Politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2015-86

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Référence au processus : 2014-190

Autres références : 2014-190-1, 2014-190-2, 2014-190-3, 2014-190-4, 2015-24 et 2015-25

Ottawa, le 12 mars 2015

Parlons télé

Aller de l’avant - Créer une programmation canadienne captivante et diversifiée

La présente politique énonce les conclusions du Conseil sur les moyens de bâtir un futur système canadien de télévision qui encourage la création par des Canadiens d’une programmation captivante et diversifiée. Elle résulte du processus amorcé par Parlons télé : une conversation avec les Canadiens et fait suite aux décisions du Conseil à l’égard de la télévision locale en direct et de la substitution simultanée. Les politiques du Conseil à l’égard du choix et de la souplesse du consommateur, ainsi que des renseignements des consommateurs qui leur sont offerts seront publiées au cours des prochaines semaines.

Le Canada possède une industrie de la télévision florissante qui offre un choix diversifié de programmation en un grand nombre de langues et un grand éventail de genres d’émissions, des dramatiques aux émissions de musique ou de sport en passant par les nouvelles et les documentaires. Le système canadien de télévision présente des émissions qui attirent des millions de téléspectateurs canadiens sur de multiples plateformes. Une infrastructure de financement privé et de soutien gouvernemental, qui a évolué au cours des années, offre d’importants avantages à la programmation canadienne. Cette programmation est acheminée par des systèmes de distribution robustes et bien développés qui garantissent que les Canadiens y ont accès, peu importe la région où ils vivent. En bâtissant sur ces solides acquis, l’industrie canadienne de la radiodiffusion est en mesure de faire face à l’avenir avec la confiance et la créativité nécessaires pour faire concurrence, tant au pays qu’à l’étranger, et ce, sur une variété de plateformes.

Au cours des prochaines années, les Canadiens poursuivront la transition d’une télévision programmée et de services de programmation en forfait vers une télévision de plus en plus sur demande et plus personnalisée. Ils chercheront à mieux contrôler les émissions qu’ils regardent et accéderont à des vidéos sur un éventail toujours plus diversifié d’appareils. Ce nouvel environnement exigera que tous les joueurs du système de radiodiffusion, y compris les gouvernements et le Conseil, concertent leurs efforts en vue de trouver des approches nouvelles et innovatrices favorisant la création d’une programmation captivante et diversifiée.

C’est pourquoi le Conseil annonce des mesures visant à faciliter et la transition vers un environnement de plus en plus sur demande, et à y jouer un rôle de premier plan. Les mesures énoncées dans la présente politique sont regroupées en fonction des quatre thèmes suivants :

A. Paver la voie aux approches innovatrices

Le Conseil reconnaît qu’une bonne visibilité et une grande disponibilité des émissions canadiennes sont essentielles à leur succès. Les Canadiens doivent avoir davantage d’occasions de découvrir les émissions canadiennes sur de multiples plateformes. À cet égard, le Conseil convoquera un sommet afin d’engager directement avec les parties intéressées des discussions sur les façons de travailler ensemble en vue de développer des mesures et des stratégies pour améliorer la visibilité et la promotion des émissions canadiennes. Le Conseil offre également des mesures incitatives additionnelles favorisant la promotion des émissions canadiennes.

Les Canadiens de toutes les régions devraient avoir accès à la programmation, y compris à la programmation canadienne originale, sur des plateformes en ligne exploitées par des Canadiens. Par conséquent, le Conseil crée une nouvelle catégorie de service hybride de vidéo sur demande (VSD) et énonce les règles qui s’y appliqueront. Les services de cette catégorie seront exemptés de l’obligation de détenir une licence de radiodiffusion. La création de cette nouvelle catégorie éliminera les obstacles auxquels les sociétés canadiennes doivent faire face afin de faire concurrence sur un pied d’égalité dans l’environnement sur demande.

Le secteur de la production canadienne joue un rôle de premier plan dans l’ultime succès du futur système de télévision. Un secteur de la production canadienne robuste sera plus en mesure d’offrir du contenu captivant de grande qualité aux Canadiens et aux auditoires mondiaux. La création et la promotion des émissions canadiennes doivent être soutenues par des modèles et des outils de financement appropriés. Le Conseil fait donc un certain nombre de recommandations aux gouvernements et aux agences sur les moyens de permettre au secteur de la production de croître et d’évoluer dans le nouvel environnement vidéo. Le Conseil lance également des projets pilotes et examine ses propres politiques de certification en vue de permettre une plus grande souplesse à l’égard de la création d’émissions canadiennes.

À l’avenir, le succès de l’industrie de la radiodiffusion dépendra de sa capacité d’adapter aux besoins et aux intérêts des Canadiens les contenus des forfaits de programmation ainsi que la programmation elle-même. L’information sur l’écoute sera essentielle dans ce nouvel environnement axé sur le téléspectateur. De nouveaux outils, comme un système de mesures de cotes d’écoute au moyen de boîtiers de décodage, seront essentiels. Par conséquent, le Conseil exige que l’industrie mette sur pied un groupe de travail afin de développer un système de mesures de cotes d’écoute au moyen de boîtiers de décodage.

B. Changement de cap pour la programmation canadienne : de quantité à qualité

Au cours de l’instance Parlons télé, les Canadiens ont exprimé clairement qu’ils s’attendent à du contenu de grande qualité de leur système de télévision. La production de programmation captivante de grande qualité exige non seulement de la créativité, mais aussi des investissements financiers. Investir dans du contenu de grande qualité largement disponible et bien promu augmente l’écoute et, par conséquent, les revenus. Tous ces éléments contribuent à un succès d’ensemble.

Afin de favoriser la production d’émissions de grande qualité, le Conseil modifie son approche afin de privilégier une approche réglementaire basée sur les dépenses (les sommes consacrées à la programmation canadienne) plutôt que sur les quotas de présentation (le nombre d’heures consacrées à la diffusion de programmation canadienne). Plus précisément, le Conseil exigera des dépenses en émissions canadiennes d’un plus grand nombre de services de programmation. En même temps, le Conseil éliminera certaines exigences de présentation à l’égard de services de programmation. Cependant, certaines de ces exigences demeureront en ce qui a trait aux périodes d’écoute les plus importantes.

C. Offrir un soutien réglementaire pour certains types de programmation considérés d’intérêt public, mais seulement en cas d’échec du marché

Le Conseil est d’avis que la politique d’exclusivité des genres n’est plus nécessaire en vue d’assurer la diversité de la programmation entre les services et il l’élimine par conséquent. Cette politique limitait à certains types de programmation ce que les services de programmation étaient autorisés à diffuser, et interdisait à d’autres services d’offrir cette programmation. En éliminant cette politique, le Conseil supprime des obstacles réglementaires de façon à favoriser l’émergence de nouveaux services de programmation et une plus grande concurrence domestique. Ceci fera en sorte que la diversité de la programmation découle des forces du marché dans la mesure du possible. Les services de programmation pourront répondre aux consommateurs et adopter des stratégies créatives en matière de programmation.

Les services de nouvelles jouent un rôle vital au sein du système de radiodiffusion. Le Conseil estime que certains soutiens réglementaires doivent demeurer en place afin de garantir que les Canadiens aient accès à des informations et à des nouvelles de qualité et bénéficient d’informations de sources diversifiées sur des sujets d’intérêt public. À cet égard, le Conseil imposera de nouveaux critères aux services de nouvelles nationales nouveaux et existants.

Le Conseil conserve les présentes exigences de dépenses à l’égard des émissions considérées d’intérêt national. Il estime que les Canadiens doivent avoir accès à certains types d’émissions qui contribuent de façon importante au système de radiodiffusion. Un grand nombre de Canadiens qui ont offert des observations au cours de l’instance Parlons télé partagent ce point de vue.

D. Simplifier et alléger le processus d’attribution de licence aux services de programmation

Finalement, le Conseil adopte des mesures afin de réduire le fardeau réglementaire. Il exemptera un plus grand nombre de services de programmation de l’obligation de détenir une licence de radiodiffusion. De plus, le Conseil regroupera les classes de licences des services de programmation en vue de simplifier et d’alléger le processus d’attribution de licence.

Introduction

  1. Le 24 avril 2014, le Conseil a lancé une instance visant l’examen formel de ses politiques en matière de télévision (avis de consultation de radiodiffusion 2014-190). Cet examen, comprenant une audience publique entamée le 8 septembre 2014, représentait la troisième étape de Parlons télé : une conversation avec les Canadiens et portait sur les enjeux et les priorités identifiés par les Canadiens au cours des deux premières étapes de cette conversationNote de bas de page 1.
  2. Au cours de la consultation, le Conseil a reçu plus de 13 000 commentaires et interventions, plusieurs d’entre eux provenant de Canadiens de toutes les régions du pays. Le dossier public de cette instance, y compris les rapports sur les commentaires et les contributions des Canadiens recueillis lors des deux premières étapes, peut être consulté sur le site web du Conseil, www.crtc.gc.ca.
  3. En août 2014, le Conseil a publié l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190-3 (le Document de travail) qui énonçait diverses propositions relatives à la réglementation future du système canadien de radiodiffusion. Le Conseil y notait que la mention de certaines propositions ne signifiait en rien qu’il avait déjà pris une décision sur une question ou qu’il privilégiait une option plutôt qu’une autre. En effet, son seul objectif était d’offrir aux parties des modèles possibles pour stimuler les discussions et les débats.
  4. Dans le respect de sa mission de garantir aux Canadiens un système de communications de classe mondiale, le Conseil a énoncé les trois objectifs suivants afin d’orienter le processus Parlons télé :
    1. Un système canadien de télévision qui encourage la création par les Canadiens d’une programmation canadienne captivante et diversifiée.
    2. Un système canadien de télévision qui favorise le choix et la souplesse en ce qui concerne la sélection des services de programmation.
    3. Un système canadien de télévision qui renforce la capacité des Canadiens à accéder à la programmation et à faire des choix éclairés à son sujet, et prévoit des recours en cas de différends.
  5. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a déclaré que ces objectifs pourraient être atteints sans intervention réglementaire, simplement par l’évolution du marché ou le changement de l’environnement de la technologie. Advenant qu’une intervention réglementaire soit justifiée, celle-ci n’aurait lieu que lorsque des résultats ou des objectifs précis ne seraient pas réalisables sans elle. De plus, le Conseil estimait que de telles mesures devaient être aussi simples que possible, proportionnelles, faciles à gérer et adaptables au changement.
  6. La présente politique réglementaire met l’accent sur le premier objectif susmentionné : un système canadien de télévision qui encourage la création d’une programmation canadienne captivante et diversifiée. Le Conseil a déjà traité d’un certain nombre d’enjeux relatifs à la télévision locale en direct et à la substitution simultanée dans les politiques réglementaires de radiodiffusion 2015-24 et 2015-25, respectivement. Les politiques du Conseil sur le choix et la souplesse offerts au consommateur et sur l’information et les recours du consommateur seront publiées au cours des prochaines semaines.
  7. Dans sa prise de décision dans le cadre de ces politiques, le Conseil doit examiner les éléments publics, privés et communautaires du système de radiodiffusion canadien. Certaines conclusions énoncées dans les prochaines sections seront en vigueur au moment du renouvellement de la licence. Pour le secteur de la télévision privée, les renouvellements de licences des grands groupes de propriété auront lieu d’ici le 31 août 2017 et débuteront aussi tôt que le 31 août 2018 pour les services indépendants, selon leur date d’expiration de licence respective. Les licences de la SRC seront renouvelées d’ici le 31 août 2018. Le Conseil étudiera également plus en détails les questions entourant la programmation locale et communautaire dans le cadre d’un examen à venir tel qu’annoncé dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-24.

L’avenir de la télévision

À quoi ressemblera la « télévision » dans 10 ans?

  1. Bien qu’il soit impossible de dire précisément à quoi ressemblera la « télévision » dans les prochains 5 ou 10 ans, certaines tendances et orientations sont évidentes. Au cours des prochaines années, les Canadiens poursuivront la transition d’une télévision programmée et de services de programmation en forfait vers une télévision sur demande et personnalisée. Ils deviendront proactifs et voudront un meilleur contrôle des émissions qu’ils regardent. Les téléspectateurs Canadiens, tout comme les téléspectateurs autour du monde, consommeront de plus en plus de contenu sur une panoplie d’appareils et demanderont des approches nouvelles et innovatrices à l’égard de la programmation.
  2. De récents développements technologiques, menés par des services et appareils Internet innovateurs, répondent déjà à la demande latente et accumulée des consommateurs pour du contenu et entraînent des changements d’habitudes de consommation chez un grand nombre de Canadiens (p. ex. écoute en ligne ou sur appareil mobile, gavage audiovisuel, accès à des sources de contenu inédites et mondiales).
  3. En même temps, bon nombre de Canadiens continueront à consommer du contenu sur des plateformes traditionnelles de télévision de la même façon et au même rythme qu’ils le font depuis des décennies. Le Conseil doit donc concevoir un cadre réglementaire qui tienne compte des nouvelles façons dont le contenu peut et sera distribué, tout en reconnaissant l’importance et la valeur des moyens plus traditionnels d’accéder à du contenu, et ce, pour le bénéfice des téléspectateurs qui désirent continuer à regarder ainsi la télévision. Cette nouvelle approche doit offrir la plus grande souplesse possible quant à la façon dont le contenu est créé, diffusé et regardé.
  4. Un grand nombre de sociétés et de services qui opèrent dans le marché télévisuel aujourd’hui continueront de jouer un rôle important dans l’environnement futur, mais plusieurs subiront des changements radicaux. De nouveaux services de vidéo innovateurs verront le jour, alors que des services existants disparaîtront. La plupart de ces changements répondront aux intérêts et aux choix des téléspectateurs dans le marché, mais le Conseil poursuivra son travail afin que les Canadiens bénéficient d’un choix complet, y compris d’un large éventail d’émissions canadiennes captivantes et diversifiées.
  5. En envisageant l’avenir de certains services et sociétés, le Conseil s’attend à ce que les sociétés intégrées verticalement (celles qui possèdent ou contrôlent à la fois des services de programmation et des services de distribution) continuent, quant à elles, d’avoir l’occasion de tirer parti de leurs ressources et auditoires pour acquérir des émissions populaires et payantes et à être en mesure de produire de la programmation de grande qualité produite par des Canadiens. Leur masse critique leur procure le capital nécessaire pour réussir tant sur le plan national qu’international. Cependant, compte tenu de leur position extrêmement privilégiée dans le marché canadien, certaines mesures sont nécessaires afin de veiller à ce que ces sociétés n’exercent pas leur puissance de marché de façon à nuire à la capacité d’autres distributeurs ou fournisseurs de contenu d’offrir des services aux Canadiens ou à limiter les choix qui s’offrent à ces derniers.
  6. Les stations de télévision traditionnelle continueront, du moins à court et à moyen terme, à être largement accessibles aux Canadiens, soit en direct, soit par abonnement payant à un distributeur de télévision. Un grand nombre de ces stations, surtout celles exploitées par des sociétés intégrées verticalement, continueront à jouir d’un large auditoire pour les émissions canadiennes ou étrangères à gros budgets diffusées aux heures de grande écoute en soirée. Puisque ces émissions feront face à une plus grande concurrence au niveau des auditoires, elles devront être de la meilleure qualité possible afin de captiver les Canadiens. Les émissions de nouvelles et les émissions locales aussi offertes par ces stations tisseront toujours des liens importants avec les auditoires et permettront aux Canadiens de participer au niveau communautaire et national. Cependant, ce contenu continuera de se caractériser par une production exigeant des ressources considérables compte tenu de la taille de ses auditoires.
  7. Les services de programmation facultatifs linéaires (aussi appelés les services payants et spécialisés) continueront d’offrir de la programmation différente originale de même que du contenu en rediffusion. Le présent modèle linéaire est cependant appelé à perdre du terrain alors que les services de vidéo en ligne cherchent à rassembler du contenu à long terme, c’est-à-dire à créer de grands inventaires d’émissions déjà diffusées qui desservent de nombreux créneaux d’auditoires. En même temps, les services autorisés de télévision à la carte (TVC) et les services de vidéo sur demande (VSD), déjà non linéaires, ressembleront vraisemblablement de plus en plus aux services de vidéo en ligne.
  8. Les producteurs profiteront des occasions de création provenant de la possibilité de monnayer les nouvelles plateformes. Une programmation captivante capable d’attirer un auditoire international deviendra la clé du succès dans un environnement de plus en plus concurrentiel.
  9. Les distributeurs de contenu, les radiodiffuseurs et les créateurs seront également plus actifs en ligne et bénéficieront de la croissance sur toutes les plateformes dans la mesure où :
    • il existe un marché de gros robuste et équitable;
    • l’audace et l’innovation en matière de production de programmation sont encouragées; et
    • l’accent est mis sur la promotion et la découverte.
  10. Bref, le futur système de « télévision » sera un système dans lequel les Canadiens vivront une expérience harmonieuse lorsqu’ils accéderont au contenu de leur choix. Cette expérience sera le fruit d’une collaboration mutuellement profitable entre les divers éléments du système : les créateurs de contenu, les rassembleurs de contenu et les distributeurs.

Y parvenir

  1. La Loi sur la radiodiffusion (la Loi) est le texte législatif qui établit les objectifs de politique pour le système canadien de radiodiffusion. Ces objectifs de politique soulignent l’importance de la disponibilité, pour les Canadiens, d’une diversité d’émissions produites par des Canadiens. En vertu de la Loi, le système canadien de radiodiffusion devrait entre autres choses :
    • favoriser l’épanouissement de l’expression canadienne en proposant une très large programmation qui traduise des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadiennes, qui mette en valeur des divertissements faisant appel à des artistes canadiens et qui fournisse de l’information et de l’analyse concernant le Canada et l’étranger considérés d’un point de vue canadien;
    • par sa programmation et par les chances que son fonctionnement offre en matière d’emploi, répondre aux besoins et aux intérêts, et refléter la condition et les aspirations, des hommes, des femmes et des enfants canadiens, notamment l’égalité sur le plan des droits, la dualité linguistique et le caractère multiculturel et multiracial de la société canadienne ainsi que la place particulière qu’y occupent les peuples autochtones.
  2. À titre d’organisme réglementaire chargé de surveiller et de réglementer le système canadien de radiodiffusion, le Conseil doit, au nom du public, veiller à ce que ces objectifs de politique soient atteints. Par conséquent, le Conseil surveille le système canadien de radiodiffusion et n’intervient que lorsque la preuve démontre qu’un problème faisant obstacle aux objectifs prévus par la loi ne peut être résolu par les seules forces du marché.
  3. Le système canadien de télévision est une industrie florissante qui emploie directement près de 60 000 personnes. Selon Profil 2014, un rapport publié par la Canadian Media Production Association (CMPA), l’association québécoise de la production médiatique (AQPM), le ministère du Patrimoine Canadien et Nordicity Group, la production de films et de télévision au Canada a compté pour près de 7,5 milliards de dollars en produit intérieur brut en 2013-2014.
  4. Certaines émissions canadiennes sont produites à l’interne par les radiodiffuseurs, alors que nombre d’entre elles le sont par les producteurs indépendants. Financer une émission de télévision représente pour un producteur indépendant un processus complexe exigeant beaucoup de travail et de temps. Il doit déposer des demandes auprès de plusieurs agences et obtenir d’une institution financière un préfinancement ou un financement provisoire pour ce qui est considéré comme un projet à risque élevé.
  5. Un soutien financier est nécessaire pour que les ressources requises soient disponibles afin que les Canadiens créent une diversité d’émissions. En cela, le Canada ne fait pas cavalier seul. La plupart des pays en mesure de soutenir un système de radiodiffusion estiment qu’il est dans l’intérêt public de favoriser l’industrie de la production domestique, laquelle entraîne des avantages sociaux, économiques et culturels. Certains de ces avantages sont intangibles et difficiles à quantifier, par exemple l’importance de raconter et d’entendre ses propres histoires. D’autres sont par contre facilement quantifiables, par exemple le nombre d’emplois hautement spécialisés créés et les revenus générés.
  6. Comme le Canada, ces pays ont mis en place divers programmes, tels que des subventions ou des crédits d’impôts, afin de favoriser le financement de productions domestiques, ce qui est à l’origine de différents avantages pour la société. Au Canada, l’industrie de la production jouit d’un financement important provenant d’un certain nombre de sources. Certaines d’entre elles sont privées, comme les prêts de capital de risque, les investissements de capitaux ou les préventes d’émissions à des radiodiffuseurs internationaux. Cependant, le gros du financement des émissions canadiennes est public, comme le financement de la Société Radio-Canada (SRC), et provient tant du fédéral que du provincial par des programmes de subventions, y compris ceux de Téléfilm, ou de crédits d’impôt, tels que le Crédit d’impôt pour la production cinématographique et télévisuelle ontarienne.
  7. Les sources de soutien financier des émissions canadiennes peuvent également être plus indirectes. Elles comprennent les revenus en salles lors de la présentation de longs métrages canadiens éventuellement diffusés à la télévision ainsi que les revenus des radiodiffuseurs provenant de la vente de publicité et d’abonnements à des services facultatifs. Pour ces derniers, le Conseil exige que la plupart des radiodiffuseurs consacrent une partie de leurs revenus provenant de ces secteurs et d’autres activités directement à la programmation canadienne.
  8. D’autres sources de financement des émissions canadiennes peuvent se qualifier de « partenariats créés par la politique publique ». Par exemple, le Conseil exige que les EDR qui comptent plus de 2 000 abonnés consacrent 5 % de leurs revenus bruts provenant de leurs activités de radiodiffusion à la création de programmation canadienne, au moyen de versements à des fonds publics ou indépendants. Au moins 80 % des contributions totales d’une EDR doit être versé au Fonds des médias du Canada (FMC), qui favorise, fait la promotion, développe et finance la production de contenu canadien et d’applications logicielles pour consommation sur diverses plateformes médias audiovisuelles. Le reste des contributions doit être versé à un ou à plusieurs fonds de production indépendants certifiés par le Conseil (FPIC)Note de bas de page 2.
  9. Finalement, afin de veiller à ce que l’intérêt public soit servi lors de modifications de propriété ou de contrôle effectif des entreprises de radiodiffusion, le Conseil s’attend à ce que le demandeur propose des contributions financières (appelées « avantages tangibles »). Ces avantages tangibles sont proportionnels à l’importance et à la nature de la transaction et procureront des améliorations mesurables aux collectivités desservies par l’entreprise de radiodiffusion qui sera acquise, de même qu’au système canadien de radiodiffusion dans son ensemble. Afin de garantir que les avantages tangibles sont principalement consacrés à la production d’émissions canadiennes, le Conseil exige généralement qu’au moins 80 % de ceux-ci soient versés au FMC ou à d’autres FPIC. De ces sommes, au moins 60 % doivent être versés au FMCNote de bas de page 3.
  10. Entre 2010 et 2014, le FMC a contribué à lui seul plus de 1,4 milliards de dollars à 1 923 émissions de télévision et à 335 applications logicielles et contenus de médias numériques, ce qui s’est traduit par l’investissement d’un total de 4,8 milliards de dollars dans la production de contenu canadien. À ce titre, chaque dollar de financement par le FMC se traduit en 3,38 $ investis dans la création de programmation canadienne.
  11. Au total, les appuis aux émissions faits par les Canadiens équivalaient à plus de 4,1 milliards de dollars en 2012-2013. Presque les deux tiers de cette somme (65,6 %), ou 2,7 milliards, découlent directement des dépenses des services de programmation de télévision canadiens pour des émissions faites par des Canadiens. Les autres montants proviennent de crédits de taxes provinciaux et fédéraux (15,8 %), du FMC (9 %), d’avantages tangibles (4,8 %), de contributions des EDR à la programmation communautaire (3 %) et de divers FPIC (1,5 %)Note de bas de page 4.
    Diagramme en camembert illustrant les dépenses en programmation canadienne. Les chiffres proviennent du Conseil et de sources externes. Ils représentent l’ampleur des dépenses en programmation canadienne provenant de divers mécanismes. En 2013, le montant total des dépenses en programmation canadienne a été de 4.1 milliards de dollars. Le diagramme en camembert illustre les différentes sources d’argent, lesquelles sont illustrées en pourcentage. Les pourcentages et leur source sont les suivants :
Dépenses au titre des émissions canadiennes : 65,6%; Crédits d’impôts provinciaux variés : 9,9%; Fond des médias du Canada : 9%; Crédits d’impôts fédéraux : 5,9%; Avantages tangibles : 4,8%; Expression locale (communauté) : 3%;
Autres fonds de production indépendants certifiés en excluant le Fond des médias du Canada : 1.5%.
  12. Ces divers appuis jouent un rôle crucial dans le financement des émissions. Selon le rapport annuel de 2013-2014 du FMC, 26 % des budgets de production du marché de langue anglaise pour les émissions financées par le FMC provenaient du FMC lui-même, et 27,5 % d’autres sources fédérales ou provinciales comme les crédits d’impôt ou les subventions d’agences. Pour les mêmes productions, les radiodiffuseurs de langue anglaise ont versé des contributions qui représentent 29 % des budgets par l’intermédiaire de leurs dépenses en émissions canadiennes, alors que les producteurs ont eux-mêmes contribué un total de 4 % des budgets. Du côté du marché de langue française, le FMC a fait des contributions qui représentent 27 % des budgets de production, alors que les contributions des autres sources fédérales et provinciales représentaient 28 %. Les sommes versées par les radiodiffuseurs de langue française représentaient 42 % des budgets de production et celles des producteurs 1,7 %.
  13. Cette infrastructure de soutien gouvernemental et d’investissements privés, qui a évolué au cours des années, offre de multiples occasions de financement à la programmation canadienne. Il ne fait aucun doute que le système canadien de radiodiffusion est en pleine transition, mais rien ne permet d’affirmer qu’il est en crise. Cette situation résulte du fait que le système a construit, sur plusieurs décennies, une base solide de ressources et de talents qui lui permet de faire face à l’avenir avec confiance et esprit de créativité.
  14. Cette confiance et cette créativité seront essentielles pour relever les prochains défis. Non seulement la technologie et le comportement du consommateur ont-ils changé, mais la notion même de « télévision de qualité » a évolué. Au cours des dernières années, la télévision est devenue plus cinématographique, avec des artistes de haut niveau du grand écran qui œuvrent dorénavant au petit écran à la recherche de davantage occasions d’innover et de réaliser des projets risqués de scénarios. Une innovation consiste à créer un nombre réduit d’épisodes d’une émission par saison afin de consacrer plus de ressources à chaque épisode, ce qui améliore la qualité de ces productions. Les mesures que le Conseil adopte dans la présente politique tiennent compte des profonds changements qui surviennent dans l’univers de ce que les Canadiens appellent la télévision. Les créateurs canadiens sont prêts à relever ces défis.
  15. Parmi le vaste contenu offert sur toutes sortes de plateformes, la programmation canadienne ne devra pas se contenter d’être visible, mais devra aussi être choisie. Cela exigera des efforts concertés de chacun des éléments du système, de la production à la distribution. Dans un tel environnement, la programmation canadienne devra de plus en plus s’affranchir des soutiens réglementaires tels les quotas relatifs au contenu.
  16. Notre système canadien de télévision a déjà fait ses preuves :
    • il est en mesure de créer une programmation desservant tous les Canadiens, y compris les anglophones, les francophones et les Canadiens dont la langue principale est une langue tierce, et qui attire souvent des auditoires internationaux;
    • il peut créer de la programmation qui sert les besoins des communautés autochtones et ethnoculturelles Canadiennes ainsi que ceux des Canadiens qui vivent avec un handicap;
    • il est en mesure d’offrir du contenu sur une multiplicité de plateformes, partout au pays, par satellite, par câble, par Internet, sur les appareils fixes ou mobiles;
    • il est ouvert au meilleur contenu provenant du monde entier;
    • il compte du personnel de création et technique ainsi que des installations de production de classe mondiale.
  17. Le système canadien de télévision offre de la programmation qui attire des millions de téléspectateurs canadiens sur une variété de plateformes. Cette programmation est acheminée par des systèmes de distribution robustes et bien développés, ce qui en garantit l’accessibilité aux Canadiens de toutes les régions. Le Canada jouit d’une industrie florissante qui offre une grande variété de programmation dans plusieurs langues et dans un large éventail de genres, des dramatiques aux émissions de musique, en passant par les émissions de sport, de nouvelles et les documentaires. Cette programmation est créée dans plusieurs régions de l’ensemble du pays. La programmation canadienne de langue française, télévisuelle ou cinématographique, connaît un grand succès et profite d’un système de vedettariat bien développé ainsi que d’auditoires très impliqués. Bien que les émissions canadiennes de langue anglaise ne bénéficient pas toutes des mêmes avantages, leur auditoire est solide et en croissance. De plus, un grand nombre d’émissions canadiennes de langue anglaise populaires attirent de larges auditoires canadiens et étrangers.
  18. De même, le Canada a développé des services de vidéo en ligne qui sont une vitrine pour la créativité canadienne. Par exemple :
    • ONF.ca offre gratuitement en ligne des documentaires, des films d’animation et des histoires interactives. En 2009, l’Office national du film a lancé son espace de visionnement en ligne qui présente des titres tant en anglais qu’en français. Depuis, on compte plus de 57 millions de visionnements des 2 000 films, extraits, bandes-annonces et œuvres interactives offerts sur le site.
    • Tou.tv, un site web de langue française de télévision sur demande créé par la SRC, regroupe 20 producteurs et radiodiffuseurs nationaux et internationaux. Il offre une panoplie d’émissions de télévision, de séries, d’émissions de variétés, de documentaires et de magazines d’actualités.
    • Club Illico est le service de vidéo en ligne Vidéotron offert à tous les Canadiens. Lancé en 2013, il compte maintenant plus de 111 000 abonnés.
  19. Un autre succès canadien est Éléphant, un projet sans but lucratif consacré au patrimoine cinématographique québécois et à rendre ce dernier disponible sur de nouvelles plateformes. Depuis 2008, Éléphant a remasterisé numériquement plus de 200 films et répondu à plus de 250 000 commandes, sur diverses plateformes, ce qui représente environ un demi-million de téléspectateurs.
  20. Ces forces constituent les assises de l’ultime succès du futur système canadien de télévision. Une fois ces forces réunies, l’industrie de la télévision canadienne sera bien placée pour faire concurrence ici et partout dans le monde sur multiples plateformes.
  21. Les marchés de langue anglaise et de langue française doivent relever des défis importants qui influencent la capacité du système canadien de radiodiffusion de respecter les objectifs fixés par la Loi, d’où la nécessité d’une intervention réglementaire :
    • En général, beaucoup de Canadiens de langue anglaise choisissent de regarder de la programmation américaine, sauf par exemple les émissions de nouvelles ou de sport. Il est moins coûteux d’acheter des émissions américaines (qui ont déjà recouvré leurs coûts dans leur propre marché) que de produire de la programmation canadienne. En outre, la programmation canadienne rapporte moins aux radiodiffuseurs canadiens que la programmation américaine. Sans une intervention réglementaire, les forces du marché tendent donc à inciter les radiodiffuseurs privés canadiens de langue anglaise à acheter et à présenter de la programmation américaine. Ces émissions profitent aussi de la puissance de promotion d’Hollywood et de son système de vedettariat bien établi, ces deux éléments étant par comparaison plutôt faibles au Canada anglais. D’un autre côté, la programmation canadienne de langue anglaise jouit d’un succès international grâce aux ventes à l’exportation.
    • Alors que les Canadiens de langue française préfèrent la programmation canadienne dans leur langue, l’offre ne suffit pas à la demande. En effet, le marché de langue française du Canada est de petite taille et peine à soutenir une industrie de production autonome. De plus, les ventes à l’étranger représentent un défi. Cependant, la programmation canadienne de langue française profite d’une promotion domestique et d’un système de vedettariat.
  22. Comme voisins d’un des plus grands producteurs culturels au monde, les Canadiens sont depuis longtemps conscients de la globalisation et des façons dont les changements technologiques en matière de communications peuvent vraisemblablement menacer l’identité nationale et la capacité de se développer comme producteurs culturels à part entière.
  23. Plutôt que de priver les Canadiens du contenu provenant d’un autre pays et d’utiliser la technologie pour mettre en place un système canadien de radiodiffusion fermé, le Conseil a choisi une autre voie : il a développé une réglementation qui permet aux Canadiens de profiter d’un contenu étranger, tout en bâtissant une industrie domestique capable de donner place à la créativité, aux histoires et aux perspectives canadiennes.
  24. Cette approche a créé un système qui fait l’envie du monde entier, un système qui demeure ouvert à la programmation et aux services étrangers, tout en garantissant une place à l’expression canadienne. Il s’agit d’une approche gagnante et elle constitue une base solide sur laquelle on peut construire.
  25. Pendant des décennies, le système canadien de radiodiffusion était relativement fermé et permettait de limiter le nombre d’émissions étrangères en vue de créer une demande pour des émissions canadiennes, et ce, au moyen de quotas de présentation. Aujourd’hui, avec l’arrivée des nouvelles plateformes à large bande, le nombre d’émissions étrangères disponibles est vraisemblablement illimité. Cette situation a rendu difficile le maintien du système de quotas en vue de créer une demande domestique d’émissions canadiennes. En outre, la demande domestique ne suffit plus à assurer le succès continu de l’industrie de la production qui fait face à des offres de contenu provenant du monde entier. Afin de s’adapter à cette nouvelle configuration de l’offre et de la demande, la programmation canadienne doit chercher des solutions et développer des auditoires internationaux.
  26. Dans le passé, avec le soutien des différentes institutions culturelles, des politiques et des impôts payés par les contribuables, les créateurs canadiens ont pu relever un grand nombre de défis et profiter de multiples occasions découlant de la proximité du Canada avec les États-Unis. Grâce à cette expérience, nous sommes très bien en mesure d’affronter un avenir dans lequel les technologies de communications nous rapprocheront du reste du monde et de ses offres illimitées de produits culturels. Dans ce nouveau monde, la production culturelle des Canadiens doit s’illustrer.
  27. Le Conseil croit qu’un cadre performant à l’égard de la programmation canadienne doit réaliser les objectifs suivants :
    • les Canadiens seront en mesure de profiter et de regarder des émissions canadiennes captivantes qui reflètent une diversité de points de vue sur une variété de plateformes;
    • les radiodiffuseurs seront incités à investir dans du contenu captivant fait par et pour des Canadiens, qui générera des revenus, lesquels seront à leur tour réinvestis dans la création de contenu;
    • les radiodiffuseurs seront davantage en mesure de répondre aux consommateurs et d’adopter des stratégies créatives de programmation;
    • les obstacles à l’entrée dans le marché, à l’adaptation de la programmation et à la concurrence domestique seront supprimés;
    • la diversité de la programmation sera, dans la mesure du possible, contrôlée par les forces du marché;
    • le contenu télévisuel sera encore plus accessible à tous les Canadiens;
    • le cadre réglementaire sera simplifié et allégé sur le plan administratif.
  28. En ce qui a trait à la dualité linguistique, en vertu des articles 3(1)d)(iii) de la Loi, le Conseil doit veiller à ce que le système canadien de radiodiffusion réponde aux intérêts et besoins des Canadiens, reflète leur condition et leurs aspirations. Il doit aussi, en vertu de l’article 3(1)k) de la Loi, veiller à ce qu’une gamme de services de radiodiffusion en français et en anglais soit progressivement offerte à tous les Canadiens, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens. De plus, à titre d’institution fédérale, le Conseil a, en vertu de l’article 41 de la Loi sur les langues officielles, le devoir de faire en sorte que soit prises des mesures positives afin de favoriser l’épanouissement des minorités francophones et anglophones du Canada et d’appuyer leur développement, ainsi que de promouvoir la pleine reconnaissance et l’usage du français et de l’anglais dans la société canadienne.
  29. L’article 3(1)c) de la Loi indique également que les radiodiffusions de langues française et anglaise, malgré certains points communs, diffèrent quant à leurs conditions d’exploitation et, éventuellement, quant à leurs besoins. À ce titre, lorsqu’il prend des décisions, le Conseil doit tenir compte des conditions et des besoins des deux marchés linguistiques, y compris des minorités de l’une ou l’autre langue.
  30. Dans les sections suivantes, le Conseil annonce des mesures visant à faciliter la voie de la transition vers un nouvel environnement de plus en plus sur demande et à y jouer un rôle de premier plan. Certaines de ces mesures répondent à la nécessité d’adopter de nouvelles approches, particulièrement en vue de garantir que la programmation canadienne soit largement accessible et visible, de supprimer les obstacles auxquels se butent les sociétés canadiennes afin de leur permettre de faire une concurrence efficace dans un milieu d’émissions sur demande, ainsi que de soutenir la création et la promotion d’émissions canadiennes grâce à des modèles et à des outils de financement appropriés. D’autres mesures visent la poursuite des efforts en vue de passer des quotas de présentation (nombre d’heures de diffusion de programmation canadienne) à une approche basée sur les dépenses (sommes à consacrer à la programmation canadienne) afin de mettre l’accent sur la qualité de la programmation canadienne plutôt que sur sa quantité; d’autres encore visent à offrir un soutien réglementaire à certains types de programmation considérés comme d’intérêt public, mais seulement lorsque le marché aura échoué à la tâche. Finalement, le Conseil adopte plusieurs mesures visant à simplifier et à alléger le processus d’attribution des licences afin de réduire le fardeau réglementaire.

A. Paver la voie aux approches innovatrices

Favoriser la promotion et la découverte de la programmation canadienne

Objectifs visés
Historique
  1. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a déclaré qu’il était prêt à envisager différentes mesures afin d’inciter la promotion des émissions canadiennes afin que les Canadiens puissent découvrir ces émissions.
  2. Dans l’environnement actuel où le contenu sur demande est en expansion, les téléspectateurs ont plus de contrôle sur ce qu’ils regardent et quand ils le font. Aujourd’hui, plus que jamais, ils ont accès à du contenu de sources nationales et internationales. La manière dont les téléspectateurs trouvent ce qu’ils veulent regarder est en constante évolution.
  3. En raison de la taille des bibliothèques de contenu sur demande, diverses méthodes sont présentement utilisées pour promouvoir ou suggérer du contenu aux téléspectateurs. Les services peuvent utiliser des algorithmes pour suggérer du contenu pouvant être d’intérêt pour leurs téléspectateurs en fonction de leurs préférences passées. D’autres services peuvent choisir de jouer un rôle plus éditorial afin de mettre en valeur certaines œuvres.
  4. Dans cet environnement, la manière dont la programmation canadienne est découverte et promue sera essentielle à son succès.
  5. La découverte représente davantage un défi au pays pour la programmation canadienne de langue anglaise que pour la programmation canadienne de langue française. Toutefois, en raison de la grande variété de contenu disponible sur diverses plateformes, la découverte représente un défi à l’étranger tant pour la programmation canadienne de langue anglaise que de langue française. Le défi est encore plus grand pour les radiodiffuseurs indépendants, lesquels ne jouissent pas de l’auditoire et du profil des sociétés intégrées verticalement. Dans les deux cas, la promotion est essentielle pour découvrir la programmation canadienne et y accéder.
Positions des parties
  1. Dans le marché de langue française, des parties comme l’Union des artistes (UDA), la Société des auteurs de radio, télévision et cinéma (SARTEC) et l’Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec (ARRQ) ont exprimé l’avis général que la tâche de promouvoir la programmation canadienne revenait aux radiodiffuseurs. Ils notent que le problème était inexistant dans le marché de langue française où les émissions font déjà l’objet de promotion.
  2. En général, les parties du marché de langue anglaise estimaient la découverte de la programmation canadienne encore plus importante compte tenu des changements technologiques et des nouvelles habitudes de consommation. Elles appuyaient la proposition du Conseil d’envisager des mesures incitatives en vue de promouvoir la programmation canadienne.
  3. Tant Irene Berkowitz de l’Université Ryerson qu’Entertainment One (eOne) ont discuté de l’importance de refaire l’image de marque du Canada en tant qu’exportateur de succès mondiaux et d’établir sa réputation comme pays créateur. Selon eux, le Canada est présentement surtout perçu comme un pays offrant de solides équipes de production et de bons incitatifs financiers, mais sans aucun réel succès mondial à son actif. À l’audience, eOne a déclaré être favorable à l’idée de participer à une table ronde, de partager ses données et de discuter d’études de cas avec les parties prenantes de l’industrie afin d’alimenter le débat. Dans sa dernière intervention, Mme Berkowitz a indiqué qu’après avoir discuté avec eOne à la suite de l’audience, ensemble, ils soutiendraient ensemble la formation d’un groupe de travail en vue d’élaborer des stratégies pour réaliser l’objectif de produire des succès mondiaux.
  4. Le ministre du Tourisme, de la Culture et du Sport de l’Ontario, ainsi que des groupes de création, y compris l’Alliance of Canadian Cinema, Television and Radio Artists (ACTRA), la Guilde canadienne des réalisateurs (la Guilde des réalisateurs) et la Writers Guild of Canada (Writers Guild), soutenaient l’idée d’admettre les dépenses de promotion dans le calcul des exigences des dépenses en émissions canadiennes (DÉC) imposées aux services de programmation, du moment que ces dépenses seraient additionnelles et non soustraites de la part qui revient à la production. D’un autre côté, les sociétés intégrées verticalement étaient favorables à ce que la promotion soit une dépense admissible, mais n’étaient pas d’accord si cela signifiait une augmentation des exigences en DÉC. Rogers a suggéré que le Conseil réduise l’incidence d’une telle mesure en limitant ces dépenses aux émissions diffusées seulement aux heures de grande écoute (19 h à 23 h).
  5. En ce qui concerne une proposition à l’effet que les dépenses à l’égard de la promotion de la programmation comptent aux fins des DÉC, Bell a proposé que seuls les coûts de promotion des tierces parties (c.-à-d. des parties non affiliées au producteur ou au diffuseur d’une émission) soient admissibles au titre des DÉC, et ce, jusqu’à un maximum de 10 % des dépenses admissibles au titre de la programmation canadienne. Corus a soutenu cette proposition, alors que la CMPA a fait valoir que ce pourcentage était trop élevé parce qu’il équivaudrait presque au pourcentage de DÉC alloué aux émissions d’intérêt national.
  6. Shaw a indiqué que son budget pour la promotion des tierces parties était mince et comprenait les panneaux d’affichage, les affiches dans le métro et autres outils destinés à attirer l’attention des téléspectateurs sur une émission particulière.
  7. Le FMC a déclaré financer une liste précise de dépenses en promotion admissibles et que cette liste lui permet actuellement de consacrer beaucoup plus de dépenses en promotion que jamais dans les budgets des projets qu’il finance. Ce changement a pour but d’encourager les activités promotionnelles comme les campagnes de médias sociaux liées aux émissions de télévision et à leurs éléments numériques. Le FMC a ajouté qu’il élargissait sa définition de ce qu’il considère comme une dépense de promotion admissible.
  8. Des parties ont critiqué la manière dont les disponibilités localesNote de bas de page 5 sont actuellement utilisées. Pelmorex a proposé que, sur une base juste et équitable, au moins 50 % des disponibilités de publicité sur les services étrangers soient offertes aux services de programmation de télévision autorisés indépendants, et ce, sans frais. Cette proposition a reçu l’appui de la SRC. Anthem Media et Blue Ant Media ont indiqué voir dans les disponibilités locales une occasion importante de promouvoir leurs services. Pelmorex a aussi fait des propositions relatives à un canal d’autopublicité et à un guide électronique d’émissions dans lesquels au moins 50 % du temps d’antenne serait offert gratuitement aux services indépendants de programmation. Dans son intervention, Téléfilm Canada a suggéré un fonds afin de promouvoir les longs métrages canadiens.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Dans le passé, les télédiffuseurs étaient les seuls à déterminer quelles émissions devaient être diffusées à quel moment. Ils étaient les intermédiaires principaux entre les créateurs de contenu et les téléspectateurs. La technologie et l’émergence de nouvelles plateformes à large bande ont mis au défi ces relations. Dans cet environnement en évolution, les créateurs devront trouver de nouvelles approches innovatrices afin d’établir une relation avec les auditoires.
  2. Le Conseil reconnaît que dans le marché de télévision de langue française, la présence d’un système de vedettariat sain fait en sorte que la promotion, d’un point de vue réglementaire, n’est pas réellement un enjeu au Canada. Pour ce qui est de la programmation de langues anglaise et française, le Conseil estime que davantage de promotion des émissions canadiennes en améliorera la découverte et fera en sorte que les téléspectateurs canadiens et étrangers les découvriront, ce qui en retour entraînera une augmentation de l’auditoire, des revenus et des investissements projetés.
Sommet sur la découverte
  1. Le Conseil est d’avis que la découverte est désormais essentielle au succès de la programmation canadienne. L’environnement qui passe de services de programmation linéaires et assemblés vers une expérience télévisuelle sur demande et personnalisée change comment les téléspectateurs trouvent et découvrent des émissions canadiennes. La manière dont l’industrie adapte ses efforts promotionnels dans ce nouvel environnement dictera ultimement le succès de la programmation canadienne, tant au pays qu’à l’étranger.
  2. Plusieurs parties dans les marchés de langues anglaise et française ont reconnu l’importance de la promotion et de la découverte, mais peu de propositions concrètes ont été mises de l’avant pour répondre à ce besoin. Par conséquent, le Conseil, à titre d’institution fédérale chargée de réglementer et de surveiller les questions relatives à la radiodiffusion au Canada, convoquera un sommet sur la découverte afin de convier les parties intéressées à une discussion sur les pratiques exemplaires à adopter à l’avenir en cette matière. Le Conseil invitera un groupe varié de participants dont le gouvernement et les parties intéressées de l’industrie à travailler de concert en vue de développer des stratégies et des mesures pour améliorer la découverte des émissions canadiennes.
  3. Ce sommet aura lieu à l’automne 2015.
Inclusion des dépenses en promotion provenant de tierces parties dans les exigences au titre des dépenses en émissions canadiennes
  1. Présentement, les dépenses de promotion, y compris celles des tierces parties, ne sont généralement pas comptabilisées au titre des exigences de DÉC imposées aux services de programmation. Le Conseil croit que les sociétés intégrées verticalement ont déjà de nombreuses occasions de faire de la publicité croisée pour la programmation sur leurs divers services et plateformes. L’importance des budgets des services de programmation détenus ou contrôlés par les sociétés intégrées verticalement leur permet de faire une promotion plus importante et à plus grande échelle que celle à la portée des services de programmation indépendants.
  2. Les sociétés intégrées verticalement jouissent aussi de synergies considérables en ce qui concerne la promotion de leurs émissions canadiennes sur leurs propres services et ont très peu besoin d’en faire la publicité croisée sur d’autres services de programmation.
  3. De plus, les sociétés intégrées verticalement reçoivent davantage de fonds du FMC que les services de programmation indépendants. Ceci est dû à la fois au nombre et à l’importance des productions qu’elles entreprennent, ainsi qu’au fait qu’elles ont des auditoires dans l’ensemble plus importants pour l’ensemble de leur programmation et sont donc en mesure de mieux répondre aux critères de performance du FMC.
  4. Au cours de l’audience, le Conseil a très souvent entendu des propos sur l’importance de la promotion, particulièrement sur le problème de la découverte des services de programmation indépendants, lesquels ne bénéficient pas des avantages susmentionnés.
  5. Compte tenu de ce qui précède, et compte tenu des conclusions du Conseil à l’égard des exigences au titre des DÉC, énoncées dans une section ci-dessous, le Conseil estime approprié d’adopter certaines mesures relatives à la promotion des tierces parties pour ce qui est des services de programmation indépendants. Plus précisément, à compter d’aujourd’hui, le Conseil permet aux services de programmation indépendants (c.-à-d. tous les services de programmation non affiliés à une société intégrée verticalement) de tenir compte des dépenses de promotion des tierces parties pour les émissions canadiennes dans le calcul de leurs DÉC, et ce, jusqu’à un maximum de 10 % de leurs DÉC. Les dépenses admissibles comprendront toute somme versée à un autre radiodiffuseur en échange de temps de promotion payé. De plus, le Conseil adopte la liste des dépenses de promotion admissibles du FMC à titre de dépenses admissibles en vertu de la présente politique, pourvu que les versements soient faits à des parties non affiliées au radiodiffuseur ou au producteur de l’émission. Toute autre dépense non reliée à celles mentionnées dans la liste est inadmissible.
Utilisation des disponibilités locales pour promouvoir les émissions canadiennes
  1. Les disponibilités locales sont des périodes de publicité (généralement deux minutes par heure) des services spécialisés non canadiens qui servent à faire la promotion des services de programmation canadiens ou d’autres services offerts par les EDR. Présentement, les EDR sont autorisées à utiliser les disponibilités locales conformément à l’autorisation générale énoncée dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2011-522. Cette autorisation prévoit ce qui suit :
    • Au moins 75 % des disponibilités locales doivent être mises à la disposition - selon les principes du « premier arrivé, premier servi » et de la récupération des coûts - des services de programmation canadiens autorisés pour la promotion de leurs services respectifs, pour la promotion du canal communautaire et pour la diffusion de messages d’intérêt public canadiens non payés. Ces promotions peuvent concerner des services de programmation liés à une EDR (y compris des services de radio).
    • Au plus 25 % des disponibilités locales peuvent servir à fournir aux abonnés des EDR des informations sur le service à la clientèle et les réalignements de canaux, ou à promouvoir des services et des blocs de services de programmation facultatifs, le service FM au câble, les prises de câble supplémentaires et des services hors programmation, dont les services téléphoniques et par Internet.
  2. Il est interdit aux EDR de vendre et d’insérer de la publicité commerciale dans les disponibilités locales.
  3. Même si à long terme les disponibilités locales perdront graduellement de l’importance, elles continuent à représenter pour l’instant un moyen utile de promotion de la programmation canadienne. En tenant compte de ce fait et de diverses craintes soulevées par des intervenants, le Conseil décide de conserver sa politique existante sur l’utilisation des disponibilités locales, sous réserve de quelques changements.
  4. Les disponibilités locales fournissent présentement une plateforme promotionnelle à une multitude de services de programmation canadiens de même qu’à des services offerts par les EDR. Le Conseil est d’avis que ces disponibilités devraient servir à promouvoir les émissions de télévision canadiennes originales en particulier plutôt que les services de programmation ou les annonceurs et commanditaires commerciaux en général. De plus, afin de s’assurer que ces périodes soient utilisées de façon efficace, le temps consacré aux émissions canadiennes sera calculé en fonction de la journée de radiodiffusion. Par conséquent, le Conseil modifiera l’autorisation relative à l’utilisation des disponibilités locales des services non canadiens comme suit :

    Au cours de chaque journée de radiodiffusion, au moins 75 % des disponibilités locales doivent être mises à la disposition des services de programmation canadiens autorisés, de manière équitable et selon le principe de la récupération des coûts, pour la promotion d’émissions canadiennes originales de première diffusion.

  5. Les EDR pourront continuer à utiliser les 25 % restants des disponibilités locales afin de promouvoir leurs services de radiodiffusion et de télécommunications, comme prévu dans l’autorisation existante.
  6. Le Conseil fera des vérifications, de façon aléatoire et en réponse à des plaintes reçues, pour vérifier la conformité et prévenir les abus. Dans le cadre de ces vérifications, le Conseil examinera les frais que les EDR exigent des services de programmation pour la promotion de leurs émissions afin de s’assurer que ces frais ne dépassent pas la récupération des coûts normaux d’une insertion de promotion. Il évaluera également si les messages promotionnels sont utilisés de façon inappropriée pour promouvoir des commanditaires.
  7. La politique réglementaire énonçant les autorisations générales relatives aux EDR sera modifiée en conséquence.

Équité réglementaire pour les services de vidéo sur demande

Objectifs visés
Historique
  1. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a déclaré qu’il était prêt à envisager diverses mesures incitatives et autres pour garantir la présence d’émissions canadiennes captivantes sur de multiples plateformes. Le document de travail proposait ce qui suit :
    • La définition de revenus de radiodiffusion pour les titulaires est modifiée pour y inclure les revenus provenant des émissions offertes en ligne et sur d’autres plateformes exemptées.
    • Les radiodiffuseurs auront l’autorisation de comptabiliser, au titre de leurs dépenses en émissions canadiennes, leurs dépenses relatives à des émissions originales diffusées exclusivement en ligne.
  2. L’intention du Conseil était de savoir si les nouveaux mécanismes proposés encourageraient les radiodiffuseurs à mettre à la disposition des Canadiens davantage de contenu canadien en ligne, et ce, afin de répondre à l’appétit grandissant des Canadiens à l’égard du contenu audiovisuel disponible sur demande. De façon générale, les Canadiens peuvent accéder à du contenu sur demande sur deux types de services de VSD :
    1. les services de VSD rattachés à une EDR : il s’agit des services de VSD qu’offrent plusieurs EDR à leurs abonnés. Ils peuvent inclure l’accès sur demande aux émissions diffusées par divers services de télévision, des films à la pièce et autre contenu, de même que du contenu gratuit. Ces services sont exploités en vertu d’une licence de VSD ou, en ce qui concerne les services exploités par des EDR ayant moins d’abonnés, en vertu d’une ordonnance d’exemption (ordonnance de radiodiffusion 2011-60).
    2. les services vidéo en ligne : bien qu’ils se présentent sous divers modèles d’affaires, ces services sont souvent vendus par abonnement en forfait de programmation. Dans certains cas, ils ne sont offerts qu’aux téléspectateurs déjà abonnés à un service d’EDR (appelés ici services avec authentification). Ces services canadiens ou non canadiens peuvent être exploités à titre d’entreprises exemptées en vertu de l’ordonnance d’exemption des médias numériques (l’OEMN) (ordonnance de radiodiffusion 2012-409) pourvu qu’ils soient totalement accessibles et distribués par Internet ou sur un service mobile.
  3. Comme l’énonce la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-444, les services de VSD autorisés sont tenus de contribuer à la programmation canadienne de la façon suivante :
    • la totalité des revenus provenant de la diffusion de longs métrages canadiens doit être versée aux détenteurs canadiens de droits à moins d’entente contraire;
    • au moins 5 % des longs métrages de langue anglaise de leur inventaire mis à la disposition des abonnés doivent être des films canadiens;
    • au moins 8 % des longs métrages de langue française de leur inventaire mis à la disposition des abonnés doivent être des films canadiens;
    • au moins 20 % de la programmation autre que les longs métrages de leur inventaire mis à la disposition des abonnés doit être d’origine canadienne;
    • leur inventaire de longs métrages doit comprendre tous les nouveaux longs métrages canadiens;
    • au moins 25 % des titres faisant l’objet d’une promotion au cours de chaque mois sur leur canal d’autopublicité doivent être des titres canadiens;
    • ils doivent consacrer 5 % de leurs revenus annuels bruts à un fonds de production de programmation canadienne administré indépendamment de leur entreprise.
  4. De plus, il est interdit aux services de VSD autorisés d’offrir par abonnement de la programmation qui concurrence un service payant ou spécialisé dont le genre bénéficie d’une protection (soit un service de catégorie A).
  5. Les services vidéo en ligne exploités en vertu de l’OEMN ne sont assujettis à aucune des exigences susmentionnées.
Exclusivité
  1. Historiquement, les services de programmation comme les stations de télévision traditionnelle et les services spécialisés acquièrent les droits exclusifs leur permettant de diffuser des émissions. Ainsi, un service de programmation donné peut être le seul à diffuser une émission ou une série particulière. Le Conseil a cependant toujours exigé que les services de programmation soient mis à la disposition de toutes les EDR et ne soient pas exclusifs à une EDR particulière. De cette manière, la plupart des Canadiens ont accès aux émissions dont les droits ont été achetés sur une base exclusive.
  2. La majorité des services de VSD sont liés à une EDR particulière exploitée dans une région donnée et ne sont disponibles que par abonnement et sur la plateforme technologique utilisée. Ainsi, ces services de VSD ont des obligations particulières semblables à celles des services de programmation, mais sont assujettis à des restrictions semblables à celles imposées aux EDR. Par exemple, le Conseil interdit aux services de VSD de détenir du contenu exclusif. Cette règle vise à éviter que les consommateurs soient obligés de s’abonner à une EDR spécifique pour avoir accès à de la programmation exclusive.
  3. Dans l’OEMN, le Conseil a appliqué une approche un peu différente sur le contenu exclusif, selon la façon d’y accéder. Plus précisément, l’OEMN interdit aux services d’offrir un accès exclusif à de la programmation conçue principalement pour la télévision lorsque l’accès à cette programmation est limité en fonction de l’abonnement du consommateur à un fournisseur particulier de service mobile ou Internet. L’exclusivité du contenu est donc permise pourvu que ce contenu soit accessible par les abonnés de plus d’un fournisseur de service mobile ou Internet.
  4. Par exemple, une émission conçue pour la télévision ne peut être offerte exclusivement par un service comme Global Go si elle est seulement disponible sur la plateforme du service Shaw Internet. Toutefois, elle peut être offerte en exclusivité par Global Go si on peut y avoir accès par d’autres fournisseurs de service Internet au Canada. Les exclusivités sont également permises aux entreprises exemptées lorsque le contenu a été conçu spécifiquement pour la consommation en ligne ou mobile, que le service dépende ou non d’un abonnement à un fournisseur particulier de service mobile ou Internet.
Positions des parties
  1. Plusieurs intervenants ont soumis des observations à l’égard des asymétries réglementaires perçues entre les services autorisés et les services exemptés. Certaines parties, surtout les représentants du secteur de la création, ont recommandé que le Conseil applique une symétrie réglementaire en imposant des obligations aux services vidéo en ligne exemptés tant domestiques qu’étrangers.
  2. De façon générale, les sociétés intégrées verticalement s’opposaient à toute mesure qui les désavantagerait encore plus sur le plan de la concurrence par rapport aux services vidéo en ligne étrangers. Shaw, par exemple, craignait une augmentation des asymétries réglementaires existantes entre les services autorisés et les fournisseurs de services vidéo en ligne exemptés, point de vue partagé par Bell.
  3. Adoptant une approche différente, Rogers a indiqué que la meilleure façon de veiller à ce que les titulaires contribuent à la production de programmation canadienne distribuée sur des plateformes numériques était de faire en sorte qu’ils puissent faire concurrence aux services vidéo en ligne étrangers sur un pied d’égalité. Rogers a noté que permettre à l’industrie canadienne de la radiodiffusion de développer de nouvelles offres en ligne garantira que ces offres comportent du contenu canadien :

    [traduction] Le contenu canadien sera notre marque distinctive. Au fur et à mesure de la croissance de nos services [vidéo en ligne], du nouveau contenu canadien sera créé pour être distribué tant sur la plateforme linéaire traditionnelle que sur de nouvelles plateformes numériques. Les radiodiffuseurs canadiens seront ainsi incités à rendre leurs offres en ligne distinctes en développant un contenu distinct capable d’attirer des auditoires vers cette plateforme.
  4. Québecor a allégué qu’interdire des exclusivités sur les services de VSD rattachés à une EDR nuit à la capacité de son service, Club Illico, de faire concurrence aux services vidéo en ligne étrangers. Selon Québecor, la protection des genres constitue aussi un obstacle; c.-à-d. qu’il ne peut acquérir du contenu exclusif qui lui permettrait de faire concurrence au service de films Super Écran. En outre, Québecor a fait valoir que le consommateur voit de moins en moins de différence entre les services traditionnels et les services de VSD en ligne, d’où sa propre approche sur les services sur demande sur multiplateformes. Québecor a déclaré qu’il s’agit en partie d’une stratégie pour conserver les abonnés à l’EDR. Il a demandé au Conseil d’éliminer l’interdiction faite aux services de VSD et à toutes les autres plateformes (en ligne ou mobile) en ce qui concerne le contenu exclusif, ainsi que celle à l’égard de la publicité sur les services de VSD.
  5. Toujours au sujet de l’exclusivité interdite aux services de VSD rattachés à une EDR, Lemay-Yates Associates Inc. a déclaré à l’audience que la présente interdiction n’incite en rien à investir dans la programmation, à acquérir les droits sur de la programmation, à utiliser ces droits pour vendre à l’étranger.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Le Conseil est d’avis qu’il ne conviendrait pas de réviser pour le moment la définition de revenus de radiodiffusion pour permettre aux titulaires d’inclure les revenus provenant des émissions offertes en ligne et sur d’autres plateformes exemptées. Une telle révision pourrait étouffer l’innovation et nuire à la capacité des titulaires d’offrir de la nouvelle programmation uniquement disponible en ligne qui concurrencerait les services vidéo en ligne. Le Conseil estime que l’industrie devrait avoir la possibilité de développer davantage ces plateformes, et ce, sans exiger de contributions de ces services pour l’instant.
  2. À cet égard, le Conseil réitère son avis que l’attribution de licences aux entreprises de radiodiffusion de médias numériques n’est généralement pas nécessaire pour atteindre les objectifs de la politique de radiodiffusion énoncés dans la Loi. Pour l’instant, l’exemption de ces services favorisera la croissance continue et le développement des industries de médias numériques au Canada, ce qui, en retour, contribue à l’atteinte des objectifs de la politique en radiodiffusion.
  3. Le Conseil ne procédera donc pas à un examen général de l’OEMN pour l’instant. Toutefois, il élargira la portée de son ordonnance d’exemption pour les services de VSD.
  4. Les services de VSD, tant traditionnels qu’en ligne, font de plus en plus face à une concurrence directe des services vidéo en ligne étrangers, une tendance qui devrait se poursuivre. Le Conseil s’attend à ce que les auditoires des services sur demande continuent d’augmenter, alors que les Canadiens exercent davantage de contrôle sur leur expérience télévisuelle.
  5. Tel que susmentionné, les services vidéo en ligne sont exploités à titre d’entreprises exemptées en vertu de l’OEMN, alors que les services de VSD canadiens associés aux plateformes des EDR sont généralement exploités conformément à une série d’exigences réglementaires qui ne s’appliquent pas aux services vidéo en ligne.
  6. Les articles 3(1)k) et 3(1)s) de la Loi prévoient comme objectifs qu’une gamme de services de radiodiffusion devrait être progressivement offerte à tous les Canadiens et que les réseaux et les entreprises de programmation privés devraient demeurer réceptifs à l’évolution de la demande du public.
  7. Comme les Canadiens continuent à rechercher des émissions sur demande, les services de VSD, et surtout les services vidéo en ligne, sont appelés à devenir d’importantes sources de contenu de vidéo canadien et autres. Cependant, plusieurs de ces services sont très récents et leurs modèles d’affaires ainsi que les différentes façons dont ils sont offerts continueront d’évoluer. En reconnaissant ces faits, le Conseil estime important de continuer à respecter les objectifs de la Loi dans le nouvel environnement qui nous attend. Pour ce faire, il faut s’assurer que :
    • les Canadiens de toutes les régions du pays aient accès à la programmation sur demande, y compris à la programmation canadienne originale, que ce soit par les EDR traditionnelles ou en ligne.
    • les services de VSD soient en mesure de faire concurrence aux services vidéo en ligne sur un pied d’égalité réglementaire ;
    • les règles et les attentes qui s’appliqueront à chaque service soient claires.
  8. Tel qu’indiqué ci-dessus, il existe présentement deux méthodes autorisées pour offrir des services de VSD :
    1. les services rattachés à une EDR, offerts en vertu d’une licence de VSD ou d’une ordonnance d’exemption relative aux services de VSD;
    2. les services vidéo en ligne offerts en vertu de l’OEMN.
  9. Les services rattachés à une EDR sont exploités en vertu de règles claires, dont le cadre réglementaire des entreprises de VSD établi dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-190 et les exigences normalisées pour les services de VSD énoncées dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-444. Ils doivent également se conformer aux conditions de leur licence ou, dans le cas des services de VSD exemptés, aux conditions énoncées dans leur ordonnance d’exemption. De même, il existe des règles différentes, mais tout aussi claires, qui s’appliquent aux services vidéo en ligne, en vertu de l’OEMN.
  10. Cependant, compte tenu de l’arrivée de nouveaux services VSD et de l’évolution des modèles d’affaires, le Conseil est préoccupé par la possibilité qu’il ne soit pas clair quelles règles appliquer aux nouveaux services. À cet égard, la Loi précise clairement que pour être exploitée au Canada, une entreprise de radiodiffusion doit être autorisée par le Conseil, soit en vertu d’une licence, soit en vertu d’une ordonnance d’exemption. Les services doivent respecter toutes les modalités et conditions prévues dans cette autorisation. Les mêmes principes s’appliquent aux services de VSD, qu’ils soient exploités en vertu d’une licence ou d’une ordonnance d’exemption. Par conséquent, si un service de VSD est offert sur une plateforme fermée précise d’une EDR, il doit respecter toutes les exigences qui s’appliquent à une licence ou une ordonnance d’exemption de service de VSD. Afin d’être exploité selon les exigences réglementaires allégées prévues à l’OEMN, un service vidéo en ligne doit être pleinement accessible et distribué aux Canadiens (par InternetNote de bas de page 6). Alors qu’il est possible dans une certaine mesure d’exploiter un service en vertu des deux régimes, les différentes exigences réglementaires qui s’appliquent à chacun, particulièrement en ce qui concerne l’exclusivité, telle que décrite ci-dessus, rendraient impossible d’offrir un service identique à la fois sur Internet et sur la plateforme fermée d’une EDR.
  11. Compte tenu de la nature nouvelle et évolutive de plusieurs services de VSD, le Conseil estime approprié d’autoriser une troisième catégorie de services de VSD, basée sur une approche réglementaire hybride. Il autorisera ces services hybrides à être exploités avec la même souplesse dont bénéficient les services exploités en vertu de l’OEMN, sous réserve qu’ils respectent certaines conditions.
  12. Le Conseil modifiera ainsi la présente exemption relative aux services VSD et en élargira la portée pour y inclure les services de VSD hybrides à titre de nouvelle entreprise exemptée. Le Conseil estime que d’attribuer des licences à ces services ne contribuera pas de façon probante à l’atteinte de l’un des objectifs de politique énoncés à l’article 3(1) de la Loi, alors que les exempter contribuera à l’atteinte des articles 3(1)k) et 3(1)s) de la Loi.
  13. Ces services de VSD hybrides bénéficieront des mesures incitatives suivantes :
    • la possibilité d’offrir une programmation exclusive, de la même manière que les services exploités en vertu de l’OEMN;
    • la possibilité d’offrir leur service sur le réseau fermé d’une EDR, de la même manière que les services de VSD traditionnels, sans les exigences réglementaires qui s’appliquent normalement à ces derniers relativement aux contributions à la programmation canadienne et à la place de celle-ci dans l’inventaire.
  14. Cependant, afin d’être admissible à une exemption en vertu de l’ordonnance élargie, un service doit aussi être offert sur Internet à tous les Canadiens, sans exigence d’authentification d’un abonnement à une EDR.
  15. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2015-87, également publié aujourd’hui, le Conseil sollicite des observations sur le libellé des modifications à l’ordonnance d’exemption.
    Trois tableaux énumèrent les critères pour chacun des trois services. Le premier énumère les critères ci-après pour opérer sous l’Ordonnance d’exemption relative aux médias numériques : Exclusivités, disponible via Internet à tous les Canadiens, services canadiens et non-canadiens. Le deuxième énumère les critères ci-après des nouveaux services de vidéo sur demande hybride exemptés : Exclusivités, réseau ouvert et/ou fermé, service canadien, aussi disponible via Internet à tous les Canadiens. Le troisième énumère les critères ci-après pour services de Vidéo sur demande détenteur de licence : Réseau fermé, abonnement à un service de télé, service canadien, contributions financières pour productions canadiennes, exigences relatives au contenu.

Repenser les modèles de financement de la programmation canadienne

Objectif visé
Historique
  1. Tel que souligné dans une section précédente, le financement de la programmation canadienne est un modèle très complexe de soutien financier direct et indirect qui comprend les droits de licence des radiodiffuseurs canadiens, les crédits d’impôt des gouvernements provinciaux et fédéral, les fonds du FMC et de fonds indépendants, les prêts de capital de risque et les investissements de capitaux. Une partie de ce système se fonde également sur le fait que le Conseil exige certaines contributions financières indirectes au secteur de la création par l’intermédiaire du FMC ou d’autres fonds de production indépendants. Ces divers soutiens financiers sont essentiels au maintien d’un secteur de production canadien solide.
Positions des parties
  1. À l’audience publique, eOne a insisté sur l’importance du contrôle canadien de la distribution internationale de la programmation créée par des Canadiens, en partie par la création d’un secteur de production et de sociétés de distribution plus stables, de plus grande taille et mieux capitalisées.
  2. Il a également proposé d’examiner le système de points qui sert à qualifier de canadiennes certaines productions de prestige et à gros budgets, sous réserve que les droits de distribution internationale soient conservés par un exportateur de contenu mondial qui a fait ses preuves en matière d’investissements significatifs dans la programmation canadienne. Selon eOne, cela aiderait à retenir les créateurs canadiens de classe mondiale qui travaillent présentement aux États-Unis ou ailleurs et les inciterait à créer au Canada du contenu attrayant au plan international.
  3. De même, Mme Berkowitz a proposé de ramener les Canadiens d’Hollywood et de faire en sorte que la proximité du Canada avec les États-Unis passe d’un désavantage à un avantage concurrentiel en modifiant le système de points de sorte que les Canadiens ne soient plus obligés de résider au Canada. Selon elle, le concept des « histoires créées par des Canadiens » reprendrait la valeur des Canadiens expatriés qui travaillent à Hollywood et transformerait un « exode des cerveaux » en une « chaîne de cerveaux ». Elle a proposé un nouveau système de points qu’elle décrit dans son mémoire.
  4. Le fonds Shaw Rocket a fait un certain nombre de demandes pour réviser des aspects du cadre relatif aux FPIC afin de supprimer les obstacles perçus à l’optimisation de leur contribution au financement et au succès du contenu canadien.
  5. Bell a proposé d’augmenter le financement des productions canadiennes à gros budget, soit celles qui dépassent 1,75 million de dollars par épisode. Ainsi, 0,5 % des contributions des EDR serait redirigés vers un nouveau fonds, et des contributions seraient exigées de la part des services vidéo en ligne étrangers.
  6. Sur la question du financement de la création de contenu destiné à une diffusion exclusivement en ligne, le FMC a rappelé au Conseil qu’une grande partie de son financement provient du secteur réglementé de l’industrie, alors qu’aucune somme ne provient du « secteur émergent non réglementé ». Le FMC a donc proposé [traduction] « de mettre en place de nouvelles mesures incitatives, par exemple permettre aux nouveaux joueurs de contribuer au financement du FMC, ainsi que des mesures législatives et réglementaires afin de garantir une contribution proportionnelle de la part de ces nouveaux services. »
  7. Rogers, quant à lui, a allégué que les ententes commerciales sont contre-productives en ce qui concerne la création de contenu canadien. Les radiodiffuseurs sont assujettis à des limites à l’égard des sommes qu’ils peuvent récupérer des productions qu’ils aident à financer. Rogers a expliqué que les radiodiffuseurs hésitent à financer des idées et concepts canadiens créatifs et innovateurs mais non éprouvés, à moins qu’ils bénéficient d’incitatifs additionnels (p. ex. des périodes de licence prolongées et occasions de partager les profits et les revenus). Il presse le Conseil de réexaminer ses points de vue sur la valeur, la nécessité et l’efficacité des ententes commerciales dans l’industrie et lui demande aussi de cesser d’exiger des radiodiffuseurs qu’ils signent une telle entente à titre de condition de licence.
Analyse et décisions du Conseil
  1. L’article 3(1)d)(ii) de la Loi stipule que le système de radiodiffusion devrait favoriser l’épanouissement de l’expression canadienne en proposant une large gamme de programmation qui traduise des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadiennes, et en mettant en valeur une programmation de divertissement faisant appel à des artistes canadiens. De plus, l’article 3(1)f) de la Loi indique que toutes les entreprises de radiodiffusion devraient faire appel au maximum, et dans tous les cas au moins de manière prédominante, aux ressources - créatrices et autres - canadiennes pour la création et la présentation de leur programmation. De plus, comme l’indique l’article 3(1)m)(i) de la Loi, la SRC, à titre de radiodiffuseur public national du Canada, doit fournir de la programmation principalement et typiquement canadienne.
  2. Le Canada dispose d’une infrastructure stable d’appui gouvernemental et d’investissement privé, qui génère d’importantes possibilités de financement pour la programmation canadienne. Cependant, cette infrastructure comporte des obstacles qui entravent la création de certains types de production. Le Conseil estime que ce système de financement peut être davantage amélioré afin de favoriser un secteur de production canadien solide et plus en mesure d’offrir du contenu captivant de grande qualité aux Canadiens et aux marchés mondiaux. Un système de financement plus souple contribuerait davantage à l’atteinte des objectifs de la Loi énoncés ci-dessus.
  3. À l’heure actuelle, la programmation canadienne n’a souvent que peu ou pas de valeur pécuniaire à long terme, en partie parce que la plupart des producteurs indépendants ne peuvent en soutenir l’exploitation longtemps ni l’exportation. Qui plus est, les services de programmation de télévision qui commandent des émissions et en payent les droits ne sont pas incités à en faire l’exploitation à long terme ou l’exportation, étant donné que les droits internationaux sont souvent détenus par les producteurs en vertu des présentes ententes commerciales entre les parties. Ainsi, les occasions de créer des cycles vertueux de production canadienne sont réduites :
    • plusieurs producteurs indépendants sont incités à exploiter leur affaire comme un service de l’industrie qui fonctionne de projet en projet;
    • les services de programmation acquièrent du contenu à la pièce, sans vraiment tenir compte du développement d’émissions à long terme;
    • les deux parties s’appuient fortement sur les subventions ou investissements gouvernementaux pour assurer leur viabilité.
  4. Le Conseil estime que cette situation révèle que les sociétés de production indépendante sont insuffisamment capitalisées. Selon des données approximatives publiées par le FMC, il existe plus de 900 sociétés de production de télévision canadiennes. Plusieurs de ces sociétés sont de très petite taille, ou encore temporaires. Elles peuvent avoir été constituées afin de ne produire qu’une émission, ou encore une seule saison d’une émission unique, puis sont dissoutes par la suite. Même les sociétés qui poursuivent leurs activités année après année sont souvent petites et exploitées avec des ressources limitées.
  5. Ces sociétés de production indépendante mal capitalisées tendent à dépendre des subventions gouvernementales et du financement provenant de fonds de production dont les allocations sont contrôlées par les services de radiodiffusion autorisés. Un tel environnement incite les producteurs indépendants à se comporter comme des entrepreneurs de production travaillant au sein de l’industrie de services, c.-à-d. qu’ils ne produisent qu’à la demande des services de radiodiffusion autorisés, sans être en mesure d’exploiter leur propre contenu ou propriété intellectuelle. Ce système de projet en projet entrave la croissance et n’appuie pas la santé à long terme de l’industrie dans son ensemble.
  6. Le Conseil est d’avis que la situation actuelle n’est plus tenable. L’industrie de la production devra se transformer pour faire en sorte que les sociétés de production soient viables et mieux capitalisées, capables de rentabiliser l’exploitation de leur contenu sur une plus longue période, en collaboration avec des services de radiodiffusion qui bénéficieront d’incitatifs pour investir dans la promotion de contenu.
  7. Selon le Conseil, un secteur de production canadien solide est essentiel à l’exploitation à long terme des revenus de contenu (y compris les ventes internationales). Idéalement, cela suppose des associations entre des sociétés de production indépendantes bien capitalisées et des radiodiffuseurs qui possèdent des intérêts dans le contenu et les droits de propriété intellectuelle. De telles arrangements pourraient être à l’origine d’une programmation canadienne de meilleure qualité qui aurait davantage de succès tant au pays qu’à l’étranger.
  8. Par conséquent, le Conseil est prêt à travailler de concert avec les autres parties intéressées du gouvernement afin d’atteindre le résultat ci-dessus. À cette fin, il recommande ce qui suit :
    • Les gouvernements provinciaux et fédéral doivent continuer à mettre à jour leurs programmes de soutien à la production en tentant de développer des stratégies et des processus afin de stimuler :
      1. les coproductions et coentreprises internationalesNote de bas de page 7;
      2. la promotion;
      3. la distribution internationale;
      4. le succès auprès de l’auditoire;
      5. l’élimination des obstacles à la création de productions en ligne.
    • Les gouvernements doivent mettre en place de nouvelles mesures afin de permettre le développement de sociétés de production canadiennes plus importantes et mieux capitalisées, en mesure de s’engager financièrement dans le développement de concepts et de scénarios et dans la production et le marketing de multiples émissions canadiennes de grande qualité et mieux capables de concurrencer dans les marchés internationaux.
    • Le FMC et le gouvernement doivent éliminer l’exigence selon laquelle un producteur doit avoir signé une entente sur les droits de diffusion avec un radiodiffuseur traditionnel canadien pour obtenir le financement d’une production canadienne.
  9. Dans le but d’atteindre des objectifs semblables à l’égard de ses propres règles et pratiques, le Conseil examinera ses politiques sur les FPIC plus tard cette année afin de s’assurer qu’elles accordent une plus grande souplesse en matière de financement de la programmation canadienne.
  10. Dans le même ordre d’idées, le Conseil est d’avis que le futur environnement télévisuel pourra exiger de nouvelles approches sur ce qui constitue de la programmation canadienne. Dans le système actuel, les émissions sont reconnues comme canadiennes sur la base des rôles de création et autres rôles joués par les Canadiens et les sociétés canadiennes dans leur production.
  11. La production d’émissions implique souvent divers talents et le financement provenant de différentes sources, y compris d’autres pays. Il existe trois types de production au Canada :
    • les productions qui peuvent être clairement considérées canadiennes étant donné que tous les talents et le financement proviennent du Canada;
    • les coproductions officielles reconnues par des traités internationaux - ces ententes permettent aux Canadiens et aux producteurs étrangers de partager leurs ressources créatives, techniques et financières pour coproduire des projets qui bénéficient du statut de productions nationales dans les pays impliqués (c’est-à-dire qu’ils sont admissibles au financement et aux crédits d’impôt de tous les pays partenaires);
    • les co-entreprises - il s’agit de coproductions impliquant des sociétés de production d’autres pays avec qui le Canada n’a pas signé de traité de coproduction. Ces productions peuvent bénéficier de crédit d’impôt de services de production et peuvent être comptabilisés par les radiodiffuseurs dans l’atteinte de leurs exigences en matière de programmation canadienne.
  12. Contrairement à un roman, qui peut être rédigé par un seul auteur, une émission de télévision consiste en un travail d’équipe qui implique de nombreuses personnes ayant divers rôles créatifs (p. ex. scénariste, acteur principal, producteur, directeur, etc.). Pour déterminer si une production peut être considérée canadienne, la citoyenneté des personnes impliquées est considérée. À cet égard, un système de points est utilisé. Des points sont accordés en fonction des Canadiens jouant des rôles créatifs clés afin de déterminer si une production est considérée canadienne et, par conséquent, si elle est admissible au financement et au crédit d’impôt ou à être prise en compte dans les exigences de dépenses et de présentation de contenu canadienNote de bas de page 8. Ainsi, c’est la citoyenneté des créateurs qui est considérée et non le contenu de la production.
  13. Les productions sont certifiées canadiennes soit par le Conseil, soit par le ministère du Patrimoine canadien, par l’entremise du Bureau de certification des produits audiovisuels canadiens (BCPAC). Le BCPAC reconnaît seulement les traités de coproduction comme canadiens, alors que le Conseil reconnaît également les coentreprises internationales. Au cours des dernières années, cette souplesse a permis des productions à grande échelle comme les séries télévisuelles Beauty and the Beast et Reign. Certaines de ces coentreprises sont produites grâce à d’importantes pré-ventes à des réseaux étrangers (généralement des réseaux américains).
  14. Afin d’encourager les gouvernements et les agences partenaires à réfléchir à des approches plus souples et prospectives en matière de production et de financement d’émissions canadiennes de haut calibre, le Conseil lancera deux projets pilotes :

    Projet pilote 1 : À titre d’exception au processus normalisé de certification des émissions canadiennes, reconnaître comme canadiennes les productions dramatiques ou comiques en action réelle basées sur des adaptations de romans best-sellers d’auteurs canadiens.

    Projet pilote 2 : À titre d’exception au processus normalisé de certification des émissions canadiennes, reconnaître comme canadiennes les productions dramatiques ou comiques en action réelle ayant un budget d’au moins 2 millions de dollars par heure.

    Les deux projets pilotes seront assujettis aux critères additionnels suivants :

    • le scénariste doit être Canadien;
    • un interprète principal doit être Canadien;
    • la société de production doit être canadienne;
      • au moins 75 % des coûts des services sont payables à des Canadiens;
      • au moins 75 % des coûts de postproduction sont payables à des Canadiens.
  15. Le Conseil, quant à lui, reconnaîtra les productions qui respectent les exigences de ces projets pilotes à titre de productions canadiennes aux fins de l’application des exigences réglementaires des services de programmation de télévision, et les certifiera comme telles, le cas échéant. Les coentreprises qui respectent les critères susmentionnés peuvent également être admissibles à participer à ces projets pilotes.
  16. Le Conseil est également prêt à examiner d’autres propositions de projets pilotes. Ces propositions devront être cohérentes avec les résultats visés par le Conseil.
  17. Cependant, le Conseil reconnaît que ces projets pilotes ne peuvent réussir qu’avec la participation et l’engagement d’autres groupes partenaires et agences, dont le BCPAC et le FMC. Par conséquent, le Conseil s’engage à collaborer avec ces derniers et d’autres parties prenantes à la réalisation de ces projets pilotes. Il évaluera le succès des projets pilotes au moins trois ans après leur lancement effectif.
    Le diagramme décrit deux projets pilotes lancés par le CRTC. Projet pilote 1 : Reconnaître comme canadiennes les productions dramatiques ou comiques en action réelle basées sur des adaptations de romans best-sellers d’auteurs canadiens. Projet pilote 2 : Reconnaître comme canadiennes les productions dramatiques ou comiques en action réelle ayant un budget d’au moins 2 millions de dollars par heure. Les deux projets pilotes seront assujettis aux critères additionnels suivants : le scénariste doit être Canadien; un interprète principal doit être Canadien; la société de production doit être canadienne (au moins 75 % des coûts des services seront payables à des Canadiens et au moins 75 % des coûts de postproduction seront payables à des Canadiens).
Ententes commerciales
  1. Les ententes commerciales sont devenues un sujet à discussion lors de l’examen de 2006 de certains aspects du cadre réglementaire de la télévision en direct annoncé dans l’avis d’audience publique en radiodiffusion 2006-5. Les organisations de l’industrie du marché de langue anglaise ont demandé au Conseil d’encourager le développement de lignes directrices sur des ententes commerciales acceptables, semblables à celles utilisées au Royaume-Uni et relevant d’Ofcom, l’autorité régulatrice des communications de ce pays.
  2. Ofcom applique des ententes commerciales collectives relatives à la programmation de télévision, publiées en 2004 dans des codes de pratique, lesquels énoncent une base claire pour négocier des ententes, et ce, afin de limiter le pouvoir de négociation des radiodiffuseurs. Au Royaume-Uni, les ententes commerciales ont favorisé la stabilisation et la capitalisation du secteur de la production indépendante en facilitant sa capacité à concurrencer sur le plan mondial et en clarifiant la question des droits numériques. Au Canada, le différend du début de l’année 2007 entre l’ACTRA et l’Association canadienne de production de films et de télévision (ACPFT) (maintenant appelée la Canadian Media Production Association (CMPA)) a révélé le besoin de clarifier la question de ces droits afin que l’industrie ne soit pas déstabilisée. L’ACTRA était en grève par rapport à l’ACPFT parce que les acteurs désiraient être payés si leur travail était diffusé en ligne.
  3. À la suite de l’examen de 2006, le Conseil a énoncé ses décisions dans l’avis public de radiodiffusion 2007-53. Dans cette politique, le Conseil a conclu que les ententes commerciales procureraient de la stabilité et de la clarté à toutes parties concernées et il en a encouragé le développement entre les radiodiffuseurs et les producteurs indépendants. Il s’attendait à ce que les titulaires fournissent, à l’occasion de leur demande de renouvellement de licence, un projet d’entente commerciale avec les producteurs indépendants ou encore une entente signée.
  4. Par la suite, à l’occasion des renouvellements de licence par groupe des groupes de télévision de langue anglaise (voir la décision de préambule énoncée dans la décision de radiodiffusion 2011-441), le Conseil imposait à Bell, Shaw, Corus et Rogers une condition de licence exigeant que chaque titulaire respecte une entente commerciale avec la CMPA.
  5. Tel qu’indiqué dans la décision de radiodiffusion 2012-241, Astral a conclu des ententes avec l’APFTQ (maintenant appelée l’AQPM) et la CMPA. Ces deux ententes ont été déposées lors de son renouvellement de licence, mais leur respect n’a pas fait l’objet d’une condition de licence.
  6. Dans la décision de radiodiffusion 2012-242, relative aux renouvellements de licence de Groupe TVA, le Conseil a conclu que le dossier public ne révélait aucun problème particulier dans les négociations entre Groupe TVA et les producteurs indépendants et il a déclaré s’attendre à ce que les négociations se poursuivent afin d’arriver à une entente.
  7. En 2013, le Conseil a imposé des conditions de licence exigeant que la SRC conclue des ententes commerciales avec la CMPA et l’APFTQ.
  8. Dans tous ces cas, le Conseil indiquait que de telles ententes commerciales devraient exister, sans pour autant en préciser le contenu.
  9. Plusieurs changements sont survenus dans l’environnement télévisuel depuis 2006. Particulièrement, l’enjeu des droits numériques et autres droits a été largement clarifié. La plupart des titulaires ont maintenant signé des ententes commerciales. Ces premières ententes comprennent les obligations de base des radiodiffuseurs et des producteurs faisant en sorte que le contenu soit largement accessible et monnayé de façon appropriée. Les ententes commerciales entre les producteurs et les radiodiffuseurs faisant partie de grands groupes de propriété privée de langue anglaise sont en vigueur depuis bientôt quatre ans, et les parties ont eu le temps d’en évaluer les forces et les faiblesses.
  10. Selon le Conseil, il n’est plus nécessaire d’intervenir dans ces relations en exigeant que les titulaires respectent leurs ententes commerciales. Il estime que les radiodiffuseurs et les producteurs ont maintenant suffisamment d’information et d’expérience pour négocier toute future entente entre eux. Ainsi, le Conseil permettra aux services de programmation de demander la suppression de l’exigence de signer une entente commerciale, et ce, à compter du 29 avril 2016, soit cinq ans après que la première entente signée lui a été soumise.

Répondre efficacement au changement ainsi qu’aux besoins et intérêts des téléspectateurs - Utilisation d’un système de mesure de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage

Objectifs visés
Historique
  1. Au début de 2014, Tom Pentefountas, vice-président, Radiodiffusion, a mené une enquête sur la possibilité d’utiliser un système de mesure de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage. Par la suite, au cours de la présente instance, le Conseil a posé un certain nombre de questions sur l’éventuelle mise en place de ce système. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a de plus invité les parties à proposer un modèle concret pour établir un tel système, lequel respecterait la vie privée des Canadiens. Il a déclaré que la protection de la vie privée et les questions liées au consentement du téléspectateur, à la cueillette et à la conservation des informations personnelles étaient d’une importance capitale dans la mise en place d’un tel système.
  2. Les sociétés intégrées verticalement pourraient avoir un avantage en ce qui concerne la cueillette des données des boîtiers de décodage, puisqu’elles partagent les données fournies par leurs EDR avec les services de programmation de télévision qu’elles possèdent. Les services bénéficiant d’un nombre élevé de téléspectateurs ou d’abonnés ont également accès à une quantité importante de données utiles et pertinentes grâce aux services existants de mesures de cotes d’écoutes comme Numeris (anciennement BBM Canada), ce qui n’est pas à la portée des services ayant moins d’abonnés ou des services de créneau.
  3. Dans le Document de travail, le Conseil a proposé que l’industrie soit tenue de former un groupe de travail ayant pour tâche de collaborer au développement d’un système de mesure de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage, y compris les aspects techniques et les questions liées à la protection de la vie privée, à la structure de gouvernance et au partage des coûts. Ce groupe de travail devait faire rapport de ses progrès au Conseil.
  4. En décembre 2014, le Conseil a envoyé une lettre aux radiodiffuseurs et aux EDR afin de connaître les progrès accomplis dans le développement d’un tel système et de savoir si un groupe de travail avait été formé pour examiner cet enjeu.
  5. Dans leurs réponses, les radiodiffuseurs et les EDR, à l’exception de SaskTel, ont indiqué être prêts à faire partie d’un groupe de travail, mais qu’un tel groupe n’avait pas été formé. SaskTel a indiqué qu’il ne comptait pas établir un système de mesure de cotes d’écoutes, ni partager les données sur l’écoute provenant des boîtiers de décodage de ses clients avec des tierces parties.
Positions des parties
  1. Tant à l’audience que dans les observations finales, l’établissement d’un système de mesure de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage a reçu l’aval de Bell (pourvu qu’il soit rémunéré pour l’utilisation de ses données), de Rentrak Corporation (qui croyait que le système pouvait être fonctionnel d’ici 18 mois si les EDR fournissent leurs données), et de nombreuses autres parties : Anthem Media, l’AQPM, l’Association canadienne des annonceurs, la Canadian Media Directors’ Council, la SRC, la CMPA, Cogeco, le Conseil provincial du secteur des communications (CPSC), Shaw, SaskTel, V Média, Hollywood Suite, l’Independent Broadcast GroupNote de bas de page 9 (IBG), Numeris, le ministère du Tourisme, de la Culture et du Sport de l’Ontario, On Screen Manitoba, St. Andrews Community Channel, Stingray Digital Group et la U.S. Television Coalition. Québecor, au nom de Vidéotron, ainsi que Rogers, qui avaient initialement exprimé leur opposition à la proposition par écrit, ont plus tard manifesté leur appui au système.
  2. D’autres parties ont soulevé diverses préoccupations. MTS Allstream a allégué que les données des boîtiers de décodage ont peu de valeur à l’échelle de l’industrie dans son ensemble parce qu’elles varient d’une EDR à l’autre. Un particulier, Zachary Kornblum, estimait que si le problème était l’asymétrie de l’information, les parties devraient faire appel à Numeris pour créer un fonds public afin que ce dernier rende ses données publiques.
  3. SaskTel a exprimé des craintes au sujet de la protection de la vie privée de ses abonnés. Dans le même ordre d’idées, le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada (CPVP) a déclaré que les renseignements recueillis grâce aux boîtiers de décodage seraient vraisemblablement des renseignements personnels qui pourraient être de nature sensible. Il a aussi allégué qu’en l’absence de plus d’information sur la nature et la portée des données qui seraient recueillies, sur les personnes qui les recueilleraient et avec qui elles seraient partagées, il pouvait difficilement évaluer pleinement l’incidence de la proposition sur la vie privée.
  4. Le CPVP a déclaré que dans la mesure où le système de mesure basé sur boîtiers de décodage supposait la collecte de renseignements personnels, il ne devrait être mis en place qu’avec le consentement explicite des personnes en cause dans le cas où les renseignements, de façon autonome ou jumelés à d’autres, étaient de nature sensible. Le CPVP a proposé une série de mesures de protection de la vie privée et a ajouté que les types de renseignements personnels recueillis devaient être déterminés.
  5. De même, le Centre pour la défense de l’intérêt public, l’Association des consommateurs du Canada, le Council of Senior Citizens’ Organizations of British Columbia, la Fédération nationale des retraités, Option consommateurs et le Conseil ethnoculturel du Canada (collectivement CDIP et autres) ont suggéré que tout régime de collecte de données devrait exiger un consentement à participer éclairé et explicite. L’Union des consommateurs a dit craindre que parce que chaque boîtier de décodage correspond à un code postal, toute donnée recueillie puisse conduire à identifier les utilisateurs, ce qui pourrait contrevenir à la Loi sur la protection des renseignements personnels.
  6. Au cours de la consultation en ligne, quelques personnes ont exprimé des inquiétudes relatives à la protection de leurs habitudes d’écoute et ont indiqué qu’elles abandonneraient leur service si les données de l’écoute de leur foyer étaient recueillies. Une personne a dit craindre que le « groupe de travail secret » œuvre derrière des portes closes. Cette dernière a exprimé le désir de faire partie de cet exercice pour connaître les renseignements qui seraient recueillis par les EDR.
  7. Dans ses commentaires finaux, Pelmorex a recommandé qu’on établisse un conseil de gouvernance intérimaire plutôt qu’un groupe de travail. L’intervenant a suggéré que ce conseil intérimaire, dont la composition pourrait ressembler à celle du conseil de Numeris, comprenne les principales parties intéressées afin de surveiller le développement de normes techniques, les mesures de protection de la vie privée, le partage des coûts et le choix de celui qui regroupera les données et de son intégration au système existant de mesures de cotes d’écoute de Numeris.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Le Conseil estime qu’un système de mesure de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage contribuerait à l’atteinte de certains objectifs énoncés dans la Loi, précisément aux articles 3(1)d) et 3(1)s), lesquels prévoient que le système de radiodiffusion devrait demeurer aisément adaptable aux progrès scientifiques et techniques et que les réseaux et entreprises de programmation privés devraient demeurer réceptifs à l’évolution de la demande du public.
  2. Les renseignements sur les téléspectateurs seront essentiels dans un environnement télévisuel émergent axé sur eux. L’industrie canadienne de la télévision devrait avoir accès aux outils appropriés pour répondre efficacement au changement dans l’industrie et aux besoins et aux intérêts des téléspectateurs, pourvu que la vie privée de ces téléspectateurs soit protégée. Un système de mesures de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage pourrait servir d’outil puisque les données peuvent être utilisées pour mesurer plus précisément les cotes d’écoute. Un tel système permettrait à l’industrie d’être plus en mesure de fournir aux téléspectateurs canadiens la programmation qu’ils veulent regarder et les renseignements dont ils ont besoin pour faire des choix éclairés. De plus, cela pourrait servir à augmenter les revenus des créateurs d’émissions.
  3. Les services ayant moins d’abonnés et les services de créneau qui n’ont pas accès à des données de mesures de cotes d’écoute significatives (p. ex. : APTN, TVO, Knowledge Network) pourraient également bénéficier des données ainsi collectées.
  4. Il existe un vaste consensus dans tous les secteurs de l’industrie au sujet de leur participation à un groupe de travail chargé de définir les enjeux relatifs au développement d’un système de mesure de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage.
  5. Bien que Pelmorex ait proposé une stratégie détaillée en vue de mettre en œuvre un autre projet, le Conseil estime qu’il conviendrait davantage de mettre sur pied un groupe de travail de l’industrie qui aurait l’occasion de développer son propre projet pour l’avenir. Le Conseil estime que l’industrie devrait avoir l’occasion de prendre des décisions clés sur des questions essentielles comme la gouvernance, et ce, collectivement et en collaboration, plutôt que de se voir imposer une solution. Tout système de mesure de cotes d’écoute basé sur les boîtiers de décodage serait développé par et pour l’industrie de la radiodiffusion. Pelmorex aurait l’occasion de présenter ses propositions au groupe de travail. Toute solution proposée par l’industrie doit cependant tenir compte du respect de la vie privée des Canadiens.
  6. Le Conseil conclut qu’un tel système doit, entre autres choses :
    • permettre aux radiodiffuseurs de faire des choix plus éclairés en matière de programmation et d’horaire;
    • donner aux radiodiffuseurs de nouvelles occasions de monnayer efficacement la publicité;
    • faire en sorte que les EDR soient mieux en mesure d’offrir des services et du contenu en forfait sur mesure;
    • placer l’industrie canadienne de la radiodiffusion sur un pied d’égalité avec le marché international et le marché de vidéo en ligne;
    • garantir la protection de la vie privée des personnes.
  7. Par conséquent, le Conseil exige que l’industrie forme un groupe de travail qui se réunira la première fois au plus tard le 13 avril 2015. Ce groupe de travail développera ensemble un système de mesures de cotes d’écoutes basé sur les boîtiers de décodage, y compris les normes techniques, les mesures de protection de la vie privée, la structure de gouvernance et le partage des coûts. Il examinera aussi comment ce système de mesure de cotes d’écoute, ou tout système semblable, pourrait le mieux s’appliquer à l’écoute. Le groupe devra faire rapport de ses progrès au Conseil au plus tard le 10 juin 2015.
  8. Le groupe de travail fera rapport au Conseil sur ses conclusions en ce qui concerne les données qui doivent être recueillies, la structure de gouvernance, les protocoles relatifs à la vie privée (dont la question de savoir si le fait que les données soient regroupées répond à toutes les préoccupations sur la protection de la vie privée) et une façon de financer le système et d’en récupérer les coûts.
  9. Si le Conseil conclut que les progrès du groupe de travail ne sont pas assez significatifs ou que les objectifs de politique de la Loi ou les principes énoncés au paragraphe 158 ne sont pas traités de façon appropriée, il pourra décider d’intervenir en donnant des lignes directrices précises pour faire avancer l’établissement du système.

B. Changement de cap pour la programmation canadienne : de quantité à qualité

Une programmation canadienne originale de qualité pour les Canadiens dans l’environnement audiovisuel de leur choix - Présentation et dépenses en matière de programmation canadienne

Objectif visé
Historique
  1. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a déclaré que puisque les relations entre les Canadiens et le système composé de radiodiffuseurs titulaires de licences sont en plein changement, les présentes mesures de soutien à la programmation canadienne seraient affectées. Il ajoutait que les habitudes de visionnement des téléspectateurs changent, dans la mesure où ils cherchent et choisissent de plus en plus la programmation qu’ils consomment à la pièce plutôt que par l’intermédiaire de canaux linéaires, et que cela aura une incidence importante sur le modèle de financement. Le Conseil estimait par conséquent qu’il était temps d’examiner les différents types de soutien à la programmation canadienne qui étaient de son ressort.
  2. L’un des objectifs du présent examen est de trouver des mesures favorisant la transition d’un système axé sur des services linéaires vers un système multiplateforme qui fonctionne de plus en plus sur demande et qui privilégie la qualité des émissions. À cet égard, il est important de noter que l’article 3(1) de la Loi établit les objectifs suivants :

    […] e) tous les éléments du système doivent contribuer, de la manière qui convient, à la création et la présentation d’une programmation canadienne;

    f) toutes les entreprises de radiodiffusion sont tenues de faire appel au maximum, et dans tous les cas au moins de manière prédominante, aux ressources - créatrices et autres - canadiennes pour la création et la présentation de leur programmation à moins qu’une telle pratique ne s’avère difficilement réalisable en raison de la nature du service - notamment, son contenu ou format spécialisé ou l’utilisation qui y est faite de langues autres que le français ou l’anglais - qu’elles fournissent, auquel cas elles devront faire appel aux ressources en question dans toute la mesure du possible; […]

  1. En vue de garantir à l’avenir la présence d’émissions canadiennes captivantes sur de multiples plateformes, le Conseil a annoncé qu’il était prêt à envisager différentes mesures incitatives et autres solutions comme la réduction ou l’élimination des exigences minimales relatives à la présentation de programmation canadienne autre que la programmation locale, ou encore l’imposition de DÉC à toutes les stations de télévision autorisées ainsi qu’à tous les services spécialisés et payants.
  2. Le Document de travail proposait ce qui suit :
    • supprimer les exigences de présentation au cours de la journée de radiodiffusion, mais maintenir celles s’appliquant à la période en soirée;
    • exiger que toutes les stations de télévision autorisées et les services payants et spécialisés respectent les exigences en matière de DÉC;
    • maintenir l’approche par groupe de propriété à l’égard de l’attribution de licences et ajuster les DÉC dès le début afin de les maintenir à leur niveau actuel. Augmenter les DÉC au cours d’une période de licence. Les DÉC seraient fixées lors du renouvellement de licence.
  3. Au cours de la consultation en ligne, le Conseil a reçu un certain nombre de commentaires en faveur des exigences à l’égard de la programmation canadienne afin de garantir la présence d’histoires canadiennes dans la [traduction] « mer de contenu américain ». Une personne a déclaré ce qui suit : [traduction] « Le contenu canadien est très important pour l’économie canadienne. Les joueurs comme Rogers, Bell, la SRC et CTV doivent donc tous faire leur part pour fournir du contenu canadien. »
  4. D’autres ont fait valoir que de telles exigences devraient être supprimées, pour des motifs tels que :
    • la perception selon laquelle le contenu canadien de langue anglaise est de piètre qualité;
    • le nombre élevé de rediffusions d’émissions canadiennes;
    • l’idée que la programmation canadienne devrait concurrencer la programmation américaine sans soutien réglementaire.
  5. Une personne a déclaré que le contenu intéressant traverse les frontières. [traduction] « Que le contenu soit canadien m’importe peu. Tout ce que je veux, c’est du contenu intéressant et si une émission l’est, je suis convaincu qu’on la verra à la télévision. » Une autre blâme le système au sujet de la qualité de la télévision canadienne. [traduction] « Le concept de contenu canadien « forcé » est la raison pour laquelle les émissions produites au Canada sont en grande partie inférieures. »
  6. Un Canadien suggère que l’industrie devrait sortir des sentiers battus. [traduction] « Les exigences de contenu canadien devraient demeurer, surtout pour les réseaux qui comptent sur les émissions américaines pour leurs cotes d’écoute et qui les annoncent même comme étant leurs propres productions. S’ils peuvent acquérir des émissions américaines, ils peuvent produire des émissions canadiennes; il suffit qu’ils soient plus innovateurs et plus souples. »
  7. Dans la présente section, le Conseil annonce des mesures qui reconnaissent que, même si les habitudes d’écoute des Canadiens et les plateformes de distribution changent de façon significative, la rupture avec le passé n’est pas complète. Les nouvelles habitudes coexistent avec les traditionnelles, et le soutien à la programmation canadienne doit tenir compte de cette situation en évolution.
Cadre existant
Exigences de présentation
  1. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-167, dans laquelle le Conseil énonce son approche sur l’attribution de licences par groupe de propriété (la politique sur l’attribution de licences par groupe), le Conseil a annoncé qu’il réduisait l’obligation minimale de toutes les stations de télévision traditionnelle à l’égard de la diffusion d’émissions canadiennes de 60 % à 55 % au cours d’une année de radiodiffusion, tout en conservant les pourcentages existants pour les périodes d’écoute en soirée de 18 h à minuit. Le Règlement de 1987 sur la télédiffusion a par la suite été modifié en conséquence.
  2. Les obligations des services de catégorie A sont énoncées par condition de licence et varient selon la nature du service. Dans la majorité des cas, ces obligations exigent qu’un minimum de 50 % de la programmation diffusée au cours de la journée et de l’année de radiodiffusion soit canadienne. Dans la politique sur l’attribution de licences par groupe, le Conseil a confirmé que les obligations des services spécialisés continueraient à refléter les caractéristiques de chaque service.
  3. Tous les services de catégorie B de langues anglaise et française ont les mêmes exigences en matière de présentation. Ces exigences augmentent au cours des trois premières années d’exploitation et, à compter de la troisième année, ils doivent consacrer à la diffusion de programmation canadienne 35 % de la période de jour et 35 % de la période en soirée (à la suite de la phase de transition des deux premières années). L’obligation en matière de présentation des services à caractère ethnique et en langues tierces est de 15 %.
  4. Les services de nouvelles nationales de catégorie C doivent consacrer au moins 90 % de la journée de radiodiffusion à la diffusion de programmation canadienne. En ce qui concerne les services de sport d’intérêt général, le pourcentage est de 60 % de la journée de radiodiffusion et d’au moins 50 % pour la période en soirée.
Dépenses en émissions canadiennes
  1. Dans sa politique d’attribution de licences par groupe, le Conseil a indiqué que les grands groupes de propriété de langue anglaise :
    • sont tenus de respecter les conditions de licence sur les DÉC de toutes leurs stations de télévision traditionnelle, de tous leurs services payants et spécialisés de catégorie A et de tous leurs services de catégorie B comptant plus d’un million d’abonnés;
    • doivent s’engager à l’égard d’un seuil minimal global de DÉC pour le groupe;
    • bénéficient de la souplesse d’attribuer les DÉC entre leurs divers services, avec un maximum de 25 % des DÉC exigées pour les stations de télévision traditionnelle peut être attribué à d’autres services spécialisés admissibles du groupe.
  2. L’objectif du Conseil était de stabiliser les contributions à la création de programmation canadienne de langue anglaise et de permettre aux groupes de s’adapter rapidement aux changements de l’environnement grâce à une souplesse en matière de DÉC.
  3. Dans le marché de langue française, les situations des deux principaux groupes de télévision privée sont fort différentes l’une par rapport à l’autre. Dans le cas de Groupe TVA, on reconnaît généralement que ce joueur contribue de façon significative à la programmation canadienne et que ces contributions dépassent largement celles imposées au marché de langue anglaise. V Média, au contraire, n’a aucune obligation en matière de DÉC puisqu’à son dernier renouvellement de licence, entre autres choses, de telles obligations n’étaient généralement pas imposées aux services.
  4. Outre les grands groupes de propriété, les DÉC sont imposées au cas par cas tant dans le marché de langue anglaise que dans celui de langue française. À quelques exceptions près, tous les services de catégorie A et tous les services de sport de catégorie C sont assujettis à des exigences en matière de DÉC, alors que, de façon générale, les services de catégorie B n’ont aucune obligation à ce titre.
Présentation de programmation canadienne
Positions des parties
  1. Bien que la majorité des parties aient noté le besoin de mettre l’accent sur la qualité de la programmation canadienne plutôt que sur leur quantité, les avis différaient grandement sur la question de l’élimination ou de la réduction des exigences de présentation.
  2. Dans le marché de langue anglaise, la plupart des radiodiffuseurs et des sociétés intégrées verticalement étaient en faveur de réduire les exigences de présentation, mais divergeaient d’opinion sur la façon de le faire :
    • Bell a proposé d’harmoniser l’exigence en la fixant à 50 % pour les stations locales traditionnelles et à 35 % pour les services spécialisés, sans retenir d’exigence pour la période d’écoute en soirée. Cette proposition a été élaborée lors de la recherche d’une solution à certaines conditions de licence précises à l’origine des rediffusions d’émissions canadiennes sur tous les services.
    • Corus a plaidé en faveur de l’élimination de toutes les exigences de présentation.
    • Shaw a proposé 50 % pendant la période d’écoute en soirée et 25 % pendant la journée de radiodiffusion, et ce, pour tous les services.
  3. Certaines parties, surtout du secteur de la création, s’opposaient à la diminution de la présentation (la Guilde des réalisateurs) ou exprimaient des préoccupations à ce sujet (ACTRA). La WGC a déclaré s’opposer à une approche basée exclusivement sur les dépenses. Selon la WGC, une telle approche pourrait faire en sorte que le nombre d’émissions diminue alors que leurs budgets augmentent, ce qui peut résulter en une diminution du bassin d’artistes au Canada.
  4. Comme le secteur de la création, le CDIP et autres n’estimaient pas nécessaire de modifier les présents soutiens réglementaires à la programmation canadienne de langue anglaise.
  5. Par ailleurs, le Forum for Research and Policy in Communications a proposé de permettre aux stations de télévision traditionnelle de réduire graduellement le pourcentage de présentation de contenu canadien de 55 % (pourcentage actuel) à 35 % en 2025. Il a aussi recommandé que le Conseil remplace l’exigence actuellement imposée aux stations de télévision privée concernant la diffusion de 55 % de contenu canadien par une exigence de diffusion de 35 % de dramatiques canadiennes, de 20 h à 23 h au cours de chaque semaine de radiodiffusion.
  6. Le ministère du Tourisme, de la Culture et du Sport de l’Ontario a déclaré que la réduction de l’asymétrie réglementaire ne devrait pas s’opérer par un allègement de la réglementation imposée à la télévision. Il estimait essentiel de conserver le degré actuel de réglementation à l’égard de la télévision afin de veiller à la santé de l’industrie de l’Ontario et du système canadien de radiodiffusion.
  7. Certains services à caractère ethnique en langue tierce ont proposé de remplacer leurs exigences en matière de présentation par l’imposition d’exigences au titre des DÉC.
  8. Du côté du marché de langue française, l’AQPM a suggéré de réduire de 20 % le pourcentage actuel de présentation pendant la journée de radiodiffusion et de réduire de 10 % celui pendant la période d’écoute en soirée. De plus, elle a proposé une augmentation de 10 % des présentes obligations au titre des DÉC. Ces modifications seraient mises en place lors des renouvellements de licence.
  9. V Média était en faveur de l’élimination des exigences de présentation, mais seulement pendant la journée de radiodiffusion, alors que l’Alliance des producteurs francophones du Canada (APFC) s’y opposait et s’inquiétait d’une éventuelle réduction de la production de certains genres d’émissions, comme les magazines, les jeux-questionnaires, les émissions causeries ainsi que les émissions pour enfants et les émissions jeunesse. L’Union des consommateurs s’opposait aussi à cette proposition.
  10. L’ARRQ, l’UDA et la SARTEC ont plaidé en faveur de conditions de licence au cas par cas afin de pallier le déclin de la programmation originale de langue française. Québecor, pour sa part, a allégué qu’une telle réglementation serait inutile dans le marché de la télévision du Québec.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Le Conseil s’est servi d’exigences en matière de présentation comme un moyen d’atteindre les objectifs de la Loi énoncés aux articles 3(1)e) et f). Cependant, il est clair qu’alors que les quotas de contenu de ce type ont été utiles afin de garantir la présentation d’émissions canadiennes dans un système de télévision entièrement linéaire, ils seront de moins en moins efficaces dans un environnement qui fonctionne de plus en plus sur demande.
  2. Qui plus est, ces quotas peuvent aussi avoir des incidences négatives inattendues. Notamment, des données de registres d’émissions déposés au Conseil révèlent qu’en moyenne, bien au-delà de 50 % de la programmation canadienne présentée sur l’ensemble des services tant dans le marché de langue française que de langue anglaise sont rediffusées sur le même service ou recyclées en provenance d’autres services. Souvent, un épisode particulier d’une émission est repris plusieurs fois au cours de la journée, de la semaine, du mois et même sur une période de plusieurs années. Pour certains services, ce pourcentage est encore plus élevé et plus de 90 % de la programmation canadienne est rediffusé ou recyclé. Bien qu’il puisse s’agir d’un modèle d’affaires viable pour certains services, le Conseil estime que les productions canadiennes originales de première diffusion ajoutent une plus grande valeur au système; les rediffusions excessives et le recyclage des émissions semblent faire peu au regard de la réalisation des objectifs de la Loi.
  3. Cependant, du moins à court terme, certaines exigences de présentation peuvent être efficaces en vue d’atteindre les objectifs de la Loi énumérés ci-dessus. Des données de Numeris pour l’année de radiodiffusion 2013-2014 et relatives aux deux marchés linguistiques démontrent qu’il y a environ cinq fois plus d’écoute des stations de télévision traditionnelle entre 20 h et 22 h du lundi au vendredi que pendant toute heure du reste de la journée hors de la période en soirée, et de deux à quatre fois plus d’écoute de 18 h à 20 h et de 22 h à 23 h. La période de grande écoute en soirée est donc toujours celle pendant laquelle la plupart des téléspectateurs regardent les stations de télévision traditionnelle. C’est pourquoi les émissions canadiennes ou étrangères les plus captivantes sont diffusées pendant cette période.
  4. Compte tenu de la politique du Conseil à l’égard de la substitution simultanéeRetour à la référence de la note de bas de page 10, énoncée dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-25, il continuera d’y avoir des mesures incitatives pour les stations de télévision traditionnelle des marchés de langue anglaise afin qu’elles diffusent des émissions non canadiennes pendant les périodes en soirée. Ainsi, afin de garantir que les émissions canadiennes continuent d’être largement mises à la disposition des Canadiens dans un environnement traditionnel linéaire, et que ces émissions aient une chance de succès en étant diffusées en soirée, pendant la période de grande écoute, le Conseil conserve les exigences de présentation pour les stations de télévision traditionnelle privées, mais seulement pendant la période de diffusion en soirée. Pour ce qui est du marché de langue française, où la substitution simultanée n’a aucune incidence, l’exigence en soirée sera également conservée compte tenu de l’importance de l’écoute de la programmation canadienne pendant cette période et que personne n’a demandé de la supprimer. Lors des prochains renouvellements de licence, les exigences de présentation relatives à l’ensemble de la journée de radiodiffusion seront suppriméesNote de bas de page 11.
  5. Les services facultatifs (services spécialisés et payants) ne s’appuient pas sur la substitution simultanée et offrent souvent une roue de programmation à l’échelle du pays, peu importe le fuseau horaire du téléspectateur. Des données de Numeris pour l’année de radiodiffusion 2013-2014 et visant les deux marchés linguistiques révèlent que la période de grande écoute en soirée est beaucoup moins significative pour les services facultatifs qu’elle ne l’est pour les stations traditionnelles. En même temps, les services facultatifs offrent un nombre bien plus élevé de rediffusions et d’émissions recyclées que les services traditionnels et ils rediffusent souvent les mêmes émissions au cours de chaque journée de radiodiffusion. Par conséquent, les présentes exigences de présentation pour les services facultatifs pendant la période en soirée ne semblent pas contribuer de façon significative à la réalisation des objectifs de la Loi.
  6. En ce qui concerne les exigences relatives à l’ensemble de la journée de radiodiffusion qui s’appliquent aux services facultatifs, compte tenu des décisions du Conseil sur le type et la normalisation des classes de licence énoncées ci-dessous dans la présente politique réglementaire, le Conseil estime approprié d’adopter une approche normalisée de ces exigences pour tous les services facultatifs. De plus, compte tenu qu’il opte ci-dessous pour l’application des exigences en matière de DÉC à tous ces services lors du prochain renouvellement de licence de chacun, le Conseil établit pour les services facultatifs l’exigence normalisée de présentation pendant l’ensemble de la journée de radiodiffusion à 35 %, soit le pourcentage actuel qui s’applique aux services de catégorie B en exploitation depuis au moins trois ans.
  7. Le Conseil reconnaît qu’une approche individuelle à l’égard des exigences de présentation peut être nécessaire pour certains services. Par exemple, les périodes de grande écoute sont différentes pour les émissions pour enfants et les émissions jeunesse. Le Conseil tiendra compte de ces circonstances particulières au cas par cas lors du renouvellement de licence, si nécessaire.
  8. À titre d’exception à cette politique, le Conseil conserve toutes les exigences de présentation des services qui bénéficient de la distribution obligatoire en vertu de l’article 9(1)h) de la LoiNote de bas de page 12.
  9. Tel que noté ci-dessus, les réductions des exigences de présentation seront mises en place par voie de condition de licence lors du prochain renouvellement de licence de chaque service, en même temps que les nouvelles exigences en matière de DÉC énoncées ci-dessous. Pour les services détenus par les grands groupes de propriété privés de langue anglaise et de langue française qui sont exploités dans les deux marchés linguistiques, cette mise en œuvre aura lieu au moment du renouvellement de leurs licences, au plus tard le 31 août 2017. Pour les services indépendants, cette mise en œuvre pourrait avoir lieu dès le 1er septembre 2018, selon la date d’expiration de leur licence.
    Ce graphique illustre les différents quotas pour la programmation canadienne. La première colonne illustre les quotas de façon globale. En ce moment, les stations de télé en direct ont un quota de 55% globalement. Selon la nouvelle politique, ils n’auront pas de quotas minimums globalement. Les services spécialisés et payants ont actuellement des quotas variés de façon globale. Selon la nouvelle politique, le quota sera de 35%. La deuxième colonne illustre les quotas en soirée. En ce moment, les stations de télé en direct ont un quota de 50% en soirée. Ce quota sera maintenu en vertu de la nouvelle politique. Les services spécialisés et payants ont des quotas variés en soirée. Selon la nouvelle politique, ils n’auront pas de quotas en soirée.
Dépenses en émissions canadiennes
Positions des parties
  1. De façon générale, les parties étaient d’avis que la bonne approche était de mettre l’accent sur la création de programmation canadienne au moyen des dépenses à y consacrer plutôt qu’en imposant des exigences sur leur présentation. À cet égard, plusieurs ont noté la nécessité de privilégier la qualité de la programmation canadienne produite plutôt que la quantité diffusée.
  2. Dans le marché de langue anglaise, la plupart des parties appuyaient la proposition d’exiger des DÉC de tous les services autorisés, à l’exception de la SRC et de Knowledge Network, compte tenu de leur modèle de financement en tant que radiodiffuseurs publics.
  3. D’un autre côté, Rogers et la Coalition of Small Market Independent Television Stations (la Coalition) étaient en faveur conserver des exigences de présentation de programmation locale, mais de ne pas imposer d’exiger de DÉC aux stations traditionnelles.
  4. Les parties du secteur de la création, comme l’ACTRA et Onscreen Manitoba, étaient favorables à une augmentation des DÉC. Mais, tel que noté ci-dessus, la WGC s’opposait à une approche basée exclusivement sur les dépenses qui supprimerait toute exigence de présentation.
  5. La CMPA a allégué qu’à l’avenir, il était primordial de veiller à ce que les radiodiffuseurs investissent dans le contenu original de production indépendante, plutôt que simplement dans du matériel de bibliothèque ou des productions internes. Selon la CMPA, le Conseil devrait établir des règles afin de garantir que les consommateurs de cet univers à la carte puissent continuer à regarder de nouvelles émissions originales et il devrait aussi exiger que les radiodiffuseurs maintiennent le pourcentage de DÉC consacré dans le passé aux émissions canadiennes nouvelles et originales.
  6. Shaw a avancé que le moment était mal choisi pour augmenter les exigences de DÉC et préfère attendre de voir ce qu’il adviendrait des autres propositions du Conseil, compte tenu de l’incidence possible sur les revenus.
  7. La majorité des parties étaient d’avis qu’une approche normalisée relative aux DÉC pour les grands groupes de propriété et leurs services était une approche appropriée, mais que, dans le cas des services indépendants et du marché de langue française, une approche au cas par cas serait plus appropriée.
  8. Certaines parties, comme Anthem Media, ont proposé que seuls les services facultatifs comptant un certain nombre d’abonnés soient assujettis à des exigences de DÉC minimales.
  9. Bell a mis de l’avant plusieurs propositions pour le marché de langue anglaise, y compris :
    • les grands groupes de propriété ayant des revenus annuels de plus de 100 millions de dollars continueront d’être réglementés sur une base de groupe; les DÉC seraient fixées à 25 % des revenus bruts de l’année précédente et réparties entre tous les services du groupe autres que les services de nouvelles nationales et de sport d’intérêt général de catégorie C;
    • en ce qui concerne les services dont les revenus sont inférieurs à 100 millions de dollars, le Conseil adopterait une approche au cas par cas afin de déterminer les niveaux appropriés de DÉC et de présentation de programmation canadienne.
  10. Comme pour le marché de langue anglaise, les groupes de création du marché de langue française appuyaient, de façon générale, la proposition du Conseil d’imposer des exigences de DÉC à toutes les stations de télévision autorisées et à tous les services spécialisés et payants.
  11. De plus, l’APFC, l’AQPM, l’UDA, la SARTEC, Bell, la SRC et Corus ont fait valoir que les exigences de DÉC devraient être liées aux droits d’accès ou à la présentation. Bell a proposé une augmentation de l’exigence de DÉC de 32 % à 35 % pour les services facultatifs de langue française tant que la protection des genres et les droits de distribution sont maintenus, étant donné que ce marché n’est pas autant touché par les services vidéo en ligne.
  12. L’APFC a proposé que les stations de télévision traditionnelle et les services payants et spécialisés soient assujettis à une exigence de DÉC basée sur le total de leurs revenus bruts de radiodiffusion de l’année précédente.
  13. Le ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine du Québec (MCCCFQ) n’a proposé aucune augmentation de l’exigence au titre des DÉC, alors que Québecor a fait valoir que de telles exigences réglementaires ne sont pas nécessaires dans le marché de langue française.
  14. Festival Portuguese Television (FPTV) indique que pour représenter un pont culturel efficace pour les nouveaux arrivants canadiens, les services en langue tierce doivent offrir de la programmation canadienne pertinente pour la communauté ethnique desservie. Dans la plupart des cas, cela implique la production de programmation locale - on entend par « local » l’endroit où les communautés ethniques sont situées dans l’ensemble du Canada. FPTV a indiqué qu’une exigence minimale de DÉC devrait garantir que la programmation canadienne produite sera pertinente pour l’auditoire du service donné.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Au cours de l’instance Parlons télé, les Canadiens ont clairement fait savoir qu’ils s’attendaient à du contenu de grande qualité de leur système de télévision. La création de productions canadiennes captivantes de grande qualité exige notamment des investissements financiers. Investir dans du contenu de grande qualité largement accessible et bien promu attire l’auditoire et génère par conséquent des revenus. À leur tour, ces revenus peuvent être réinvestis dans la production de contenu futur. Selon le Conseil, les exigences de DÉC représentent une mesure incitative nécessaire pour créer ce type de cercle vertueux de production.
  2. En outre, ces exigences sont des outils importants à la réalisation des objectifs de la Loi mentionnés ci-dessus, particulièrement compte tenu des conclusions ci-dessus à l’égard de la présentation. En particulier, appliquer les exigences de DÉC à tous les services de programmation autorisés garantira que ces éléments du système de télédiffusion contribuent de façon appropriée à la création et à la présentation de programmation canadienne. De même, fixer le pourcentage des DÉC à des niveaux appropriés assurera l’utilisation optimale et prépondérante des ressources canadiennes dans la création de programmation de grande qualité.
  3. De plus, le Conseil estime que cette approche élargira la base des DÉC à même lesquelles les investissements en matière de programmation canadienne peuvent être faits. Si on y ajoute la nouvelle souplesse à l’égard de l’horaire provenant de la diminution des exigences de présentation, l’accent sera mis sur la qualité des émissions produites par les Canadiens, et ce, sans égards à l’endroit ou au moment où les Canadiens peuvent y accéder.
  4. Cette approche globale tient aussi compte des incidences possibles des autres modifications prévues dans la présente politique réglementaire ou d’autres décisions de politiques découlant de l’instance Parlons télé, en stabilisant la base des DÉC pour la production canadienne. Ainsi, on reconnaît que ce ne sont pas tous les services de programmation canadiens existants qui réussiront dans le nouvel environnement télévisuel.
  5. Compte tenu de ce qui précède, en ce qui concerne le marché de langue anglaise (incluant les services en langue tierce), le Conseil appliquera les exigences de DÉC à tous les services autorisés. Les services qui n’ont pas présentement d’exigence de DÉC s’en verront imposer une lors du renouvellement de licence. Le pourcentage des DÉC sera basé sur les pourcentages de dépenses consacrées dans le passé.
  6. Pour ce qui est des grands groupes de propriété privés présentement exploités selon l’approche par groupe, le Conseil conservera l’approche d’attribution de licences par groupe et les pourcentages actuels de dépenses. Les services de programmation faisant partie d’un groupe seront assujettis à des exigences de DÉC qui contribueront de façon appropriée au pourcentage global de DÉC de ce groupe. En ce qui concerne les groupes qui exploitent des services de langue française et de langue anglaise, chaque groupe linguistique sera traité séparément et pourra être assujetti à des exigences différentes.
  7. Compte tenu des divers autres changements que le Conseil effectue dans le cadre de l’instance Parlons télé, le Conseil propose de ne pas augmenter les pourcentages de DÉC. Le maintien du statu quo donnera au Conseil l’occasion de surveiller les incidences sur les revenus des autres changements provenant de la présente instance et permettra aux parties touchées de s’adapter en conséquence.
  8. Puisque les stations indépendantes en direct seront assujetties à des exigences de DÉC pour la première fois, le pourcentage approprié sera basé sur les pourcentages de dépenses historiques au moment des renouvellements de licence. Le Conseil tiendra compte de toute incidence provenant de l’instance d’examen de la programmation communautaire et locale annoncée dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2015-24.
  9. En ce qui concerne les services facultatifs de langue anglaise et en langue tierce, les exigences au titre des DÉC seront mises en place pour tous les services qui comptent plus de 200 000 abonnés. Tel que discuté plus tard dans le présent document, tous les services facultatifs desservant moins de 200 000 abonnés seront exemptés de l’obligation de détenir une licence en vertu d’une nouvelle ordonnance d’exemption. Les DÉC pour les services autorisés seront établies au cas par cas et basées sur les pourcentages historiques. Cependant, compte tenu des grandes variations de revenus et de dépenses des services facultatifs et du fait que certains services ne font pas ou peu de dépenses en émissions canadiennes, le pourcentage minimal sera fixé à 10 %. Selon le Conseil, ce pourcentage constitue un seuil minimum atteignable pour tous les services facultatifs tout en garantissant une certaine contribution à la création et à la présentation d’émissions canadiennes. Présentement, 19 services sont assujettis à des DÉC de moins de 10 %, la moyenne pour ces services étant de 5 %.
  10. Le Conseil reconnaît les différences dans les situations des quatre groupes de propriété privés qui possèdent des stations en direct exploitées dans le marché de langue française, donc aucun n’a été désigné comme grand groupe de propriété en vertu de l’approche par groupe :
    • En vertu d’une exception, les DÉC de Groupe TVA sont basées sur les dépenses totales de programmation et non sur les revenus;
    • V Média n’a pour l’instant aucune obligation, et la base de ses revenus est beaucoup plus petite que celle de Groupe TVA;
    • RNC et Télé-Inter-Rives n’exploitent que des stations affiliées des autres réseaux, ce qui rend les DÉC non pertinentes.
  11. Par conséquent, dans le marché de langue française, le Conseil encouragera les services conjointement détenus à se faire reconnaître comme groupe lors des renouvellements de licence. Il établira au cas par cas avec ces services leur niveau de contribution financière au titre de la programmation canadienne.
  12. En ce qui concerne les services facultatifs de langue française, le Conseil imposera des exigences de DÉC à tous les services qui comptent plus de 200 000 abonnés. Ces exigences seront établies au cas par cas et se baseront sur les pourcentages de dépenses historiques.
  13. Les exigences, s’il en est, demeureront inchangées en ce qui concerne la SRC, les services éducatifs provinciaux, les stations autorisées de télévision communautaire en direct, les services de nouvelles nationales et les services de sport d’intérêt général.
Doublage des émissions
  1. Le Conseil craint qu’en réduisant l’importance accordée à la présentation de programmation canadienne au profit de la production de programmation canadienne d’une qualité encore plus grande grâce aux dépenses qui y seront consacrées, il survienne des incidences négatives sur les crédits de temps pour les émissions doublées au Canada. Ces répercussions seraient plus ressenties dans le marché de langue française étant donné que le doublage des émissions y est plus présent. Le doublage d’émissions au Canada procure aux téléspectateurs canadiens une expérience de plus grande qualité des émissions doublées. Cela provient du fait que la version doublée au Canada tient mieux compte des particularités linguistiques et culturelles du téléspectateur canadien, en utilisant les expressions et les accents familiers. Le Conseil cherche à faire en sorte que les services de télévision canadiens continuent à recourir le plus possible aux services canadiens de doublage pour la création et la présentation de programmation aux Canadiens, et ce, conformément à l’article 3(1)f) de la Loi.
  2. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-905, le Conseil a jugé approprié d’accorder un crédit de temps additionnel de 25 % aux émissions canadiennes doublées au Canada dans l’une des langues officielles du Canada ou dans une langue autochtone canadienne. À l’époque, le Conseil était d’avis que le crédit additionnel de 25 % :
    • encouragerait les radiodiffuseurs à effectuer le doublage des émissions canadiennes au Canada;
    • reconnaîtrait la contribution des artistes et des ressources de production de l’industrie canadienne du doublage à la production de contenu canadien, tout en renforçant l’identification des téléspectateurs canadiens aux émissions canadiennes doublées;
    • augmenterait le nombre d’échanges entre les deux marchés linguistiques du pays et les rapprocherait (une émission de langue française ou de langue anglaise, une fois doublée dans l’autre langue, peut être rediffusée dans un autre marché, trouver un nouvel auditoire et gagner une visibilité tant nationale qu’internationale).
  3. Le doublage procure aux francophones une fenêtre sur la programmation de langue anglaise produite au Canada, outre les émissions produites à l’étranger, et inversement, procure aux anglophones un accès à la programmation de langue française produite au Canada ou à l’étranger.
  4. Afin de garantir que les services de télévision canadiens continuent à retenir les services des sociétés canadiennes de doublage, le Conseil estime approprié d’augmenter à 33 % le crédit de temps additionnel accordé aux émissions canadiennes et étrangères doublées au Canada. Toutes les autres conditions applicables énoncées dans l’avis public 2000-42 et dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2010-905 demeurent inchangées.
  5. Le Conseil croit que cette mesure permettra aux services de télévision canadiens d’utiliser le plus possible les services de doublage canadiens pour la création et la présentation de programmation aux Canadiens, et ce, conformément à l’article 3(1)f) de la Loi.

C. Soutien réglementaire pour certains types de programmation considérés d’intérêt public, mais seulement en cas d’échec du marché

  1. Selon le Conseil, le système de radiodiffusion devrait s’appuyer sur les forces du marché dans la mesure où celui-ci peut fournir des émissions et des services qui respectent les objectifs de la Loi. Le Conseil n’interviendra que lorsque le marché échouera à fournir de tels services ou émissions.

Supprimer les obstacles réglementaires pour laisser agir les forces du marché - Politique de l’exclusivité des genres

Objectifs visés
Historique
  1. La politique d’exclusivité des genres est un élément clé du présent cadre réglementaire du système de télévision. En vertu de cette politique, les services payants et spécialisés sélectionnés, appelés les services de catégorie A, sont autorisés selon la règle d’un service par genre. Ces services de catégorie A sont autorisés à offrir des émissions d’un type précis provenant de catégories d’émissions précises ou relatives à certains sujets. Les genres sont définis de façon à ce que les services de catégorie A soient complémentaires et ne se fassent pas concurrence l’un et l’autre. Ces services comprennent, par exemple, un service consacré à l’histoire, un autre consacré à la diffusion de films en primeur ou encore un autre qui traite de voyages. Par ailleurs, les services de catégorie B peuvent se faire concurrence l’un et l’autre. Cependant, le Conseil n’autorise généralement pas un service de catégorie B qui serait en concurrence directe avec un service de catégorie A existant. Les services de catégorie C qui exploitent les genres des nouvelles nationales et de sport d’intérêt général peuvent faire concurrence à d’autres services du même genre, mais non à des services de catégorie A.
  2. En vue de garantir qu’un service facultatif demeure distinct et respecte le genre pour lequel il a obtenu une licence, le Conseil impose des conditions de licence qui définissent et limitent les émissions qu’il peut diffuser. Ces conditions de licence sont collectivement appelées la nature du service. Les objectifs du Conseil en ce qui concerne la politique sur le genre ont généralement été à deux volets : garantir la diversité des genres d’émissions et fournir un certain soutien aux services payants et spécialisés de catégorie A afin qu’ils puissent respecter leurs obligations en matière de programmation et de contenu canadien, lesquelles sont généralement plus élevées que celles d’autres types de services payants et spécialisés. La nature du service indique aussi aux abonnés le type de programmation auquel ils peuvent s’attendre.
  3. Bien qu’elle y soit liée par de nombreux aspects, la politique sur l’exclusivité des genres est distincte des règles d’accès relatives à la distribution des services par les EDR, lesquelles ne font pas l’objet de la présente politique. La question des règles d’accès sera traitée dans une politique du Conseil sur le choix du consommateur et la souplesse, laquelle sera publiée au cours des prochaines semaines.
  4. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil sollicitait des observations sur la question de savoir s’il était d’intérêt public de conserver une protection des genres réglementée à l’égard des services payants et spécialisés. Dans le Document de travail, le Conseil a proposé d’éliminer la politique de protection de genres et les mesures de protections des services de catégorie A. Selon cette proposition, les services de catégorie A n’auraient plus une nature de service réglementée, mais livreraient pleinement concurrence aux autres services facultatifs et seraient assujettis aux exigences normalisées.
Positions des parties
  1. Les EDR et les services de programmation possédés ou contrôlés par des sociétés intégrées verticalement étaient, de façon générale, favorables à l’élimination de la protection des genres. Ils ont fait valoir que l’élimination de la protection des genres permettrait aux services de mieux répondre aux nouvelles demandes des consommateurs, encouragerait l’innovation et améliorerait la qualité de la programmation. De plus, selon eux, le processus d’attribution de licence serait simplifié et allégé sur le plan administratif, le marché étant suffisamment mature pour s’ouvrir à la concurrence compte tenu de l’existence d’un grand nombre de services populaires et rentables. Un grand nombre de sociétés intégrées verticalement ont noté que les lignes de démarcation étaient déjà très floues.
  2. Les entreprises de programmation indépendantes, certains groupes représentant des communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM), ainsi que des groupes de créateurs se sont généralement opposés à l’élimination de la protection des genres, surtout en raison de son lien avec les règles d’accès relatives à la distribution obligatoire des services de catégorie A par les EDR. Cependant, ils ont aussi allégué qu’il s’agit d’une mesure importante pour maintenir la diversité de la programmation. Beaucoup ont suggéré que, si la protection des genres était éliminée, il pourrait y avoir une course des services pour s’immiscer et une concurrence accrue pour des émissions très populaires ou à faible budget (surtout des émissions américaines de téléréalité). Plusieurs ont dit craindre qu’en l’absence de la protection des genres, les services de programmation détenus ou contrôlés par des sociétés intégrées verticalement pourraient occuper tous les genres les plus populaires. Les groupes de créateurs ont dit craindre que l’élimination de la protection des genres n’entraîne des demandes en vue de réduire les engagements à l’égard de la programmation canadienne.
  3. Certaines parties, telles que Bell, Corus, l’Alliance des producteurs francophones du Canada (APFC), l’AQPM et le Ministère de la culture et des communications du Québec ont déclaré que la protection des genres devait être conservée dans le marché de langue française. Certains craignaient que sa petite taille le rende plus vulnérable à une concurrence accrue dans les genres populaires et à la domination de Vidéotron dans le marché de la distribution. D’autres craignaient que certains services facultatifs deviennent déficitaires et que la qualité de la programmation en soit donc affectée. Seul Québecor s’est déclaré en faveur de l’élimination de la protection des genres dans ce marché.
  4. IBG a déclaré que la protection des genres était essentielle aux services indépendants et a fait remarquer que les services qui s’étaient éloignés le plus de la nature de leur service semblaient être ceux qui sont détenus ou contrôlés par des sociétés intégrées verticalement. IBG a recommandé qu’elle soit conservée jusqu’à ce que le Conseil renouvelle les licences des services indépendants en 2018, lorsqu’il sera mieux en mesure d’évaluer l’incidence des changements envisagés aujourd’hui. Cependant, ces parties se sont davantage concentrées sur les droits d’accès que sur la protection des genres. Seul Pelmorex a allégué que la protection des genres était plus importante que l’accès.
  5. La SRC a déclaré que l’élimination de la protection des genres permettrait aux sociétés intégrées verticalement de lancer leurs propres services concurrents dans les genres les plus attrayants et d’évincer les services indépendants qui exploitent dans ces genres. Selon elle, cela se traduirait par une diminution de la diversité dans le système. Elle a donc recommandé au Conseil de reconsidérer la question dans trois ans.
  6. Bon nombre de parties ont recommandé que la protection des genres (et les règles d’accès) ne soit éliminée que lors des renouvellements de licence. Bell a proposé que la protection des genres disparaisse en décembre 2015 afin que les services aient le temps de s’adapter.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Le Conseil estime que la protection des genres n’est plus un outil efficace pour garantir la diversité de la programmation. Elle est plutôt devenue un fardeau réglementaire qui fait obstacle à l’innovation en matière de programmation. Elle a aussi comme effet indirect de protéger de la concurrence des marques établies et des services, des services qui sont surtout détenus par des sociétés intégrées verticalement. En fait, à la suite de la consolidation des dernières années, la plupart des 65 services de catégorie A ont été achetés par des grands groupes de propriété privés, et seulement 15 d’entre eux sont considérés comme des services indépendants.
  2. Alors que les services indépendants ont dit craindre que les sociétés intégrées verticalement lancent des services concurrents et, dans les faits, compromettent la survie des services indépendants ou empêchent leur entrée dans le système, le Conseil note que la plupart d’entre eux exploitent déjà dans des genres très spécialisés qui ne sont pas des cibles de choix pour la concurrence.
  3. La réglementation de la protection des genres n’a pas non plus empêché que les lignes entre les services deviennent floues ou que des services s’immiscent et exploitent principalement les mêmes types d’émissions : bon nombre de services se sont éloignés, volontairement ou accidentellement, de la nature de leur service et les grands groupes de radiodiffusion privés qui détiennent plusieurs services de programmation ont souvent transféré des émissions de l’un de leurs services à un autre d’un genre complètement différent, ou encore diffusé les mêmes émissions ou des émissions semblables sur un grand nombre de services, tous de genres différents.
  4. De plus, le Conseil estime que la politique a aussi entraîné des conséquences négatives inattendues, telles que le fait que les conditions de licence sont devenues complexes et difficiles d’application compte tenu de la nature subjective des genres. En outre, la nature exclusive de la protection des genres a fait en sorte que les nouveaux venus ont eu moins d’occasions d’exploiter des genres spécialisés très convoités, même si ce genre avait peut-être été abandonné par le service autorisé à l’exploiter.
  5. Certains genres exploités par les services de catégorie A ont été définis il y a aussi longtemps qu’en 1984, alors que les plus récents ont été établis en 2001. Ces genres et la politique de protection des genres ont sans doute eu du succès dans le passé, mais les besoins et les intérêts des Canadiens, la disponibilité du contenu, les technologies de production et de distribution ont changé radicalement au cours des dernières décennies. Selon le Conseil, il serait illogique de maintenir les politiques et les normes culturelles des décennies passées dans une politique sur le nouvel environnement télévisuel axée sur l’avenir.
  6. Le Conseil est conscient que ces défis sont beaucoup moins significatifs dans le marché de langue française. Les services de langue française ont des marques solides et les différences entre eux sont sans doute plus faciles à établir. Aucun intervenant n’a apporté de preuve convaincante que ces services modifieraient leurs stratégies de programmation au point de nuire de façon importante à la diversité de la programmation offerte aux Canadiens.
  7. Le Conseil estime que l’élimination de la protection des genres offrira aux radiodiffuseurs une plus grande souplesse pour créer ou acquérir la programmation qu’ils croient la plus intéressante pour leurs auditoires. Les services existants ou les nouveaux venus auront dorénavant la possibilité d’adapter leurs stratégies de programmation et de choisir d’exploiter leurs services dans un genre peut-être plus attrayant et populaire auprès des Canadiens. Ils pourront aussi développer des émissions nouvelles, innovatrices et d’un genre nouveau sans avoir à respecter ou à éviter certains genres établis par la réglementation. Ces services seront en mesure de répondre aux demandes changeantes du public et ainsi aider à atteindre les objectifs énoncés à l’article 3(1)s) de la Loi.
  8. De plus, le Conseil estime que l’objectif de la Loi énoncé à l’article 3(1)i)(i) selon lequel la programmation doit être variée et aussi large que possible et qu’elle offre à l’intention des hommes, femmes et enfants de tous âges, intérêts et goûts puisse être atteint par ces services sans une intervention réglementaire de ce type.
  9. Le Conseil note les préoccupations exprimées par plusieurs parties. Cependant, le Conseil estime que le marché assurera la diversité de la programmation, surtout dans un système caractérisé par le très grand choix et la souplesse offerts aux consommateurs. Dans un tel environnement, les services doivent nécessairement se distinguer les uns des autres et offrir une programmation qui intéresse les Canadiens s’ils veulent conserver ou accroître leurs auditoires. La stratégie de marque, le marketing, la promotion et l’investissement dans de la programmation de qualité avec une définition de service seront des éléments clés. Compte tenu des difficultés de la politique sur la protection des genres au cours des dernières années, il n’y aucune preuve que le maintien de la protection des genres servirait à garantir la diversité de la programmation à l’avenir.
  10. En outre, l’élimination de la protection des genres réduira le fardeau administratif parce que les titulaires ne seront plus tenus de demander des modifications relatives à la nature de leur service ou de répondre aux plaintes sur de possibles violations des définitions de nature de service.
  11. À titre d’exception à l’élimination générale de la protection des genres, le Conseil conservera les conditions de licence à l’égard de la nature du service des services qui bénéficient d’une ordonnance de distribution obligatoire en vertu de l’article 9(1)h) de la Loi, y compris les services de nouvelles nationales qui font l’objet d’une discussion plus détaillée ci-dessous. Ces services bénéficient d’une ordonnance de distribution obligatoire en raison de l’importance de la programmation qu’ils offrent dans l’atteinte des objectifs de la Loi.
  12. Le Conseil conservera également les limites qui s’appliquent aux services de sport d’intérêt général. Les titulaires qui choisissent d’exploiter des services de sport d’intérêt général doivent, entre autres, respecter un pourcentage élevé de DÉC, soit 50 % des revenus bruts de radiodiffusion par année. Les autres services facultatifs qui désirent offrir certaines émissions de sport doivent limiter à 10 % le nombre d’émissions de sport professionnel en direct au cours de chaque mois de radiodiffusion, à moins qu’ils choisissent de verser le taux élevé de DÉC et de respecter les autres exigences qui s’appliquent aux services de sport d’intérêt général. Le Conseil conservera donc la limite actuelle de 10 % d’émissions de sport professionnel en direct pour les services facultatifs autres que les services de sport d’intérêt général. Cela fera en sorte que d’autres services ne pourront se transformer en services de sport d’intérêt général sans en assumer les exigences en matière de dépenses et de présentation.
  13. Par conséquent, le Conseil éliminera la politique sur la protection des genres et les protections afférentes pour tous les services facultatifs de langue anglaise et de langue française. Les nouveaux services ou les services existants qui désirent offrir des émissions qui appartiennent à des genres protégés peuvent le faire immédiatement. Le Conseil n’appliquera plus les conditions de licence sur la nature du service, sauf les exceptions énoncées ci-dessus. Les services facultatifs existants, autres que ceux qui bénéficient d’une ordonnance en vertu de l’article 9(1)h) de la Loi, peuvent déposer immédiatement une demande afin de faire supprimer les conditions de licence relatives à la nature de leur service, sauf celles ayant trait au pourcentage maximal de programmation de sport.
  14. Cependant, afin de s’assurer que les Canadiens et le Conseil continuent à avoir de l’information de base sur les services spécialisés en exploitation, les conditions de licence sur la nature du service qui seront supprimées seront remplacées par l’obligation de fournir au Conseil le nom et une brève description du service, ainsi que de mettre à jour ces renseignements en cas de changements. Cette description et le nom d’un service paraîtront sur le site web du Conseil et dans toute décision approuvant un nouveau service ou renouvelant une licence. Plus clairement, la modification du nom d’un service ne changera en rien le nom du titulaire inscrit dans les dossiers du Conseil, et ce dernier n’exigera pas que le service respecte à titre de condition de licence la description fournie.
  15. De plus, le Conseil a modifié l’ordonnance d’exemption relative aux services facultatifs desservant moins de 200 000 abonnés, ordonnance qui fait l’objet d’une discussion plus détaillée dans une section ultérieure, en vue de supprimer l’obligation d’un service exempté de déclarer qu’il respectera la nature du service telle qu’approuvée. Cette ordonnance d’exception est énoncée à l’ordonnance de radiodiffusion 2015-88, également publiée aujourd’hui. Le Conseil modifiera également les conditions de licence normalisées des services VSD énoncées dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-444 afin d’y supprimer l’interdiction d’offrir un bloc de VSD par abonnement canadien qui concurrence directement un service canadien facultatif dont le genre bénéficie d’une protection.

Offrir aux Canadiens une programmation de nouvelles de qualité et des informations de sources diversifiées - Nouveaux critères pour les services de nouvelles nationales

Objectif visé
Historique
  1. Dans l’avis public de radiodiffusion 2008-100, le Conseil a déclaré que les services de programmation exploitant le genre des nouvelles nationales, comme CBC News Network, CTV News Channel, Le Canal Nouvelles (LCN) ou Le Réseau de l’information (RDI), étaient solides, rentables, éminemment populaires et extrêmement concurrentiels. Le Conseil a donc décidé qu’il convenait de permettre la concurrence entre les services canadiens exploitant dans ce genre. Le Conseil a énoncé des conditions de licence normalisées pour les services de nouvelles nationales dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2009-562-2. Ces services bénéficient d’une ordonnance de distribution obligatoire en vertu de l’article 9(1)h) de la Loi (ordonnance de radiodiffusion 2013-735).
  2. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2013-734, le Conseil a énoncé un certain nombre de mesures de protection en vue de garantir un accès plus large et plus équitable aux services de nouvelles nationales pour les Canadiens, y compris l’obligation faite aux EDR de fournir ces services à leurs abonnés. Le Conseil a déclaré dans cette politique réglementaire que les critères d’attribution de licence à ces services devaient être révisés compte tenu des droits privilégiés de distribution dont ils bénéficient et afin de garantir que les Canadiens reçoivent une programmation de nouvelles de grande qualité.
  3. Dans le Document de travail, le Conseil a proposé de nouvelles obligations pour les services spécialisés de nouvelles nationales, dont les suivantes :
    1. la diffusion d’une moyenne de 16 heures par jour, sept jours par semaine, d’émissions de nouvelles originales;
    2. un engagement voulant que la programmation ne soit composée que de programmation de nouvelles et d’actualités.
  4. De plus, le Conseil a proposé que les demandeurs qui veulent lancer un nouveau service de nouvelles nationales soient tenus de démontrer ce qui suit :
    • ils ont un dossier documenté sur leur capacité à produire de la programmation de nouvelles de grande qualité;
    • il existe clairement une demande dans le marché pour un service additionnel de nouvelles nationales;
    • le service proposé ajouterait de la diversité dans le paysage des nouvelles nationales.
Positions des parties
  1. Plusieurs participants à la consultation de la phase 1 de l’instance Parlons télé se sont dits être préoccupés par les nouvelles et les informations. Cette opinion se retrouvait également dans les réponses des Canadiens à un sondage en quête de l’opinion publique mené par Harris/DecimaNote de bas de page 13. Selon les conclusions énoncées dans ce sondage, la programmation de nouvelles représentent le genre d’émissions le plus important aux yeux des Canadiens, qu’il s’agisse de nouvelles locales (81 % ont répondu que c’était important), nationales (78 %), documentaires (72 %) ou internationales (68 %).
  2. De façon générale, les radiodiffuseurs ont appuyé la proposition relative aux services de nouvelles nationales énoncée dans le Document de travail. Certains ont cependant soulevé des préoccupations à l’égard de la programmation originale et des catégories d’émissions desquelles de tels services peuvent tirer leurs émissions.
  3. Bell et Québecor, entre autres, ont déclaré que si le Conseil impose une exigence de 16 heures par jour de programmation originale, cette programmation ne devrait pas être limitée à des émissions de nouvelles en direct de première diffusion, de façon à leur permettre de compter les rediffusions. Ils ont avancé qu’il serait très difficile pour n’importe quel service de nouvelles nationales de respecter une obligation de diffuser 16 heures par jour de nouvelles en direct de première diffusion. Si cette définition de programmation originale était maintenue, Bell a alors suggéré de réduire l’obligation à 12 heures par jour, alors que Québecor a proposé de la fixer à 13 heures par jour, du lundi au vendredi, sans obligation en ce qui concerne les fins de semaine.
  4. En ce qui concerne le genre de programmation que ces services devraient être autorisés à diffuser, quelques radiodiffuseurs étaient d’avis que la programmation devrait être tirée des catégories d’émissions suivantes, énoncées à l’article 6 de l’annexe I du Règlement de 1990 sur les services spécialisés : 1 Nouvelles, 2a) Analyse et interprétation, 2b) Documentaires de langue durée et 3 Reportages et actualités.
  5. Cogeco est la seule EDR qui a présenté des observations à ce sujet. Cogeco n’est pas en faveur de la proposition du Document de travail et allègue que, compte tenu de l’approche proposée par le Conseil à l’égard des forfaits d’assemblage souples, de l’élimination de la protection des genres pour les services spécialisés et d’un choix accru de programmation provenant de sources non canadiennes, il n’y a aucune raison justifiable d’établir et de conserver des conditions particulières d’attribution de licence pour ces services.
  6. Le CPSC a vu dans les critères proposés un pas dans la bonne direction. Cependant, il a ajouté qu’il fallait faire davantage non seulement pour garantir la grande qualité de la programmation de nouvelles, mais aussi pour empêcher que trop de temps d’antenne soit consacré à de l’information basée sur des opinions ou des commentaires plutôt qu’à de l’information basée sur des faits vérifiés. Le CPSC a fait valoir que le présent Code d’indépendance journalistique relevant du Conseil canadien des normes de radiotélévision (CCNR) n’est pas suffisamment détaillé pour garantir une programmation de grande qualité et ne fournit pas de lignes directrices claires sur la programmation basée sur des opinions; il a suggéré de plutôt envisager un code de déontologie plus approprié, s’apparentant à celui du Conseil de presse du Québec, « Droits et responsabilités de la presse », qui comprend de l’information sur la distinction entre les différents genres journalistiques, les conflits d’intérêt, l’intégrité dans la présentation et l’illustration des nouvelles.
  7. Québécor a demandé au Conseil de modifier la condition de licence normalisée qui limite les services de nouvelles nationales à un maximum de 12 minutes de publicité par heure. Il a proposé que ces minutes soient comptées en moyenne au cours d’une journée de radiodiffusion plutôt que par heure, faisant valoir que cette modification accorderait une plus grande souplesse lors de la couverture en continu d’événements spéciaux.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Les services de nouvelles nationales jouent un rôle primordial dans l’atteinte des objectifs de la Loi en aidant les Canadiens à participer pleinement dans la vie démocratique, économique, sociale et culturelle de leur pays, de leurs régions, de leurs provinces et de leurs voisinages. Ces services contribuent également à l’atteinte de l’objectif énoncé à l’article 3(1)d)(ii) de la Loi, selon lequel le système de radiodiffusion devrait fournir de l’information et de l’analyse concernant le Canada et l’étranger, considérés d’un point de vue canadien. De plus, ces services aident à atteindre l’objectif énoncé à l’article 3(1)i)(ii), selon lequel la programmation devrait puiser aux sources locales, régionales, nationales et internationales. Le niveau d’intervention réglementaire exigé du Conseil correspond donc à l’importance placée sur le rôle de ces services.
  2. Dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2013-734, le Conseil a indiqué qu’il estime qu’il y a lieu d’adopter des exigences plus contraignantes afin de garantir que les services de nouvelles nationales fournissent une programmation de nouvelles de grande qualité aux Canadiens et que ceux-ci aient accès à une diversité de points de vue sur des sujets d’intérêt public, surtout depuis que ces services bénéficient d’une distribution obligatoire et d’autres modalités de distribution favorables, telles qu’énoncées dans l’ordonnance de radiodiffusion 2013-735. À cet égard, le Conseil a tenu compte des nombreuses propositions et observations faites par les intervenants au cours de l’instance Parlons télé.
  3. Plus précisément, le Conseil estime que la nature nationale de ces services doit être mieux reflétée dans les critères utilisés pour l’attribution de licence à ces services. Ces services ont l’obligation de refléter et de faire des reportages au sujet de toutes les régions du Canada. Ils doivent donc être en mesure de démontrer qu’ils peuvent cueillir des nouvelles et faire des reportages au sujet des événements qui surviennent partout au pays. Ceci peut être réalisé de plusieurs façons, y compris à l’aide d’ententes avec d’autres services. Les conditions de licence normalisées et les critères d’attribution de licence seront modifiés en conséquence.
  4. De plus, tel qu’indiqué dans les conditions de licence normalisées actuelles, les services de nouvelles nationales peuvent tirer leur programmation de toutes les catégories d’émissions. Le Conseil restreindra cette condition de licence afin que presque toute la programmation soit tirée des catégories d’émissions suivantes, qui sont pertinentes aux services de nouvelles : 1 Nouvelles, 2a) Analyse et interprétation, 2b) Documentaires de longue durée et 3 Reportages et actualités. Cette modification garantira qu’une prédominance de la programmation diffusée s’apparente aux nouvelles tout en continuant de permettre une souplesse à l’égard de la programmation.
  5. En plus des critères d’attribution de licence actuels déjà énoncés dans la politique réglementaire de radiodiffusion 2009-562-2, le Conseil adoptera les critères suivants, qui comprennent les modifications discutées plus haut :
    • Le titulaire doit diffuser, 7 jours par semaine, une moyenne de 16 heures par jour d’émissions originales, calculée sur l’année de radiodiffusion. Il n’est pas nécessaire que ces émissions originales soient de première diffusion.
    • Au moins 95 % de l’ensemble de la programmation diffusée au cours du mois de radiodiffusion doit être tirée des catégories d’émissions suivantes : 1 Nouvelles, 2a) Analyse et interprétation, 2b) Documentaires de longue durée et 3 Reportages et actualités.
    • Le titulaire doit exploiter des installations de diffusion en direct et avoir des bureaux de nouvelles dans au moins trois régions autres que celle d’où provient la diffusion en direct (c.-à-d. qu’il a démontré avoir la capacité de cueillir des nouvelles dans plusieurs régions).
    • Outre les codes présentement établis dans les conditions de licence normalisées, le titulaire devra respecter les codes suivants relevant du CCNR : le Code de déontologie de l’Association des journalistes électroniques, le Code de déontologie de l’Association canadienne des radiodiffuseurs et le Code d’indépendance journalistiqueNote de bas de page 14.
    • Le titulaire devra être en mesure de couvrir des événements internationaux d’un point de vue canadien.
  6. Dans son intervention, Québecor a proposé que la condition de licence à l’égard de la publicité soit modifiée en vue d’accorder aux services de nouvelles nationales la souplesse nécessaire pour offrir une couverture de nouvelles en continu pendant un événement spécial. Le Conseil estime que cette nouvelle souplesse non seulement garantira aux téléspectateurs d’être informés en tout temps des nouvelles de dernière heure, sans interruption, mais permettra également aux services de respecter leurs engagements envers les annonceurs et d’éviter de perdre leur auditoire au profit d’un concurrent. Le Conseil modifiera donc la condition de licence normalisée à l’égard de la publicité afin de permettre aux titulaires de compter le maximum de 12 minutes de publicité permis par heure comme un moyenne au cours d’une journée de radiodiffusion.
  7. En ce qui concerne les services existants, les nouveaux critères énoncés ci-dessus s’appliqueront au moment du renouvellement de licence et serviront à déterminer si un service continuera à bénéficier de l’ordonnance de distribution à titre de service de nouvelles nationales. Les critères serviront également lors de l’évaluation de demandes pour une licence de radiodiffusion en vue d’exploiter un nouveau service de nouvelles nationales. Les demandeurs devront de plus démontrer qu’il existe une demande pour un nouveau service de nouvelles nationales et que le service proposé ajoutera de la diversité dans la programmation offerte par le système.
  8. Le Conseil publiera ces modifications aux conditions de licence normalisées des services de nouvelles nationales dans une politique réglementaire à venir. Le Conseil modifiera également l’ordonnance de distribution obligatoire pour les services de nouvelles nationales afin d’y inclure de nouveaux services, le cas échéant.

Investir dans les émissions qui contribuent de façon importante au système de radiodiffusion - Émissions d’intérêt national

Objectifs visés
Historique
  1. Les objectifs énoncés dans la Loi prévoient que la programmation offerte par le système Canadien de radiodiffusion devrait être variée, aussi large que possible et qu’elle devrait de plus favoriser l’épanouissement de l’expression canadienne en proposant une programmation qui reflète les valeurs et les attitudes canadiennes. Les objectifs prévoient également que la programmation devrait faire appel de façon notable aux producteurs canadiens indépendants. Afin de respecter ces objectifs, le Conseil a, par le passé, encouragé la production de certains types d’émissions - dramatiques, documentaires de longue durée, émissions de musique, de variétés et de remise de prix - au moyen d’exigences en matière de dépenses. Ces émissions sont connues sous le nom d’émissions d’intérêt national (ÉIN).
  2. Les présentes exigences en matière d’ÉIN n’ont été adoptées que récemment, lors du dernier processus de renouvellement de licence pour les grands groupes de propriété privés. Elles comprennent des dépenses minimales et prévoient l’obligation d’attribuer à des émissions faites par des producteurs indépendants un minimum fixe des dépenses au titre des ÉIN. Du côté des services de langue française, seuls les services facultatifs qui faisaient partie du groupe désigné Astral en 2012 sont présentement assujettis à une exigence en matière d’ÉIN.
  3. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a demandé s’il devait continuer à encourager la production de certains types d’émissions et quels types d’émissions il devait ainsi encourager. Dans le Document de travail, le Conseil a proposé de conserver les exigences existantes au titre des ÉIN à la fois pour le marché de langue anglaise et le marché de langue française. En ce qui concerne le marché de langue française, ces exigences seraient réexaminées lors des renouvellements de licence. Le Document de travail proposait également que les émissions pour enfants soient considérées comme des ÉIN.
Positions des parties
  1. Au cours de la consultation en ligne et pendant la période d’intervention, un grand nombre de Canadiens ont insisté sur l’importance des dramatiques, de la programmation pour enfants et, dans une moindre mesure, des documentaires canadiens. Le sujet de la programmation pour enfants a suscité beaucoup de commentaires. Un Canadien était d’avis que les enfants devraient grandir en regardant du contenu canadien.
  2. Par exemple, un Canadien a exprimé ainsi son appui aux dramatiques canadiennes : [traduction] « Je préférerais que la réglementation recommence à accorder une plus grande priorité aux dramatiques qu’aux documentaires, à la téléréalité, etc. La téléréalité coûte moins cher à produire que les dramatiques; alors, les mettre sur le même pied favorise la téléréalité au détriment des dramatiques. » De façon plus générale, un autre participant pose la question suivante : [traduction] « Comment le Canada peut-il conserver une culture distinctement canadienne si son paysage télévisuel est américain? »
  3. Les sociétés intégrées verticalement étaient généralement d’avis de conserver les présentes exigences en matière d’ÉIN. Pour sa part, Rogers a fait valoir que les dépenses en ÉIN devraient servir à créer du contenu local original. À l’audience, Rogers a déclaré que l’allocation minimale des dépenses en ÉIN consacrée aux émissions produites par des producteurs indépendants nuisait à la création de productions à gros budget et à risque plus élevé. Bell a proposé que le critère pour qualifier une émission d’ÉIN soit le degré de risque qu’elle présente.
  4. Les groupes de créateurs et d’autres, comme la CMPA, le Writers Guild, l’ACTRA, ainsi que le FMC appuyaient tous le maintien du régime des ÉIN. Le FMC a déclaré que [traduction] « quatre ans de politique publique et de soutien réglementaire ont fait une différence. Les Canadiens regardent des émissions canadiennes de grande qualité aux heures de grande écoute. » Le ministère du Tourisme, de la Culture et du Sport de l’Ontario a déclaré que les ÉIN étaient importantes pour sa province.
  5. La plupart des intervenants qui ont fait des observations sur les exigences de dépenses en matière d’ÉIN pour les services de langue française étaient favorables au maintien ou à l’augmentation de celles-ci. Bell était d’accord pour le maintien des exigences imposées aux services spécialisés si on conservait la politique d’exclusivité des genres et les droits d’accès des services de catégorie A de langue française.
  6. L’UDA, la SARTEC et l’ARRQ étaient d’avis que les ÉIN demeuraient la pierre angulaire de la télévision de langue française, mais que les exigences actuelles, imposées de façon inégale aux différents services de langue française, n’accordaient pas de protection suffisante à ces catégories. Ils notaient de plus que Groupe TVA n’était assujetti pour l’instant à aucune condition de licence à l’égard de la présentation ou des dépenses en matière d’ÉIN et que V Média n’avait que des obligations minimales de présentation. L’UDA, la SARTEC et l’ARRQ estimaient que le statu quo était préférable à l’élimination totale des exigences à cet égard, mais elles favorisaient l’imposition à chaque service de conditions de licence ciblées et de taux minimaux précis pour chaque catégorie d’émissions.
  7. Seul Corus a proposé d’éliminer les exigences de dépenses en ÉIN pour les services spécialisés de langue française, faisant valoir que ces catégories d’émissions recevaient déjà un soutien adéquat au moyen de mécanismes de financement, comme le FMC et les crédits d’impôt, d’autant plus que les radiodiffuseurs en ligne étrangers ne sont pas assujettis aux mêmes exigences.
  8. En ce qui concerne la programmation pour enfants, la majorité des intervenants était favorable à son inclusion dans la définition d’ÉIN. On Screen Manitoba a fait valoir qu’une catégorie « programmation pour enfants » constituerait une approche mesurable en vue de garantir que les Canadiens de tous âges aient accès à de la programmation canadienne originale de grande qualité.
  9. Le fonds Shaw Rocket et la Youth Media Alliance étaient d’accord pour ajouter la programmation pour enfants à la définition d’ÉIN. Cependant, le fonds Shaw Rocket a ajouté que sans une garantie de dépenses minimales, il n’y avait aucune garantie que davantage de programmation pour enfants serait produite.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Le Conseil estime que les exigences de dépenses en matière d’ÉIN sont toujours utiles en vue de garantir que les Canadiens aient accès au plus grand nombre possible d’émissions des catégories d’émissions qualifiées d’intérêt national et qui exigent un soutien réglementaire continuel. Ce point de vue est partagé par un très grand nombre d’intervenants, y compris des particuliers canadiens.
  2. Les exigences en matière d’ÉIN ont été énoncées pour la première fois pour le marché de langue anglaise en 2011, pour le marché de langue française en 2012 et pour les services de la SRC en 2013. Lors du renouvellement des licences de radiodiffusion des services de Rogers en 2014, les exigences en matière d’ÉIN ont été uniformisées avec celles des autres groupes de propriété de langue anglaise. Puisque les exigences en matière d’ÉIN n’ont été mises en place que récemment, le Conseil estime qu’il est prématuré de modifier la politique pour l’instant. Les exigences actuelles en matière d’ÉIN, y compris les catégories d’émissions spécifiques pour chaque marché linguistique, seront donc maintenues.
  3. Pour les services dans le marché de langue française, le Conseil examinera les exigences en matière d’ÉIN lors de leurs prochains renouvellements de licence. Le Conseil tiendra compte des circonstances particulières de chaque service, y compris leur inclusion dans des groupes de propriété de tailles et de situations variées, lorsqu’il décidera des exigences.
  4. Le Conseil estime également que la condition de licence exigeant qu’au moins 75 % des exigences de dépenses au titre des ÉIN soient consacrées à des émissions produites par des producteurs indépendants est l’un des moyens par lequel l’objectif de la Loi relatif au secteur indépendant est respecté; cette condition devrait donc être maintenue.
Définition des émissions d’intérêt national
  1. Comme des parties l’ont fait remarquer lors de l’audience, il n’existe pour l’instant aucun test pour déterminer s’il est nécessaire de soutenir des types particuliers d’émissions au moyen de mesures réglementaires comme les ÉIN.
  2. Tant dans son intervention qu’à l’audience, Bell a suggéré que le risque (au sens du risque financier de produire ou d’acquérir une émission possiblement peu rentable ou dont les coûts seraient irrécupérables) soit un facteur à considérer dans la décision de qualifier un type d’émission soit considéré comme une ÉIN.
  3. L’article 3(1)d)(ii) de la Loi prévoient comme objectif que le système de radiodiffusion doit proposer aux Canadiens une vaste gamme de programmation qui traduise des attitudes, des opinions, des idées, des valeurs et une créativité artistique canadiennes. Par conséquent, tout test en vue de déterminer si un type particulier d’émission doit être considéré comme une ÉIN doit faire en sorte d’aider à réaliser cet objectif de la Loi.
  4. Lorsque le Conseil examine si certains types d’émissions requièrent un soutien réglementaire, il doit se demander si les objectifs ou les résultats particuliers souhaités seraient possibles en l’absence d’une intervention réglementaire.
  5. À cet égard, le Conseil estime que les notions de risque et de besoin de soutien doivent être considérées en conjonction avec la contribution qu’une telle programmation apporte au système de radiodiffusion. Le Conseil appliquera donc un test en trois étapes lors de ses prochaines décisions relatives au retrait ou à l’ajout de catégories d’ÉIN. Plus précisément, un type de programmation ne devrait être qualifié d’ÉIN uniquement si :
    1. il est généralement cher à produire et comporte un risque élevé de non-rentabilité;
    2. la grande accessibilité d’une telle programmation aux Canadiens est nécessaire afin d’atteindre les objectifs de la Loi;
    3. en l’absence de soutien réglementaire, une telle programmation ne pourrait être autrement offerte aux Canadiens.
  6. Le Conseil utilisera le test ci-dessus s’il décide de lancer une instance de politique afin d’ajouter ou de retrancher une catégorie d’émissions des ÉIN à l’avenir. La mise en œuvre de toute modification aux catégories aura lieu lors des renouvellements de licence.
Programmation pour enfants
  1. Le Conseil estime que la programmation pour enfants et la programmation jeunesse font partie intégrante du système de radiodiffusion. Au cours de chaque étape de l’instance Parlons télé, des particuliers canadiens et d’autres intervenants ont discuté, à l’écrit et à l’oral, de la valeur de la programmation pour enfants et de l’importance que les enfants canadiens regardent de la programmation canadienne. En ce qui concerne son inclusion dans la définition des ÉIN, il convient de noter que certaines émissions pour enfants et émissions jeunesse, comme les dramatiques pour enfants, sont déjà considérées comme des ÉIN.
  2. Cependant, dans le cadre de la présente instance, des données conflictuelles ont étés déposées quant au financement et à la production de la programmation jeunesse et pour enfants. Par conséquent, le Conseil reconnaît qu’il existe un besoin de recueillir un plus grand nombre de données détaillées pour surveiller de façon efficace le nombre de projets pour enfants qu’il certifie, de même que les dépenses consacrées à ce type de programmation. Les divers règlements ne comprennent à l’heure actuelle aucune catégorie d’émissions consacrées aux enfants et à la jeunesse qui pourrait faciliter le processus. Par conséquent, en vue de surveiller la création, la présentation d’émissions pour enfants et d’émissions jeunesse ainsi que les dépenses qui y sont consacrées, le Conseil publiera un avis de consultation plus tard au cours de l’année afin de lancer une instance pour créer des sous-catégories d’émissions pour enfants. Ces sous-catégories pourraient être basées sur les groupes d’âge de l’auditoire cible, comme les groupes d’âge préscolaire (0-4), scolaire (5-12) et jeunesse (13-17).

D. Un processus d’attribution de licence aux services simplifié et allégé

Regroupement des licences des services de programmation

Objectif visé
Historique
  1. Présentement, le Conseil accorde des licences à plus de 20 types différents de services de programmation, tels que la télévision traditionnelle, les services payants et spécialisés de catégorie A et de catégorie B, les services de programmation communautaire, les services de VSD, les services de TVC, etc.
  2. Bon nombre de ces types de services sont assujettis à leur propre ensemble de conditions de licence normalisées, en plus des conditions particulières à chaque licence.
  3. Dans l’avis de consultation de radiodiffusion 2014-190, le Conseil a proposé de simplifier l’approche à l’égard de l’attribution de licence aux services de programmation en regroupant les services en trois types, selon la façon dont ces services sont distribués aux Canadiens par les EDR. Ces trois types seraient les suivants :
    1. les services de base (les stations traditionnelles en direct et les services éducatifs provinciaux);
    2. les services facultatifs (tous les services payants et spécialisés);
    3. les services sur demande (les services de VSD et de TVC).
Positions des parties
  1. La plupart des radiodiffuseurs et des EDR étaient généralement favorables au regroupement des types de licence, bien que Bell et Corus aient suggéré que cette approche ne soit pas mise en œuvre dans le marché de langue française. Cogeco a fait valoir que cette approche ne simplifierait le processus que si le Conseil normalisait les exigences de tous les services d’une catégorie donnée dans son ensemble. Si chaque service individuel a sa longue liste d’exigences additionnelles, le processus d’attribution de licence deviendra complexe.
  2. À l’audience, le CPSC a déclaré que des conditions de licence normalisées pour les services facultatifs seraient nuisibles, surtout à l’égard du marché de langue française. Il a ajouté que cela inciterait les services spécialisés à diffuser des émissions d’intérêt général, ce qui leur permettrait de puiser à même les revenus de publicité des stations traditionnelles, qui sont déjà en situation précaire.
  3. Fairchild Television Ltd. a indiqué qu’il n’était pas dans l’intérêt public d’imposer des conditions de licence normalisées à tous les services spécialisés de catégorie A et de catégorie B.
  4. Dans son intervention finale, Corus a aussi demandé qu’au cours du processus, le Conseil élimine toutes les anciennes conditions de licence, qu’il définit comme des conditions uniques, particulières et qui reflètent le plus souvent les engagements pris lors de l’attribution de licence aux services. Il a également pressé le Conseil de reconnaître le besoin d’une souplesse accrue et d’un allègement du fardeau réglementaire lors de la rédaction des conditions de licence normalisées.
  5. La CMPA a déclaré être favorable au regroupement des licences des services de programmation, sous réserve que le Conseil lance une autre instance en vue d’établir les obligations appropriées à l’égard de la programmation canadienne. Cependant, elle a ajouté que la normalisation des obligations, associée au regroupement des licences des services de programmation, ne devrait pas entraîner de diminution nette des contributions au titre de la programmation canadienne dans l’ensemble du système.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Compte tenu des autres changements annoncés dans la présente politique, le Conseil estime qu’il convient de simplifier le processus d’attribution de licence et de regrouper pratiquement toutes les licences des services de programmation de télévision en trois grandes catégories. Tel que proposé dans le Document de travail, les trois catégories seront les suivantes :
    1. les services de base (y compris les stations traditionnelles et communaitaires en direct et les services éducatifs provinciaux);
    2. les services facultatifs (tous les services payants et spécialisés, y compris les services, autres que ceux de stations de télévision traditionnelle, qui bénéficient d’une ordonnance de distribution obligatoire au service de base en vertu de l’article 9(1)h) de la Loi);
    3. les services sur demande (les services de VSD et de TVC).
  2. Chaque type de licence aura ses propres conditions de licence normalisées. Les stations traditionnelles et communautaires en direct et les services éducatifs provinciaux seront autorisés à titre de services de base, avec des conditions de licence qui les distingueront des autres services de base. De même, les services de nouvelles nationales et les services de sport d’intérêt général seront autorisés à titre de services facultatifs, avec des conditions de licence additionnelles particulières qui ne s’appliqueront pas aux autres services facultatifs. Comme c’est présentement le cas, le Conseil aura l’option d’imposer des conditions de licence individuelles à des services particuliers.
  3. Le Conseil établira les exigences normalisées pour chaque nouvelle catégorie de licence et modifiera les différents règlements lors d’une prochaine instance. Les nouvelles catégories de licence seront mises en place par la voie du processus de renouvellement de licence et entreront en vigueur pour chaque service dès le début de sa prochaine période de licence.

Élargir la portée de l’ordonnance d’exemption pour les services qui desservent moins de 200 000 abonnés - Nouvelle ordonnance d’exemption pour les services facultatifs

Objectif visé
Historique
  1. Le Conseil exempte présentement certaines catégories de services de programmation de l’obligation de détenir une licence de radiodiffusion pourvu qu’ils respectent les critères spécifiques énoncés dans l’ordonnance d’exemption pertinente. Les services présentement exemptés comprennent certains services en langue tierce et des services de catégorie B qui desservent moins de 200 000 abonnés.
  2. Dans le Document de travail, le Conseil a proposé d’élargir la portée de l’ordonnance d’exemption relative aux services de programmation en langue tierce en éliminant les exclusions à l’égard de langues particulières et d’élargir la portée de l’ordonnance d’exemption relative aux services de catégorie B pour y inclure tous les services facultatifs comptant moins de 200 000 abonnés. Ces deux ordonnances d’exemption sont présentement énoncées dans l’ordonnance de radiodiffusion 2012-689.
Positions des parties
  1. Dans ses commentaires, Rogers a fait valoir l’inutilité de réviser ou de simplifier les ordonnances d’exemption, puisque l’ordonnance relative aux services de catégorie B n’est en vigueur que depuis peu et que l’élargissement de la portée de l’ordonnance d’exemption relative aux services en langue tierce ne fera vraisemblablement pas augmenter le nombre de ces types de services. Il a ajouté qu’il est même possible que l’élargissement de la portée de l’ordonnance d’exemption des services en langue tierce complique la surveillance de ces services par le Conseil.
  2. Bell a déclaré que si le Conseil élimine l’exclusivité des genres pour les services en langue tierce, il serait en faveur d’exempter de l’obligation de détenir une licence tous les services de ce type, pourvu qu’ils respectent des exigences minimales. Bell a aussi suggéré d’élargir l’ordonnance d’exemption actuelle relative aux services de catégorie B comptant moins de 200 000 abonnés pour y englober les services qui desservent jusqu’à 500 000 abonnés.
  3. Asian Television Network International a exprimé des réserves au sujet de l’élargissement de la portée de l’ordonnance d’exemption à l’égard des services en langue tierce. Il estimait que cette mesure n’accroîtrait pas la souplesse pour les consommateurs et qu’elle ne serait adoptée que pour des raisons d’ordre administratif.
  4. IBG appuyait un recours plus fréquent aux ordonnances d’exemption et l’effort du Conseil pour en élargir la portée, particulièrement en vue de garantir que les exigences en matière de programmation soient conformes à d’autres exigences réglementaires. IBG a de plus exprimé l’avis qu’il convient de modifier l’ordonnance d’exemption relative aux services en langue tierce pour permettre à des services de radiodiffusion en certaines langues de réduire leurs exigences de contenu canadien.
  5. Cogeco et Sasktel étaient tous deux en faveur de l’élargissement des ordonnances d’exemption actuelles pour y inclure plus de services de programmation facultatifs et sur demande comptant un petit nombre d’abonnés.
Analyse et décisions du Conseil
  1. Le Conseil estime que les ordonnances d’exemption actuelles relatives aux services de catégorie B et à certains services en langue tierce peuvent être réunies et élargies pour y inclure tous les services facultatifs comptant moins de 200 000 abonnés. Cette nouvelle ordonnance d’exemption conservera certaines distinctions entre, d’une part, les services de langue anglaise et ceux de langue française et, d’autre part, les services en langue tierce, telles que les exigences de présentation réduites qui s’appliquent aux services en langue tierce, mais il imposera une série d’obligations communes à l’ensemble de ces services.
  2. La réunion et l’élargissement des ordonnances d’exemption n’ajouteront pas des obligations aux services exemptés; au contraire, elles auront pour objectif de permettre à un plus grand nombre de services de s’inscrire à titre de service exempté, ce qui réduira le fardeau administratif des radiodiffuseurs comptant moins d’abonnés et réduira le fardeau administratif sur les ressources du Conseil. En outre, les obligations à l’égard du respect de la nature du service seront éliminées, de concert avec l’élimination de la protection de genre, et le fardeau réglementaire de ces services en sera allégé.
  3. Par conséquent, le Conseil publie aujourd’hui l’ordonnance de radiodiffusion 2015-88, l’ordonnance d’exemption réunie et élargie s’appliquant aux services facultatifs. L’ordonnance d’exemption pour les services facultatifs entrera en vigueur lorsque le Règlement sur la distribution de radiodiffusion aura été modifié afin d’en inclure une référence. Les ordonnances d’exemption actuelles pour les services de catégorie B et pour certains services en certaines langues tierces demeureront en vigueur jusqu’à ce que le Règlement soit modifié.
  4. Par le passé, les services qui préféraient être exploités en vertu d’une licence de radiodiffusion plutôt qu’à titre d’entreprises exemptées ont parfois obtenu une licence même s’ils étaient admissibles à une exemption en vertu de l’une ou l’autre des ordonnances d’exemption susmentionnées. Une fois la nouvelle ordonnance d’exemption élargie entrée en vigueur, le Conseil n’accordera plus de licence à des services admissibles à une exemption en vertu de cette ordonnance.

Secrétaire general

Documents connexes

Notes de bas de page

Note de bas de page 1

Voir aussi à cet égard l’avis d’invitation de radiodiffusion 2013-563.

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Note de bas de page 2

Les EDR qui exploitent un canal communautaire peuvent consacrer une partie de leurs contributions à leurs dépenses relatives à l’expression locale.

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Note de bas de page 3

Voir la politique réglementaire de radiodiffusion 2014-459.

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Note de bas de page 4

Les chiffres proviennent du Conseil et de sources externes et se veulent un survol de l’ampleur des dépenses en émissions canadiennes ainsi que les divers mécanismes qui existent afin de soutenir de telles dépenses.

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Note de bas de page 5

Les « disponibilités locales » sont des périodes de temps pendant la diffusion d’émissions non canadiennes au cours desquelles des annonces ou des publicités sont insérées à la suite d’ententes conclues entre les EDR et les services non canadiens.

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Note de bas de page 6

Ou distribués au moyen de la technologie point à point et captés par des appareils mobiles.

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Note de bas de page 7

Une coproduction est une œuvre audiovisuelle produite conjointement par un producteur canadien et un producteur d’un autre pays avec lequel le Canada a signé un traité de coproduction administré par Téléfilm Canada. Au cours des 50 dernières années, le Canada a signé des traités de coproductions audiovisuelles avec 54 pays (pour obtenir de plus amples renseignements, voir http://www.pch.gc.ca/fra/1358521061176). Une coentreprise est une coproduction internationale non visée par un traité relevant de Téléfilm Canada, ce qui inclut tous les projets entrepris avec des coproducteurs d’autres pays n’ayant pas signé de traité de coproduction de films ou d’émissions de télévision avec le Canada et tous les projets entrepris avec des coproducteurs de pays visés par un traité, mais dont le traité ne porte pas précisément sur la coproduction en cause.

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Note de bas de page 8

Pour obtenir de plus amples renseignements, voir le Guide des formulaires de la Certification des émissions canadiennes du CRTC, énoncé sur le site web du Conseil.

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Note de bas de page 9

Ce groupe comprend les membres suivants : Aboriginal Peoples Television Network, Channel Zero, Ethnic Channels Group, Fairchild Television, Stornoway et S-VOX Group of Companies.

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Note de bas de page 10

La substitution simultanée est le remplacement temporaire d’un signal d’une station non canadienne par celui d’une station canadienne lorsque l’émission diffusée est « comparable » (au moins identique à 95 % en excluant les messages publicitaires). Effectuée à la demande du télédiffuseur par des EDR - la plupart du temps sur le marché de langue anglaise -, la substitution simultanée permet aux télédiffuseurs canadiens de maximiser les auditoires et les revenus publicitaires des émissions non canadiennes dont ils se sont procuré les droits pour le marché canadien. Elle aide ainsi à assurer aux télédiffuseurs les ressources financières nécessaires pour contribuer au système canadien de radiodiffusion en produisant à leur tour de la programmation canadienne.

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Note de bas de page 11

Les exigences de présentation imposées aux réseaux de la SRC demeurent inchangées.

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Note de bas de page 12

À l’heure actuelle, ces services sont les suivants : APTN, CPAC, AMI-tv, AMI-tv français et TV5/UNIS dans tous les marchés; RDI, TVA, The Weather Network et AMI-audio dans les marchés de langue anglaise; CBC News Network, Météomédia, Canal M et Avis de recherche dans les marchés de langue française; et les assemblées législatives du Nunavut et des Territoires du Nord-Ouest pour les EDR par satellite de radiodiffusion directe desservant le Nunavut et les Territoires du Nord-Ouest. Cela comprend également les services de nouvelles nationales CBC News Network, CTV News Channel, Le Canal Nouvelles et RDI.

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Note de bas de page 13

Voir Parlons télé : Rapport de recherche quantitative.

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Note de bas de page 14

CBC News Network et RDI sont présentement assujettis à Normes et pratiques journalistiques de la SRC et continueront de l’être.

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