Décision de radiodiffusion CRTC 2016-487

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Référence : 2016-349

Ottawa, le 20 décembre 2016

MTS Inc.
Winnipeg et régions avoisinantes (Manitoba)

Demande 2016-0602-1, reçue le 8 juin 2016

Entreprise de distribution de radiodiffusion terrestre desservant Winnipeg et les régions avoisinantes – Modification du contrôle effectif

Le Conseil approuve une demande en vue d’obtenir l’autorisation de modifier la propriété et le contrôle effectif de l’entreprise de distribution de radiodiffusion (EDR) terrestre desservant Winnipeg et les régions environnantes (Manitoba), dont MTS Inc. (MTS) détient actuellement la licence, de façon à ce que le contrôle effectif soit exercé par BCE Inc.

Le Conseil conclut que la transaction ne soulève aucun problème quant aux politiques du Conseil et aux règlements, et qu’elle n’entraîne pas le versement d’avantages tangibles. De plus, Bell s’est engagé à investir dans des infrastructures au Manitoba et notamment dans les marchés actuellement non desservis, ce qui s’avère profitable au système de radiodiffusion.

La présente demande fait partie d’une transaction plus large entre MTS et Bell Canada impliquant des services de télécommunication. La portion de la transaction qui porte sur les services de télécommunication est régie par la Loi sur les télécommunications et ne requiert pas l’approbation préalable du Conseil. Le Conseil a exclusivement examiné la modification de propriété qui affecte l’EDR autorisée. L’autorisation accordée dans la présente décision ne suffit pas en soi pour permettre à BCE d’aller de l’avant avec la transaction plus large, laquelle nécessite des autorisations d’autres organismes.

Demande

  1. MTS Inc. (MTS) a déposé une demande en vue d’obtenir l’autorisation de modifier la propriété et le contrôle effectif de l’entreprise de distribution de radiodiffusion (EDR) terrestre desservant Winnipeg et les régions avoisinantes (Manitoba) dont MTS détient actuellement la licence, de façon à ce que le contrôle effectif soit désormais exercé par BCE Inc. (BCE).
  2. MTS est une filiale à part entière de MTS Communications Holdings Inc. (MCH), elle-même détenue a part entière par de Manitoba Telecom Services Inc. (Manitoba Telecom), une société cotée en bourse. Le contrôle effectif de MTS est exercé par son conseil d’administration.
  3. Bell Canada (Bell) est une filiale à part entière de BCE, une société cotée en bourse. Le contrôle effectif de Bell est exercé par BCE, à son tour contrôlé par son conseil d’administration.
  4. La modification proposée de la propriété et du contrôle de cette EDR fait partie d’un plan d’aménagement (le plan) selon lequel BCE propose d’acheter toutes les actions émises et en circulation de Manitoba Telecom, moyennant la somme approximative de 3,9 milliards de dollars.
  5. Selon le plan, la transaction englobe aussi les services de télécommunication de MTS. La demande déposée par MTS n’inclut pas les services de télécommunication. En vertu de la Loi sur les télécommunications, la modification de propriété des services de télécommunication ne requiert pas l’autorisation préalable du Conseil.
  6. Bell acquerrait également les EDR exemptées de MTS qui desservent diverses localités au Manitoba. Aucune approbation préalable du Conseil n’est nécessaire pour cette portion de la transaction.
  7. La transaction proposée serait complétée par l’intermédiaire d’une série d’étapes, décrites ci-après :

    Étape 1

    La société mère de MTS, MCH, serait liquidée dans Manitoba Telecom.

    Étape 2

    Bell acquerrait toutes les actions émises et en circulation au capital de Manitoba Telecom.

    Étape 3

    BCE incorporerait une nouvelle filiale à part entière (BCE Subco) qui viendrait acquérir les actions de Manitoba Telecom de Bell. Manitoba Telecom fusionnerait ensuite avec BCE Subco afin de former MTS Public Amalco.

    Étape 4

    Bell acquerrait les actions de MTS détenues par MTS Public Amalco. À l’issue de cette acquisition, MTS Public Amalco ne ferait plus partie de la structure de propriété de MTS.

    Étape 5

    Bell fusionnerait avec MTS et continuerait sous Bell.

  8. Immédiatement avant la clôture de la transaction, MTS procéderait à la rétrocession de sa licence de vidéo sur demande (VSD) régionale.
  9. À la suite de la transaction, l’EDR terrestre autorisée serait détenue à part entière par Bell et son contrôle effectif serait exercé par BCE. Bell poursuivrait l’exploitation de l’entreprise en vertu des mêmes modalités et conditions que celles de la licence actuelle.

Interventions et réplique

  1. Le Conseil a reçu des interventions favorables à la demande ainsi que des interventions en opposition et des commentaires. MTS a répliqué aux interventions et aux commentaires. Le dossier public de la présente demande peut être consulté sur le site web du Conseil, www.crtc.gc.ca, ou en utilisant le numéro de demande indiqué ci-dessus.
  2. En général, les intervenants favorables à la demande insistent sur l’investissement promis par Bell et les attraits technologiques du service de télévision IP de Bell (Bell Télé Fibe), lequels ne sont pas offerts par MTS, comme l’enregistreur 4K Partout chez vous et sa capacité de stockage de 320 heures en HD, qui permet en outre de rejouer depuis le début une émission en cours et de revenir sur les 30 dernières heures.
  3. Quelques intervenants, parmi lesquels des particuliers et des groupes de défense des consommateurs, allèguent que la réduction du nombre de concurrents au Manitoba risque de faire augmenter les prix.
  4. Dans son intervention, la succursale manitobaine de l’Association des consommateurs du Canada (ACC Manitoba) soutient que la transaction réduirait sérieusement la concurrence au Manitoba et, par conséquent, le choix. ACC Manitoba fait valoir que l’approbation de la demande placerait l’EDR de MTS dans un conglomérat intégré verticalement qui manifeste moins de souplesse en termes d’offre de programmation, tout en exigeant des prix plus élevés pour les chaînes à l’unité.
  5. Arguant dans le même sens, le Centre pour la défense de l’intérêt public (le CDIP) rappelle qu’il est prouvé que les EDR verticalement intégrées sont moins motivées à offrir aux consommateurs des fonctionnalités qui favorisent le choix, la flexibilité et, en fin de compte, l’abordabilité.
  6. Le CDIP prétend en outre que la transaction proposée devrait entraîner le versement d’avantages tangibles parce que les investissements et l’amélioration des produits ne compensent pas les risques que posent une concurrence réduite et la disparition d’un exploitant indépendant en faveur d’une EDR verticalement intégrée.
  7. Advenant l’approbation de la demande, le CDIP et ACC Manitoba recommandent que le Conseil :
    • impose une condition d’approbation obligeant Bell à maintenir l’offre actuelle de MTS en ce qui concerne le petit service de base, les services à la carte et les petits forfaits, de même que la location d’équipement et les conditions d’achat, pendant au moins trois ans après la conclusion de la transaction;
    • exige le versement d’avantages tangibles.
  8. Certains producteurs indépendants, comme On Screen Manitoba, s’inquiètent du financement de l’émission communautaire MTS Stories from Home que présente actuellement MTS sur son service de VSD. On Screen Manitoba ajoute qu’il devrait y avoir une disposition pour obliger Bell à soutenir le développement, la production et la distribution de contenu provenant du Manitoba.
  9. Dans sa réplique, MTS mentionne qu’il y a actuellement six EDR autorisées au Manitoba, la plus grande étant Shaw, de même que de nombreuses EDR exemptées, ce qui démontre l’existence d’une concurrence entre les EDR au Manitoba. MTS ajoute que pour évaluer l’état de la concurrence sur ce marché, il faut traiter Bell Satellite comme un service distinct de Bell Télé Fibe étant donné que la base d’abonnés actuelle (principalement urbaine) de MTS chevauche peu celle de Bell Satellite (principalement rurale). Pour ce qui est de la tarification, MTS indique qu’autant MTS que Bell se conforment parfaitement aux nouvelles politiques du Conseil sur les forfaits et que, sauf pour le petit service de base, ni le prix au détail, ni l’assemblage des services facultatifs ne sont réglementés. De plus, Bell fait remarquer qu’attacher des restrictions à la tarification représenterait un important renversement de l’approche du Conseil à la déréglementation des tarifs des EDR.
  10. MTS rappelle qu’en vertu de la politique sur les avantages tangibles (politique réglementaire de radiodiffusion 2014-459), le Conseil n’exige pas le versement d’avantages tangibles pour le changement de propriété et de contrôle effectif d’une EDR. MTS mentionne en outre que le CDIP et ACC Manitoba n’ont pas fourni de raisonnement adéquat pour conclure qu’il y aurait réellement une réduction de la concurrence sur le marché manitobain et que cela justifierait un renversement des politiques du Conseil.
  11. Concernant la programmation communautaire, MTS confirme que Bell a l’intention de continuer à investir dans l’expression locale, ce qui inclut des émissions comme MTS Stories from Home, et que la rétrocession de la licence de VSD n’est d’aucune conséquence pour le financement de la programmation communautaire. MTS rappelle que le financement de la programmation communautaire découle des obligations à l’égard des contributions à l’expression locale énoncées dans le Règlement sur la distribution de radiodiffusion (le Règlement) et n’est pas lié à la licence de VSD.

Analyse et décisions du Conseil

  1. La demande soumise à l’étude du Conseil se limite à la modification de propriété de l’EDR autorisée, ce qui représente une très petite partie de l’importante transaction entre MTS et Bell. La majeure partie de la transaction porte sur les services de télécommunication, lesquels sont régis par la Loi sur les télécommunications et n’exige pas l’approbation préalable du Conseil. La portion télécommunication de la transaction n’entre donc pas dans le cadre de la présente instance.
  2. L’examen de transactions impliquant la propriété constitue un élément essentiel du mandat de réglementation et de surveillance du Conseil en vertu de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi). Puisque le Conseil ne sollicite pas de demandes concurrentes en vue de modifier le contrôle effectif d’entreprises de radiodiffusion, il incombe au demandeur de démontrer que l’approbation sert l’intérêt public, que les avantages découlant de la transaction sont proportionnels à l’importance et à la nature de la transaction, et que la demande représente la meilleure proposition possible dans les circonstances.
  3. Le Conseil doit examiner le bien-fondé de chaque demande en tenant compte des circonstances qui lui sont propres. De plus, il doit être convaincu que l’approbation de la transaction de propriété proposée favorise l’intérêt public, tel que défini par les objectifs énoncés à l’article 3(1) de la Loi.
  4. Après examen du dossier public de la présente demande en vertu des règlements et des politiques applicables, le Conseil estime que les enjeux sur lesquels il doit se pencher sont les suivants :
    • incidence de la transaction proposée sur le système de radiodiffusion canadien;
    • application de la politique sur les avantages tangibles;
    • considérations a l’égard de la télévision communautaire.

Incidence de la transaction proposée sur le système de radiodiffusion canadien

  1. Bell compte offrir des améliorations dans les produits de télévision IP aux abonnés de MTS et des améliorations dans les infrastructures au Manitoba, y compris dans des marchés actuellement mal desservis, qui profiteront à l’ensemble du système de radiodiffusion.
  2. Certains intervenants ont fait part de leurs inquiétudes concernant l’état de la concurrence dans le marché des EDR au Manitoba. Dans la politique sur la diversité des voix (avis public de radiodiffusion 2008-4), le Conseil a reconnu que la concurrence entre les EDR constituait le moyen le plus efficace de bien servir les consommateurs. Dans cette politique, le Conseil a également déclaré qu’il ne permettrait pas à une seule et même personne de contrôler l’ensemble des EDR dans un marché donné et que, de façon générale, il n’approuverait pas une demande visant à changer le contrôle d’une EDR si ce changement permettait à une seule personne d’exercer un contrôle sur la distribution des services de programmation dans ce marché.
  3. Dans le cas présent, Shaw continuerait d’être le plus important exploitant d’EDR au Manitoba et il n’y a pas un seul marché où Bell serait seul à exploiter une EDR. Bell ne serait donc pas en mesure de contrôler la distribution des services de programmation dans le marché. Par conséquent, le Conseil estime que la transaction est conforme à la politique sur la diversité des voix.
  4. Certains intervenants ont dit craindre que la transaction proposée n’ait des répercussions sur l’abordabilité et le choix des services de programmation. À ce chapitre, le Conseil estime que la répartition des parts de marché entre les EDR du Manitoba, de pair avec les mesures énoncées dans le Règlement et dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-96, comme l’obligation pour les EDR d’offrir un service d’entrée de gamme à 25 $ ainsi que des services à la carte et des forfaits restreints, suffisent à garantir que les consommateurs manitobains continueront d’avoir le choix entre plusieurs fournisseurs de services de télévision et différents forfaits pour leurs services de programmation. Par ailleurs, à l’exception du service d’entrée de gamme, le Conseil ne réglemente pas le prix au détail des services d’une EDR.
  5. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que la transaction ne soulève aucun problème par rapport aux politiques du Conseil, au Règlement ou aux conditions de licence du service. De plus, les nouvelles fonctionnalités de Bell Télé Fibe et l’engagement de Bell à investir dans l’amélioration des infrastructures au Manitoba profiteront au système de radiodiffusion dans son ensemble.

Avantages tangibles

  1. Les avantages tangibles, comme l’énonce la politique sur les avantages tangibles, sont généralement requis pour des transactions impliquant la modification du contrôle effectif des entreprises de radiodiffusion, à l’exception des EDR autorisées.
  2. Le CDIP et ACC Manitoba ont fait valoir que la transaction proposée justifiait le versement d’avantages tangibles parce que les investissements et les améliorations de produit que Bell compte introduire ne compensent pas les risques que posent une concurrence réduite et la disparition d’un exploitant indépendant en faveur d’une EDR verticalement intégrée.
  3. La demande soumise à l’étude du Conseil se limite à la modification de propriété de l’EDR autorisée et ne soulève aucun problème par rapport aux politiques du Conseil ou aux règlements. Par conséquent, la transaction n’entraîne pas le versement d’avantages tangibles et le Conseil est d’avis qu’une exception visant à exiger le paiement d’avantages tangibles ne se justifie pas dans ce cas. De plus, le Conseil estime que les problèmes de flexibilité et de tarification soulevés par ACC Manitoba et le CDIP pour justifier l’imposition d’avantages tangibles sont atténués par les mesures réglementaires, annoncées dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-96, destinées à maximiser le choix des téléspectateurs et favoriser un marché télévisuel sain et dynamique.

Télévision communautaire

  1. Dans le cadre politique relatif à la télévision locale et communautaire (politique réglementaire de radiodiffusion 2016-224), le Conseil a établi des mesures réglementaires afin que les Canadiens continuent d’avoir accès à une programmation locale qui reflète leurs besoins et leurs intérêts. Cela comprend la diffusion de nouvelles locales de qualité auxquelles les Canadiens se fient pour demeurer informés au sujet des questions qui les intéressent, ainsi que la diffusion d’une programmation communautaire permettant aux Canadiens de s’exprimer. Certaines des mesures adoptées prévoient une approche flexible aux contributions des EDR à l’expression locale.
  2. Compte tenu des mesures annoncées dans le cadre politique relatif à la télévision locale et communautaire et de l’engagement explicite de Bell à soutenir la télévision communautaire au Manitoba, le Conseil n’imposera pas d’exigences supplémentaires à Bell pour l’obliger à soutenir le développement, la production et la distribution d’un contenu provenant du Manitoba.

Conclusion

  1. Compte tenu de tout ce qui précède, le Conseil détermine que la demande sert l’intérêt public et approuve la demande déposée par MTS Inc. en vue d’obtenir l’autorisation de modifier la propriété et le contrôle effectif de l’EDR terrestre desservant Winnipeg et les régions avoisinantes (Manitoba), dont MTS détient actuellement la licence, de façon à ce que le contrôle effectif soit désormais exercé par BCE Inc.
  2. Le Conseil s’attend à ce que MTS rétrocède au Conseil la licence de son service régional de VSD.

Secrétaire générale

Documents connexes

La présente décision doit être annexée à la licence.

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