Ordonnance de télécom CRTC 2017-129

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Ottawa, le 3 mai 2017

Numéros de dossiers : 8663-C12-201503186 et 4754-533

Demande d’attribution de frais concernant la participation de l’Association des Sourds du Canada à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2016-496

Demande

  1. Dans une lettre datée du 27 juillet 2016, l’Association des Sourds du Canada (ASC) a présenté une demande d’attribution de frais pour sa participation à l’instance ayant mené à la politique réglementaire de télécom 2016-496, dans laquelle le Conseil a examiné ses politiques concernant les services de télécommunication de base au Canada (instance).
  2. Le Conseil a reçu une réponse de Bell CanadaNote de bas de page 1 datée du 29 juillet 2016. L’ASC a déposé une réplique datée du 17 août 2016.
  3. L’ASC a indiqué qu’elle avait satisfait aux critères d’attribution de frais énoncés à l’article 68 des Règles de pratique et de procédure du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (Règles de procédure), car elle représentait un groupe ou une catégorie d’abonnés pour qui le dénouement de l’instance revêtait un intérêt, elle avait aidé le Conseil à mieux comprendre les questions examinées et elle avait participé à l’instance de manière responsable.
  4. Plus précisément, l’ASC a fait valoir qu’elle avait promu les intérêts des personnes handicapées concernant les questions qui ont été examinées lors de l’instance et qu’elle a fourni des recommandations concrètes.
  5. En ce qui a trait au groupe ou à la catégorie d’abonnés que l’ASC a indiqué être la représentante, l’ASC a expliqué qu’elle est une organisation communautaire composée de personnes de culture Sourde et qui est contrôlée et exploitée par elles. L’ASC a déclaré que ses positions ont été élaborées par son conseil d’administration (dont les membres font eux-mêmes partie de la communauté des Sourds) et partagées avec les membres de l’ASC afin d’assurer que ces positions traduisaient précisément les souhaits de la communauté et recevaient son appui.
  6. L’ASC a demandé au Conseil de fixer ses frais à 24 078,89 $, soit 22 910,00 $ en honoraires d’expert-conseil et 1 168,89 $ en débours. L’ASC a joint un mémoire de frais à sa demande.
  7. Concernant ses honoraires d’expert-conseil, l’ASC a réclamé 110 heures au taux horaire externe de 110 $ pour un expert-conseil externe et 23 jours au taux interne de 470 $ par jour pour son expert-conseil interne.
  8. Concernant les débours, l’ASC a réclamé des dépenses de voyage et d’hébergement pour la comparution de l’un de ses experts-conseils à l’audience.
  9. L’ASC a précisé que tous les fournisseurs de services de télécommunication qui ont participé à l’instance devraient être tenus de payer les frais attribués par le Conseil (intimés).

Réponse

  1. Bell Canada a argué que certains frais réclamés par l’ASC étaient déraisonnables et inutiles, et qu’ils devraient être rejetés. D’après Bell Canada, l’ASC a réclamé de manière inappropriée le taux lié à l’expert-conseil externe pour du temps passé à la préparation de l’instance par le président du conseil d’administration de l’ASC. Bell Canada a indiqué que le président du conseil d’administration de l’ASC contrôle fermement les activités et les décisions de l’ASC; par conséquent, il ne respecte pas le critère d’admissibilité établi dans l’ordonnance de télécom 2014-351 pour l’utilisation du taux lié à un expert-conseil externe. Bell Canada a indiqué que le taux journalier lié à un expert-conseil interne aurait donc dû être utilisé, comme établi dans les Lignes directrices pour l’évaluation des demandes d’attribution de frais (Lignes directrices) du Conseil.
  2. Concernant la répartition de la responsabilité du paiement des frais, Bell Canada a indiqué que les frais devraient être répartis entre les fournisseurs de services de télécommunication qui ont participé à l’instance en fonction de leurs revenus d’exploitation provenant d’activités de télécommunication (RET)Note de bas de page 2, conformément aux Lignes directrices.

Réplique

  1. L’ASC a argué que le président de son conseil d’administration ne devrait pas être considéré comme un expert-conseil interne mais plutôt comme un expert-conseil externe. Elle a expliqué que selon sa structure organisationnelle, le poste de président du conseil d’administration est un poste bénévole dont les responsabilités sont très différentes de celles typiquement exercées par le président d’un conseil d’administration d’une organisation à but lucratif. L’ASC a indiqué que le président de son conseil d’administration joue un rôle restreint dans les activités et ne vote que dans le cas d’une égalité des votes. Par conséquent, le président n’exerce pas un grand contrôle sur les activités de l’ASC. 
  2. L’ASC a de plus expliqué que le personnel permanent consiste en un directeur exécutif et un adjoint administratif travaillant à temps partiel. L’ASC a ajouté que le président du conseil d’administration fournit aussi des services de consultation à d’autres clients.
  3. L’ASC a demandé au Conseil de ne pas appliquer les Lignes directrices de manière stricte aux organisations à but non lucratif comme elle, car elles n’ont pas les ressources dont disposent les entreprises privées pour participer aux instances du Conseil. L’ASC a fait remarquer qu’un nombre limité de personnes possèdent une expertise combinée sur les questions relatives à l’accessibilité et aux télécommunications, ce qui lui laisse peu de personnes pouvant participer aux instances du Conseil.

Résultats de l’analyse du Conseil

Admissibilité

  1. Les critères d’attribution de frais sont énoncés à l’article 68 des Règles de procédure, qui prévoit :

    68. Le Conseil décide d’attribuer des frais définitifs et fixe le pourcentage maximal de ceux-ci en se fondant sur les critères suivants :

    a) le fait que le dénouement de l’instance revêtait un intérêt pour le demandeur ou pour le groupe ou la catégorie d’abonnés qu’il représentait;

    b) la mesure dans laquelle le demandeur a aidé le Conseil à mieux comprendre les questions qui ont été examinées;

    c) le fait que le demandeur a participé à l’instance de manière responsable.

  2. Dans le bulletin d’information de télécom 2016-188, le Conseil a donné des directives sur la manière dont un demandeur peut démontrer qu’il répond au premier critère en ce qui a trait à la représentation d’abonnés intéressés. L’ASC représente les personnes de culture Sourde. Elle a démontré qu’elle répond au premier critère en s’appuyant sur son conseil d’administration, lequel est entièrement composé de membres de la communauté des Sourds, et en s’assurant que ses membres appuyaient ses positions.
  3. L’ASC a également satisfait au critère restant par sa participation à l’instance. Plus particulièrement, l’ASC a offert une perspective unique et précieuse qui a aidé le Conseil à mieux comprendre comment les questions examinées pourraient affecter les membres de la communauté des Sourds qui ont besoin que les services de télécommunication en cours d’examen soient disponibles de manière accessible.
  4. Par conséquent, l’ASC est admissible à une attribution de frais pour sa participation à l’instance.

Honoraires d’experts-conseils

  1. Le Conseil reconnaît l’importante contribution que les organisations à but non lucratif ayant des conseils d’administration composés de bénévoles apportent à sa capacité de mieux comprendre les questions examinées lors d’une instance et d’aider les Canadiens représentés par ces organisations. À l’intérieur de celles-ci, il est courant que les membres du conseil d’administration jouent deux rôles : i) exercer une surveillance à titre de dirigeant concernant la gouvernance et les activités de l’organisation et ii) effectuer des tâches généralement accomplies par du personnel rémunéré ou des experts-conseils, notamment la recherche et l’élaboration des mémoires présentés au Conseil par l’organisation. Cela ne servirait pas l’intérêt public d’empêcher ces organisations de recouvrer leurs frais simplement parce que le travail a été effectué par un membre bénévole du conseil d’administration, car il est peu probable que l’organisation aurait la capacité de participer aux instances du Conseil sans le recouvrement des frais.
  2. Cependant, il reste important pour le Conseil de s’assurer que de tels dirigeants jouant le rôle d’expert-conseil soient classés de manière appropriée comme des experts-conseils internes ou externes d’après les principes établis dans l’ordonnance de télécom 2014-351, adaptés aux circonstances. Les frais pouvant être raisonnablement réclamés pour des experts-conseils externes sont supérieurs à ceux s’appliquant aux experts-conseils internes, car on présume que ces derniers font partie de l’organisation et offrent des services dans le cadre de leurs tâches régulières, les coûts de ces services étant couverts par les frais d’exploitation de l’organisation. Toutefois, on présume que les experts-conseils externes facturent à l’organisation des tarifs applicables à l’industrie pour une expertise spécifique.
  3. Dans l’ordonnance de télécom 2014-351, le Conseil a fourni plusieurs facteurs à examiner lors de l’évaluation de l’indépendance des experts-conseils par rapport au demandeur, y compris si l’expert-conseil a d’autres clients dans le domaine des communications et s’il a utilisé ses propres équipements et ressources afin d’effectuer son travail.
  4. L’ASC est un organisme de bienfaisance enregistré comportant un conseil d’administration composé de bénévoles qui a participé directement à l’élaboration du mémoire de l’ASC. La personne dont le temps de travail fait l’objet d’un désaccord est le président du conseil d’administration. Toutefois, les heures réclamées concernent la préparation et la présentation d’un mémoire, ce qui est généralement effectué par du personnel rémunéré ou des expert-conseils externes. Par conséquent, le Conseil estime que le temps réclamé pour le président n’était pas pour ses fonctions de direction mais plutôt à titre d’expert-conseil.
  5. De plus, le dossier indique que le président fournit des services de consultation à d’autres clients, pour lesquels il est payé. À ce titre, il est approprié pour l’ASC de réclamer des coûts pour son temps au taux d’expert-conseil externe.

Débours

  1. Les montants réclamés concernant les débours sont conformes aux Lignes directrices, telles qu’elles sont énoncées dans la politique réglementaire de télécom 2010-963.

Conclusion

  1. Compte tenu de ce qui précède, le montant total réclamé par l’ASC correspond à des dépenses nécessaires et raisonnables et il y a lieu de l’attribuer.
  2. Il convient dans le cas présent de sauter l’étape de la taxation et de fixer le montant des frais attribués, conformément à la démarche simplifiée établie dans l’avis public de télécom 2002-5.

Intimés et attribution

  1. Le Conseil désigne généralement intimés à une attribution de frais les parties qui sont particulièrement visées par le dénouement de l’instance et qui y ont participé activement. Compte tenu de l’ampleur de l’instance, un grand nombre de parties étaient à la fois particulièrement visées par le dénouement de l’instance et y ont participé activement.
  2. Le Conseil répartit généralement la responsabilité du paiement des frais entre les intimés en fonction de leurs RETNote de bas de page 3, critère qu’il utilise pour déterminer la prépondérance et l’intérêt relatifs des parties à l’instance. Aucune partie n’a contesté la justesse d’utiliser les RET dans le cas présent.
  3. Tel qu’il est indiqué dans les Lignes directrices, le Conseil limitera le nombre d’intimés à un maximum de 10 pour une attribution de frais qui s’élève jusqu’à 20 000 $ et il ajoutera un intimé supplémentaire par tranche additionnelle de 5 000 $. Toutefois, dans l’ordonnance de télécom 2015-160, le Conseil a estimé que 1 000 $ devrait être le montant minimal à payer par un intimé étant donné le fardeau administratif que l’attribution de petits montants impose autant au demandeur qu’aux intimés.
  4. Par conséquent, Bell Canada, Rogers Communications Canada Inc. (RCCI)Note de bas de page 4 et la Société TELUS Communications (STC) sont les intimés appropriés dans les circonstances. La responsabilité du paiement des frais doit être répartie comme suit :
Entreprise Pourcentage Montant
Bell Canada 43,3 % 10 426,16 $
STC 29,7 % 7 151,43 $
RCCI 27,0 % 6 501,30 $
  1. Conformément à l’approche générale énoncée dans l’ordonnance de frais de télécom 2002-4, le Conseil désigne Bell Canada responsable du paiement au nom des compagnies Bell. Le Conseil laisse aux membres des compagnies Bell le soin de déterminer entre eux leur part respective.

Directives relatives aux frais

  1. Le Conseil approuve la demande d’attribution de frais présentée par l’ASC pour sa participation à l’instance.
  2. Conformément au paragraphe 56(1) de la Loi sur les télécommunications, le Conseil fixe à 24 078,89 $ les frais devant être versés à l’ASC.
  3. Le Conseil ordonne à Bell Canada, à la STC et à RCCI de payer immédiatement à l’ASC le montant des frais attribués dans les proportions indiquées au paragraphe 30.

Secrétaire générale

Documents connexes

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