ARCHIVÉ - Décision de radiodiffusion CRTC 2008-13

Cette page Web a été archivée dans le Web

Information archivée dans le Web à des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Les décisions, avis et ordonnances (DAO) archivés demeurent en vigueur pourvu qu'ils n'aient pas été modifiés ou annulés par le Conseil, une cour ou le gouvernement. Le texte de l'information archivée n'a pas été modifié ni mis à jour depuis sa date de mise en archive. Les modifications aux DAO sont indiquées au moyen de « tirets » ajoutés au numéro DAO original. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s'appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez obtenir cette information dans un autre format en communiquant avec nous.

 

Décision de radiodiffusion CRTC 2008-13

  Ottawa, le 21 janvier 2008
 

Plainte de Avis de recherche inc. contre Vidéotron ltée, alléguant une préférence indue

  Le Conseil conclut que Vidéotron ltée n'a pas enfreint l'article 9 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion qui interdit à une titulaire d'accorder à quiconque, y compris elle-même, une préférence indue ou d'assujettir quiconque à un désavantage indu. Le Conseil rejette donc la plainte de Avis de recherche inc.
 

Les parties

1.

Avis de recherche inc. (ADR) est la titulaire du service de programmation d'émissions spécialisées de catégorie 2 de langue française s'appelant Avis de Recherche. Sa programmation est constituée d'émissions destinées principalement à offrir aux organismes chargés d'appliquer la loi au Canada un outil médiatique pour obtenir de l'information.

2.

Vidéotron ltée (Vidéotron), la plus grande entreprise de distribution de radiodiffusion (EDR) au Québec, est une filiale à part entière de Quebecor Média inc.
 

La plainte

3.

Le 11 avril 2007, ADR a déposé une plainte alléguant que Vidéotron menace de retirer Avis de Recherche de son service de base numérique si les sommes dues à Vidéotron pour la télédistribution du service ne sont pas payées. Dans sa plainte, ADR fait valoir qu'à sa connaissance, Vidéotron n'exige pas de frais de distribution des autres services spécialisés canadiens de catégorie 2 qu'elle distribue, dont le service de catégorie 2 qui lui est lié, Prise 2. ADR précise que Avis de Recherche est distribué au Québec au service numérique de base de Vidéotron depuis le 21 octobre 2004.

4.

ADR indique que Vidéotron ne distribue que trois services de programmation d'émissions spécialisées de catégorie 2 de langue française numériques canadiens, soit cinépop, un service qui appartient à Astral Média inc., Prise 2, un service lié appartenant à Groupe TVA inc. (Groupe TVA) et Avis de Recherche. ADR estime que la distribution par Vidéotron de ces trois services ne respecte pas l'esprit de la réglementation du Conseil, et plus particulièrement l'article 18(14) du Règlement sur la distribution de radiodiffusion (le Règlement) qui se lit comme suit :
 

Sauf condition contraire de sa licence, le titulaire doit, pour chaque service de catégorie 2 et chaque service en langues tierces exempté d'une entreprise de programmation liée qu'il distribue dans une zone de desserte autorisée, distribuer dans celle-ci au moins cinq services de catégorie 2 ou services en langues tierces exemptés, ou un ensemble d'au moins cinq de ces services, d'entreprises non liées. 

5.

Bien qu'ADR concède que cette réglementation ne semble pas s'appliquer sur une base linguistique, elle est d'avis que le fait de ne pas appliquer cette réglementation sur une base linguistique restreint les possibilités pour les services numériques de catégorie 2 de langue française non liés à des EDR d'obtenir l'accès à la distribution dans le marché linguistique principal du service.

6.

De plus, ADR estime que l'imposition de conditions de distribution qui prévoient le versement à Vidéotron d'un tarif mensuel pour la distribution de Avis de Recherche au service numérique de base des EDR de Vidéotron va à l'encontre de l'objectif de la politique canadienne de radiodiffusion, énoncé à l'article 3(1)t)(iii) de la Loi sur la radiodiffusion (la Loi). L'article 3(1)t)(iii) de la Loi stipule que les entreprises de distribution ont l'obligation d'offrir « des conditions acceptables relativement à la fourniture, la combinaison et la vente des services de programmation qui leur sont fournis, aux termes d'un contrat, par les entreprises de radiodiffusion ».

7.

ADR allègue qu'en versant à Prise 2 un tarif mensuel de gros tout en refusant d'en verser un au service spécialisé non lié, Vidéotron accorde à Prise 2 une préférence indue. De plus, selon elle, en exigeant d'ADR le versement d'un tarif mensuel pour que son service soit distribué, Vidéotron impose à Avis de Recherche un désavantage indu.

8.

ADR fait aussi valoir que, comme elle doit se conformer à l'article 10.1 du Règlement de 1990 sur les services spécialisés dont le texte est similaire à celui de l'article 9 du Règlement, l'entente conclue avec Vidéotron l'empêche, en pratique, de voir son service distribué par une EDR appartenant à une autre titulaire. Selon ADR, afin de ne pas assujettir une autre EDR à un désavantage indu en regard de Vidéotron, et afin de respecter la réglementation actuelle, celle-ci devrait payer toute autre EDR qui consentirait à distribuer son service, et, en conséquence, elle serait acculée à la faillite.

9.

ADR note que l'entente prévoit une croissance du tarif exigé par Vidéotron pour la distribution d'Avis de Recherche, qui passe d'un maximum équivalant à 0,03 $ par abonné par mois en 2002 à 0,07 $ par abonné par mois en 2004, soit une croissance de 133 % en deux ans. Selon ADR, comme Vidéotron a toujours soutenu qu'il n'y avait aucune justification à ce que le Conseil augmente les tarifs mensuels de gros que les distributeurs doivent verser aux services spécialisés analogiques canadiens lorsqu'ils sont distribués au service de base, il est pour le moins paradoxal et ironique de voir Vidéotron considérer comme justifiée une augmentation de 133 % sur 2 ans lorsque c'est elle qui se fait payer pour distribuer le service.

10.

ADR est donc d'avis que Vidéotron a fait preuve de préférence indue à l'endroit de Prise 2 et a assujetti Avis de Recherche à un désavantage indu en utilisant son pouvoir de marché pour imposer à ADR une entente de distribution qui reflète les clauses types des ententes de distribution qui régissent les relations de Vidéotron avec des services exemptés de l'obligation de détenir une licence (du type Télé‑Achat  ou Télé-Annonces) qui bénéficient du privilège de pouvoir diffuser 60 minutes de publicité à l'heure.
 

Position de Vidéotron

11.

Vidéotron fait valoir que la distribution du service de catégorie 2 Avis de Recherche n'est pas obligatoire1. Vidéotron ajoute qu'elle a accepté de distribuer ce service à la base numérique sous réserve de conditions spécifiques de distribution, établies par les deux parties, afin qu'elle n'ait pas à encourir de frais additionnels pour la distribution de Avis de Recherche - d'où la facturation mensuelle à Avis de Recherche. Selon Vidéotron, cette entente initiale a été négociée de bonne foi par les parties et a été convenue avant le lancement du service. Malgré l'entente initiale entre Vidéotron et ADR, cette dernière n'a pas toujours respecté ses obligations et Vidéotron a constamment tenté de régler ces défauts de bonne foi. Vidéotron soutient qu'elle ne doit pas être tenue responsable des infortunes d'ADR, surtout qu'elle ne respecte même pas l'entente convenue entre les deux parties.

12.

Vidéotron indique ne pas avoir été convaincu que ce service allait être suffisamment attrayant pour les consommateurs. D'ailleurs, selon Vidéotron, aucun distributeur ne s'était montré intéressé à distribuer Avis de Recherche gratuitement au service de base à ce moment-là et aucun distributeur canadien ne s'est montré intéressé depuis. Vidéotron tenait donc à ne pas facturer les consommateurs pour un tel service. Vidéotron affirme qu'ADR a insisté pour que son service soit distribué à la base numérique « en appuyant le modèle convenu au moyen d'assurance verbale de commandites de la part de divers corps policiers ». Vidéotron ajoute que le modèle de tarification convenu entre les deux parties témoigne ainsi du fait qu'ADR comptait exclusivement sur les revenus publicitaires pour assurer la viabilité de son service et non sur les revenus d'abonnement.

13.

Dans les circonstances, Vidéotron est d'avis qu'ADR a déposé une plainte au Conseil pour, à la fois, essayer de se faire libérer de sa créance envers Vidéotron et, de surcroît, pour faire modifier les modalités de l'entente afin d'être relevée de l'exigence d'effectuer des paiements à Vidéotron à l'avenir. Selon Vidéotron, ADR désire convaincre le Conseil qu'il s'agit d'un enjeu réglementaire alors qu'il s'agit plutôt d'un enjeu strictement contractuel qui serait mieux servi devant les tribunaux responsables.

14.

Vidéotron est d'avis que l'article 18(14) du Règlement ne s'applique pas sur une base linguistique, ce qui rend l'argument d'ADR non fondé et complètement faux. Vidéotron estime qu'elle respecte la réglementation actuelle puisqu'elle offre un total de 41 services de catégorie 2 pour un seul service lié. Vidéotron note d'ailleurs que, présentement, trois services de programmation d'émissions spécialisées de catégorie 2 de langue française sont en exploitation, soit Prise 2, cinépop et Avis de Recherche. Vidéotron est donc d'avis que, étant donné le nombre limité de services de catégorie 2 de langue française, le Conseil a cru bon réglementer sans égard à la langue.

15.

Vidéotron maintient qu'en demandant une licence de catégorie 2, ADR connaissait très bien les règles applicables à cette licence et, par conséquent, ADR devait savoir que les entreprises de distribution ne sont responsables d'aucune façon de la viabilité de cette catégorie de service. Vidéotron ajoute qu'ADR était, et demeure libre, de contracter quelque entente que ce soit avec un distributeur et que le Conseil « n'a jamais voulu intervenir dans les ententes d'affiliation entre les entreprises de programmation de catégorie 2 et les entreprises de distribution ».

16.

En présumant pour fins d'analyse que Vidéotron ait pu s'être involontairement accordée une préférence, ce que Vidéotron nie catégoriquement, celle-ci ne pourrait en aucun cas être qualifiée de préférence indue au sens de la réglementation. Il serait, selon Vidéotron, manifestement déraisonnable dans les circonstances d'assujettir Vidéotron au paiement de pénalités, ou même à un simple blâme, en raison de l'incapacité d'ADR de réaliser son plan d'affaires et d'assumer les risques liés à l'exploitation de sa licence.

17.

Selon Vidéotron, les sommes payées jusqu'ici par ADR ont été versées conformément à une entente conclue de bonne foi entre les parties et dans le respect mutuel des droits de chacun.
 

Analyse et décision du Conseil

 

Préférence ou désavantage

18.

L'article 9 du Règlement prévoit ce qui suit :
 

Il est interdit au titulaire d'accorder à quiconque, y compris lui-même, une préférence indue ou d'assujettir quiconque à un désavantage indu.

19.

Lorsqu'il analyse une plainte en vertu de l'article 9 du Règlement, le Conseil cherche d'abord à déterminer si une partie a accordé une préférence à quiconque, ou a assujetti quiconque à un désavantage. Ensuite, le Conseil examine le caractère indu de cette préférence ou de ce désavantage. En étudiant cette deuxième question, il prend en considération le fait que la préférence ou le désavantage ait eu, ou aura vraisemblablement, des incidences négatives importantes sur le plaignant ou toute autre personne. Le Conseil analyse finalement les conséquences que cette préférence ou ce désavantage a eu, ou aura vraisemblablement, sur la réalisation des objectifs de la politique de radiodiffusion établie dans la Loi.

20.

Dans la décision de radiodiffusion 2005-527, le Conseil a approuvé la demande de Groupe TVA visant à obtenir une licence de radiodiffusion afin d'exploiter le service spécialisé de catégorie 2 maintenant appelé Prise 2. Le Conseil avait alors indiqué que « dans l'éventualité où un distributeur refusait de distribuer un service de catégorie 2 non affilié au bénéfice d'un service de catégorie 2 affilié, cette situation pourrait faire l'objet d'un examen en vertu de l'article 9 du Règlement sur la distribution de radiodiffusion ».

21.

Dans l'avis public 2000-6, le Conseil a énoncé un cadre pour l'attribution de licences à de nouveaux services de programmation canadiens numériques. Dans cet avis public, le Conseil mentionnait qu'il « ne tiendrait pas compte de la viabilité des services de la catégorie 2, de leurs plans d'entreprise ou de marketing ou encore des tarifs facturés, de manière à ce que les services expérimentaux et très innovateurs ne soient pas exclus en raison du manque de viabilité perçu ».

22.

Enfin, dans l'avis public de radiodiffusion 2004-24, le Conseil a décidé « qu'il serait conforme à une démarche d'entrée libre de permettre aux EDR d'évaluer l'intérêt d'un éventuel service de catégorie 2 pour leurs abonnés avant de choisir de le distribuer, ou pas ».

23.

Dans le cas présent, le Conseil constate que Vidéotron n'a pas nié les allégations de ADR qui faisaient état du fait que Vidéotron n'exige pas de frais de distribution des autres services spécialisés canadiens de catégorie 2 qu'elle distribue. En traitant différemment Avis de Recherche des autres services spécialisés canadiens de catégorie 2 distribués par ses EDR, le Conseil juge que Vidéotron accorde une préférence à ces autres services et soumet Avis de Recherche à un désavantage.
 

Préférence ou désavantage indu

24.

Le Conseil constate qu'Avis de Recherche est distribué par Vidéotron depuis le 21 octobre 2004 en vertu d'une entente qui semble aujourd'hui avoir tourné au désavantage de la plaignante. Comme ADR l'a elle-même mentionné, elle a accepté de payer des frais de distribution à Vidéotron et comptait sur des recettes publicitaires pour assurer la rentabilité de son service. Le Conseil juge que cette entente a été négociée de bonne foi entre les parties, malgré l'inexpérience d'ADR, et que ce sont les conditions spécifiques de cette entente qui ont permis au service Avis de Recherche d'être distribué au service de base numérique de Vidéotron. Le Conseil est d'avis qu'à défaut de cette entente, le service Avis de Recherche n'aurait pas été distribué par Vidéotron.

25.

Le Conseil considère que les ententes d'affiliation entre Vidéotron et les services numériques de catégorie 2 que Vidéotron distribue relève du domaine commercial et que le Conseil ne devrait pas intervenir à moins que l'entente convenue entre les parties ne soit contraire à l'intérêt public ou à la réglementation du Conseil.

26.

Bien que l'entente entre Vidéotron et ADR soit unique en son genre du fait qu'un service de programmation d'émissions spécialisés de catégorie 2 paie des frais à Vidéotron pour être distribué, le Conseil considère que l'approche énoncée dans les avis public 2000-6 et 2004-24 peut recevoir application et le Conseil n'interviendra donc pas. Ainsi, pour les raisons et faits exposés plus haut, le Conseil conclut que Vidéotron n'a pas imposé de désavantage indu à ADR en lui facturant des frais de distribution et que Vidéotron n'a pas accordé de préférence indue aux autres services de catégorie 2 qu'elle distribue, dont le service lié Prise 2.
 

L'article 18(14) du Règlement

27.

Le Conseil note que, selon Vidéotron, en date du 17 octobre 2007, il y avait 76 services de catégorie 2 de langue anglaise en exploitation et trois services de langue française, soit cinépop, Prise 2 et Avis de Recherche. Le Conseil note également que Vidéotron indique distribuer un total de 41 services de catégorie 2, dont les trois services de langue française.

28.

Le Conseil est d'avis, tout comme les parties dans le présent cas, que l'article 18(14) du Règlement ne s'applique pas sur une base linguistique. En conséquence, le Conseil estime que Vidéotron, en offrant une quarantaine de services de catégorie 2 non liés pour un service de catégorie 2 lié, respecte l'article 18(14) du Règlement. Le Conseil constate qu'aucune distinction n'a été faite dans l'avis public 2000-6 ou dans l'article 18(14) du Règlement afin que cette règle d'accès soit applicable sur une base linguistique. Le Conseil note que Vidéotron a choisi de distribuer le service affilié de langue française Prise 2 avec une quarantaine de services de langue anglaise ou tierce. Le Conseil constate que, présentement, le choix de distribuer ou de ne pas distribuer un service de catégorie 2 en exploitation dans le marché linguistique principal d'une EDR est laissé à la discrétion de l'EDR.
 

Conclusion

29.

À la lumière de ce qui précède, le Conseil estime que la preuve présentée par ADR ne suffit pas à conclure à l'existence d'une préférence indue ou d'un désavantage indu. Par conséquent, le Conseil rejette la plainte d'Avis de recherche inc.
  Secrétaire général
 

Documents connexes

 
  • Nostalgie - service spécialisé de catégorie 2, décision de radiodiffusion CRTC 2005-527, 21 octobre 2005
 
  • Révision des procédures de traitement des demandes de nouveaux services numériques de télévision payants et spécialisés de catégorie 2, avis public de radiodiffusion CRTC 2004-24, 8 avril 2004
 
  • Politique relative au cadre de réglementation des nouveaux services de télévision spécialisée et payante numériques, avis public CRTC 2000-6, 13 janvier 2000
  La présente décision est disponible, sur demande, en média substitut, et peut également être consultée en version PDF ou en HTML sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca 

Note de bas de page :
1Dans la décision de radiodiffusion 2007‑246, le Conseil a approuvé en partie une demande visant à rendre obligatoire la distribution du service Avis de Recherche dans la province de Québec au service numérique de base de toutes les entreprises de distribution par SRD ainsi que des EDR de classe 1 et de classe 2, les entreprises de systèmes de distribution multipoints étant exclues.
 

Mise à jour : 2008-01-21
Date de modification :