Ordonnance de télécom CRTC 2017-376

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Ottawa, le 23 octobre 2017    

Numéros de dossiers : 1011-NOC2016-0192 et 4754-546

Demande d’attribution de frais concernant la participation d’OpenMedia à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2017-104

Demande

  1. Dans une lettre datée du 10 janvier 2017, OpenMedia a présenté une demande d’attribution de frais pour sa participation à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2017-104 (instance). Lors de l’instance, le Conseil a examiné les questions de politique entourant le recours à des pratiques de différenciation des prix par des fournisseurs de services Internet et a établi un cadre pour évaluer ces pratiques.
  2. Bell Canada et la Société TELUS Communications (STC) ont déposé des interventions, datées du 20 janvier 2017, en réponse à la demande d’OpenMedia. OpenMedia a déposé une réplique datée du 30 janvier 2017.
  3. OpenMedia a indiqué qu’elle avait satisfait aux critères d’attribution de frais énoncés à l’article 68 des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (Règles de procédure), car elle représentait un groupe ou une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêtait un intérêt, elle avait aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées et elle avait participé à l’instance de manière responsable.
  4. Plus précisément, OpenMedia a indiqué qu’elle représentait les intérêts des abonnés canadiens, ou des abonnés éventuels, aux services Internet, ainsi que les intérêts des personnes qui se soucient de l’avenir d’Internet et des télécommunications au Canada. OpenMedia a également indiqué qu’elle avait fourni des sources utiles et pertinentes pour étayer les positions avancées, lesquelles étaient axées sur les questions principales de l’instance et tenaient compte des perspectives des Canadiens ordinaires. Enfin, OpenMedia a fait valoir qu’elle avait respecté tous les délais, qu’elle avait suivi les règles procédurales, qu’elle s’était mise à l’entière disposition du Conseil et qu’elle n’avait fait appel à du personnel, tant interne qu’externe, que dans la mesure nécessaire.
  5. En ce qui a trait au groupe ou à la catégorie d’abonnés dont elle s’est dite représentante, OpenMedia a précisé qu’elle représentait plus de 60 000 Canadiens de partout au pays. Selon OpenMedia, le groupe est constitué des signataires de la pétition qu’elle a présentée au Conseil dans le cadre de l’instance, ainsi que des commentateurs qui ont participé au processus de consultation d’OpenMedia au moyen de son outil de transmission de la voix sur Internet. Au sujet des moyens particuliers par lesquels OpenMedia représente ce groupe ou cette catégorie d’abonnés, OpenMedia a expliqué qu’elle avait mené des consultations directement auprès des membres des collectivités, qu’elle avait intégré leurs commentaires à sa participation à l’instance et qu’elle s’était appuyée sur des rapports de politique produits par externalisation ouverte.
  6. OpenMedia a demandé au Conseil de fixer ses frais à 86 745,46 $, soit 63 517,50 $ en honoraires d’avocat, 17 732,50 $ en honoraires d’expert-conseil et d’analyste, et 5 495,46 $ en débours. La somme réclamée par OpenMedia comprenait la taxe fédérale sur les produits et services (TPS) appliquée aux frais, moins le rabais auquel OpenMedia est admissible au titre de la TPS. OpenMedia a joint un mémoire de frais à sa demande.
  7. OpenMedia a réclamé 470,5 heures en honoraires d’avocat adjoint externe au taux horaire de 135 $ (pour un total de 63 517,50 $), 40,5 heures en honoraires d’expert-conseil adjoint externe au taux horaire de 110 $ (pour un total de 4 455 $) et 28,25 jours en honoraires pour 4 analystes internes au taux quotidien interne de 470 $ (pour un total de 13 277,50 $, taxes et rabais applicables compris).
  8. En ce qui concerne les débours, OpenMedia a réclamé des frais de déplacement pour trois représentants qui ont participé à l’audience, ainsi que des frais d’hébergement pour deux de ces représentants. Même si OpenMedia a réclamé 473,96 $ pour des déplacements en voiture à l’intérieur de la ville, elle n’a présenté des reçus que pour un montant de 423,93 $.
  9. OpenMedia n’a pas précisé qui devrait être tenu de payer les frais attribués par le Conseil (intimés), mais elle a indiqué qu’elle se conformerait aux conclusions du Conseil relativement à la répartition appropriée des frais, aux termes des Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais (Lignes directrices) énoncées dans la politique réglementaire de télécom 2010-963.

Réponse

  1. La STC ne s’est pas opposée à la demande d’attribution de frais d’OpenMedia, mais elle a soutenu que le montant réclamé était excessif et devrait être ramené à 28 408,45 $. Premièrement, la STC a soutenu que, pour une comparution d’une demi-journée, deux nuits d’hébergement par personne, soit la nuit précédant la comparution et la nuit suivante, auraient été raisonnables. Elle a donc suggéré de réduire le montant réclamé en conséquence. En outre, la STC a fait remarquer que des séjours à l’hôtel de cinq et dix nuits par personne constituaient des dépenses inutiles et déraisonnables compte tenu de la courte comparution de ces deux personnes devant le Conseil.
  2. Deuxièmement, la STC a soutenu que le nombre d’heures de travail réclamé était excessif et disproportionné par rapport au nombre d’heures réclamé par les autres demandeurs, même en tenant compte du niveau d’expérience des réclamants. Par conséquent, la STC a suggéré que le nombre d’heures réclamé pour le travail de l’avocate externe soit réduit de 50 %. La STC a également indiqué qu’OpenMedia avait réclamé quatre heures supplémentaires même si ces heures ne sont pas admissibles au remboursement.
  3. Troisièmement, la STC a soutenu que le temps réclamé relativement à la participation à l’audience de cinq jours totalisait presque 12 jours de travail, ce qui  était excessif. Elle a indiqué que le temps réclamé devrait être réduit pour correspondre à la participation d’un représentant à la totalité de l’audience et à la participation des autres représentants à une demi-journée d’audience.
  4. Quatrièmement, la STC a soutenu que les taux réclamés pour l’avocate externe, Mme Cynthia Khoo, devraient être réclamés à titre d’honoraires d’avocate interne plutôt qu’externe, puisque certains indices laissent clairement entendre que Mme Khoo agissait à titre d’avocate interne, notamment son titre d’avocate (externe) chez OpenMedia indiqué dans son profil LinkedIn.
  5. Cinquièmement, la STC a soutenu qu’OpenMedia demandait le remboursement de frais non remboursables. La STC a soutenu que les 25 heures réclamées pour la préparation de la demande d’attribution de frais ne devraient pas être admissibles, puisque ce travail n’a en rien aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées dans le cadre de l’instance. En outre, la STC a argué que les 10,5 jours de  sensibilisation des citoyens ne constituaient pas une consultation, mais plutôt une tentative de lobbyisme, et que, par conséquent, les coûts associés ne devraient pas être admissibles au remboursement. De plus, la STC a indiqué que les 13,5 heures réclamées pour des travaux de recherche sur des questions de radiodiffusion devraient être rejetées, puisque le temps consacré aux questions de radiodiffusion n’est pas admissible au remboursement.
  6. La STC a argué que le Conseil devrait examiner les sources de financement d’OpenMedia, puisqu’il semblait que les dons reçus avaient été sollicités et utilisés à des fins précises, et qu’ils avaient par conséquent été reçus en lien avec une instance.
  7. La STC a également souligné que les Règles de procédure ne prévoient pas de droit de réplique à une réponse à une demande d’attribution de frais, mais elle a précisé qu’elle ne s’opposerait pas à une demande de contre-réplique de la part d’OpenMedia si celle-ci était présentée dans un délai de cinq jours.
  8. Enfin, la STC a fait référence aux mémoires relatifs à l’attribution des frais qu’elle a déposés en réponse à la demande d’attribution de frais de l’Equitable Internet Coalition concernant sa participation à l’instance. Dans ces mémoires, elle a indiqué que le Conseil devrait s’assurer que la répartition de la responsabilité du paiement des frais reflète véritablement la prépondérance et l’intérêt relatifs des intimés, ainsi que leur capacité à absorber les coûts. Selon la STC, le Conseil doit veiller à calculer les revenus d’exploitation provenant d’activités de télécommunication (RET)Note de bas de page 1 des intimés de manière équitable et neutre sur le plan de la concurrence. Plus précisément, la STC a indiqué que le Conseil devrait attribuer les frais en fonction des RET des sociétés mères de chaque intimé. De plus, la STC a soutenu que le Conseil devrait tenir compte de la position particulière de Bell Canada et de Québecor Média inc., Vidéotron ltée et Vidéotron s.e.n.c. (collectivement Vidéotron) en ce qui concerne les frais, puisque l’instance découle de l’instance relative au service Musique illimitée et de l’instance concernant les services de télé mobile de Bell Mobilité Inc. et de Vidéotron.
  9. Bell Canada a soutenu qu’OpenMedia ne devrait pas être admissible au remboursement de ses frais puisqu’elle est une entité non commerciale et qu’elle avait, à elle seule, les motifs et les ressources nécessaires pour participer à l’instance. En outre, du fait des questions abordées au cours de l’instance, il était important, pour l’exécution de son mandat, qu’OpenMedia participe à l’instance. Selon Bell Canada, la position unique d’OpenMedia, en raison de son mandat plus restreint et de ses ressources financières plus importantes que celles des autres intervenants, signifie que sa capacité à participer de manière concrète à l’instance ne dépendait pas de sa capacité à réclamer des frais. Bell Canada a également soutenu qu’OpenMedia avait grandement bénéficié de sa participation à l’instance puisque sa participation lui a servi de plateforme de financement.
  10. Comme autre solution, Bell Canada a indiqué que les coûts réclamés par OpenMedia devraient être réduits, soutenant que le nombre d’heures réclamé pour le travail de l’avocate était excessif et n’était pas comparable au nombre d’heures réclamé par les autres demandeurs. Bell Canada a appliqué des facteurs de conversion au travail réalisé par l’avocate d’OpenMedia, tenant compte de son niveau d’expérience, afin de démontrer que le nombre d’heures réclamé par OpenMedia par rapport à l’expérience était supérieur au nombre d’heures réclamé par les autres demandeurs. D’après le temps moyen réclamé par les autres demandeurs, calculé d’après ses facteurs de conversion, Bell Canada a soutenu que le nombre d’heures réclamé pour le travail de l’avocate devrait être réduit pour passer de 511 à 365.
  11. En ce qui concerne le recours aux services de l’avocate externe, Bell Canada a indiqué que le Conseil devrait se demander si Mme Khoo ne devrait pas plutôt être considérée comme une avocate interne. À ce sujet, Bell Canada a fait remarquer que le profil LinkedIn de Mme Khoo semblait suggérer qu’elle était employée d’OpenMedia. Bell Canada a soutenu que le fait que le Conseil s’appuie généralement sur la façon dont une personne déclare sa situation d’emploi au barreau dont elle est membre incite les avocats à structurer leur pratique de façon à pouvoir être considérés comme des avocats externes et à être admissibles à des taux plus élevés. Pour déterminer le statut d’un avocat, Bell Canada a suggéré au Conseil d’adopter un critère semblable à celui utilisé pour déterminer le statut d’emploi des experts-conseils. Bell Canada a fait valoir que si le Conseil concluait que Mme Khoo était en fait une avocate interne, les frais réclamés pour son travail devraient être ramenés à 28 685 $.
  12. En outre, Bell Canada a suggéré au Conseil d’examiner les taux réclamés puisque, comme la plupart des demandeurs, OpenMedia a réclamé les taux admissibles maximums établis dans les Lignes directrices. Bell Canada a soutenu que le Conseil devrait demander aux demandeurs de fournir des éléments de preuve indiquant les taux généralement facturés aux clients par les intervenants en dehors des instances du Conseil. Enfin, Bell Canada a argué que comme Mme Khoo fournit des services juridiques à OpenMedia en dehors des instances du Conseil, celui-ci devrait se renseigner sur les taux qu’elle facture pour le travail effectué à ces occasions.
  13. Dans l’éventualité où le Conseil déterminerait que Mme Khoo agissait bel et bien comme avocate externe, Bell Canada a soutenu qu’OpenMedia avait fait appel aux services de l’avocate dans une mesure excessive puisque l’instance s’inscrivait dans le cadre du mandat principal d’OpenMedia. Selon Bell Canada, OpenMedia disposait de ressources internes qualifiées capables de préparer sa participation à l’instance. Il est attendu, de la part d’une organisation, qu’elle tire parti de ses ressources internes avant de faire appel à des ressources externes. Bell Canada a soutenu que seulement 17,1 heures avaient été consacrées à la recherche juridique et que ce à quoi ont été consacrées les autres heures réclamées pour l’avocate aurait pu être pris en charge par les ressources internes. Bell Canada a soutenu que le Conseil devrait attribuer un tiers des honoraires d’avocat réclamés à une ressource interne, ce qui aurait pour effet de réduire de 28 047,50 $ le montant total réclamé.
  14. Bell Canada a argué que les débours réclamés par OpenMedia n’étaient pas raisonnables. Plus précisément, Bell Canada a soutenu qu’un séjour de 10 nuits pour une personne était déraisonnable dans le cadre d’une instance de 5 jours. Par conséquent, Bell Canada a indiqué qu’un montant de 784,12 $, soit la valeur de 4 nuits d’hébergement, devrait être déduit du montant réclamé.
  15. De plus, Bell Canada a soutenu qu’OpenMedia avait incorrectement décrit la pratique de l’exonération de données à ses abonnés et que, comme le soutien offert par les membres de la communauté d’OpenMedia à l’égard de la position de celle-ci s’appuyait sur une compréhension inexacte, il n’y avait donc pas lieu d’en tenir compte. Bell Canada a fait valoir que, compte tenu de cette situation, le temps consacré par OpenMedia à ce travail n’avait pas contribué à une meilleure compréhension des questions examinées et qu’OpenMedia ne devrait pas être admissible à un remboursement. Bell Canada a précisé qu’une somme de 4 395 $, équivalant à 10,5 jours de travail, devrait donc être déduite du montant total réclamé.
  16. Bell Canada a indiqué que les intimés devraient être déterminés conformément aux Lignes directrices.

Réplique

  1. OpenMedia a fait remarquer que l’article 27 des Règles de procédure prévoit un délai de 10 jours pour présenter une réplique à une réponse, ce que les demandeurs ont souvent fait par le passé. OpenMedia a soutenu qu’en rejetant le délai standard de 10 jours, le Conseil irait à l’encontre du principe d’équité procédurale puisque cela constituerait une modification sans préavis du processus établi.
  2. OpenMedia a soutenu que le montant total des coûts réclamé était raisonnable compte tenu de la durée et de la complexité de l’instance, de l’éventail des questions interreliées, du nombre de parties concernées et de l’importance des répercussions de la décision subséquente. OpenMedia a précisé que le chevauchement entre ses interventions et celles des autres parties était minime, voire inexistant.
  3. OpenMedia a fait remarquer que le montant réclamé pour l’hébergement était incorrect et était le résultat d’un oubli par inadvertance. Cependant, OpenMedia s’est dite en désaccord avec l’argument de la STC selon lequel un séjour de plus de deux nuits pour ses représentants était déraisonnable dans le cadre d’une instance de cinq jours. OpenMedia a soutenu que sa participation avait eu lieu vers la fin de l’audience et qu’il était important pour ses représentants de pouvoir discuter en personne des questions et préparer leurs interventions pour l’audience. OpenMedia a ajouté que le Conseil avait auparavant attribué des frais pour la participation et la surveillance de plusieurs avocats au cours d’une instance.
  4. OpenMedia a modifié sa réclamation de débours afin de ne réclamer que six nuits d’hébergement pour deux représentants, y compris la nuit précédant le début de l’audience et la nuit de la dernière journée de l’audience, réduisant ainsi le montant initial de sa réclamation de 702,95 $.
  5. S’appuyant sur les Lignes directrices, OpenMedia a soutenu que les organisations qui ne devraient pas être admissibles à l’attribution de frais sont celles qui ont un intérêt financier direct dans le dénouement d’une instance, pas celles dont la participation s’inscrit dans le cadre de leur mandat principal. OpenMedia a précisé qu’elle n’avait pas utilisé sa participation pour trouver d’autres sources de financement puisque, comme tous les organismes sans but lucratif, elle fait régulièrement de la publicité pour informer les particuliers du travail qu’elle fait de façon à démontrer qu’elle s’acquitte de son mandat. OpenMedia a soutenu que les dons en question avaient été utilisés à des fins opérationnelles d’ordre général et qu’aucune aide financière directe n’avait été reçue en lien avec sa participation à l’instance. De plus, OpenMedia a indiqué qu’il lui aurait été impossible de participer à l’instance sans la perspective de recouvrer ses frais.
  6. OpenMedia a fait valoir que les frais et le temps réclamés pour l’avocate étaient raisonnables comparativement à ceux réclamés par les autres demandeurs. OpenMedia a présumé qu’elle était autorisée à réclamer le temps consacré à la préparation de la demande d’attribution de frais puisque cette catégorie figure dans les formulaires de demande d’attribution de frais du Conseil, mais elle a indiqué qu’elle se conformerait aux conclusions du Conseil si celui-ci déterminait qu’il s’agissait d’une erreur.
  7. OpenMedia a soutenu que la conversion des heures faites par Bell Canada constituait une comparaison arbitraire qui donnait lieu à des hypothèses inexactes quant à la productivité par rapport à l’expérience. De plus, OpenMedia a fait valoir qu’il était inapproprié de comparer sa participation à celle des autres demandeurs puisque les autres demandeurs ont des structures organisationnelles et des mandats différents. En réponse à l’argument de la STC selon lequel les heures réclamées pour le travail de l’avocate étaient excessives parce que le nombre d’heures réclamé par OpenMedia pour une seule personne était supérieur à celui réclamé par les autres demandeurs pour tous les membres de leurs équipes, OpenMedia a soutenu qu’une seule personne avait réalisé le travail de toute une équipe. Ainsi, OpenMedia a soutenu que le nombre d’heures qu’elle réclamait était raisonnable.
  8. OpenMedia a soutenu que son recours aux services de l’avocate externe n’était pas exceptionnel pour un intervenant d’intérêt public. Elle a expliqué que, comme ses ressources internes travaillaient à d’autres projets pendant la durée de l’instance, elle n’aurait pas été en mesure d’y participer sans aide externe.
  9. En ce qui concerne le statut d’avocate externe de Mme Khoo, OpenMedia a fait valoir que c’est le droit de représenter d’autres clients qui fait qu’un avocat est considéré comme externe, peu importe qu’il exerce ou non ce droit. OpenMedia a affirmé que Mme Khoo représentait effectivement d’autres clients. OpenMedia a soutenu que le répertoire du Barreau du Haut-Canada constitue une source plus fiable que les comptes de médias sociaux pour déterminer le statut d’un avocat. Enfin, OpenMedia a affirmé que le Conseil avait déjà accepté qu’une personne comme Mme Khoo soit traitée comme un avocat externe, et qu’il devrait en être de même dans le cas présent.
  10. OpenMedia a contesté l’affirmation selon laquelle elle avait incorrectement décrit aux citoyens la pratique de l’exonération de données. Elle a soutenu que sa description de la pratique était au centre des arguments présentés dans ses mémoires. OpenMedia a également affirmé qu’elle avait intégré les résultats de ses activités de sensibilisation dans ses mémoires et que ces résultats ne devraient pas être écartés. Enfin, OpenMedia a soutenu que le Conseil avait déjà reconnu que les consultations publiques pouvaient comprendre de la rétroaction sollicitée.
  11. En ce qui a trait aux questions de radiodiffusion, OpenMedia a soutenu que ses recherches n’avaient pas été entreprises à des fins de radiodiffusion, mais bien dans le but de présenter une position plus éclairée sur les questions de télécommunication. Elle a indiqué que les frais liés à ces recherches devraient donc être recouvrables.

Résultats de l’analyse du Conseil

  1. Le paragraphe 27(1) des Règles de procédure prévoit que les demandeurs ont le droit de déposer une réplique à une réponse à une demande d’attribution de frais dans les dix jours suivant l’expiration, selon le cas, du délai pour déposer la réponse ou du délai pour intervenir dans l’instance. Dans le cas présent, OpenMedia a déposé une réplique 10 jours après l’expiration du délai pour le dépôt des réponses. Par conséquent, le Conseil estime que la réplique d’OpenMedia aux réponses a été déposée conformément aux dispositions du paragraphe 27(1).
  2. Les critères d’attribution de frais sont énoncés à l’article 68 des Règles de procédure, qui prévoit :

    68. Le Conseil décide d’attribuer des frais définitifs et fixe le pourcentage maximal de ceux-ci en se fondant sur les critères suivants :

    a) le fait que le dénouement de l’instance revêtait un intérêt pour le demandeur ou pour le groupe ou la catégorie d’abonnés qu’il représentait;

    b) la mesure dans laquelle le demandeur a aidé le Conseil à mieux comprendre les questions qui ont été examinées;

    c) le fait que le demandeur a participé à l’instance de manière responsable.

  3. Dans le bulletin d’information de télécom 2016-188, le Conseil a donné des directives sur la manière dont un demandeur peut démontrer qu’il répond au premier critère en ce qui a trait à la représentation d’abonnés intéressés. Dans le cas présent, OpenMedia a démontré qu’elle satisfaisait à cette exigence puisqu’elle représentait les intérêts des abonnés canadiens aux services Internet du fait de l’intégration des opinions de ces abonnés dans ses mémoires.
  4. OpenMedia a également satisfait aux autres critères par sa participation à l’instance. Plus particulièrement, les mémoires d’OpenMedia, concernant notamment la participation des utilisateurs à des activités en ligne de création et d’innovation, le choix des consommateurs, la différenciation des prix des fonctions administratives et promotionnelles ainsi que le contenu canadien, ont aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées.
  5. En ce qui concerne les arguments selon lesquels le Conseil devrait examiner les sources des dons faits à OpenMedia, le Conseil conclut qu’un tel examen n’est pas nécessaire. Le Conseil accepte l’affirmation d’OpenMedia selon laquelle les dons qu’elle reçoit visent les opérations générales, peu importe les différentes campagnes mises en œuvre pour solliciter du financement, et convient que les donateurs ne contrôlent pas la façon dont leurs contributions sont utilisées.
  6. Relativement à l’argument selon lequel OpenMedia a fait appel aux services de l’avocate externe de façon excessive, le Conseil accepte l’affirmation d’OpenMedia selon laquelle elle n’aurait pas été en mesure de participer à l’instance sans aide externe puisque ses ressources internes travaillaient à d’autres projets pendant la durée de l’instance.
  7. Le Conseil a déterminé que la façon dont une personne déclare son statut d’emploi au barreau dont elle est membre est une manière efficace d’établir si elle doit être considérée comme une ressource interne ou externe, compte tenu des graves conséquences que peut entraîner une déclaration trompeuse sur son statut auprès du barreau. Les parties n’ont fourni aucune raison expliquant pourquoi un examen plus approfondi serait nécessaire dans le cas présent.
  8. En ce qui a trait au statut de Mme Khoo, les Lignes directrices prévoient que les réclamants doivent déclarer au barreau dont ils sont membres qu’ils exercent à titre privé pour pouvoir réclamer des taux externes. Bien que Mme Khoo ait affirmé qu’elle agissait à titre d’avocate externe et qu’OpenMedia ait soutenu, dans sa réplique, que le statut déclaré au barreau constituait la façon appropriée de déterminer le statut d’un avocat, OpenMedia n’a pas indiqué de façon explicite, documents à l’appui, de quelle façon Mme Khoo déclarait son statut d’emploi au barreau dont elle est membre. Le Conseil a effectué, de façon indépendante, une vérification auprès du Barreau du Haut-Canada et Mme Khoo a bel et bien déclaré qu’elle exerçait à titre privé. Le Conseil conclut donc qu’elle agissait effectivement comme avocate externe pour OpenMedia aux fins de la présente demande d’attribution de frais.
  9. Les taux réclamés au titre des honoraires d’expert-conseil et d’avocat sont conformes aux taux établis dans les Lignes directrices, qu’ils soient équivalents aux taux maximum admissibles ou non. Ainsi, le Conseil ne considère pas nécessaire ni indiqué de demander des renseignements complémentaires relativement aux taux facturés en dehors des instances du Conseil, puisque cela entraînerait des délais supplémentaires dans le traitement de la présente demande, imposerait un fardeau plus lourd au demandeur et n’aurait probablement que peu ou pas d’effet sur le montant des frais attribués. Cependant, le Conseil conclut que les frais réclamés par OpenMedia ne constituent pas entièrement des dépenses nécessaires et raisonnables, et a donc rajusté le montant des frais à attribuer de la façon décrite ci-après.
  10. Dans le cas présent, OpenMedia a participé activement à l’instance, mais sa participation était comparable à celle des autres demandeurs, lesquels réclament un nombre d’heures considérablement moins élevé. Le nombre total d’heures réclamé par OpenMedia est supérieur d’environ 250 à 550 heures à celui réclamé par les autres demandeurs dans le cadre de l’instance. De plus, la plupart des heures réclamées étaient liées au travail d’un avocat adjoint. Même si on peut s’attendre à ce qu’un avocat adjoint consacre davantage de temps à une instance qu’un avocat principal, le Conseil considère que le nombre d’heures réclamé pour le travail de l’avocate dans le cas présent est excessif compte tenu de la nature et de la portée de l’intervention d’OpenMedia.
  11. Bien que les demandeurs soient admissibles au remboursement des frais associés au temps consacré à la préparation de leur demande d’attribution de frais et que les taux admissibles pour certaines tâches ne soient pas plafonnés, le Conseil estime qu’il est excessif de réclamer 25 heures pour la préparation d’une demande d’attribution de frais, étant donné la nature du travail requis. De manière similaire, même s’il était approprié d’effectuer certaines recherches relativement aux questions de radiodiffusion étant donné l’action réciproque de l’article 28 et du paragraphe 27(2) de la Loi sur les télécommunications (Loi), le Conseil estime que le nombre d’heures qu’OpenMedia a consacré aux questions de radiodiffusion est excessif puisque l’instance ne portait que sur des questions de télécommunication.
  12. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que le nombre d’heures réclamé par OpenMedia pour le travail de l’avocate doit être réduit de 200 heures et que le taux horaire externe appliqué doit être de 135 $, pour une réduction totale de 27 000 $.
  13. En ce qui concerne l’argument de la STC selon lequel le nombre de nuits pour lesquelles OpenMedia réclamait des frais d’hébergement était excessif, OpenMedia a modifié sa réclamation de débours afin de ne réclamer que six nuits d’hébergement pour chacun de ses deux représentants, y compris la nuit précédant le début de l’audience et la nuit de la dernière journée de l’audience de cinq jours (12 nuits au total), réduisant ainsi de 702,95 $ le montant initial de sa réclamation. Le Conseil conclut que, compte tenu de la portée et de la nature de l’instance, il est raisonnable que les représentants se soient rencontrés en personne pour se préparer en vue de leur intervention. Cependant, un total de 12 nuits d’hébergement est déraisonnable dans le cadre d’une audience de 5 jours sans réplique orale. Dans le cas présent, le Conseil conclut qu’une réclamation pour trois nuits d’hébergement pour chacun des deux représentants (six nuits au total) est raisonnable.
  14. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil rajuste le montant des débours pour les frais d’hébergement en fonction du tarif de l’hôtel, soit 166,29 $ par nuit pour 6 nuits (la taxe sur l’hébergement est comprise, mais pas la TVH, puisque OpenMedia réclame le rabais total au titre de la TVH). Par conséquent, le montant total approuvé pour l’hébergement est de 1 161,27 $ plutôt que le montant de 2 183,81 $ avancé par OpenMedia dans sa réplique.
  15. Le Conseil conclut également qu’il est approprié de déduire le montant de 50,03 $ pour les déplacements en voiture non justifiés à l’intérieur de la ville du montant réclamé en débours.
  16. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil réduit le montant de la réclamation d’OpenMedia de 28 072,57 $ et détermine que les frais raisonnables et nécessaires encourus pour sa participation à la présente instance s’élèvent à 57 969,94 $.
  17. Il convient dans le cas présent de sauter l’étape de la taxation et de fixer le montant des frais attribués, conformément à la démarche simplifiée établie dans l’avis public de télécom 2002-5.
  18. Le Conseil désigne généralement intimés à une attribution de frais les parties qui sont particulièrement visées par le dénouement de l’instance et qui y ont participé activement. Étant donné la portée de cette instance de politique générale visant à établir un cadre réglementaire pour l’examen des pratiques de différenciation des prix utilisées par les fournisseurs de services Internet, un grand nombre de parties étaient particulièrement visées par le dénouement de l’instance et ont participé activement à celle-ci.
  19. Tel qu’il est énoncé dans les Lignes directrices, le Conseil désigne généralement un maximum de 10 intimés dans le cadre d’une attribution de frais allant jusqu’à 20 000 $ et ajoute un intimé supplémentaire par tranche additionnelle de 5 000 $ de frais attribués. Toutefois, comme il est établi dans l’ordonnance de télécom 2015-160, le Conseil estime que 1 000 $ devrait être le montant minimal qu’un intimé devrait être tenu de verser en raison du fardeau administratif que les attributions de petits montants imposent à la fois au demandeur et aux intimés.
  20. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que les parties suivantes sont les intimés appropriés dans les circonstances : Bell Canada; Québecor Média inc., au nom de Vidéotron s.e.n.c. (Vidéotron s.e.n.c.); Rogers Communications Canada Inc. (RCCI); Saskatchewan Telecommunications (SaskTel); Shaw Cablesystems G.P. (Shaw); et la STC.
  21. Le Conseil répartit généralement la responsabilité du paiement des frais entre les intimés en fonction de leurs RET, critère qu’il utilise pour déterminer la prépondérance et l’intérêt relatifs des parties à l’instanceNote de bas de page 2. Le Conseil n’est pas convaincu, comme le suggère le mémoire de la STC, qu’il doit attribuer les frais en fonction des RET des sociétés mères des intimés. Dans le cas présent, les intimés ont participé à l’instance en leur propre nom, pas au nom de plusieurs sociétés affiliées.
  22. Par conséquent, conformément à la pratique du Conseil, il est approprié d’attribuer la responsabilité à l’égard du paiement des frais relativement aux RET des intimés qui ont participé à l’audience et non en fonction des RET de toutes leurs entreprises. La STC a choisi de fonctionner selon une structure juridique particulière et doit accepter les conséquences d’une telle structure sur les frais. De plus, le Conseil estime que, dans les circonstances, il ne serait pas approprié d’attribuer une plus grande responsabilité à Bell Canada et à Vidéotron que celle normalement imposée à l’égard du paiement des frais en raison de leurs RET respectifs. La politique réglementaire de télécom 2017-104 vise à fournir des indications à l’ensemble de l’industrie et, par conséquent, tous les fournisseurs de services en tireront avantage.
  23. Par conséquent, le Conseil conclut que la responsabilité du paiement des frais devrait être répartie comme suit :
    Entreprise Pourcentage Montant
    STC 33,5 % 19 419,93 $
    RCCI 30,5 % 17 680,83 $
    Bell Canada 22,6 % 13 101,21 $
    Vidéotron s.e.n.c. 6,0 % 3 478,19 $
    Shaw 4,1 % 2 376,77 $
    SaskTel 3,3 % 1 913,01 $

Directives relatives aux frais

  1. Le Conseil approuve, sous réserve des déductions susmentionnées, la demande d’attribution de frais présentée par OpenMedia pour sa participation à l’instance.
  2. Conformément au paragraphe 56(1) de la Loi, le Conseil fixe à 57 969,94 $ les frais devant être versés à OpenMedia.
  3. Le Conseil ordonne aux intimés de payer immédiatement à OpenMedia le montant des frais attribués dans les proportions indiquées au paragraphe 59.

Secrétaire général

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