Décision de télécom CRTC 2006-1

Ottawa, le 6 janvier 2006

TELUS Communications Inc. - Demande concernant la décision de télécom CRTC 2005-6 - Emplacement du point de présence d'un concurrent

Référence : 8661-T66-200508038

Dans la présente décision, le Conseil approuve une demande présentée par TELUS Communications Inc. afin de préciser qu'un concurrent doit avoir un point de présence au Canada pour être admissible aux services de réseau numérique propres aux concurrents (RNC). Le Conseil rejette la demande connexe de Bell Canada en vue de faire exempter les circuits transfrontaliers du service RNC.

Historique

1. Dans la décision Cadre de réglementation applicable à la deuxième période de plafonnement des prix, Décision de télécom CRTC 2002-34, 30 mai 2002 (la décision 2002-34), le Conseil a ordonné aux grandes entreprises de services locaux titulaires (ESLT) d'introduire un service d'accès au réseau numérique propre aux concurrents (ARNC). Le service ARNC offrait aux concurrents l'accès au réseau numérique (ARN) des ESLT et aux installations de liaison connexes à des tarifs inférieurs à ceux du service ARN de détail. Le Conseil a interdit la revente simple du service ARNC afin d'éviter les distorsions dans le marché du service ARN de détail. Le Conseil a défini la revente simple comme une revente sans valeur ajoutée et comprenant la refacturation.

2. Dans la décision Services de réseau numérique propres aux concurrents, Décision de télécom CRTC 2005-6, 3 février 2005 (la décision 2005-6), le service de réseau numérique propre aux concurrents (RNC) a été approuvé de manière définitive. Le Conseil a maintenu l'interdiction de la revente simple, et le service RNC a été mis à la disposition des entreprises canadiennes inscrites et de tous les revendeurs (concurrents) inscrits. Le Conseil a également fait remarquer dans cette décision que si le trafic acheminé au moyen d'une installation d'ARNC louée par un concurrent se terminait à l'emplacement du réseau du concurrent dans le territoire de l'ESLT qui a fourni cette installation, l'ESLT pourrait décider que le trafic du concurrent se terminait ultimement à l'emplacement du réseau du concurrent.

3. Toutefois, dans la décision 2005-6, le Conseil a cessé d'exiger que le trafic d'un concurrent acheminé sur une installation d'ARNC se termine à l'emplacement du réseau du concurrent dans le territoire de l'ESLT qui a fourni l'accès. Plus précisément, le Conseil a conclu au paragraphe 251 « .  qu'il ne faudrait pas empêcher un concurrent d'utiliser les services RNC même si le circuit dont ce service se sert pour acheminer le trafic se termine finalement à un PDP [ point de présence] situé en dehors du territoire de l'ESLT qui fournit les services RNC ».

4. Le Conseil a adopté cette approche à l'égard des services RNC après avoir constaté que les concurrents dotés d'installations fournissaient des services en se servant d'installations et de services loués auprès d'ESLT et d'autres fournisseurs en combinaison avec des installations et des services auto-approvisionnés. Le Conseil a estimé que cette approche favorisait la concurrence fondée sur les installations et qu'il ne conviendrait donc pas de limiter l'utilisation des services RNC lorsque l'emplacement du réseau d'un concurrent où le trafic RNC est acheminé se trouve en dehors du territoire de l'ESLT qui fournit ces services.

5. Le Conseil a également déclaré au paragraphe 252 de la décision 2005-6 que si le PDP est situé en dehors du territoire de l'ESLT qui fournit les services RNC, l'ESLT ne saurait pas si le circuit utilisé par le service pour acheminer le trafic se terminerait ultimement sur le réseau du concurrent. Le Conseil a donc estimé qu'il convenait d'exiger que chaque concurrent qui utilise les services RNC fournisse un affidavit confirmant qu'il respecte l'interdiction de se livrer à la revente simple et que cet affidavit devrait indiquer que la route ou la voie d'acheminement associée à chaque installation d'accès louée incluse dans le cadre des services RNC se raccorde ultimement à un PDP.

6. Le Conseil a également conclu que les vérifications quant au respect par les concurrents de l'interdiction en question ne devraient se faire que lorsque les circonstances le justifient.

La demande

7. Le 5 juillet 2005, le Conseil a reçu une demande de TELUS Communications Inc. (TELUS) afin de préciser que le PDP d'un concurrent doit être situé au Canada pour être admissible aux services RNC1. TELUS a fait remarquer que dans la décision 2005-6, le Conseil n'a pas précisé si un PDP devait être situé au Canada.

8. TELUS a soutenu que l'obligation pour un concurrent d'avoir un PDP au Canada est nécessaire pour maintenir l'interdiction de la revente simple et favoriser la concurrence fondée sur les installations.

9. TELUS a fait valoir que l'exigence établie dans la décision 2005-6 voulant que la route ou la voie d'acheminement associée à chaque installation d'accès louée incluse dans le cadre des services RNC se raccorde ultimement à un PDP d'un  concurrent est essentielle à l'interdiction de la revente simple.

10. TELUS a ajouté qu'un concurrent qui n'avait pas de PDP au Canada enfreindrait l'interdiction de revente simple car il pourrait simplement refacturer les services de réseau numérique fournis par les ESLT et créer une nouvelle marque sans ajouter de valeur au service comme ce serait le cas s'il se servait des installations de l'ESLT en combinaison avec les siennes.

11. TELUS a soutenu que si tous les PDP d'un concurrent étaient situés à l'extérieur du Canada, il serait difficile, voire impossible, de faire des vérifications de conformité à l'étranger et l'interdiction de faire la revente simple ne pourrait pas être appliquée adéquatement.

12. TELUS a en outre soutenu que l'objectif du Conseil dans la décision 2005-6, qui est de promouvoir la concurrence fondée sur les installations, exigeait également qu'un concurrent ait un PDP au Canada. TELUS a fait valoir que sans cette exigence, les entités étrangères, notamment, pourraient obtenir des services RNC au rabais sans avoir d'installations au Canada. TELUS a fait valoir que cela ne serait pas conforme à l'objectif de la politique canadienne de télécommunication qui est d'accroître l'efficacité et la compétitivité des télécommunications canadiennes.

13. TELUS a fait valoir que l'article 12 de la Loi d'interprétation permettait de conclure que pour être admissible au RNC, un concurrent devait avoir un PDP situé au Canada2.

Processus

14. Des observations ont été déposées par Rogers Telecom le 19 juillet 2005, par MTS Allstream Inc. (MTS Allstream) le 27 juillet 2005, par Bell Canada le 2 août 2005 et par MCI Canada le 5 août 2005.

15. TELUS a déposé des observations en réplique le 12 août 2005.

Positions des parties

16. MTS Allstream et Rogers Telecom ont appuyé la demande de TELUS. MTS Allstream a soutenu que les ESLT devraient adopter et utiliser une définition commune d'un tarif pour le PDP d'un concurrent afin de bien préciser que le PDP doit être situé au Canada. Rogers Telecom a soutenu que les tarifs des services RNC des ESLT devraient comprendre une clause limitant les services RNC aux fournisseurs de services de télécommunication ayant un PDP au Canada.

17. Bell Canada et MCI Canada se sont opposées à la demande de TELUS. Bell Canada a soutenu que dans la décision 2005-6, le Conseil a décidé que les circuits RNC pouvaient se terminer à des emplacements en dehors du territoire de l'ESLT qui fournit le service RNC sans empêcher les circuits RNC de commencer et de se terminer au Canada. Bell Canada a de plus indiqué qu'il n'était pas nécessaire qu'un concurrent ait un PDP au Canada pour maintenir l'interdiction de revente simple. Bell Canada a fait valoir qu'une telle exigence occasionnerait des coûts supplémentaires et des retards à toutes les parties, y compris les ESLT, qui auraient à déterminer l'emplacement du PDP d'un concurrent pour s'assurer que le circuit est admissible aux services RNC.

18. En ce qui concerne le respect de l'interdiction de revente simple, Bell Canada a soutenu que l'obligation actuelle de fournir un affidavit était efficace et suffisante.

19. Bell Canada a fait valoir que contrairement à ce que TELUS a avancé, l'obligation d'avoir un PDP au Canada ne favoriserait pas la concurrence fondée sur les installations, mais qu'elle priverait les concurrents qui n'ont pas de PDP au Canada des avantages que procure un choix concurrentiel. Bell Canada a demandé que si le Conseil concluait que les concurrents devaient avoir un PDP au Canada pour obtenir les services RNC, le Conseil devait également exiger que les concurrents paient des tarifs ARN de détail, et non des tarifs RNC, pour les circuits transfrontaliers, lesquels, a-t-il déclaré, comprenaient normalement une composante d'accès et une composante de transport qui ferait ou non l'objet d'une abstention de la réglementation. Bell Canada a soutenu que cette exigence serait nécessaire pour que les ESLT sur le réseau desquelles le circuit commence ne soient pas désavantagées par rapport aux autres concurrents au Canada.

20. Bell Canada a soutenu en outre que la demande de TELUS était en fait une demande déguisée en révision et modification de la décision 2005-6 et que TELUS n'avait pas réussi à prouver que les conditions que le Conseil a données comme exemples de situations où il existe un doute réel quant à la rectitude d'une décision ont été satisfaites3.

21. MCI Canada a soutenu que la demande de TELUS allait à l'encontre de la décision 2005-6 dans laquelle il est indiqué que les services RNC étaient accessibles à tous les concurrents. MCI Canada a soutenu, de plus, que le fait d'exiger que tous les revendeurs aient un PDP au Canada crée un obstacle artificiel et inutile à l'entrée des revendeurs.

22. MCI Canada a fait valoir en outre que ce que demande TELUS ne serait pas compatible avec les obligations du Canada concernant l'accès au marché en vertu de l'article XVI de l'Accord général sur le commerce et les services (l'AGCS). MCI Canada a soutenu que selon la Liste du Canada des engagements spécifiques à l'égard de la Liste de l'AGCS, le Canada s'est engagé à assurer aux revendeurs l'accès au marché et n'avait imposé aucune restriction à l'entrée de ces fournisseurs de services dans le marché des services de transmission de données à commutation de circuit et à commutation par paquets. De l'avis de MCI Canada, si le Canada avait souhaité limiter l'entrée des revendeurs dans ce marché, il aurait demandé l'ajout d'une mention à cet effet dans sa Liste.

23. MCI Canada a fait valoir que rien dans la Loi d'interprétation ni dans aucune autre loi au Canada n'oblige le Conseil à insérer une condition dans les tarifs des services RNC voulant que les concurrents aient un PDP au Canada.

Réplique de TELUS

24. TELUS a fait valoir que l'argument de Bell Canada au sujet des coûts supplémentaires et des retards ne tenait pas compte de la conclusion que le Conseil a rendue dans la décision 2005-6 au sujet de l'obligation imposée aux concurrents de présenter un affidavit précisément parce que les ESLT ne sauraient pas nécessairement où le trafic d'un concurrent aboutirait. TELUS a également soutenu que contrairement à ce que Bell Canada a avancé, les ESLT ne sont pas tenues de vérifier qu'un circuit RNC se raccorde au PDP d'un concurrent et qu'il n'y aurait donc pas de coûts supplémentaires ni de retards si les concurrents étaient tenus d'avoir un PDP au Canada.

25. TELUS a fait valoir que contrairement à ce que Bell Canada a avancé, l'affidavit concernant la revente simple n'est pas un substitut à l'obligation qu'un concurrent ait un PDP au Canada, mais que ce processus est nécessaire du fait qu'une ESLT ne peut pas savoir si le trafic d'un concurrent aboutit au réseau du concurrent si son PDP se trouve en dehors du territoire de l'ESLT.

26. En ce qui concerne la position de Bell Canada et de MCI Canada, TELUS a fait valoir que l'accès aux tarifs RNC sans avoir un PDP (ou toute autre installation) au Canada ne pourrait que nuire à la concurrence fondée sur les installations, car des entités pourraient alors bénéficier des tarifs RNC sans investir dans des installations au Canada. TELUS a fait valoir que les revendeurs pourraient ainsi entrer dans le marché et offrir le service en utilisant uniquement les intrants des ESLT offerts à rabais et revendus.

27. TELUS a soutenu qu'elle ne demande pas au Conseil de réviser et de modifier la décision 2005-6 puisqu'elle ne lui demande pas de renverser la décision, mais plutôt de préciser sa position concernant l'emplacement des PDP des concurrents.

28. En réplique aux arguments de MCI Canada concernant l'AGCS, TELUS a fait valoir que l'article XVI de l'AGCS, sur lequel MCI Canada a fondé son argument, est de nature très générale et devrait être lu en contexte. TELUS a fait remarquer que l'article XVI:1 se lit comme suit :

En ce qui concerne l'accès aux marchés suivant les modes de fourniture identifiés à l'article premier, chaque Membre accordera aux services et fournisseurs de services de tout autre Membre un traitement qui ne sera pas moins favorable que celui qui est prévu en demande des modalités, limitations et conditions convenues et spécifiées sans sa Liste [des engagements particuliers].

29. TELUS a fait valoir qu'aux termes de l'article XVI de l'AGCS, le Canada est obligé d'accorder aux fournisseurs de services étrangers un traitement non moins favorable que celui prévu dans les modalités, les limitations et les conditions convenues et spécifiées dans sa Liste. TELUS a soutenu que son interprétation de la décision 2005-6 ne va pas à l'encontre de cette disposition puisque tous les fournisseurs sont traités de la même façon.

30. D'autre part, TELUS a fait valoir que l'article XVI:1 de l'AGCS devrait être lu à la lumière de l'article XVI:2 de l'AGCS qui prévoit ce qui suit :

Dans les secteurs où des engagements en matière d'accès aux marchés seront contractés, les mesures qu'un Membre ne maintiendra pas, ni n'adoptera, que ce soit au niveau d'une subdivision régionale ou au niveau de l'ensemble de son territoire, à moins qu'il ne soit spécifié autrement dans sa Liste, se définissent comme suit :

  1. limitations concernant le nombre de fournisseurs de services, que ce soit sous forme de contingents numériques, de monopoles, de fournisseurs exclusifs de services ou de l'exigence d'un examen des besoins économiques;
  2. limitations concernant la valeur totale des transactions ou avoirs en rapport avec les services, sous forme de contingents numériques ou de l'exigence d'un examen des besoins économiques;
  3. limitations concernant le nombre total d'opérations de services ou la quantité totale de services produits, exprimées en unités numériques déterminées, sous forme de contingents ou de l'exigence d'un examen des besoins économiques;
  4. limitations concernant le nombre total de personnes physiques qui peuvent être employées dans un secteur de service particulier, ou qu'un fournisseur de services peut employer et qui sont nécessaires pour la fourniture d'un service spécifique, et s'en occupent directement, sous forme de contingents numériques ou de l'exigence d'un examen des besoins économiques;
  5. mesures qui restreignent ou prescrivent des types spécifiques d'entité juridique ou de coentreprise par l'intermédiaire desquels un fournisseur de services peut fournir un service;
  6. limitations concernant la participation de capital étranger, exprimées sous forme d'une limite maximale en pourcentage de la détention d'actions par des étrangers, ou concernant la valeur totale d'investissements étrangers particuliers ou des investissements étrangers globaux.

31. TELUS a soutenu que la jurisprudence liée à l'AGCS ne soutient pas l'argument avancé par MCI Canada. Selon TELUS, l'article XVI:2 de l'AGCS établit une liste complète du type de limitations à l'accès aux marchés qui ne sont pas autorisées. Par conséquent, de l'avis de TELUS, il est possible d'imposer des limitations autres que celles mentionnées dans l'article XVI:2 de l'AGCS, et rien sur le plan juridique n'oblige quiconque à ajouter ces limitations à la Liste d'un pays.

32. TELUS a soutenu que le fait qu'une restriction sur les PDP au Canada ne corresponde à aucune des limitations énoncées dans l'article XVI:2 de l'AGCS, ne donne pas nécessairement lieu à une interdiction aux termes de l'article XVI:1 et l'imposition de ce genre de restriction n'est pas incompatible avec les engagements pris par le Canada en vertu de l'article de l'AGCS, pas plus que cette limitation n'a à être incluse dans la Liste du Canada.

Analyse et conclusions du Conseil

33. Le Conseil estime que la demande de TELUS n'est pas une demande en révision et modification de la décision 2005-6, mais vise plutôt à obtenir des précisions concernant l'emplacement du PDP d'un concurrent.

34. Le Conseil fait remarquer que dans l'instance qui a mené à la décision 2005-6, les questions liées à l'emplacement du PDP d'un concurrent portaient sur la question de savoir si, pour qu'un circuit d'accès loué soit admissible aux tarifs RNC, le PDP d'un concurrent auquel le circuit en question est connecté et le circuit associé au client final devraient se trouver dans le même secteur du centre de commutation de l'ESLT et dans le territoire de l'ESLT.

35. Bell Canada a soutenu que l'exigence d'avoir un PDP au Canada imposerait des coûts supplémentaires et des retards à toutes les parties concernées, y compris les ESLT qui auraient à déterminer l'emplacement du PDP d'un concurrent pour s'assurer que le circuit est admissible au service RNC. Toutefois, le Conseil fait remarquer que TELUS a fait observer à juste titre que les ESLT ne sont pas tenues de déterminer l'emplacement du PDP d'un concurrent. Le Conseil ajoute que contrairement à l'argument de Bell Canada, les ESLT n'auraient pas à déterminer l'emplacement du PDP d'un concurrent si le PDP doit être situé au Canada. Le Conseil convient donc avec TELUS que Bell Canada n'a pas tenu compte de la conclusion du Conseil au sujet de l'obligation de présenter un affidavit, car une ESLT ne saurait pas nécessairement si le trafic se terminait ultimement au réseau du concurrent si le PDP de ce dernier était situé en dehors du territoire de l'ESLT.

36. Conformément à la conclusion qu'il a tirée dans la décision 2002-34, le Conseil a interdit la revente simple du service RNC dans la décision 2005-6 pour éviter des distorsions dans le marché du service ARN de détail. Dans la décision 2005-6, le Conseil a défini la revente simple comme la revente sans valeur ajoutée et a fait remarquer que la revente simple comprend la refacturation.

37. Étant donné que son champ de compétence est limité au Canada, le Conseil estime que l'interdiction de la revente simple établie dans la décision 2005-6 concerne la revente simple à l'échelle du Canada.

38. Le Conseil estime également que le raccordement d'une installation RNC louée par un concurrent à son PDP est un des principaux moyens par lesquels le Conseil peut vérifier que le concurrent ajoute de la valeur à l'installation louée. À cet égard, le Conseil fait remarquer que l'obligation de présenter un affidavit concernant l'interdiction de la revente simple prévoit que chaque concurrent atteste que la route ou la voie d'acheminement associée à chaque installation d'accès louée incluse dans le cadre des services RNC se raccorde ultimement à un PDP.

39. De l'avis du Conseil, si un revendeur n'a pas de PDP au Canada et que le PDP en cause est situé en dehors du Canada, l'ajout de la valeur se produit, par définition, en dehors du Canada. Dans ces conditions, le Conseil estime qu'il n'y aurait pas de valeur ajoutée à l'installation louée au Canada et qu'elle pourrait donc faire l'objet d'une revente simple au Canada, en infraction à l'interdiction établie dans la décision 2005-6.

40. En ce qui concerne l'application de l'interdiction de la revente simple, le Conseil convient avec TELUS que si un concurrent n'a pas de PDP au Canada, il serait extrêmement difficile, voire impossible, de vérifier son affidavit sur le respect de l'interdiction de la revente simple en raison, notamment, de la question de la compétence extraterritoriale.

41. Le Conseil prend également note de l'argument de Bell Canada selon lequel le fait de demander à un concurrent d'avoir un PDP au Canada ne favoriserait pas la concurrence fondée sur les installations car, de l'avis de Bell Canada, il est peu probable qu'un concurrent étranger établisse un PDP au Canada alors qu'il peut obtenir des circuits RNC revendus de concurrents autres que des ESLT au Canada. Toutefois, le Conseil estime que la disponibilité des installations ARN des ESLT aux tarifs RNC n'est qu'un des facteurs dont un concurrent tiendrait compte pour décider d'établir un PDP au Canada.

42. Le Conseil prend note de l'argument de TELUS selon lequel le fait de ne pas demander à un concurrent d'avoir un PDP au Canada pour obtenir le service RNC irait à l'encontre de l'objectif de la politique du Conseil sur la concurrence fondée sur les installations, car les revendeurs seraient ainsi autorisés à entrer dans le marché et à offrir le service uniquement sur la base des intrants à rabais et revendus des ESLT. Le Conseil fait remarquer, en outre, que lorsqu'il a finalisé le service RNC, il a conclu que l'obligation d'offrir les services RNC favoriserait la concurrence fondée sur les installations et ferait en sorte que les services de télécommunication soient fournis conformément aux objectifs de la politique canadienne de télécommunication énoncés dans la Loi sur les télécommunications4. De l'avis du Conseil, on favorisera la concurrence fondée sur les installations si les concurrents ont un PDP au Canada.

43. Pour ce qui est de l'argument de MCI Canada selon lequel ce que demande TELUS ne serait pas conforme à l'article XVI de l'AGCS, le Conseil estime que les arguments que TELUS a fait valoir dans ses observations en réplique sont convaincants.

44. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil approuve la demande de TELUS et précise qu'un concurrent doit avoir un PDP au Canada pour obtenir le service RNC. Il précise également que l'exigence énoncée dans la décision 2005-6 voulant que l'affidavit des concurrents indique que la route ou la voie d'acheminement associée à chaque installation d'accès louée incluse dans le cadre des services RNC « se raccorde ultimement à un PDP » devrait se lire : « se raccorde ultimement à un PDP au Canada ». Le Conseil ordonne à Bell Canada, à Aliant Telecom Inc., à MTS Allstream et à Saskatchewan Telecommunications de publier des pages de tarif révisées pour le service RNC afin de tenir compte de l'exigence voulant qu'un concurrent ait un PDP au Canada.

45. Le Conseil prend note de la demande de Bell Canada voulant que si les concurrents doivent avoir un PDP au Canada pour obtenir les services RNC, le Conseil devrait les obliger à payer les tarifs ARN de détail, et non les tarifs RNC, pour les circuits ARN transfrontaliers. Bell Canada a soutenu que cette exigence ferait en sorte que les ESLT dans le territoire desquelles le circuit commence ne seraient pas désavantagées par rapport aux autres concurrents du Canada.

46. Le Conseil fait remarquer que l'instance qui a mené à la décision 2005-6 avait pour objet d'examiner la position concurrentielle relative des ESLT et des concurrents lorsqu'ils fournissent aux clients de détail des services qui utilisent les installations ARN comme un intrant. Le Conseil a conclu dans la décision 2005-6 qu'en l'absence de services RNC, les ESLT avaient un avantage concurrentiel indu et déraisonnable par rapport aux concurrents en ce qui concerne l'utilisation des installations ARN. Le Conseil a donc obligé les ESLT à mettre leurs installations ARN à la disposition des concurrents, comme le service RNC.

47. Conformément à la décision 2005-6, le Conseil estime que les concurrents seraient indûment désavantagés si les circuits transfrontaliers étaient exemptés du service RNC comme Bell Canada l'a proposé et il estime également que, pour Bell Canada, le service RNC actuel ne constitue pas un inconvénient indu sur le plan de la concurrence.

48. Par conséquent, le Conseil rejette la demande présentée par Bell Canada en vue d'exempter les circuits transfrontaliers du service RNC.

Secrétaire général

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Notes de bas de page

[1] Au paragraphe 117 de la décision 2005-6, le Conseil a défini un PDP comme l'emplacement d'un concurrent que celui-ci a désigné comme site d'interconnexion et qui peut ou non contenir un commutateur.

[2] L'article 12 de la Loi d'interprétation prévoit que tout texte est censé apporter une solution de droit et s'interprète de la manière la plus équitable et la plus large qui soit compatible avec la réalisation de son objet.

[3] Les circonstances, qui sont énoncées dans les Lignes directrices relatives aux demandes de révision et de modification, Avis public Télécom CRTC 98-6, 20 mars 1998, sont les suivantes :

  1. une erreur de droit ou de fait;
  2. un changement fondamental dans les circonstances ou les faits depuis la décision;
  3. le défaut de considérer un principe de base qui avait été soulevé dans la procédure initiale; ou
  4. un nouveau principe découlant de la décision.

[4] Paragraphe 169 de la décision 2005-6.

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