ordonnance qui mettrait Shaw à l'abri d'autres lois qui sont en fait des lois valides et constitutionnellement applicables. Toutefois, Shaw a fait valoir que Vancouver ne devait pas tenter de contrecarrer le cadre d'accès municipal défini par la Loi et par le Conseil. Shaw a précisé que son intention en demandant au Conseil de confirmer que les conditions qu'il établirait seraient les seules conditions régissant l'accès de Shaw à Vancouver visait à empêcher Vancouver d'imposer des modalités additionnelles.

 Analyse et lignes directrices du Conseil

60.  Le Conseil a toujours considéré l'accès aux servitudes municipales comme un obstacle à l'entrée dans le marché et à la concurrence locale. Dans la décision 2003-82, le Conseil fait remarquer ce qui suit :

Dans la décision C oncurrence locale , Décision Télécom CRTC 97-8 , 1 er  mai 1997 (la décision 97-8) et dans la décision Cadre de réglementation applicable à la deuxième période de plafonnement des prix, Décision de télécom CRTC  2002-34 , 30 mai 2002, le Conseil a conclu que la concurrence locale fondée sur les installations est le meilleur moyen d'assurer un service de qualité et abordable, de même que l'innovation et la différenciation des services, et que ce genre de concurrence à long terme deviendrait la forme de concurrence la plus efficace et la plus rentable qui permettrait d'atteindre les objectifs de politique énoncés à l'article 7 de la Loi.

61.  Dans la même décision, le Conseil a estimé :

. que les entreprises doivent pouvoir accéder aux servitudes municipales suivant des modalités et des conditions raisonnables. De l'avis du Conseil, il est tout particulièrement important que les ESLC aient un accès raisonnable aux servitudes municipales puisque contrairement aux ESLT, les ESLC n'ont pas eu la chance de construire leur réseau dans un environnement monopolistique et dans des conditions aussi favorables que celles offertes à l'époque aux ESLT. Le Conseil a noté précédemment dans l'ordonnance C oncurrence locale : clause de temporarisation pour les installations quasi essentielles , Ordonnance CRTC 2001-184 , 1 er  mars 2001, et, plus récemment, dans le Rapport à la gouverneure en Conseil : État de la concurrence dans les marchés des télécommunications au Canada, Mise en place et accessibilité de l'infrastructure et des services de télécommunication de pointe, novembre 2003, que la résolution des questions d'accès se rapportant aux servitudes est essentielle à l'établissement d'une concurrence fondée sur les installations. Le Conseil craint que les AAM signés par les entreprises ne nuisent à la politique de la concurrence fondée sur les installations et, de façon plus générale, à l'atteinte des objectifs de politique énoncés à l'article 7 de la Loi. Le Conseil craint également que les AAM n'empêchent de façon directe les entreprises de continuer à exploiter leurs installations.

62.  Dans la décision 2001-23, le Conseil a fait remarquer ce qui suit :

.la forte demande pour des servitudes découle de la concurrence dans le marché des télécommunications et de l'implantation de réseaux haute vitesse modernes étendus. Les avantages d'un tel marché et l'accès accru à des réseaux haute vitesse modernes ne profitent pas uniquement aux actionnaires et aux clients des entreprises. En effet, l'activité économique que ces installations soutiennent profitera à toute la municipalité en attirant l'industrie, en créant des emplois, en augmentant les recettes fiscales, etc.

63.  Dans la décision Fourniture de services de télécommunication aux clients d'immeubles à logements multiples, Décision de télécom CRTC 2003-45, 30 juin 2003, le Conseil a conclu  :

.que la concurrence fondée sur les installations est le meilleur moyen d'assurer un service de qualité et abordable, de même que l'innovation et la différenciation des services, et que la concurrence fondée sur les installations serait finalement la forme de concurrence la plus efficace et la plus durable pour atteindre les objectifs de la politique énoncés à l'article 7 de la Loi.

64.  Il est prévu à l'article 7 de la Loi que les objectifs de la politique canadienne de télécommunication sont notamment de permettre l'accès aux Canadiens dans toutes les régions du Canada à des services de télécommunication sûrs et abordables, de favoriser le développement ordonné des télécommunications partout au Canada et d'accroître l'efficacité et la compétitivité des télécommunications canadiennes.

65.  Le Conseil fait remarquer que Vancouver n'avait offert des permis à Shaw qu'à la condition que Shaw signe l'AAM provisoire proposé de Vancouver. L'AAM provisoire prévoit la résiliation de l'accord par l'une ou l'autre des parties en tout temps avec un préavis de 180 jours. Le Conseil fait remarquer que Shaw s'est opposée de façon constante à l'AAM provisoire et à sa politique d'annulation. Le Conseil note également que Shaw se sert d'un arrangement avec Urban pour placer ses installations dans les routes et les autres lieux publics de Vancouver. Le Conseil fait remarquer que l'AAM provisoire d'Urban avec Vancouver contient la même disposition de résiliation de 180 jours.

66.  Le Conseil estime que les entreprises qui ne peuvent obtenir que des AAM provisoires sont vulnérables non seulement parce que la municipalité peut en tout temps mettre un terme à leur accès aux servitudes municipales avec un préavis de 180 jours, sans le renégocier, mais également parce que les modalités d'un tel accès peuvent être changées à la négociation d'un nouvel accord et devenir inacceptables pour l'entreprise. Le Conseil fait remarquer que si les modalités d'un AAM provisoire proposé sont inacceptables, les entreprises devront peut-être recourir à d'autres arrangements qui peuvent également être insatisfaisants. Le Conseil estime que peu importe si les municipalités l'exercent ou pas, ces dernières ont le pouvoir de modifier les modalités de l'accès avec peu de préavis, ce qui contribue à l'incertitude commerciale de l'entreprise.

67.  Le Conseil estime que Shaw devrait être en mesure de planifier la construction ordonnée de son réseau avec suffisamment de certitude sur le plan commercial pour récupérer son investissement dans son réseau. Le Conseil a noté que la planification à long terme des entreprises doit nécessairement tenir compte de l'amortissement des installations. Le Conseil a noté que Shaw se fonde sur une période d'amortissement de 10 à 15 ans pour son installation de transmission. Le Conseil note également que Shaw utilise des périodes de planification allant de 10 à 25 ans.

68.  Le Conseil estime que les accords d'accès provisoires n'offrent pas suffisamment de certitude sur le plan commercial pour permettre à Shaw de planifier efficacement à long terme. Le Conseil estime également que les accords provisoires peuvent nuire à la capacité de Shaw de conclure des accords de service à long terme avec ses clients.

69.  À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime qu'il est approprié que Shaw conclue un accord d'accès à long terme avec Vancouver. Le Conseil estime en outre qu'une durée de 15 ans serait une période appropriée qui permettrait à Shaw de planifier efficacement son réseau, de le construire et de recouvrer son investissement .

70.   Le Conseil fait remarquer que Shaw cherche à obtenir, en plus d'un accès à long terme aux routes et autres lieux publics municipaux, un accès à toute la ville. Le Conseil note que l'AAM provisoire qu'offre Vancouver à Shaw ne vise que des tracés sur des lieux précisés à l'annexe de l'AAM provisoire.

71.  Le Conseil estime que les arrangements en matière d'accès qui sont limités à des lieux ou ensembles de lieux précis peuvent être problématiques pour une entreprise. Le Conseil estime qu'il est extrêmement difficile pour une entreprise de prédire d'avance quels sites, secteurs ou quantités de lignes de transmission seront nécessaires pour servir ses clients existants et potentiels. Par exemple, à cause des pressions concurrentielles, Shaw peut devoir soumissionner de façon expéditive un contrat pour servir un client important qui compte des succursales et des postes dans toute la ville de Vancouver. Si elle obtenait le contrat, Shaw ne serait pas en mesure de déterminer à quels risques financiers elle s'exposerait tant qu'un accord propre à un emplacement ne sera pas négocié avec Vancouver, faisant en sorte qu'il serait difficile de préparer une soumission exacte et d'effectuer sa planification commerciale à long terme. Le Conseil estime que dans une telle éventualité, Shaw aurait un levier de négociation minimal avec Vancouver et pourrait être forcée à accepter des modalités d'accès qui lui sont inacceptables pour servir son client.

72. En outre, de l'avis du Conseil, il est extrêmement difficile pour une entreprise de prédire le roulement dans son plan d'affaire. Une entreprise peut prévoir qu'elle aura besoin d'un accès dans un secteur, tandis qu'en réalité, les affaires diminuent dans ce secteur et augmentent dans un autre auquel elle n'a pas accès.

73.  Le Conseil estime que la négociation continuelle d'AAM visant un lieu en particulier ou que la soumission continuelle de demandes au Conseil pour résoudre les différends empêche le développement efficace et ordonné des installations de Shaw pour offrir des services de télécommunication.

74.  À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime qu'il est raisonnable que Shaw ait la certitude de l'accès aux routes et aux autres lieux publics de Vancouver en vertu d'un AAM d'application générale. Le Conseil souligne que, en dépit d'un AAM d'application générale, Shaw serait toujours tenue de se conformer au processus d'octroi de permis et aux dispositions des règlements de Vancouver dans la mesure où ce processus et ces dispositions n'imposent aucune modalité qui ne cadre pas avec celles de l'AAM. C'est grâce au processus d'octroi de permis que les parties peuvent régler les questions relatives à un lieu en particulier qui ne sont pas déjà visées par l'AAM.

75.  Le Conseil note que Vancouver l'a informé au cours de l'instance ayant mené à la décision 2001-23 de son intention de créer un règlement auquel pourraient se référer tous les utilisateurs des rues. Le Conseil note toutefois que la Cour suprême a confirmé la décision 2001-23 le 4 septembre 2003 et que l'examen par Vancouver de l'accès municipal n'a toujours pas été effectué et qu'aucun règlement n'a été adopté. Le Conseil estime que suffisamment de temps s'est écoulé pour permettre à Vancouver d'être en position de conclure un AAM d'application générale à long terme avec Shaw. Par conséquent, de l'avis du Conseil, il est souhaitable et raisonnable d'en arriver à une certitude sur le plan commercial relativement à l'accès de Shaw aux servitudes municipales de Vancouver le plus tôt possible.

76.  Le Conseil fait remarquer que si Shaw et Vancouver peuvent négocier l'accès en tenant compte des lignes directrices qui précèdent, Vancouver pourrait présenter une demande au Conseil en vertu de l'article 44 de la Loi dans l'éventualité d'un différend relativement à une ligne de transmission en particulier.

77.   Le Conseil estime que Shaw et Vancouver doivent peut-être revoir leurs positions relativement aux modalités et conditions précises d'accès compte tenu des lignes directrices qui précèdent. Le Conseil note que, bien que les négociations entre Shaw et Vancouver sur les modalités et les conditions d'un AAM puissent être rompues pour l'instant, le dossier laisse entendre que Shaw et Vancouver pourraient être sur le point de s'entendre sur plusieurs de ces modalités, notamment sur l'utilisation d'un coût causal pour établir les frais, la résolution des différends, l'assurance et le rétablissement des corridors de service.

78.  Le Conseil fait remarquer que c'est intentionnellement qu'il n'a pas prescrit de modalités et de conditions dans la décision 2001-23 pour la construction future de lignes de transmission à Vancouver ou ailleurs par une entreprise. Le Conseil rappelle que dans la décision 2001-23, il a affirmé qu'il n'était pas convaincu de la nécessité d'adopter un accord modèle ou standard particulier comme point de départ des discussions entre les municipalités et les entreprises. Le Conseil estime toutefois que les principes Ledcor peuvent aider Shaw et Vancouver dans leurs négociations.

 Conclusion

79. Le Conseil recommande que Shaw et Vancouver reprennent leurs négociations relativement à l'accès municipal. Le Conseil estime qu'il serait raisonnable que Shaw et Vancouver négocient les conditions d'accès pour une période de 15 ans. Le Conseil estime également qu'il est raisonnable que Shaw puisse avoir la certitude de l'accès aux routes et aux autres lieux publics de Vancouver en vertu d'un AAM d'application générale. En dépit d'un tel AAM, Shaw serait toujours tenue de se conformer au processus d'octroi des permis et aux dispositions des règlements de Vancouver dans la mesure où ce processus et ces dispositions n'imposent aucune modalité qui ne cadre pas avec celles de l'AAM. C'est en ayant recours au processus d'octroi des permis que les parties peuvent régler les questions relatives à un lieu en particulier qui ne sont pas déjà visées par l'AAM .

80. Shaw et Vancouver peuvent se servir des principes Ledcor afin de négocier d'autres conditions particulières. Si les parties sont incapables d'en arriver à une entente dans les 60 jours suivant la date de la présente lettre, l'une ou l'autre des parties peut informer le Conseil de l'état des négociations, et ce dernier mettra en place un bref processus de réponses et de répliques. À la fin de ce processus, le Conseil sera disposé à étudier la possibilité d'octroyer l'autorisation, d'une manière expéditive, en vertu du paragraphe 43(4) de la Loi, sous réserve de conditions que le Conseil juge indiquées.

 Veuillez agréer l'expression de mes sentiments les meilleurs.

La secrétaire générale,


Diane Rhéaume

c.c. :
McCarthy Tétrault
Avocats et conseillers juridiques
Tour de la Banque Toronto Dominion, bureau 4700
Toronto (Ontario)
M5K 1E6

Stephen Rawson (avocat pour Shaw)
srawson@mccarthy.ca
Télécopieur : (416) 868-0673

Judy Rogers
Directrice municipale, Ville de Vancouver
judy.rogers@vancouver.ca
Télécopieur : (604) 873-7445

[1]      Fédération canadienne des municipalités c. AT&T Canada Corp. (C.A.) [2003] 3 C.F. 379 ( Fédération canadienne des municipalités ).

[2]      [2003] A.C.S.C. n o 97.

[3]      Fédération canadienne des municipalités, précité , paragraphe 28.

[4]      Fédération canadienne des municipalités , précité , paragraphe 21.

[5]     [1989] 1 R.C.S. 1722.

 

 

 

Mise à jour : 2005-09-01

Date de modification :