ARCHIVÉ - Ordonnance CRTC 2000-38

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Ordonnance CRTC 2000-38

Ottawa, le 21 janvier 2000
La présente ordonnance porte sur un litige en matière de concurrence concernant des paiements de contribution, conformément à la Partie VII des Règles de procédure du CRTC en matière de télécommunications, entre La Compagnie de Téléphone de Warwick (Warwick) et Distributel Communications Limited (Distributel).
No de dossier : 8692-W2-01/98
1. Le présent litige en matière de concurrence est réglé en même temps qu'un autre du même genre entre Hurontario Telephones Limited (Hurontario) et London Telecom Network Inc. (London Telecom), du 24 novembre 1998. Voir l'ordonnance CRTC 2000-37 du 21 janvier 2000.
2. Par lettre du 24 décembre 1998, Warwick a informé le Conseil de l'existence d'un litige en matière de concurrence opposant Warwick et Distributel. Warwick alléguait que Distributel ne payait pas le montant pertinent du Tarif des services d'accès des entreprises (TSAE) pour l'acheminement du trafic d'arrivée dans son territoire, tel que prescrit dans la décision Télécom CRTC 96-6 du 7 août 1996 intitulée Cadre de réglementation pour les compagnies de téléphone indépendantes au Québec et en Ontario (sauf la Commission de transport Ontario Northland, Québec-Téléphone et Télébec ltée) (la décision 96-6).
3. En outre, Warwick a allégué que des statistiques sur le trafic de Distributel seraient nécessaires pour calculer le niveau pertinent du TSAE dans le territoire de Warwick et à des fins de facturation. Distributel a allégué qu'elle paie Bell Canada (Bell) pour l'utilisation de ses services dans une circonscription adjacente au territoire de Warwick et que, compte tenu de la manière dont elle exerce ses activités, elle ne doit pas de frais de contribution à cette dernière.
4. Le Conseil souligne que Warwick dessert trois circonscriptions : Kingsey Falls, Warwick et St. Albert (indicatif régional 819, NXX 363, 358 et 353, respectivement). Le litige vise les liaisons entre le commutateur Centrex de Bell à Victoriaville et les trois circonscriptions.
Responsabilité du paiement de contribution
5. Warwick a fait valoir que Distributel exerce ses activités dans son territoire parce qu'elle achemine les appels interurbains de ses clients à destination du territoire de Warwick en utilisant des circuits du service régional en place entre les territoires d'exploitation de Bell et de Warwick.
6. Warwick a ajouté que le Conseil a énoncé très clairement que la revente utilisant des liaisons du service régional dans les territoires des compagnies de téléphone indépendantes (les indépendantes) est assujettie au paiement d'une contribution. Elle a déclaré que le Conseil s'est montré préoccupé du fait que les concurrents de l'interurbain peuvent contourner le paiement de la contribution en profitant des liaisons du service régional dans les circonscriptions de Bell.
7. Warwick a fait valoir que Distributel utilise le service régional entre la circonscription de Victoriaville de Bell et les circonscriptions de Kingsey Falls, Warwick et St. Albert de Warwick pour éviter les paiements de contribution à Warwick. Warwick a fourni, à l'appui de sa position, une étude d'une semaine menée en 1998 qui révèle que les minutes d'interurbain étaient acheminées à destination du territoire de Warwick à partir de Victoriaville. Warwick a déclaré que cette situation pouvait être extrapolée pour obtenir un total pour l'année 1998. Elle a fourni une estimation de la contribution que Distributel lui doit.
8. Warwick a fait valoir que l'article 24.4d) du Tarif général de Bell ne s'applique pas dans le cas présent parce que Distributel achemine son trafic interurbain d'arrivée en utilisant les liaisons du service régional et que c'est donc l'approche du Conseil relative à la revente du service régional établie dans la décision 96-6 qui s'applique.
9. Bell a fait remarquer que les questions soulevées dans le litige qui oppose Warwick et Distributel sont essentiellement les mêmes que celles du litige Hurontario contre London Telecom. Bell a déclaré que les observations qu'elle a faites dans cette dernière instance s'appliquent aussi aux questions soulevées dans la présente instance.
10. Bell a rejeté la proposition que le mécanisme prévu dans son tarif de « facturation répercutée », c.-à-d. l'article 24.4d) du Tarif général, soit utilisé pour percevoir et payer des frais de contribution applicables au trafic provenant des revendeurs comme London Telecom ou Distributel et acheminé à destination des installations des indépendantes au moyen de circuits du service régional.
11. Bell a fait valoir qu'une telle application serait contraire à la décision du Conseil, telle qu'établie dans la décision 96-6, selon laquelle les revendeurs doivent déclarer leurs minutes aux indépendantes et leur payer les frais pertinents relatifs au TSAE directement. Bell a fait valoir qu'en adoptant la position de Distributel, le Conseil se trouverait effectivement à réviser et à modifier cet élément particulier de la décision 96-6.
12. En outre, Bell a fait valoir que la fourniture de cette capacité additionnelle aux revendeurs irait à l'encontre de l'intention des dispositions de l'article 24.4d) du Tarif général approuvé, en ce que le tarif ne servirait pas de mécanisme de « facturation répercutée » mais plutôt de mécanisme de perception de rechange pour les revendeurs.
13. De même, Bell a aussi rejeté toute proposition d'exempter les revendeurs des frais antérieurs, compte tenu de la limite de 150 jours sur les frais non périodiques non facturés prévue dans les Modalités de service de Bell (les Modalités). Bell a fait valoir que le Conseil devrait rejeter toutes tentatives de répercuter le fardeau des frais d'accès légitimes des entreprises en question à Bell, compte tenu en particulier de l'attention importante accordée aux mêmes questions dans l'instance qui a abouti à la décision 96-6.
14. En ce qui a trait à ses systèmes de déclaration de trafic et de facturation, Bell a fait remarquer que ce litige porte sur l'utilisation des installations et des services de Bell – en particulier sur le trafic provenant du service Centrex acheminé sur des circuits du service régional. Bell a fait valoir que, comme le service Centrex est un service d'accès local et que le service régional est aussi un service local, le trafic provenant du service Centrex acheminé sur des circuits du service régional devient une partie de ce service local.
15. Bell a déclaré que le trafic du service local n'est pas mesuré à l'heure actuelle et que la mise au point d'un mécanisme de déclaration adéquat permettant la configuration de service en question serait trop coûteuse. Bell a donc fait valoir qu'elle ne devrait pas être tenue de mettre en place des systèmes et des procédures pour comptabiliser un tel trafic.
16. Tel que susmentionné, Bell a déclaré qu'elle ne traite pas les enregistrements d'appels entre les clients des revendeurs et des indépendantes sur les circuits du service régional puisque ces appels sont des appels locaux. Elle a ajouté que ce n'est que récemment que Warwick s'est plainte du fait que Distributel acheminait des minutes à destination de son territoire sans les déclarer, contrairement aux conclusions du Conseil dans la décision 96-6.
17. Bell a déclaré que son groupe de sécurité a effectué une étude mensuelle ponctuelle afin de déterminer le volume de trafic échangé sur les circuits du service régional entre la circonscription de Victoriaville de Bell et celles de Kingsey Falls, St. Albert et Warwick de Warwick. Bell a déclaré que c'est grâce à cette analyse particulière qu'elle était en mesure de déterminer le nombre de minutes acheminées sur les circuits du service régional attribuables à Distributel. Bell a déclaré que ces renseignements avaient été transmis par Warwick à Distributel et signifiés au Conseil.
18. En conclusion, Bell a fait valoir que :

(1) les clients de Distributel peuvent envoyer des appels interurbains aux clients de Warwick et recevoir des appels de ceux-ci par l'intermédiaire des circuits du service régional de Bell interconnectés avec Warwick. À ce titre, Distributel exerce de fait ses activités dans le territoire de Warwick;

(2) Distributel devrait être tenue de déclarer ces minutes à Warwick, conformément à la décision 96-6, et de payer les frais relatifs aux TSAE directement aux indépendantes pertinentes; et

(3) la date initiale de la période admissible au paiement du TSAE par les revendeurs aux indépendantes devrait être le 1er janvier 1997, conformément à la date d'entrée en vigueur de la décision 96-6.

19. Distributel a fourni son schéma de réseau montrant ses raccordements au réseau de Warwick. Elle a fait valoir qu'elle n'exerce pas ses activités dans le territoire de Warwick au sens de la décision 96-6. À cet égard, Distributel a fait remarquer le passage suivant dans la décision 96-6 : « Dans la décision 92-12, le Conseil n'a pas permis aux entreprises de services interurbains concurrentes de se servir des commutateurs de Bell pour le départ du trafic dans les territoires des parties qui ne sont pas intervenues dans l'instance qui a abouti à cette décision. Les entreprises de services interurbains concurrentes devaient négocier avec les indépendantes pour pouvoir se prévaloir des ententes de service régional conclues avec Bell. »
20. Distributel a fait valoir que ce passage exprime clairement que, dans la décision 96-6, le Conseil était préoccupé par la revente du service régional en vue d'acheminer le trafic de départ à partir du territoire d'une indépendante. Distributel a déclaré que, dans un tel cas, le revendeur serait tenu de s'inscrire auprès de l'indépendante, de fournir des données sur le trafic, au besoin, et de payer une contribution directement à la compagnie. Distributel a déclaré qu'elle n'exerce pas ses activités de cette manière.
21. Dans ses observations en réplique, Distributel a fait valoir qu'elle ne fait rien dans le territoire de Warwick et qu'elle n'« exerce » donc pas ses « activités » dans ce territoire. Distributel a déclaré qu'elle est cliente de Bell et que c'est cette dernière et non Distributel qui achemine le trafic à destination du territoire de Warwick.
22. Distributel a déclaré qu'elle n'utilise pas les services ou les installations de Warwick. Elle a toutefois ajouté qu'elle utilise les services Centrex de Bell dans la circonscription de Victoriaville adjacente au territoire de Warwick. Distributel a déclaré qu'elle est inscrite comme revendeur auprès de Bell et qu'elle paie les frais de contribution prélevés par Bell en vertu de l'article 24 du Tarif général de Bell, y compris ceux prélevés sur des appels d'arrivée acheminés dans le territoire de Warwick par le service régional de Bell. Distributel ne se croyait pas tenue de payer les frais de contribution identifiés par Warwick.
23. Distributel a relevé l'argument de Bell selon lequel l'article 24.4d) ne s'applique pas au trafic acheminé sur les circuits du service régional. Elle a souligné la proposition de Bell selon laquelle Distributel demande en fait au Conseil de réviser et de modifier la décision 96-6 en avançant cette position. Distributel a fait valoir que les arguments de Bell ne sont pas valables. Elle a répété qu'elle n'exerce pas d'activités dans le territoire de Warwick et qu'elle n'est donc pas assujettie au régime de la décision 96-6. Elle a ajouté qu'elle ne demandait en aucun cas la révision et la modification de la décision 96-6.
24. Distributel a fait valoir qu'en réalité Bell maintient sa position relative à l'article 24.4d) par crainte d'avoir à engager des coûts importants si elle est tenue de modifier ses systèmes de déclaration de trafic et de facturation afin de mettre en œuvre correctement l'article 24.4d). Distributel a fait valoir que Bell a choisi volontairement de ne pas faire ces modifications de systèmes et qu'elle se retrouve maintenant devant l'éventualité d'être tenue responsable de ne pas avoir perçu les frais répercutés prescrits. Elle a ajouté que la décision de Bell d'éviter les coûts de modification de systèmes requis ne change pas le libellé de l'article 24.4d) et ne peut exempter Bell de ses obligations en vertu de cette disposition.
25. Distributel a fait valoir que l'allégation de Bell selon laquelle la modification de son système de déclaration de trafic et de facturation entraînerait de coûts très élevés qui pourraient même excéder la contribution perçue n'est pas crédible. Distributel a fait valoir que le montant exact de ces coûts n'a pas d'impact sur la juste interprétation de l'article 24.4d). Elle a ajouté qu'en vertu des règles d'interprétation de la loi, l'article 24.4d) doit garder son sens premier. Distributel a fait valoir qu'on peut se rendre compte sur simple lecture de cette disposition que celle-ci s'applique aux installations Centrex.
26. Distributel a fait valoir que la position de Bell et de la Société d'administration des tarifs d'accès des télécommunicateurs (la SATAT, représentant Warwick) selon laquelle Distributel devrait être responsable de la déclaration du trafic est tout à fait inappropriée. Distributel a fait remarquer que Bell a admis pouvoir mesurer le trafic pertinent, le cas échéant. À l'opposé, elle a déclaré qu'elle doit s'appuyer sur son système d'enregistrement des données d'appels de poste (EDAP) pour mesurer le trafic.
27. En outre, Distributel a fait valoir qu'il y a sans aucun doute d'autres revendeurs de services Centrex, notamment de nombreux revendeurs de Centrex à transit simple, qui acheminent le trafic d'arrivée dans les territoires des indépendantes par le service régional de Bell. Distributel a déclaré que ces fournisseurs de services peuvent ne pas s'inscrire au service EDAP de Bell et peuvent ne pas être en mesure de faire une auto-déclaration. Elle a fait valoir qu'entre Bell et Distributel, il était évident que la partie pertinente responsable de comptabiliser les minutes admissibles à une contribution devrait être Bell.
28. Distributel a fait remarquer l'allégation de London Telecom dans le litige relatif à la contribution Hurontario contre London Telecom selon laquelle, dans des mémoires antérieurs au Conseil, Bell a interprété l'article 24.4d) exactement comme le propose Distributel. Elle a fait remarquer que, dans la lettre accompagnant l'avis de modification tarifaire 5894 du 13 décembre 1996, Bell a indiqué que l'article 24.4d) s'appliquerait à tout le trafic de départ ou d'arrivée acheminé dans le territoire des indépendantes au moyen de la revente des installations et des services de Bell.
29. Distributel a fait remarquer que Bell a élaboré sur sa position dans une lettre du 12 février 1997; Bell a souligné que l'article 24 garantit que les frais relatifs au TSAE soient répercutés aux concurrents qui revendent ses services Megaroute et Centrex.
30. Distributel a fait valoir que ces déclarations sont claires et sans équivoque. Elle a ajouté que l'article 24.4d) s'applique au trafic acheminé sur les circuits d'interconnexion par des installations Centrex, comme le Centrex de Victoriaville de Distributel.
31. Distributel a répété qu'elle est cliente de Bell et qu'elle a payé tous les frais de contribution prélevés par Bell en vertu de l'article 24. En particulier, Distributel a déclaré qu'elle a payé une contribution pour tous les appels d'arrivée acheminés au réseau téléphonique public commuté par son Centrex de Victoriaville, y compris les appels d'arrivée acheminés dans le territoire de Warwick par le service régional de Bell. De plus, elle a ajouté qu'elle n'est pas tenue de demander à Bell d'imposer les frais additionnels non facturés par cette dernière. Elle a fait valoir que, dans les circonstances, il revient à Bell de corriger cette erreur, en tenant compte des restrictions imposées par Bell dans ses Modalités.
32. Le Conseil constate que Bell a acheminé du trafic interurbain de départ et d'arrivée dans les circonscriptions de Warwick à un tarif définitif de 0,1292 $ la minute (0,1081 $ en contribution plus 0,0211 $ en interurbain direct = 0,1292 $) payable à Warwick (le TSAE définitif de Warwick pour 1998). Distributel a acheminé du trafic interurbain d'arrivée dans ces mêmes circonscriptions à un taux de contribution de 0,005 $ la minute payable à Bell (le taux de contribution de Bell). Le Conseil estime notamment que cette situation est injuste sur le plan de la concurrence, compte tenu de la forte différence dans la contribution payable par les deux compagnies pour acheminer du trafic interurbain dans les circonscriptions en question.
33. Contrairement à l'argument de Distributel, le Conseil estime que l'article 24.4d) du Tarif général de Bell s'applique à la contribution répercutée pour la revente des services interurbains de Bell et non pas à l'acheminement du trafic interurbain par des liaisons du service régional. Le service régional n'est pas un service interurbain; Distributel ne revend donc pas un service interurbain. En outre, contrairement à l'argument de Distributel, le Conseil estime que la décision 96-6 s'applique au trafic d'arrivée comme au trafic de départ. Sinon, Distributel jouirait d'un important avantage par rapport à Bell sur le plan de la concurrence, tel que décrit ci-dessus.
34. Le Conseil fait remarquer que la décision 96-6 établit clairement le processus pour les autres fournisseurs de services interurbains (AFSI) qui utilisent des liaisons du service régional pour acheminer du trafic d'arrivée dans les territoires des indépendantes :

« Le Conseil est d'avis que dans toute la mesure du possible, la concurrence doit être élargie. Il s'inquiète cependant de l'incidence financière produite sur les compagnies indépendantes. Grâce au service régional, on peut en effet contourner la contribution à verser aux indépendantes par les entreprises de services interurbains concurrentes qui profitent du service régional dans les cas où la liaison de service régional fait intervenir une circonscription de Bell, de même que par les « simples butineurs » locaux. Dans la décision 92-12, le Conseil n'a pas permis aux entreprises de services interurbains concurrentes de se servir des commutateurs de Bell pour le départ du trafic dans les territoires des parties qui ne sont pas intervenues dans l'instance qui a abouti à cette décision. Les entreprises de services interurbains concurrentes devaient négocier avec les indépendantes pour pouvoir se prévaloir des ententes de service régional conclues avec Bell. Par conséquent, le Conseil approuve la revente du service régional et ordonne qu'il n'y ait pas de différence entre les revendeurs de ces services et ceux des services interurbains et que, par conséquent, ils doivent verser une contribution. Le paiement de la contribution sur le service régional revendu tient compte de la vulnérabilité financière des indépendantes. Les revendeurs doivent s'inscrire auprès du Conseil et de la compagnie de téléphone compétente et fournir à la compagnie de téléphone en cause, si elle lui en fait la demande, des statistiques sur le trafic pour les besoins de la facturation et pour le calcul du TSAE. »

35. Le Conseil est d'avis que Distributel achemine du trafic interurbain par des liaisons du service régional tel qu'établi dans la décision 96-6 et qu'elle devrait être tenue de déclarer ses minutes de trafic directement à Warwick pour les besoins de la facturation.
36. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil :

(1) juge que Distributel, en acheminant du trafic interurbain par une liaison du service régional, revend du service régional, tel que l'entend la décision 96-6, et qu'elle doit donc payer la contribution appropriée; et

(2) ordonne à Distributel de s'inscrire auprès de Warwick et de lui déclarer les minutes d'interurbain de départ et d'arrivée admissibles à une contribution, conformément à la décision 96-6.

37. Le Conseil est gravement préoccupé par le fait que Distributel n'ait pas tenu compte d'avertissements et ait sciemment exploité son réseau dans le but d'éviter le paiement des frais de contribution pertinents.
La période de facturation
38. Warwick a demandé à Distributel d'indiquer le nombre de minutes de trafic interurbain de départ ou d'arrivée de Distributel qu'elle a acheminé dans le territoire d'exploitation de Warwick, du 1er janvier 1997 au 30 août 1998, et d'estimer ce trafic du 1er septembre 1998 au 31 décembre 1999, à des fins budgétaires.
39. Distributel a contesté l'argument de Bell et de la SATAT selon lequel la date d'entrée en vigueur de toute responsabilité de Distributel pour des frais non payés relatifs au TSAE de Warwick devrait être le 1er janvier 1997.
40. Distributel a fait valoir que toute responsabilité pouvant être établie serait basée sur l'article 24.4d) du Tarif général de Bell. Elle a donc fait valoir que cette responsabilité serait assujettie à l'article 18 des Modalités de Bell.
41. Distributel a déclaré que les frais de contribution sont prélevés sur une base par minute et qu'ils sont considérés comme des frais non périodiques. En vertu de l'article 18.1b) des Modalités de Bell, Distributel a fait valoir que sa responsabilité pour une contribution répercutée non facturée ou sous-facturée était limitée à 150 jours précédant la date de facturation corrigée des frais.
42. Distributel a fait remarquer que, même si son interprétation de la décision 96-6 était erronée, les Modalités de Warwick continueraient de s'appliquer. Elle a ajouté que, suite à la décision 96-6, ces Modalités sont les mêmes que celles de Bell. Elle a donc fait valoir que l'analyse susmentionnée resterait pertinente.
43. Distributel a fait valoir qu'elle reste autorisée à répliquer en vertu de l'article 18 des Modalités de Bell. Elle a déclaré que l'article 18 a été établi pour donner aux parties un degré raisonnable de certitude quant aux questions de facturation. Elle a ajouté qu'elle a exercé ses activités commerciales en fonction de l'hypothèse sous-jacente selon laquelle sa responsabilité éventuelle pour une contribution non facturée ou sous-facturée est limitée par l'article 18.
44. Distributel a reconnu qu'elle pourrait être responsable de payer les frais répercutés à Bell en vertu de l'article 24.4d) du Tarif général de cette dernière. Elle a déclaré que de tels frais s'appliqueraient à l'avenir. Elle a ajouté que, conformément à l'article 18 des Modalités de Bell, cette dernière pourrait aussi lui facturer des frais répercutés non facturés pour une période remontant à 150 jours précédant la date de la facture corrigée.
45. Distributel a déclaré que la question de la responsabilité éventuelle de Bell vis-à-vis de Warwick pour des frais répercutés non perçus par Bell ne la concerne pas directement et est sans doute régie par les accords d'interconnexion entre ces deux compagnies. Elle a ajouté qu'il semblerait raisonnable que Bell et Warwick tentent de négocier une entente à ce sujet, à la lumière des accords en question.
46. Selon le Conseil, la période limite de 150 jours de l'article 18 ne s'applique pas dans la présente instance. Ce qui est en litige, c'est la non-conformité de Distributel avec les dispositions de la décision 96-6 relatives à l'inscription et au paiement de la contribution. Une partie en non-conformité avec une décision du Conseil ne devrait pas pouvoir tirer avantage d'un article des Modalités. Une telle non-conformité pourrait équivaloir à « tromper le client » - et, dans ce cas, la période limite de 150 jours ne s'applique pas. Quant à savoir si Distributel est une cliente de Bell (et donc si les Modalités de Bell devraient s'appliquer plutôt que celles de Warwick), tel que Distributel le soutient, le Conseil répète que le litige porte sur la non-conformité avec la décision 96-6 (et non pas avec l'article 24.4d) du Tarif général de Bell). Par conséquent, le Conseil rejette l'argument voulant que la présente ordonnance s'applique avec effet rétroactif à 150 jours à partir de la date à laquelle Warwick (ou Bell) a tenté de percevoir un montant antérieurement non facturé, en vertu de l'article 18 des Modalités.
47. Le Conseil souligne que Distributel a fourni une estimation pour la période de septembre 1997 (date où elle a commencé à exercer des activités en utilisant la liaison du service régional) à avril 1999. Comme Distributel continue d'acheminer du trafic par les liaisons du service régional de Bell, le Conseil juge que la période de facturation est en vigueur depuis le 1er septembre 1997.
Le processus d'estimation et de facturation du trafic qui convient
48. Le Conseil souligne que seule Distributel a déposé une estimation complète du trafic dans le cas présent. Warwick a fourni une extrapolation pour l'année 1998 basée sur une étude limitée à une semaine. Tel que susmentionné, l'estimation de Distributel couvrait la période de septembre 1997 à avril 1999 et était basée sur les données EDAP du commutateur Centrex de Distributel à Victoriaville (loué de Bell). Le Conseil souligne que cette estimation est la meilleure disponible dans les circonstances. Il ajoute que l'estimation EDAP de Distributel pour 1998 est semblable à l'estimation extrapolée de Warwick pour la même année.
49. Dans le cas Hurontario contre London Telecom, Hurontario a fait valoir que les estimations de trafic d'arrivée de London Telecom devraient être majorées de 25 % pour tenir compte du trafic de départ. Dans le cas présent, il n'existe pas d'élément de preuve au dossier reflétant l'existence d'une situation semblable. Le Conseil est donc d'avis qu'il ne serait pas pertinent de rajuster l'estimation de Distributel.
50. Le Conseil est d'avis que l'estimation de Distributel est raisonnable et il autorise Warwick à présenter une facture pour la période visée. En outre, Warwick peut facturer des frais de contribution à Distributel sur une base continue, au fur et à mesure que celle-ci est en mesure de lui fournir des statistiques relatives au trafic.
51. Le Conseil constate que :

(1) Bell n'a pas demandé à Distributel de la rembourser de la contribution impayée; et

(2) Bell a fait valoir que, dans ce cas, le mécanisme qui conviendrait pour le trafic du service régional dans le territoire de Warwick, tel qu'il est établi dans la décision 96-6, consisterait pour Distributel à déclarer le trafic applicable à Warwick et à payer le taux du TSAE de l'indépendante pertinente à Warwick.

Compte tenu de ce qui précède, le Conseil estime que dans le cas présent, Warwick devrait facturer la contribution en question à Distributel.
52. Le Conseil estime que, si les montants avaient été payés au cours des années pertinentes, les revenus de Warwick n'auraient pas été supérieurs à la marge de taux de rendement approuvée pour chacune de ces années. Il estime aussi que le paiement à Warwick ne devrait pas avoir d'incidence sur le calcul du TSAE pour l'année au cours de laquelle Warwick déclare le paiement (c.-à-d., Warwick devrait supprimer le montant du calcul du TSAE pour l'année où l'argent est reçu).
53. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil :

(1) autorise Warwick dans le cas présent à facturer sans délai Distributel pour la période et les montants de trafic établis ci-dessus;

(2) ordonne à Distributel de payer Warwick dans les 30 jours suivant la date de réception de la facture;

(3) autorise Warwick à facturer des frais de contribution sur une base continue au fur et à mesure que Distributel fournit des statistiques relatives au trafic; et

(4) juge que le rétro-paiement versé à Warwick ne doit pas avoir d'incidence sur le calcul du TSAE pour l'année au cours de laquelle Warwick déclare le paiement.

Paiements de contribution rétroactifs pour les autres indépendantes
54. Le Conseil constate que Distributel a peut-être acheminé ou achemine peut-être encore du trafic de départ et d'arrivée à d'autres indépendantes par des liaisons du service régional comme dans le cas de Warwick.
55. Compte tenu de ce qui précède, le Conseil ordonne à Distributel de lui présenter dans les 30 jours un rapport :

(i) donnant la liste de toutes les autres indépendantes auxquelles elle se raccorde ou s'est raccordée par des liaisons du service régional; et

(ii) fournissant un plan en vue de rembourser tout sous-payé de contribution dans des circonstances semblables à celles de la présente ordonnance, avec copie aux indépendantes pertinentes et à Bell.

Secrétaire général
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