ARCHIVÉ -  Décision CRTC 84-209

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Décision

Ottawa, le 29 février 1984
Décision CRTC 84-209
CJMF-FM Ltée
Québec (Québec) - 831797600 - 832057400
A la suite d'une audience publique tenue à Québec, le 11 janvier 1984, le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes annonce qu'il refuse la demande de renouvellement de la licence de radiodiffusion de la station CJMF-FM, Québec, laquelle expire le 31 mars 1984.
Dans son avis d'audience publique du 22 novembre 1983, le Conseil se déclarait d'avis que CJMF-FM Ltée, titulaire de la licence de CJMF-FM, ne se conformait pas à sa Promesse de réalisation. Le Conseil s'appuyait sur diverses analyses de la programmation de CJMF-FM qu'il avait effectuées de 1980 à 1983, lesquelles démontraient des écarts considérables entre les engagements contenus dans la Promesse de réalisation et le rendement réel, notamment au format musical et aux émissions de premier plan. Le Conseil avait également reçu des plaintes en 1982 de CFLS Inc., un radiodiffuseur de la région de Québec, alléguant que la titulaire enfreignait une condition de sa licence en diffusant une programmation musicale très différente de celle décrite dans sa Promesse de réalisation.
Une telle dérogation à la condition de licence revêt un caractère très sérieux, étant donné le nombre très limité des fréquences disponibles dans un marché donné, et l'objectif fondamental de la politique MF qui vise à assurer que l'ensemble des services MF offerts dans un marché soit varié et complet. Il importe donc que chaque titulaire respecte le mandat qui lui est attribué quant à son orientation, à son auditoire cible et à son format musical, tel qu'explicité dans la promesse de réalisation qui est une condition de sa licence. Toute dérogation affecte l'équilibre des services offerts par les autres radiodiffuseurs et va à l'encontre de l'objectif du Conseil visant à offrir un service varié et complet.
Le Conseil a donc convoqué CJMF-FM Ltée et la plaignante à l'audience publique du 11 janvier 1984 afin de discuter du fait qu'elle ne se conformait pas à sa Promesse de réalisation, des mesures qu'elle a prises pour la respecter intégralement et des raisons qui justifieraient le renouvellement de sa licence et les modifications proposées à sa Promesse de réalisation.
La licence de la station, qui se rapporte à un format musical MOR, a été accordée à la suite de l'audience du 7 novembre 1978, de préférence à trois autres demandes postulant aussi un service radiophonique MOR. La Promesse de réalisation de CJMF-FM contenait divers engagements en ce qui a trait à la musique et au contenu verbal créateur. Sur la foi de ces engagements et des nombreuses assurances qu'il avait obtenues à l'audience quant à leur réalisation, le Conseil approuvait la demande de la titulaire et refusait de ce fait celles des trois autres requérantes dans sa décision CRTC 79-171, du 16 février 1979, en indiquant notamment:
 Le Conseil a apprécié le caractère équilibré de la demande, offrant un projet réaliste et une programmation diversifiée et de bon goût qui, tout en respectant les critères de la politique MF du Conseil, apportera aux auditeurs de la ville de Québec un choix d'émissions nouvelles répondant à un réel besoin.
 Le Conseil note tout particulièrement la haute qualité du contenu verbal proposé incluant 16 % d'émissions de formule premier plan et 9,3 % dans les catégories d'enrichissement. Du côté musical, la titulaire propose une musique vocale francophone de 80 % avec une musique de teneur canadienne de 45 %.
CJMF-FM est entrée en ondes le 16 septembre 1979, d'abord dans son format MOR autorisé sous le sigle "Harmonie FM". Des analyses de programmation effectuées par le Conseil en mai 1980 et novembre 1981 indiquaient déjà des problèmes sérieux aux émissions de formule premier plan. En ce qui a trait à la musique, certaines lacunes sont également apparues en 1981. Ces deux analyses ont été portées à l'attention de la titulaire dans des lettres datées du 31 août 1980 et du 19 mai 1982 respectivement, qui toutes deux invitaient la titulaire à rencontrer le personnel du Conseil afin de discuter plus à fond de ces résultats. La titulaire n'a pas donné suite à ces invitations.
Les 3 mai et 16 août 1982, le Conseil a reçu des plaintes formelles de CFLS Inc., une entreprise de radiodiffusion qui exploite la station CFLS, Lévis, dans un format Contemporain. La plaignante accusait CJMF-FM de diffuser dans le cadre d'un format musical non-autorisé, orienté principalement sur la musique de genre rock, contrevenant ainsi à sa Promesse de réalisation et à la décision CRTC 79-171. Une nouvelle analyse effectuée par le Conseil sur la programmation musicale diffusée par CJMF-FM, le 8 septembre 1982, a confirmé la non-conformité de la station à la Promesse de réalisation, révélant des écarts sérieux au format musical, au contenu canadien et à la musique vocale en français.
Dans une lettre en date du 3 décembre 1982 adressée au président de CJMF-FM Ltée, le président du CRTC portait à nouveau à l'attention de la titulaire les conclusions des trois analyses successives de la programmation de CJMF-FM effectuées par le Conseil. Il y soulignait que la première analyse transmise à la titulaire le 31 août 1980, "révélait de sérieux problèmes au niveau du contenu verbal créateur ainsi que des émissions de Premier plan", et que la seconde analyse, transmise le 14 mai 1982, "révélait également des problèmes très sérieux au niveau du contenu verbal créateur, de l'enrichissement, de la formule Premier plan, de la musique rock et du format musical". En ce qui a trait à la troisième analyse faite le 8 septembre 1982, le président du Conseil déclarait:
 Les résultats de cette dernière analyse soulèvent des doutes sérieux sur le respect de votre Promesse de réalisation, en ce qui a trait notamment à la musique rock, au contenu canadien et à la musique vocale d'expression française. Ces résultats sont tels qu'ils modifient le format musical autorisé de CJMF-FM.
Le président du Conseil concluait:
 Ces trois analyses de la programmation de CJMF-FM, en autant d'années, nous portent à envisager la possibilité de vous convoquer à une audience publique en vue de la révocation de votre licence, à moins que des mesures efficaces ne soient prises immédiatement pour remédier à la situation.
Le 16 décembre 1982, une rencontre a eu lieu entre le personnel du CRTC et la titulaire au sujet de l'analyse effectuée le 8 septembre 1982. Par la suite, le 20 décembre 1982, la titulaire répondait par écrit à la lettre du président du 3 décembre 1982 et affirmait qu'elle entendait se conformer "substantiellement" à ses engagements sur les formules de programmation et sur le contenu verbal créateur, et qu'elle établirait un échéancier pour se rapprocher de ses engagements en ce qui a trait à la musique.
Le 9 février 1983, le Conseil adressait une lettre à CJMF-FM Ltée afin d'obtenir des éclaircissements sur son intention de se conformer "substantiellement" à ses engagements et sur l'échéancier auquel elle faisait allusion en ce qui a trait à la musique, et l'enjoignait de soumettre dorénavant, sur une base hebdomadaire et pour une durée illimitée, la liste des pièces musicales et des émissions de Premier plan diffusées par la station. Il concluait sa lettre par la mise en demeure suivante:
 Le Conseil ne tolérera aucune infraction à la Loi et aux règlements MF et n'hésitera pas, si ceci s'avère nécessaire, à considérer immédiatement des procédures de révocation de licence à l'endroit de CJMF.
En réponse, dans une lettre en date du 1er mars 1983, la titulaire indiquait que pour ce qui est des formules de programmation (Premier plan) et du contenu verbal créateur (catégories 2, 3A, 4 et 5), ses objectifs étaient "intégralements atteints" et qu'en ce qui a trait à la musique, elle allait "poursuivre (ses) efforts en vue d'améliorer les paramètres de (sa) politique musicale".
Tout au cours de l'année 1983, le personnel du CRTC a suivi de très près l'évolution de la situation et a contacté fréquemment CJMF-FM à ce sujet. Cependant, de nouvelles analyses musicales ainsi que des émissions de Premier plan effectuées en mars et septembre 1983 ont démontré que l'état de non-conformité persistait et que, particulièrement en ce qui a trait au format musical, les écarts s'étaient même aggravés après la mise en demeure du 9 février 1983. Une dernière rencontre entre le personnel du CRTC et CJMF-FM a eu lieu le 16 décembre 1983 afin de revoir à nouveau la situation.
Tous les échanges par écrit entre le Conseil et la titulaire, ainsi que les procès-verbaux des réunions tenues, ont été versés au dossier public de CJMF-FM et ont été pris en considération dans le cadre de la demande de renouvellement de la licence de CJMF-FM.
Lors de l'audience publique du 11 janvier 1984, la titulaire a reconnu la validité et l'exactitude des relevés et des analyses effectués par le Conseil, lesquels se trouvent résumés dans les tableaux en annexe. Après avoir eu l'occasion de discuter de ces données à l'audience, la titulaire a déclaré que celles-ci représentaient "un compte-rendu assez fidèle du dossier" et que "dans notre groupe, personne ne conteste la dernière évaluation du CRTC". Elle a en outre confirmé à l'audience qu'elle diffusait toujours dans un format musical non autorisé en affirmant: "Le format actuel dans lequel nous diffusons est un format progressif rock".
La titulaire a énuméré diverses raisons pour expliquer cet état de non-conformité, dont notamment:
-  l'impossibilité apparente de respecter la Promesse de réalisation originale sans créer de sérieux problèmes financiers;
-  l'absence de moyens de contrôle efficaces;
-  le manque de temps découlant des autres occupations du principal actionnaire et de certains autres associés et un personnel insuffisant;
-  l'entrée en ondes en 1982 des stations CITF-FM et CHIK-FM de Québec dotées de ressources importantes, la première opérant aussi dans un format MOR.
Le Conseil a exploré en détail avec la titulaire lors de l'audience les différentes options qui s'offrent à lui, les possibilités de renouvellement ou de non-renouvellement de la licence et les conséquences d'un non-renouvellement sur la station et sur son auditoire actuel, sur le milieu de la radiodiffusion dans la région de Québec et sur le public en général.
Le Conseil a aussi pris en considération les interventions soumises à l'audience. La plaignante, CFLS Inc., ainsi qu'un autre radiodiffuseur de Québec, CHOI-FM, ont comparu à l'audience pour s'opposer au renouvellement et à la modification de la licence de CJMF-FM et demander l'annulation de la licence. Ces deux intervenantes ont souligné les dommages et les préjudices que leur a causé la non-conformité de CJMF-FM en termes de perte d'auditoire et de revenus. CFLS Inc. a déclaré notamment: "Il est évident que CJMF n'a pas compris les attentes du Conseil, attentes qui sont basées sur l'ensemble d'un marché afin que tous les styles d'auditoires soient desservis convenablement par l'une ou l'autre des bandes de diffusion". CHOI-FM déclarait pour sa part: "CHOI-FM n'a pas changé sa politique face au grand principe de diversité préconisé par le Conseil. Nous souscrivons toujours aux objectifs du Conseil sur ce point et continuons a souhaiter le maintien de cette philosophie dans le meilleur intérêt des auditeurs et de l'industrie de la radiodiffusion canadienne".
En vertu de la Loi sur la radiodiffusion, le Conseil est investi de l'autorité de réglementer et de surveiller tous les aspects du système de la radiodiffusion canadienne. C'est ainsi qu'en 1975, après de nombreuses consultations avec les radiodiffuseurs et le public, le Conseil a élaboré une nouvelle politique sur la radio MF dont l'objectif fondamental est la diversité des services qui devaient être offerts à un auditoire dans un marché donné. Le Conseil a réaffirmé ces principes dans les décisions rendues depuis lors et dans son Énoncé de politique sur l'Examen de la radio qu'il a publié en mars 1983.
Afin d'assurer cette diversité, le Conseil s'appuyait sur le processus d'octroi de licence ainsi que sur la Promesse de réalisation, laquelle fait partie intégrante des licences des radiodiffuseurs MF. Dans la politique MF, le Conseil estimait que les radiodiffuseurs devraient davantage rendre compte, au public et au Conseil, de l'emploi qu'ils font des ondes publiques, que ce soit au moment du renouvellement de leur licence ou à chaque fois qu'ils envisagent de modifier substantiellement la nature de leur service. Le Conseil soulignait de plus dans son énoncé de politique de 1975:
 Cette nécessité de rendre des comptes sur l'utilisation d'un bien public constitue le principe fondamental sur lequel le Conseil basera le renouvellement de la licence MF d'un radiodiffuseur privé.
Le Conseil estime que l'aggravation progressive de la situation de non-conformité de la titulaire au cours des dernières années, notamment au niveau de la musique, mine à sa base même l'intégrité du processus d'octroi de licences, les objectifs de la politique sur la radio MF et, de façon générale, l'autorité même du Conseil. Elle impose également aux autres radiodiffuseurs de la région une concurrence déloyale et inéquitable, ce qui, ultimement, va à l'encontre de l'intérêt public. Malgré les avertissements et les mises en demeure répétés, la titulaire a persisté dans un état de non-conformité sans équivoque en adoptant notamment un format musical diamétralement différent du format MOR autorisé. Après avoir obtenu sa licence en 1979 en promettant une programmation musicale (qui) visera d'abord un public adulte et s'être engagée à diffuser une proportion de 84,1 % de musique populaire générale (sous-catégorie 61) et de 4,8 % de genre rock (sous-catégorie 65), le Conseil constatait, tel qu'admis par la titulaire lors de l'audience, que d'après la dernière analyse effectuée en septembre 1983, la station diffusait une proportion de 2,2 % de musique de la sous-catégorie 61 et de 97,8 % de musique de la sous-catégorie 65.
D'après les éléments de preuve soumis à l'audience, ainsi que les réponses de la titulaire, le Conseil est convaincu que celle-ci n'a pas fait des efforts raisonnables pour se conformer aux conditions de sa licence et la titulaire n'a donné aucun motif permettant de croire qu'elle a pris des mesures appropriées ou que des changements à son attitude sont imminents. Le Conseil constate que la situation s'est détériorée au cours de la dernière année en dépit des avertissements et des mises en demeure répétés ainsi que des nombreuses occasions qui ont été données à la titulaire de se conformer.
Tenant compte de tous les facteurs susmentionnés, le Conseil estime qu'il ne serait pas dans l'intérêt public de renouveler cette licence et d'approuver les modifications proposées à la Promesse de réalisation. En raison de cette décision, le Conseil publie aujourd'hui, dans un avis distinct, un appel de demandes relatives à la prestation d'un service radiophonique MF dans la région de Québec. CJMF-FM Ltée n'est pas exclut de soumettre une demande en réponse à cet appel mais, conformément aux dispositions de la Loi sur la radiodiffusion, elle devra avoir cessé ses activités le 31 mars 1984, date d'expiration de sa licence.
Le Secrétaire général J.G. Patenaude

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