Décision de télécom CRTC 2003-33

Ottawa, le 30 mai 2003

Voir aussi : 2003-33-1

Clauses de confidentialité des entreprises canadiennes

Référence : 8665-C12-14/01 et 8665-B20-01/00

Dans la présente décision, le Conseil conclut que le consentement implicite n'est pas un type approprié de consentement pour la divulgation des renseignements confidentiels sur les clients. Toutefois, le Conseil juge qu'il y a lieu de prévoir d'autres formes de consentement explicite en plus du consentement écrit actuellement exigé. De plus, le Conseil ordonne à toutes les entreprises canadiennes de justifier, comme condition pour fournir le service à tous les revendeurs qui ne sont pas visés actuellement par les exigences en matière de confidentialité, pourquoi elles ne devraient pas inclure dans leurs contrats de service avec ces revendeurs l'obligation pour ces derniers de respecter les mêmes exigences en matière de confidentialité que les entreprises.

Introduction

1. Comme le prévoit le paragraphe 7i) de la Loi sur les télécommunications, un des objectifs de la politique canadienne de télécommunication est de contribuer à la protection de la vie privée des personnes. Actuellement, les entreprises canadiennes, à l'exception des fournisseurs de services sans fil mobiles qui ne sont pas commutés, comme les fournisseurs de services de téléappel, sont tenues de respecter les clauses de confidentialité énoncées initialement dans la décision Examen des règlements généraux des transporteurs de télécommunications terrestres assujettis à la réglementation fédérale, Décision Télécom CRTC 86-7, 26 mars 1986 (la décision 86-7), modifiée par l'ordonnance Télécom CRTC 86-593 du 22 septembre 1986 et, dans le cas de toutes les entreprises de services locaux, telle que modifiée de nouveau par l'ordonnance Fourniture aux organismes d'application de la loi de renseignements sur l'identité des fournisseurs de services de télécommunication des abonnés, Ordonnance CRTC 2001-279, 30 mars 2001 (l'ordonnance 2001-279), modifiée par la décision Fourniture aux organismes d'application de la loi de renseignements sur l'identité des fournisseurs de services de télécommunication des abonnés, Décision de télécom CRTC 2002-21, 12 avril 2002 (la décision 2002-21) (ensemble, les clauses de confidentialité). Dans la décision 86-7, le Conseil a déterminé qu'à moins que le client n'y consente par écrit ou que la divulgation ne soit exigée par les autorités juridiques, les entreprises canadiennes ne peuvent divulguer de renseignements sur les clients à une personne autre que le client, sauf le nom, l'adresse et le numéro de téléphone inscrit du client. Ce consentement n'est pas exigé dans les cas où les renseignements sont fournis à :

2. Dans l'ordonnance 2001-279, modifiée par la décision 2002-21, le Conseil a prévu que l'entreprise de services locaux peut divulguer à un organisme d'application de la loi, conformément aux modalités d'un tarif approuvé par le CRTC, l'identité du fournisseur de services, mais pas le nom du client associé à un numéro de téléphone donné.

3. Les clauses de confidentialité sont incluses dans les modalités de service des entreprises de services locaux titulaires (ESLT) pour les services de télécommunication tarifés et, en général, dans les contrats entre les entreprises canadiennes et leurs clients à l'égard de services de télécommunication faisant l'objet d'une abstention. Depuis 1987, le Conseil impose les clauses de confidentialité lorsqu'il exerce son pouvoir d'abstention à l'égard de services d'entreprises canadiennes, sauf dans le cas des services sans fil qui ne sont pas des services publics commutés.

4. Le 15 novembre 2000, Bell Canada, Bell Mobilité, Bell Nexxia, Island Telecom Inc., Maritime Tel & Tel Limited, MT&T Mobility Incorporated, MTS Communications Inc., NBTel Inc., NewTel Communications Inc. et NewTel Mobility Limited (collectivement, Bell Canada et autres) ont demandé, en vertu de la partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications,des révisions à leurs clauses de confidentialité.

5. Bell Canada et autres ont demandé une souplesse accrue dans la façon d'obtenir de la part de leurs clients qu'ils acceptent que les renseignements confidentiels les concernant soient divulgués aux affiliées1. Plus particulièrement, Bell Canada et autres voudraient être autorisées à divulguer à leurs affiliées, sur une base d'un consentement implicite, des renseignements confidentiels sur leurs clients. Bell Canada et autres ont fait valoir que leur proposition est conforme à la Loi sur la protection des renseignements personnels et les documents électroniques (LPRPDE). Bell Canada et autres ont également demandé que la divulgation à des non-affiliées soit autorisée avec le consentement exprès du client, mais que le consentement écrit ne soit pas la seule façon de donner un consentement exprès.

6. En réponse à la demande, le Conseil a reçu des interventions de TELUS Communications Inc. (TCI) et d'AXXENT Corp. (AXXENT) en même temps que d'AT&T Canada Ltd. (AXXENT et autres). TCI a appuyé les changements proposés et a demandé que le Conseil modifie ses Modalités de service générales de la même façon que Bell Canada et autres l'ont réclamé. AXXENT et autres ont fait valoir que, comme il s'agit d'une question importante pour toutes les entreprises, il faudrait qu'elle fasse l'objet d'un examen public plus général.

7. Compte tenu de l'importance publique des questions soulevées par Bell Canada et autres dans leur demande en vertu de la partie VII, le Conseil a publié l'avis Le CRTC demande au public de se prononcer sur les clauses de confidentialité des entreprises canadiennes, Avis public CRTC 2001-60, 29 mai 2001 (l'avis 2001-60) qui a amorcé une instance portant sur la restriction actuelle à l'égard de la divulgation par les entreprises canadiennes de renseignements confidentiels sur les clients. Dans l'avis 2001-60, le Conseil a soulevé un certain nombre de questions afin de l'aider à identifier quel type de consentement suffirait pour permettre à une entreprise canadienne de divulguer à ses affiliées des renseignements confidentiels sur les clients. Par la suite, le Conseil a publié l'avis Le CRTC demande au public de se prononcer sur les clauses de confidentialité des entreprises canadiennes, Avis public CRTC 2001-60-1, 31 mai 2001 (l'avis 2001-60-1), une version corrigée de l'avis  2001-60. Le Conseil a désigné toutes les entreprises canadiennes parties à l'instance et il a versé au dossier public de l'instance amorcée par l'avis 2001-60-1 la demande en vertu de la partie VII présentée par Bell Canada et autres ainsi que les interventions reçues en réponse à la demande.

8. Le Conseil a reçu des observations des parties suivantes : AT&T Canada Corp., en son nom et en celui d'AT&T Canada Telecom Services (collectivement, AT&T Canada), AXXENT, en son nom et pour le compte d'AT&T Canada Corp., Call-Net Enterprises Inc., en son nom et en celui de ses filiales à part entière (collectivement, Call-Net), Bell Canada et autres et Northern Telephone, NorTel Mobility, Norouestel Inc., Northwestel Mobility Inc., Saskatchewan Telecommunications, Télébec ltée et Télébec Mobilité (collectivement, les Compagnies), l'Association des consommateurs du Canada, l'Organisation nationale anti-pauvreté et l'Union des consommateurs (anciennement appelée Action Réseau Consommateur) (collectivement, les Groupes de consommateurs), l'Association canadienne des télécommunications sans fil (ACTS), le Commissaire à l'information et à la protection de la vie privée de l'Ontario (le CIPVP Ontario), Microcell Telecommunications Inc., au nom de Microcell Connexions Inc. et de Microcell Solutions Inc. (collectivement, Microcell), M. Murray Long, Rogers Communications Inc. au nom du Groupe de sociétés de Rogers qui inclut Rogers Broadcasting Limited, Rogers Cable Inc. et Rogers Wireless Inc. (collectivement, RCI) et TELUS Corporation, au nom de TELUS Communications Inc. et de ses affiliées, y compris TELUS Mobility (collectivement, TCI).

9. De plus, même s'il n'a pas participé activement à l'instance, le Centre pour la défense de l'intérêt public de la Colombie-Britannique, au nom de la BC Old Age Pensioners' Organization, de l'Association des consommateurs du Canada (division de la C.-B.), du Council of Senior Citizens' Organizations of BC, des Federated Anti-poverty Groups of B.C., de la Senior Citizens' Association of BC, du West End Seniors' Network, du End Legislated Poverty, de la Tenants Rights Action Coalition et de l'Information Policy Committee - B.C. Library Association ont écrit pour indiquer leur appui aux mémoires présentés par les Groupes de consommateurs.

10. Dans la partie I de la présente décision, le Conseil examine s'il y a lieu de permettre le consentement implicite pour la divulgation de renseignements confidentiels aux affiliées. Dans la partie II, le Conseil étudie les formes appropriées de consentement exprès. Finalement, dans la partie III, le Conseil se penche sur d'autres questions soulevées dans l'instance.

Partie I - Consentement implicite

Positions des parties

11. Les Compagnies ont fait valoir que le type de consentement requis devrait être fonction du caractère délicat de l'information, du type de lien qui existe entre le client et la compagnie ainsi que de la nature de la transaction. Elles ont soutenu qu'un consentement implicite devrait généralement suffire pour pouvoir divulguer aux affiliées des renseignements confidentiels sur les clients. Les Compagnies ont soutenu que lorsqu'un client souscrit à un service ou achète un produit soit d'elle, soit d'une de ses affiliées, le consentement à la divulgation de renseignements confidentiels sur le client à leurs affiliées à des fins de mise en marché ou à d'autres fins commerciales identifiées pourrait être implicite. Les Compagnies ont fait valoir que les clients s'attendent à ce que les renseignements personnels soient partagés entre les compagnies ayant la même marque de commerce qui fournissaient une gamme de services de communication connexes. Les Compagnies ont également soutenu qu'avant de pouvoir divulguer à des non-affiliées des renseignements confidentiels sur les clients, il continuerait de demeurer nécessaire d'obtenir un consentement exprès.

12. Les Compagnies ont fait valoir qu'à l'exception des renseignements sur le crédit, la vaste majorité des renseignements sur les clients susceptibles d'être partagés avec leurs affiliées ne sont pas des renseignements particulièrement de nature délicate. Les Compagnies ont indiqué que l'adresse d'un client et les renseignements sur les contacts de même que le fait qu'un client donné ait également souscrit à un service fourni par une société mère ou sour sont le genre d'information qu'elles proposent de partager avec leurs affiliées.

13. Les Compagnies ont déclaré que l'information plus délicate serait traitée avec plus de soin, conformément à la LPRPDE. Elles ont également soutenu que leurs codes internes relatifs à la protection de la vie privée assureraient une protection adéquate à leurs clients.

14. Les Compagnies ont également soutenu qu'elles ont besoin de plus de souplesse au chapitre de la divulgation à leurs affiliées des renseignements confidentiels sur les clients parce que les clauses de confidentialité actuelles les désavantagent par rapport à d'autres fournisseurs de services de télécommunication comme les revendeurs, les fournisseurs de services Internet autonomes et même les entreprises de distribution de radiodiffusion (EDR) qui ne sont pas assujetties aux clauses de confidentialité.

15. TCI et RCI ont appuyé l'affirmation des Compagnies selon laquelle le consentement implicite serait une forme appropriée de consentement pour la divulgation aux affiliées de renseignements confidentiels sur les clients, du fait que les clients perçoivent les groupes d'entreprises comme des entités uniques et qu'ils s'attendent à ce que les groupes d'entreprises partagent des renseignements personnels. Elles ont ajouté que, suivant la proposition des Compagnies, les clients connaîtraient les politiques des organisations concernant la protection de la vie privée et pourraient facilement se prévaloir de l'option d'abstention.

16. De l'avis des Groupes de consommateurs, le consentement exprès doit être obligatoire pour la divulgation aux affiliées de renseignements confidentiels sur les clients, sauf lorsque la divulgation est nécessaire pour le service demandé par le client ou qu'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'il y ait partage dans les circonstances. Les Groupes de consommateurs ont fait valoir à cet égard que le caractère délicat de l'information sur les clients varie selon les individus et le contexte.

17. Les Groupes de consommateurs se sont opposés à l'affirmation des Compagnies voulant que les clients s'attendent à ce que les renseignements confidentiels les concernant soient partagés entre les affiliées des compagnies avec leur consentement implicite. Les Groupes de consommateurs ont versé au dossier public de l'instance une copie d'une étude de marché effectuée par Ekos Research Associates Inc. Les Groupes de consommateurs ont soutenu que contrairement à ce qu'affirment les Compagnies, l'étude montre qu'une forte proportion de Canadiens (84 %) ne s'attendent pas à ce que leurs données soient partagées ou ne désirent qu'elles le soient.

18. Selon le CIPVP Ontario, les entreprises canadiennes ne devraient être autorisées à divulguer les renseignements confidentiels sur les clients à une compagnie affiliée qu'avec le consentement exprès du client, à moins que les renseignements personnels ne soient de toute évidence pas de nature délicate et qu'une personne raisonnable juge approprié dans les circonstances que des compagnies affiliées partagent les renseignements. Le CIPVP Ontario a fait valoir que dans ce cas-ci, le consentement implicite pourrait convenir.

19. M. Long a fait valoir que la forme de consentement doit généralement correspondre au caractère délicat des données. Il a déclaré qu'il n'est pas possible de déterminer le type de consentement sans savoir exactement quels renseignements les compagnies de téléphone veulent partager avec leurs affiliées.

20. M. Long a fait remarquer que le Code de protection de la vie privée de l'Association canadienne de normalisation (le Code de la CSA) préconise le recours au consentement exprès chaque fois que l'information est susceptible d'être considérée comme délicate et au consentement implicite lorsque l'information n'est pas de nature délicate. Il a fait remarquer que comme le Code de la CSA n'incluait comme autres indications sur la définition de ce que sont les renseignements personnels de nature délicate que les références aux dossiers médicaux et financiers, les organismes doivent élaborer et appliquer leurs propres normes à l'égard du caractère délicat des données. M. Long a fait valoir qu'en cas de doute au sujet du caractère délicat des renseignements en cause, le consentement exprès devrait être le mode implicite.

21. M. Long a soutenu que pour qu'un consentement implicite soit autorisé pour des données moins délicates, il faudrait que certaines conditions soient réunies. M. Long a fait valoir par exemple que, dans le cas des renseignements recueillis antérieurement, les clients devraient se voir offrir une occasion juste et raisonnable d'exercer leur droit de refuser et un délai raisonnable d'au moins trois mois pour exercer ce droit. Toujours selon M. Long, les renseignements recueillis antérieurement ne devraient pas être divulgués sans que les clients n'en soient informés adéquatement dans le cadre d'une campagne d'information consistant en des encarts de facturation, des informations dans les Pages blanches, sur le site Web, à une ligne directe concernant la protection de la vie privée ainsi que des brochures ou d'autres ressources d'information. M. Long a déclaré en dernier lieu que les clients devraient toujours pouvoir retirer leur consentement à l'égard du partage de ces renseignements. Lorsque des renseignements personnels sur les nouveaux clients sont recueillis, M. Long a précisé que la possibilité de refuser doit aussitôt être offerte aux clients et être continuellement offerte.

22. AT&T Canada, l'ACTS et Microcell s'accordent toutes pour dire qu'un consentement implicite convient, mais pas dans toutes les circonstances, selon les attentes raisonnables du client.

Les conclusions du Conseil

23. Le Conseil fait remarquer que la LPRPDE établit les règlements et les normes concernant la protection des renseignements personnels. Toutefois, le Conseil fait également observer que sa compétence en cette matière ne vient pas de cette loi mais de la Loi sur les télécommunications et qu'en exerçant les pouvoirs discrétionnaires que celle-ci lui confère, il peut appliquer des normes différentes de celles prévues par la LPRPDE.

24. Les clauses de confidentialité qui protègent la confidentialité des renseignements sur les clients sont incluses dans les tarifs des ESLT et sont imposées aux entreprises canadiennes à l'égard des services (sauf les services sans fil qui ne sont pas des services publics commutés) qu'il s'est abstenu de réglementer. Le Conseil estime que ces clauses sont encore plus pertinentes aujourd'hui qu'elles ne l'étaient lorsqu'elles ont été mises en ouvre initialement, en raison notamment de l'avènement de nouvelles technologies et de l'émergence du commerce électronique qui facilitent le traitement, la réorganisation et l'échange de l'information.

25. De l'avis du Conseil, le consentement implicite à divulguer aux affiliées des renseignements confidentiels sur les clients, comme les Compagnies le proposent, ne convient pas pour trois raisons. Premièrement, suivant la proposition des Compagnies, il se peut que les clients ne sachent pas que les renseignements confidentiels comme les renseignements sur la facturation pourraient être divulgués aux affiliées. Deuxièmement, il se peut que les clients ne connaissent pas toutes les affiliées des entreprises canadiennes et qu'elles ne sachent donc pas à quelle affiliée l'information serait divulguée. Troisièmement, ce ne serait plus à la compagnie qu'il incomberait de protéger la confidentialité des renseignements sur les clients mais au client qui aurait à contacter son entreprise pour pouvoir exercer l'option de refus.

26. En ce qui concerne les objectifs de la Loi sur les télécommunications, le Conseil estime qu'aucune des compagnies ou des parties qui ont appuyé les propositions à l'égard d'un consentement implicite n'ont prouvé que l'intérêt qu'elles ont à abaisser le seuil du consentement l'emporte sur l'intérêt des clients à conserver le contrôle de la divulgation des renseignements confidentiels les concernant.

27. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que le consentement implicite pour la divulgation aux affiliées de renseignements confidentiels sur les clients n'offrirait pas une protection suffisante aux clients.

28. En ce qui a trait à l'affirmation des Compagnies selon laquelle les règles actuelles les désavantagent par rapport aux autres fournisseurs de services de télécommunication qui ne sont pas assujettis aux clauses de confidentialité, le Conseil fait remarquer que ces clauses s'appliquent également à toutes les entreprises canadiennes, ce qui inclut les EDR qui offrent des services de télécommunication comme entreprises canadiennes au sens de la Loi sur les télécommunications, sauf dans le cas des services sans fil qui ne sont pas des services sans fil publics commutés. Le Conseil fait également remarquer qu'en général, les revendeurs, y compris les fournisseurs de services Internet autonomes, sont liés par les clauses de confidentialité, par voie de contrats avec des entreprises canadiennes pour l'utilisation des services des entreprises. Le Conseil fait en outre remarquer que rien n'empêche un groupe d'entreprises canadiennes affiliées de s'organiser pour fournir tous leurs services de télécommunication par l'entremise d'une seule entreprise canadienne, ce qui élimine la question de savoir si les renseignements confidentiels sur les clients peuvent être divulgués à leurs affiliées.

29. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut que lorsqu'un consentement est requis, le consentement exprès demeure la forme appropriée de consentement pour la divulgation aux affiliées de renseignements confidentiels sur les clients.

Partie II - Formes de consentement exprès du client

Positions des parties

30. Toutes les parties, y compris les Groupes de consommateurs, le CIPVP Ontario et M. Long ont convenu que, pour obtenir le consentement exprès du client, un consentement écrit n'était pas toujours obligatoire. Le CIPVP Ontario a soutenu que ce qui était important n'était pas que le consentement exprès soit obtenu par écrit, mais plutôt qu'il y ait un document officiel de consentement exprès. M. Long a fait valoir qu'exiger le consentement écrit dans tous les cas était incompatible avec les réalités du marché et que les entreprises canadiennes avaient besoin de plus de souplesse dans le mode de consentement demandé.

31. AT&T Canada a fait valoir que selon les circonstances, il existe différents moyens acceptables d'obtenir le consentement exprès d'un client. AT&T Canada a indiqué que le processus de transfert du client utilisé pour transférer les clients locaux était un exemple de moyen acceptable. En se basant sur ce processus, AT&T Canada a donné quatre façons d'obtenir le consentement exprès :

32. M. Long a fait valoir que s'ajoutent à la liste d'AT&T Canada concernant les moyens proposés pour obtenir le consentement exprès du client, l'utilisation d'une boîte de contrôle des acceptations, un mécanisme électronique d'acceptation utilisant Internet, un clavier téléphonique ou d'autres dispositifs, ainsi qu'un consentement verbal suivi d'une lettre confirmant que le consentement est autorisé.

33. TCI a fait valoir que comme formes permises de consentement exprès, il y aurait, mais sans s'y limiter, le consentement donné par courriel, par interface Web, par téléphone et par système de réponse vocale interactive.

34. Microcell a déclaré qu'il était raisonnable de s'attendre à ce qu'un client faisant une transaction sur le site Web d'une compagnie donne son consentement au moyen d'un « simple clic » ou en utilisant le système de réponse vocale intégré de la compagnie.

35. Les Groupes de consommateurs, l'ACTS, Microcell, M. Long, RCI et TCI ont fait remarquer que la LPRPDE prévoit que le consentement doit être éclairé.

Les conclusions du Conseil

36. Le Conseil fait remarquer que pour communiquer avec les entreprises canadiennes, les clients utilisent maintenant diverses méthodes et qu'en plus d'un document écrit signé par le client, il existe d'autres moyens pour obtenir le consentement exprès du client. Dans l'ordonnance Optel Communications Corporation c. Bell Canada - Le CRTC précise les exigences du contrat de service d'accès local, Ordonnance CRTC 2000-250, 30 mars 2000 (l'ordonnance 2000-250), le Conseil a déterminé qu'une confirmation verbale vérifiée par un tiers indépendant, une confirmation électronique au moyen d'un numéro sans frais d'interurbain ou une confirmation électronique par Internet étaient des méthodes acceptables de prouver le consentement exprès du client. Le Conseil fait remarquer que depuis les trois dernières années, l'industrie utilise les méthodes susmentionnées pour protéger les clients contre le transfert non autorisé de leurs services interurbains ou locaux.

37. De l'avis du Conseil, ces moyens donneraient aux entreprises canadiennes plus de souplesse pour obtenir le consentement des clients à l'égard de la divulgation de renseignements confidentiels les concernant tout en leur donnant une protection suffisante. Le Conseil fait remarquer que les autres moyens proposés par TCI et Microcell pour obtenir le consentement du client et certaines des méthodes suggérées par M. Long pour obtenir le consentement par Internet sont en définitive des variantes des méthodes approuvées dans l'ordonnance 2000-250 et seraient donc acceptables. Le Conseil fait en outre remarquer que la méthode particulière que M. Long a proposée impliquant la confirmation verbale du client suivi d'une lettre de confirmation d'une entreprise canadienne à ce client n'était pas un moyen acceptable d'obtenir le consentement exprès, du fait que ce serait alors au client qu'il incomberait de contester la lettre de confirmation.

38. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil conclut qu'il y a lieu de permettre aux entreprises canadiennes d'utiliser d'autres formes de consentement exprès en remplacement du consentement écrit. Le Conseil conclut notamment que, comme solutions de rechange à l'obligation actuelle de fournir un document signé par le client, les méthodes suivantes peuvent être utilisées pour obtenir le consentement exprès du client pour la divulgation de renseignements confidentiels le concernant par les entreprises canadiennes :

Partie III - Autres questions connexes

Élargissement des exigences en matière de confidentialité

39. Les Compagnies ont fait valoir qu'elles sont désavantagées sur le plan de la concurrence, étant donné que les clauses de confidentialité ne s'appliquent seulement qu'aux entreprises canadiennes et non pas aux autres fournisseurs de services concurrents comme les revendeurs, y compris les revendeurs de services Internet. TCI a appuyé la position des Compagnies.

40. De l'avis des Groupes de consommateurs, toutes les compagnies concurrentes relevant de la compétence du Conseil devraient être assujetties aux mêmes exigences en matière de confidentialité.

41. Le Conseil fait remarquer que comme condition pour fournir des services de télécommunication aux revendeurs de services locaux, il a exigé dans une lettre-décision du 1er février 2000 que toutes les entreprises des services locaux incluent, dans leurs contrats de service et autres arrangements avec ces revendeurs l'obligation pour ces derniers de fournir les garanties particulières qu'ils offrent aux clients, dont celle voulant que leurs clients pourront profiter des clauses de confidentialité.

42. Le Conseil estime qu'il serait dans l'intérêt public d'exiger, comme condition pour fournir des services de télécommunication aux revendeurs de leurs services de télécommunication, y compris les revendeurs de services Internet, que les entreprises canadiennes incluent dans leurs contrats de service et autres arrangements avec ces revendeurs l'obligation pour ces derniers de veiller à ce que leurs clients bénéficient des clauses de confidentialité.

43. Le Conseil ordonne à toutes les entreprises canadiennes de justifier, au plus tard le 30 juin 2003 pourquoi, comme condition pour fournir des services de télécommunication aux revendeurs non actuellement visés par les exigences en matière de confidentialité, elles ne devraient pas inclure dans leurs contrats de service et autres arrangements avec ces revendeurs l'obligation de respecter les clauses de confidentialité.

44. Parallèlement, les entreprises canadiennes doivent signifier copie de leurs mémoires à toutes les parties à l'avis 2001-60-1.

45. Les parties peuvent déposer des observations auprès du Conseil au plus tard le 29 juillet 2003 et elles doivent en signifier copie à l'entreprise canadienne visée. L'entreprise canadienne peut déposer des observations en réplique, au plus tard le 8 août 2003.

Demande de partage de renseignements sur les clients

46. Call-Net a proposé que les entreprises canadiennes désirant partager entre leurs affiliées et avec leurs affiliées des renseignements confidentiels sur les clients sans un consentement direct, écrit ou autrement, demandent au Conseil la permission de le faire, et indiquant quels affiliées partageront l'information, les liens entre les affiliées, les services offerts par les affiliées de même que les raisons invoquées pour permettre le partage de l'information. Call-Net a proposé que seules les affiliées fournissant les services de télécommunication prévus dans la Loi sur les télécommunications soient autorisés à partager ces renseignements.

47. Les autres parties à l'instance ont dit estimer que le mécanisme proposé par Call-Net priverait à tort les clients du droit de donner ou non leur consentement.

48. Le Conseil estime que la proposition de Call-Net est inappropriée étant donné qu'elle prive les clients du droit de donner ou non leur consentement pour la divulgation de renseignements confidentiels qui les concernent. Le Conseil rejette donc la proposition de Call-Net.

Conclusion

49. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil ordonne aux entreprises canadiennes de modifier leurs tarifs actuels, leurs contrats avec les clients et autres arrangements, de manière à inclure le texte suivant :

À moins que l'abonné n'y consente par écrit ou que la divulgation ne soit exigée par les autorités juridiques, tous les renseignements que la compagnie détient au sujet d'un client, à l'exception du nom, de l'adresse et du numéro de téléphone inscrit du client, sont confidentiels, et la compagnie ne peut les communiquer à nul autre que :

Le consentement exprès peut être considéré comme donné par le client lorsque celui-ci donne :

50. Le Conseil ordonne aux entreprises canadiennes qui offrent des services conformément à des tarifs approuvés de soumettre à son approbation des pages de tarifs proposées reflétant les conclusions tirées au paragraphe 49, au plus tard le 30 juin 2003.

51. Le Conseil ordonne aux entreprises canadiennes d'inclure dorénavant des clauses reflétant les conclusions tirées au paragraphe 49 dans les contrats de service des clients et autres arrangements pour tous les services faisant l'objet d'une abstention, sauf les services sans fil faisant l'objet d'une abstention qui ne sont pas commutés (services visés faisant l'objet d'une abstention). De plus, ces clauses s'appliqueront également à tous les clients actuels des services visés faisant l'objet d'une abstention, peu importe que les clauses aient été incluses ou non dans les contrats de service ou autres arrangements conclus par ces clients.

Secrétaire général

Ce document est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consulté sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca

Notes de bas de page

[1] Bell Canada et autres ont donné la définition suivante de compagnie affiliée : Lorsqu'une compagnie est une filiale d'une autre, les deux compagnies sont des filiales de la même compagnie, ou deux compagnies sont affiliées à une troisième compagnie en même temps. Bell Canada et autres ont fait remarquer que cette interprétation d'« affiliée » est conforme à celle de « personne morale affiliée » donnée au paragraphe 2(2) de la Loi canadienne sur les sociétés par actions.

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