ARCHIVÉ - Décision CRTC 2001-371

Cette page Web a été archivée dans le Web

Information archivée dans le Web à des fins de consultation, de recherche ou de tenue de documents. Les décisions, avis et ordonnances (DAO) archivés demeurent en vigueur pourvu qu'ils n'aient pas été modifiés ou annulés par le Conseil, une cour ou le gouvernement. Le texte de l'information archivée n'a pas été modifié ni mis à jour depuis sa date de mise en archive. Les modifications aux DAO sont indiquées au moyen de « tirets » ajoutés au numéro DAO original. Les pages archivées dans le Web ne sont pas assujetties aux normes qui s'appliquent aux sites Web du gouvernement du Canada. Conformément à la Politique de communication du gouvernement du Canada, vous pouvez obtenir cette information dans un autre format en communiquant avec nous.

Décision CRTC 2001-371

Ottawa, le 21 juin 2001

3403688 Canada inc. (Canal Évasion inc.)
L'ensemble du Canada 1999-1842-1 

Demande traitée par l'avis public CRTC 2000-174 du 15 décembre 2000

Refus de la demande visant à réduire les dépenses que Canal Évasion doit allouer à la programmation canadienne durant la deuxième année d'exploitation

1.

Le Conseil refuse, par vote majoritaire, la demande visant à modifier la condition de licence de Canal Évasion concernant les dépenses que le service doit allouer à la programmation canadienne durant la deuxième année d'exploitation. Cette modification aurait eu pour effet d'abaisser les dépenses exigibles de la titulaire pour l'année en cause de 4 489 000 $ à 583 688 $.

Historique

2.

Canal Évasion est un service d'émissions spécialisées de langue française consacré aux émissions de voyage, de tourisme et d'aventure. Le Conseil lui a attribué une licence en même temps qu'à trois autres nouveaux services spécialisés de langue française le 21 mai 1999 à la suite d'un processus concurrentiel (décisions CRTC 99-109 à 99-112). Lorsqu'il a étudié les 17 demandes déposées dans le cadre de cette instance, le Conseil a tenu compte de certains éléments clés, notamment les dépenses que chacune des requérantes s'engageait à consacrer à la programmation canadienne durant la deuxième année d'exploitation.

3.

Lorsqu'il a approuvé les quatre nouveaux services, le Conseil a exigé, par condition de licence, que les titulaires allouent, d'après leur engagement individuel, un montant défini à la programmation canadienne pendant la deuxième année. Canal Évasion, pour sa part, est tenu de dépenser au moins 4 489 000 $ pour des émissions canadiennes, soit en acquisitions, soit en investissements, pendant l'année de radiodiffusion qui suit sa première année d'exploitation. Chaque année de radiodiffusion subséquente, les quatre titulaires doivent consacrer un pourcentage établi (50 % pour Canal Évasion) de leurs recettes brutes de l'année précédente à des émissions canadiennes.

4.

Les quatre nouveaux services ont été lancés en janvier 2000 dans le cadre d'un forfait facultatif.

Propriété

5.

3403688 Canada inc. (Canal Évasion) est une société dont la propriété est partagée comme suit : Bell Globemedia Inc. (50,1 %), Serdy Direct inc. (19,9 %), Groupe TVA inc. (10 %), Media Overseas (10 %) et Pathé/Canal Voyages France (10 %).

6.

BCE inc. détient le contrôle de Canal Évasion. Bell Globemedia Inc. est la propriété de BCE inc. (70,1 %), la plus importante compagnie de télécommunications au Canada, et du Thomson Group (29,9 %). Les avoirs de Bell Globemedia Inc. comprennent CTV Inc., qui exploite des stations de télévision conventionnelle et détient une participation (directe et indirecte) dans un certain nombre de services de télévision payante et spécialisée.

La demande

7.

La requérante a demandé au Conseil de réviser la condition de licence de Canal Évasion traitant des dépenses au titre des émissions canadiennes. Pour la deuxième année, elle a proposé d'allouer 50 % des recettes brutes générées durant la première année d'exploitation plutôt qu'un montant fixe de 4 489 000 $. Selon cette proposition, les dépenses exigibles la deuxième année auraient été réduites de 3 905 312 $.

8.

Le Conseil note toutefois que la titulaire a indiqué dans sa demande qu'elle prévoyait consacrer, pour l'an deux, 2 932 000 $ à la programmation canadienne.

9.

À l'appui de sa demande, la requérante a déclaré avoir éprouvé des difficultés à négocier les modalités de distribution de Canal Évasion. Elle a ajouté que le taux de pénétration du service la première année a été beaucoup plus faible que prévu. Par conséquent, les recettes mensuelles que Canal Évasion a générées en début d'exploitation ont été sensiblement inférieures aux prévisions indiquées dans sa demande de licence.

Interventions

10.

Dans leur intervention respective, la Guilde canadienne des réalisateurs s'est opposée à la demande alors que l'Association des réalisateurs et réalisatrices du Québec l'a appuyée.

11.

La Guilde a déclaré que Canal Évasion s'est vu attribuer une licence à la suite d'une instance fortement concurrentielle et que le Conseil doit l'obliger à remplir ses engagements, surtout que BCE inc. possède des ressources et des avoirs plutôt considérables dans le secteur de la radiodiffusion. La Guilde a ajouté que l'intention du Conseil, en attribuant la licence à Canal Évasion, était de consolider la composante de langue française du système canadien de radiodiffusion. Or, permettre à Canal Évasion de réduire ses dépenses au chapitre de la programmation canadienne n'aurait pour effet que de limiter les occasions de monter des productions en français et, par conséquent, d'affaiblir le système plutôt que de le renforcer.

12.

Dans sa réponse, la requérante a réitéré les difficultés qu'elle avait eues à négocier des ententes de distribution pour son service. Elle a ajouté qu'il lui incombait d'assurer elle-même la viabilité de sa propre entreprise, peu importe qu'elle fasse partie de BCE inc.

Les conclusions du Conseil

13.

Selon le Conseil, si une requérante réussit à obtenir une licence de radiodiffusion, elle a l'obligation de respecter les engagements qu'elle a pris lorsqu'elle l'a reçue. Pareille obligation est essentielle en ce qu'elle protège l'intégrité du processus d'attribution des licences, surtout lorsque la licence est attribuée suite à un processus concurrentiel comme c'est le cas pour Canal Évasion. Même s'il demeure sensible aux défis auxquels doivent faire face les nouveaux services, le Conseil estime que les engagements d'une requérante à l'égard des dépenses réservées à la programmation canadienne ont une importance particulière parce qu'ils constituent un moyen de garantir la production d'émissions canadiennes de qualité.

14.

De plus, comme il est énoncé plus haut, les licences attribuées en mai 1999 aux quatre services d'émissions spécialisées de langue française sont assorties d'une condition les obligeant à allouer un montant défini à la programmation canadienne pendant la deuxième année d'exploitation. Comme les services sont distribués ensemble dans un forfait facultatif, chacun a dû affronter les mêmes difficultés, au début, pour arriver à conclure des ententes de distribution. Le Conseil estime donc que la proposition de Canal Évasion soulève des questions d'équité par rapport aux trois autres titulaires.

15.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil a refusé, par vote majoritaire, la demande de Canal Évasion.

Documents connexes du CRTC

. Avis public 1999-89 - Attribution de licences à de nouvelles entreprises d'émissions spécialisées de langue française - Préambule

. Décision 99-112 - Approbation d'un nouveau service spécialisé de télévision de langue française appelé « Canal Évasion »

. Décision 99-111 - Approbation d'un nouveau service spécialisé de télévision de langue française appelé « Canal Histoire »

. Décision 99-110 - Approbation d'un nouveau service spécialisé de télévision de langue française appelé « Canal Z, aux limites du savoir »

. Décision 99-109 - Approbation d'un nouveau service spécialisé de télévision de langue française appelé « Canal Fiction »

Secrétaire général

La présente décision est disponible, sur demande, en média substitut et peut également être consultée sur le site Internet suivant : www.crtc.gc.ca

 

 

Opinion minoritaire de la conseillère Andrée Noël

 

J'ai participé aux délibérations du Conseil et pris connaissance des motifs qui sous-tendent la décision de la majorité relativement à la demande de 3403688 Canada Inc. (Canal Évasion) visant à réduire les dépenses que la titulaire doit allouer à la programmation canadienne durant sa deuxième année d'exploitation de licence.

 

Contrairement à l'opinion exprimée par la majorité, je suis convaincue que le lancement de Canal Évasion en même temps que les trois autres canaux spécialisés, Historia, Série + et Canal Z qui appartiennent tous trois à « les chaînes Télé-Astral », a été fortement handicapé par l'option positive. En effet les projections de pénétration et de revenus pour chacune des stations du bouquet francophone étaient basées sur l'option négative.

 

La requérante, sur la base de l'option négative, avait projeté des revenus d'abonnement pour la première année d'opérations de 5,7 millions $. Elle n'a perçu que 386 000 $ durant cette période, soit 6,7 % des recettes d'abonnement projetées, en raison de la décision des distributeurs de ne pas recourir à l'option négative pour offrir le nouveau bouquet francophone à leur clientèle. En mars 2000, le taux de pénétration dans les territoires desservis par Vidéotron variait de 8 % à 22 % partout au Québec sauf dans l'ouest de Montréal ou il variait de 4 % à 14 %. Compte tenu de ces résultats décevants, les quatre services ont entrepris de renégocier leurs ententes d'affiliation avec les câblodistributeurs à des prix de gros relativement plus bas que ceux projetés dans les demandes. Cette stratégie a permis de régler le problème de pénétration mais seulement à compter de la deuxième année de diffusion, et à des tarifs de gros inférieurs aux projections.

 

Pour la deuxième annéed'exploitation, la demande de licence de Canal Évasion projetait des revenus totaux de 9 571 000 $ pour un bénéfice avant impôt prévu de 882 000 $, prenant en compte des dépenses de programmation canadienne de 4 489 000 $. Ce montant fixe était basé sur la prémisse qu'il est difficile d'utiliser les résultats de la première année d'exploitation comme base pour l'année suivante.

 

Compte tenu de l'écart considérable entre les projections déposées lors de la demande de licence et les prévisions révisées basées sur des taux de pénétration plus bas que prévus et des tarifs de gros renégociés, il me semble inique de maintenir une condition de licence en matière de dépenses de programmation canadienne de 4 489 000 $ alors que les revenus bruts de la première année n'ont même pas atteint 1 200 000 $. Canal Évasion demande donc de réduire son obligation à 50 % des revenus bruts de l'an un, soit
583 688 $ (1 167 375 $ x 50 %). Canal Évasion indique cependant que même si elle demande une réduction de son obligation - pour la deuxième année de licence seulement - elle entend tout de même consacrer un montant additionnel au titre des dépenses de programmation canadienne, sans qu'il s'agisse toutefois d'une condition de licence. Ce montant additionnel serait de l'ordre de 2 348 312 $ qui s'ajouterait au 583 688 $ demandés comme condition de licence pour un total de 2 932 800 $ en dépenses de programmation canadienne.

 

Canal Évasion ayant inscrit ce montant dans ses prévisions de dépenses, il me semble que si le Conseil trouvait le montant de 583 688 $ trop bas dans les circonstances, il aurait pu faire preuve de discernement et utiliser la projection de dépenses comme base de la condition de licence en matière de dépenses de programmation canadienne.

 

Je ne crois pas non plus qu'on puisse inférer du fait que les trois autres canaux spécialisés mentionnés plus haut ne se soient pas présentés devant le Conseil avec une demande semblable à celle de Canal Évasion, que cela constitue une raison valable pour refuser la demande de Canal Évasion. Le fait que les chaînes Télé-Astral n'aient pas décidé de poursuivre cette avenue ne devrait pas être pris en compte pour refuser un tel recours à Canal Évasion.

 

Quant à l'argument selon lequelil y aurait des synergies chez Canal Évasion en raison de son appartenance au groupe Bell Globemedia, je crois qu'il est fallacieux.

 

En effet, à l'exception de RDS dont la programmation est aux antipodes de celle de Canal Évasion, aucune des stations de l'écurie Bell Globemedia ne diffuse dans la langue de Molière. Quant à RDS, même si sa langue de diffusion est le français, elle bénéficie sans doute de synergies fondées sur le genre avec TSN, mais d'aucune synergie de contenu avec Canal Évasion. Je ne crois pas que l'usage d'une langue commune soit le fondement de synergies opérationnelles. Canal Évasion offre une programmation axée sur le tourisme, les voyages et leur préparation, RDS vise les amateurs de sport avec des diffusions, en direct ou en différé, de compétitions sportives. Il ne s'agit pas quant à moi de contenus réconciliables pour générer des économies d'échelles.

 

D'autre part, il est intéressant de noter à cet égard que la requérante est détenue à hauteur de 50,1 % par Bell Globemedia Inc., une filiale à 70,1 % de BCE Inc., à 19,9 % par Serdy Direct inc., à 10 % par Groupe TVA inc., à 10 % par Media Overseas et enfin à 10 % par Pathé / Canal Voyages France. Bien que BCE Inc. soit ultimement l'actionnaire de contrôle, il est curieux de constater que c'est aux actionnaires minoritaires, pourvoyeurs de contenu à des degrés divers, qu'il incombera de défrayer 49,9 % des coûts reliés à l'obligation d'investir 4 489 000 $ en dépenses de programmation canadienne au cours de la deuxième année de licence.

 

Si on veut maintenir une offre télévisuelle viable et diversifiée au Canada français, il me semble important de s'assurer de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain et de faire preuve de discernement dans l'établissement des niveaux de dépenses, en prenant en considération les circonstances particulières dans lesquelles le lancement a eu lieu et son impact sur les revenus.

 

En conséquence, j'accueillerais en partie la demande de Canal Évasion pour réduire sa condition de licence relativement aux dépenses de programmation canadienne à 2 932 000 $.

Mise à jour : 2001-06-21

Date de modification :